Monsieur le ministre, nous évoquons cet après-midi un sujet qui touche à la part la plus intime de nos vies personnelles. Vouloir satisfaire rapidement ce que nous appelons tous une nécessité n’empêche pas de bien faire les choses et d’accepter les amendements de mon collègue Gilbert Barbier quant à l’extension des dispositions en cas de décès du concubin ou d’un parent.
En préambule de mon propos, je souhaiterais émettre un regret concernant la lenteur qui affecte parfois le processus institutionnel. En effet, le Sénat examine aujourd’hui, en 2015, une proposition de loi émanant de l’Assemblée nationale, mais qui, elle-même, reprend un texte voté au Sénat dès 2006, sur l’initiative de M. Nicolas About, ancien sénateur centriste.
Le Sénat avait donc déjà fait preuve de ses grandes qualités d’anticipation et d’initiative, monsieur le ministre.
Depuis 1978, les salariés bénéficient de congés pour événements familiaux destinés à leur permettre de faire face aux événements les plus importants de leur vie personnelle, qu’ils soient heureux, comme un mariage, une naissance, ou affligeants, comme un décès. Ces congés n’ont pas d’effets sur leur rémunération ou sur leurs droits à congé.
Ces périodes permettent aux salariés de faire face à l’urgence et de gérer un événement personnel sur le plan matériel et administratif ainsi que sur le plan émotionnel et psychologique.
La durée du congé varie ainsi en fonction de l’événement : pour un mariage, le droit du travail accorde quatre jours de congé alors qu’il n’octroie que deux jours pour le décès d’un conjoint ou d’un enfant.
On ne peut en effet que s’interroger sur une telle répartition. Pourquoi prévoir davantage de jours de congés exceptionnels pour un événement heureux, prévu de longue date, que pour un événement dramatique et violent, qui, par définition, ne peut être anticipé ?
Deux jours suffisent-ils lorsque vous devez gérer les obsèques et les nombreuses formalités administratives ? Deux jours suffisent-ils lorsque vous subissez une épreuve personnelle qui vous ébranle fortement et bouleverse votre vie ? D’un point de vue psychologique et émotionnel, est-on en capacité de reprendre le travail deux jours après un événement à ce point douloureux ?
La réponse est claire et sans appel, monsieur le ministre : c’est non !
Il est vrai qu’un arrangement entre le salarié et l’entreprise est souvent trouvé. L’entreprise fait alors preuve de solidarité.
Toutefois, le dialogue se révèle parfois difficile avec l’employeur, ce qui oblige le salarié à demander un arrêt maladie à son médecin. Ces démarches ne peuvent qu’ajouter de la tension à des personnes qui sont violemment affectées.
Nous pourrions certes nous interroger sur la création de charges supplémentaires pour les entreprises en cette période de grave crise économique, mais les effets de l’allongement du congé exceptionnel semblent objectivement trop circonscrits pour avoir une répercussion significative sur l’économie ou sur l’emploi.
En effet, même si je soutiens les amendements de mon collègue Gilbert Barbier, la proposition de loi votée par l’Assemblée nationale réduit ces charges supplémentaires en limitant l’octroi de congés exceptionnels supplémentaires aux cas de décès d’un enfant ou d’un conjoint.
Par ailleurs, les conventions collectives ou les accords de branche accordent souvent des avantages déjà largement supérieurs aux minima prévus par la loi. Aujourd’hui, en France, 9, 5 millions de salariés bénéficieraient ainsi de l’application de conventions collectives beaucoup plus généreuses. Le texte que nous examinons permettra donc d’harmoniser les dispositions en vigueur pour chaque salarié susceptible d’affronter un tel drame familial.
Enfin, ce texte ne concerne pas le secteur public, les fonctionnaires étant régis par des règles spécifiques.
Pour conclure, monsieur le ministre, mes chers collègues, je rappellerai qu’il n’y a d’entreprises que par les hommes et les femmes qui y travaillent. Si l’efficacité et la performance économique sont une exigence incontournable, l’humanisme, le respect des personnes et la solidarité sont des valeurs bien souvent ancrées au cœur des entreprises et au cœur des centristes.
Aussi, le groupe UDI-UC votera en faveur de cette proposition de loi profondément humaniste.