Intervention de Alain Michelet

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 11 mars 2015 à 9h15
Interdire la prescription acquisitive des immeubles du domaine privé des collectivités territoriales et autoriser l'échange en matière de voies rurales — Examen des amendements au texte de la commission

Alain Michelet, président de la Compagnie nationale des conseils en propriété industrielle :

Notre profession, spécialisée dans le droit de l'innovation, n'est pas très connue ; elle compte 900 personnes physiques issues pour moitié d'une formation scientifique et pour moitié d'une formation juridique. Elle a été organisée par la loi en 1990 mais existe depuis la fin du XIXème siècle. Elle est très internationalisée depuis cette époque, les connaissances circulant beaucoup. Nos clients, les entreprises, recherchent la lisibilité et la prévisibilité du droit.

L'Office européen des brevets a été créé dans les années soixante-dix ; si les professionnels français étaient timorés au départ, cette harmonisation européenne a été un grand succès, qui a élevé leur compétitivité. Les entreprises peuvent faire appel à des professions libérales ou à des salariés, mais les règles déontologiques sont identiques, édictées par le European patent institute. Une juridiction européenne de contrôle, qui manquait, est en train d'être mise en place : la convention internationale a été signée il y a deux ans. La France a eu l'honneur de remporter l'implantation du siège de la juridiction ; il faut maintenant trouver un lieu et des moyens. Bref, « il n'y a plus qu'à »... La France nommera le premier titulaire de la fonction de président. On en est encore loin, car rien ne se passe. Nos homologues européens attendent...

Avec les États-Unis, les négociations peuvent être fructueuses sur certains points ; les Anglo-saxons ont cédé par exemple dans le grand débat sur l'alternative entre droit du premier inventeur, qu'ils pratiquaient, et droit du premier déposant, notre système, qu'ils ont finalement adopté. Nous avons en revanche beaucoup de difficultés à connaître l'objet même des négociations du traité transatlantique, alors que nous pourrions partager notre expérience et donner des avis. La France n'est pas en jeu, puisque c'est la Commission européenne qui est compétente. Les Américains exercent des pressions très fortes pour que le droit applicable soit celui de la nationalité de l'entreprise, voire de la maison mère, plutôt que celui du lieu d'implantation.

Nos expériences au Brésil et au Maghreb, où l'influence du droit continental et même spécifiquement du droit français sont fortes, montrent que nos entreprises françaises ont plus de facilités à s'implanter, grâce à une compréhension du droit local plus facile. Tout ce qui peut concourir à stabiliser l'étendue de notre système juridique - car nous ne pourrons plus gagner de terrain - est bon à prendre.

La formation à notre profession relève du Centre international de la propriété intellectuelle, qui dépend de l'Université de Strasbourg, où il a été installé dans les années soixante-dix. C'est un joyau. L'action conjointe des universitaires, des entreprises, des avocats et des conseils a provoqué une stimulation qui garantit une bonne formation. Le centre accueille des étudiants étrangers qui rapportent ensuite dans leur pays une culture juridique française. Il rencontre toutefois des difficultés financières importantes et le fait d'être logé à l'université de Strasbourg complique sa gestion.

Sur le secret des affaires, comment se ferait la synchronisation entre la directive européenne en cours de négociation et des dispositions qui seraient, sans attendre le texte européen, adoptées dans la loi française ? Enfin, l'Institut national de la propriété intellectuelle (Inpi) veut proposer à nos clients des prestations : le personnel des administrations a-t-il les compétences nécessaires ? Sans compter que les prix seraient faussés par rapport aux nôtres.

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