Néanmoins, nos acquis ne sauraient occulter les graves dangers qui risquent de grever le processus de transition démocratique.
La situation économique et sociale du pays s’est dégradée. Les finances publiques ont été déséquilibrées. La croissance s’est affaiblie. L’investissement privé s’est ralenti et le taux de chômage a fortement augmenté. Les exemples historiques sont nombreux qui montrent que des révolutions échouent par dégradation des situations économiques.
À tout cela s’ajoute le prix très lourd que nous payons en raison de la situation d’un pays voisin, la Libye. N’oublions pas que l’intervention en Libye s’est faite en soutien aux aspirations du peuple libyen à la démocratie. La réussite de la transition tunisienne est de ce point de vue essentielle. Elle peut être un exemple vivant et proche d’une transition réussie, d’une prospérité renouvelée et renforcée, ainsi que d’un débat pacifié.
L’enjeu, aujourd’hui, pour la Tunisie, est de conforter sa transition politique par une relance économique soutenue.
La création d’emplois reste évidemment la priorité, et un vaste programme de réforme des systèmes de formation professionnelle et d’éducation est en cours de préparation.
Mais nous savons également que le rétablissement de la sécurité et l’apaisement du climat social sont des conditions nécessaires pour le redressement de la situation économique.
Pour l’ensemble de ces actions, la Tunisie a besoin aujourd’hui que ses partenaires et amis se tiennent à ses côtés : pour investir à nos côtés, pour mobiliser avec nous des investisseurs potentiels, mais surtout pour nous accompagner sur les actions les plus structurantes et de plus longue haleine que sont la formation et la réforme administrative. Et en ce lieu de représentation des collectivités territoriales de la République, je voudrais tout particulièrement mentionner la mise en place d’une nouvelle gouvernance régionale et locale : nous nous en sommes entretenus, monsieur le président du Sénat, et j’ai bien compris, à l’écoute de votre message, que vous étiez favorable à une telle évolution.
Pour atteindre ces objectifs, la coopération décentralisée entre villes, entre gouvernorats tunisiens et régions françaises jouera un rôle essentiel.
À cet effet, nous appelons à une politique volontariste en matière d’échanges, de partenariat et d’investissement, fondée sur la complémentarité.
Nous appelons à l’instauration avec nos partenaires d’un cadre permanent de réflexion, à la mise en place d’une fondation pour promouvoir l’intégration verticale
Europe-Méditerranée-Afrique, en y incluant peut-être les pays du Golfe – mais c’est là un avenir beaucoup plus lointain.
La France assumera en mai prochain la présidence du dialogue 5+5. Travaillons ensemble à faire de la Méditerranée le centre d’un espace de prospérité partagée et non pas un mur qui ne sera jamais assez haut pour garantir la sécurité des uns et pour contenir la désespérance des autres.
Au sud, la Tunisie continuera à œuvrer pour faire du Grand Maghreb une aire de coopération économique renforcée. Ensemble, nous pouvons faire de la Méditerranée un lieu d’échanges culturels, une force économique et un modèle de développement environnemental, car nous partageons les mêmes valeurs, une même histoire, ainsi qu’une culture et une langue.
La Tunisie continuera de jouer son rôle de pont entre les cultures, les continents, les religions, un pont entre les jeunesses d’Europe, du monde arabe et d’Afrique.
Dans ces conditions, monsieur le président, permettez-moi de conclure mon allocution en saluant ces jeunesses, en appelant au renforcement de leurs relations, en les invitant à être les gardiens et les acteurs des liens déjà forts et anciens entre nos deux pays.
Vive l’amitié entre la France et la Tunisie ! Vive le Sénat français !