Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, le présent texte est consensuel, car il contient plusieurs avancées pour le fonctionnement de l’information et de la presse dans notre pays. Les sujets ciblés, aussi importants soient-ils – régulation de la distribution, gouvernance de l’AFP, nouveau statut d’entreprise solidaire –, ne suffisent cependant pas à en faire le grand texte susceptible de résoudre les difficultés d’un secteur fortement en crise.
L’inscription de la proposition de loi en procédure accélérée ne la destinait d’ailleurs pas à constituer cette réforme globale recommandée par l’ensemble des rapports publiés depuis les états généraux de la presse. On peut désormais douter qu’une telle réforme prenne forme durant ce quinquennat.
Cette proposition de loi vient tout d’abord répondre à la nécessité de rendre le statut de l’Agence France-Presse conforme au droit de l’Union européenne en matière d’aide de l’État. Parce que la Commission européenne le demandait, il y avait urgence à légiférer.
L’auteur de la proposition de loi, le député Michel Françaix, s’était intéressé, à l’occasion d’une mission d’information, aux difficultés rencontrées par l’agence dans son fonctionnement. Il a donc pu proposer utilement une réforme de sa gouvernance.
J’évoquais dans mon propos introductif le caractère consensuel du texte. Sur ce sujet de la gouvernance de l’AFP, une proposition de loi de l’ancien président de la commission de la culture, notre collègue Jacques Legendre, avait été déposée en 2011 ; elle préconisait déjà de revoir la composition du conseil d’administration de l’AFP, afin, notamment, de tenir compte de sa vocation internationale. Elle n’avait pas été inscrite à notre ordre du jour, mais certaines de ses dispositions sont adoptées aujourd’hui.
Le texte procède à un rééquilibrage au sein du conseil d’administration de l’AFP, en faisant passer la représentation des médias français de huit à cinq sièges, tandis que cinq personnalités qualifiées rejoignent les rangs de cette instance. La commission mixte paritaire a retenu notre proposition de prévoir, au sein de ce conseil, la présence de trois personnalités ayant une expérience internationale significative.
Recherchant un meilleur équilibre des pouvoirs au sein des différentes instances de l’AFP, le Sénat avait également proposé qu’une commission de surveillance soit créée sur la base de la fusion du conseil supérieur et de la commission financière. Elle aurait été garante de l’indépendance, de la déontologie et des comptes financiers de l’AFP et aurait joué un rôle réel dans l’examen de sa stratégie. Il s’agissait de mettre en place un contre-pouvoir fort pour décider des futurs projets de l’agence avec son président-directeur général.
Cette option n’a finalement pas été retenue par la commission mixte paritaire. Son principe a toutefois été compris et s’est concrétisé dans un renforcement du rôle propre de chaque organe de gouvernance de l’agence : conseil d’administration, conseil supérieur et commission financière.
Comme notre rapporteur, je pense que l’existence de trois instances dont les prérogatives sont renforcées risque de compliquer les prises de décision. Ce débat, et la solution de compromis trouvée par notre rapporteur, que je tiens à féliciter pour son travail et son implication, auront toutefois permis de progresser. Nous pourrons revenir plus tard à l’idée d’une fusion si le nouveau dispositif décisionnel ne faisait pas la preuve de son efficacité.
L’empreinte du Sénat a également été remarquable en ce qui concerne le renforcement du soutien financier pouvant être apporté à la presse. Deux dispositifs adoptés par la Haute Assemblée ont été approuvés en commission mixte paritaire.
Le premier permet une réduction d’impôt pour les particuliers souscrivant au capital des entreprises de presse d’information. Cette réduction est majorée lorsqu’il s’agit d’une entreprise solidaire de presse d’information, dont la création est définie dans le présent texte.
Les dispositions du second amendement retenu, que j’avais personnellement défendu en séance publique, nous ont rassemblés au-delà de nos clivages politiques, puisqu’elles ont été déposées à la fois par le groupe CRC et des membres du groupe UMP, avant d’être adoptées à l’unanimité. La défiscalisation des dons à la presse par l’intermédiaire d’associations d’intérêt général ou de fonds de dotation, jusqu’à présent tolérée en raison d’un rescrit fiscal, aura désormais une base législative.
Par ailleurs, l’examen de ce dispositif au sein de la commission mixte paritaire a permis de le sécuriser davantage, en prévoyant que l’organisme bénéficiaire des dons devra être reconnu d’intérêt général et que, par ailleurs, il ne devra exister aucun lien entre le donateur et l’entreprise de presse recevant l’aide.
Notre groupe se réjouit de ces avancées essentielles tant sur le plan financier que sur le plan démocratique, car elles contribuent à garantir le pluralisme de la presse.
Quant aux autres dispositions de la proposition de loi, qui s’attachent à la régulation des réseaux de distribution en renforçant la solidarité et la mutualisation en leur sein, je noterai simplement qu’elles s’inscrivent dans la logique de la loi du 20 juillet 2011, qui avait déjà fait l’objet d’un large accord, et que la décision de confier à l’Autorité de régulation de la distribution de la presse, l’ARDP, la responsabilité d’homologuer les barèmes de messagerie a été maintenue. Nous partageons, en effet, la volonté de garantir la confidentialité des tarifs appliqués et d’éviter toute suspicion de conflit d’intérêts.
La présente proposition de loi, augmentée des apports significatifs du Sénat, a fait très logiquement l’unanimité sur les bancs de l’Assemblée nationale. Notre groupe souhaite qu’il en aille de même ici et que le travail se poursuive, pour protéger l’avenir d’une presse indépendante et diverse.