Intervention de Christian Chevalier

Commission d'enquête sur le service public de l'éducation, les repères républicains et les difficultés des enseignants — Réunion du 16 mars 2015 à 15h00
Table ronde — Syndicats de personnels enseignants des premier et second degrés

Christian Chevalier, secrétaire général du Syndicat des enseignants (SE-UNSA) :

Après les événements de janvier, nous nous sommes rendus compte - notamment à l'occasion de la minute de silence dans les établissements scolaires - que la question des valeurs de la République et celle de la laïcité n'allaient pas de soi, pas plus pour les élèves que pour les enseignants et le personnel éducatif, comme d'ailleurs pour l'ensemble de la société.

Cela ne va pas de soi, en effet, car nos élèves sont divers et variés, aussi parce que nos collègues enseignants se sont souvent retrouvés en difficulté. Plus que la minute de silence elle-même, c'est le temps consacré à sa préparation et au débat avec les élèves qui importe. Nous avons vu des collègues dans l'embarras face à des classes hostiles, ou des collègues qui n'ont pas osé faire la minute de silence. D'autres collègues, notamment dans le second degré, ont parfois considéré qu'il ne leur appartenait pas de faire ce travail et l'ont renvoyé aux professeurs d'histoire-géographie ou aux documentalistes.

Ces exemples mettent en évidence que l'école est en difficulté sur ces questions. Nos collègues sont désarmés, sans doute parce que la formation initiale ne traite pas ces questions, ou tout du moins ne les traite pas suffisamment. Alors que la République et l'école sont intimement liées, les ÉSPÉ, pas plus que les instituts universitaires de formation des maîtres (IUFM) avant elles, n'affrontent pas ces thèmes. Il y a là de vrais sujets, notamment sur la manière d'aborder ces questions avec nos élèves, ainsi que sur les aspects méthodologiques du travail en classe, surtout lorsque celle-ci est hostile, en tout ou partie, au discours qui est tenu. Nos collègues nous ont fait part d'un véritable désarroi à ce sujet.

Ces évènements révèlent une lacune, repérée depuis longtemps par les études PISA, de notre système scolaire : on ne débat pas suffisamment à l'école, on ne parle pas assez, on ne sait pas polémiquer, on ne sait pas s'affronter dans des joutes oratoires, on ne sait pas échanger des arguments. Le débat à l'intérieur de l'école, entre les élèves, avec les enseignants mais également entre ces derniers, constitue un enjeu fondamental. Notre école est sans doute beaucoup trop étriquée, trop concentrée sur une approche disciplinaire qui pose des barrières. La question de la mise en oeuvre du « parcours citoyen » à l'école pose aussi celle de son appropriation par l'ensemble des personnels de l'éducation nationale, bien au-delà des seuls enseignants - je pense notamment aux personnels de direction et de vie scolaire, ainsi qu'à ceux des cantines et ceux qui relèvent des municipalités. La question de la citoyenneté doit être l'affaire de tous, pas seulement l'affaire exclusive des enseignants et, encore moins, l'affaire exclusive de l'école.

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