L'amendement n° 1 rectifié tend à supprimer l'article 13 qui visait à supprimer le délit de racolage, au motif que ce délit permettrait de recueillir des informations sur les réseaux.
Or notre ancienne collègue Virginie Klès avait bien indiqué, dans son rapport très complet sur la proposition de loi de Mme Benbassa supprimant le délit de racolage, que seule une minorité des personnes prostituées placées en garde à vue pour racolage étaient mises en contact avec des policiers ou des gendarmes chargés d'enquêter sur des réseaux de proxénétisme, et que la plupart se contentaient, au cours de leur audition, « d'un récit stéréotypé sur les conditions dans lesquelles elles ont été amenées à exercer leur activité ».
En revanche, dix ans après l'entrée en vigueur de la loi pour la sécurité intérieure, le délit de racolage a bien aggravé la situation des personnes prostituées, tandis que les objectifs poursuivis par le législateur en 2003 n'ont été que très partiellement atteints. Surtout, les statistiques ne permettent pas d'établir une corrélation. Les responsables de la brigade de répression du proxénétisme (BRP) de la préfecture de police de Paris indiquent certes qu'un quart à un tiers des 50 à 65 procédures closes chaque année avec succès à Paris en matière de proxénétisme ont pour point de départ des informations recueillies lors d'une garde à vue pour racolage, mais, ainsi que l'indiquait notre collègue Virgine Klès dans son rapport, « les statistiques agrégées au niveau national ne permettent pas de mettre en évidence un lien entre la création du délit de racolage en 2003 et une augmentation du nombre de condamnations pour proxénétisme ». Les données du casier judiciaire national enregistrent de façon relativement stable environ 600 à 800 condamnations pour proxénétisme aggravé par an depuis 2003, sans lien avec l'évolution du nombre de gardes à vue décidées pour racolage. Les statistiques sont donc a cet égard implacables : la condamnation des réseaux n'a aucun lien avec les gardes à vue des personnes prostituées.
Enfin, du seul point de vue du droit, l'utilisation actuelle du délit de racolage constitue un détournement des règles de la garde à vue. En effet, le fait d'entendre la personne placée en garde à vue pour racolage sur des faits de proxénétisme dont elle serait le témoin ou la victime n'entre pas dans le champ des motifs autorisant le recours à la garde à vue. Les personnes prostituées, quand il s'agit de lutter contre le proxénétisme, ne devraient être entendues que comme témoins. Je vous propose d'émettre un avis défavorable à l'amendement.