Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collèges, le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, appelé désormais « loi Macron », dont nous entamons la discussion aujourd’hui au Sénat, n’aurait jamais dû parvenir jusqu’à nous. Alors que le Gouvernement a été privé de majorité à gauche à l’Assemblée nationale, ce texte n’a dû son salut qu’au coup de force du Premier ministre et à l’utilisation de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution. C’est donc un projet de loi démocratiquement entaché dont nous poursuivons l’examen.
Permettez-moi de formuler une remarque politique préalable. Depuis cet épisode bafouant la souveraineté parlementaire, la politique du Gouvernement a, une nouvelle fois, conduit à une lourde défaite électorale. Monsieur le ministre, nier le lien direct entre, d’une part, le contenu de votre projet de loi, de la politique gouvernementale en général, la persistance à imposer cette politique et, d’autre part, ces débâcles électorales relève soit de l’aveuglement idéologique, soit d’un choix assumé, et, sans doute, malheureusement, d’un peu des deux.
Le Premier ministre ne peut pas, d’un côté, regretter la forte abstention à gauche, le décrochage populaire des électeurs de 2012 et, de l’autre, continuer à appliquer à la ligne les recommandations du fascicule du « parfait petit libéral », alors que cette politique ne produit aucun résultat dans la lutte contre le chômage et pour l’amélioration de la vie quotidienne des Français qui souffrent le plus. C’est totalement contradictoire !
Les Français, qui attendent des changements sociaux importants, ne cessent de vous dire clairement qu’ils souffrent de cette politique à chaque occasion qui leur est donnée. Vous devriez les écouter au lieu d’enfoncer le pays dans cette dangereuse impasse !
Au lendemain des élections départementales, vous avez montré dans quelle considération vous teniez l’expression démocratique des Français. Dès le lendemain du second tour, vous avez lancé une de ces petites phrases dont vous avez le secret, en annonçant pour l’été prochain un second volet de votre dispositif de dérégulation, un « Macron II » en quelque sorte.
Devant le tohu-bohu déclenché y compris au sein du parti socialiste, le Premier ministre a repoussé cette annonce, mais nous savons que, avant même l’adoption définitive du texte dont nous discutons, vous pensez déjà à la seconde étape, qui vise en particulier à déstructurer le droit du travail dans les PME.