Manifestement, Mme Bricq fait partie des adeptes de cette thèse au sein de notre Haute Assemblée !
C’est totalement contraire à l’attitude constructive qui a été la nôtre depuis le début de l’examen du projet de loi. En commission spéciale, nous avons tenté de rester dans l’esprit du texte. Nous nous sommes parfois retenus d’apporter des modifications plus substantielles.
De nombreuses propositions des sénateurs du groupe UDI-UC figurent dans le texte de la commission spéciale. Je pense notamment aux mesures relatives aux professions réglementées qui ont été présentées par mon collègue Henri Tandonnet et reprises par le corapporteur François Pillet.
En ma qualité de référent du groupe UDI-UC sur le volet économique et social, je reviendrai rapidement sur les améliorations apportées en la matière grâce au travail réalisé avec les corapporteurs.
Notre démarche a été la suivante : nous nous sommes concentrés sur les mesures permettant la création et l’augmentation de l’activité économique créatrice de richesses et d’emplois, tout en laissant autant que possible à la négociation avec les partenaires sociaux le soin de décliner et d’appliquer concrètement les dispositifs. Comme vous le savez, notre groupe est particulièrement attaché à la négociation collective.
Nous avons proposé des mesures complémentaires pour assouplir et simplifier encore plus notre cadre législatif sur certains points. À ce titre, nous avons présenté des amendements en commission spéciale et, à quelques détails techniques près, nous avons obtenu satisfaction.
Satisfaction d’abord sur la mise en place de seuils différents pour lisser dans le temps les effets du franchissement : le seuil qui était jusqu’à présent fixé à onze est porté à vingt et un. Attachés au rôle des institutions représentatives du personnel, nous avons estimé qu’il était opportun, en temps de crise, de suspendre certaines dispositions liées au franchissement des seuils et d’en mesurer les effets.
Satisfaction ensuite sur le compte pénibilité, dont le principe n’est absolument pas remis en cause : un dispositif plus simple à mettre en œuvre pour les employeurs est adopté et les risques professionnels recentrés sur les facteurs aisément mesurables sont pris en compte.
Satisfaction encore sur la création d’un cadre juridique simplifié pour la mise en place d’accords offensifs de maintien dans l’emploi, afin de préserver la compétitivité des entreprises et de notre économie.
Satisfaction enfin sur le crédit interentreprises, disposition introduite à l’Assemblée nationale, sous réserve de revoir sur un plan technique le dispositif d’accompagnement et d’encadrement proposé.
J’espère que nous pourrons nous mettre d’accord sur une nouvelle rédaction du dispositif d’information des salariés en cas de cession de l’entreprise, afin de faire en sorte que l’information soit donnée quand un acquéreur s’est déclaré et non au moment des négociations préalables, dans l’intérêt même de l’entreprise et de ses salariés.
De nombreuses avancées figurent dans ce texte sur l’épargne salariale et l’actionnariat salarié. Je salue notamment la mesure d’abaissement du taux du forfait social relatif aux versements sur un plan d’épargne pour la retraite collectif, ou PERCO. Il serait cependant opportun de passer le taux du forfait social des contributions employeurs pour les dispositifs d’épargne salariale de manière différenciée : à 16 % pour les entreprises dont l’effectif est compris entre 51 et 249 salariés, et à 8 % pour les entreprises de moins de 50 salariés.
Enfin, notre action a été guidée par la volonté de clarifier et de faire respecter la loi, voire de dissuader la fraude. À ce titre, je vous proposerai, comme je l’avais fait en commission spéciale, d’augmenter l’amende sanctionnant les infractions à la réglementation sur le repos dominical en cas de récidive. J’espère que nous trouverons un terrain d’entente sur ce sujet avec la commission spéciale et le Gouvernement.
La mesure sur le travail du dimanche, si elle n’est pas la plus importante du projet de loi, a été très médiatisée ; elle revêt une portée symbolique. Je veux souligner mon attachement personnel, qui est, je le sais, partagé par nombre de collègues, à l’existence d’un jour de repos, réservé à une activité collective, familiale ou extra-familiale, qu’elle soit sociale, culturelle ou sportive, pour marquer une rupture hebdomadaire.
Cela dit, nous sommes unanimement favorables à toute mesure susceptible de créer des richesses et de l’emploi. Si l’ouverture dominicale des commerces peut être bénéfique dans les zones touristiques ou frontalières, l’effet positif d’une telle mesure est moins évident dans les autres parties du territoire en l’absence d’augmentation du pouvoir d’achat. Nous touchons là aux limites de l’élasticité d’une politique de l’offre !
Il y aurait lieu de clarifier l’application de la future loi, comme il aurait été nécessaire de le faire pour les règles actuelles, afin de garantir leur respect. Elles sont très largement contournées, avec des ouvertures sans autorisation ou des abus de cogérance fictive, et les sanctions sont insuffisamment dissuasives.
Je voudrais mentionner quelques mesures que nous avons proposées pour prendre date et qui mériteraient l’attention du Gouvernement. Je pense à la création de plateformes de cotations régionales ou de bourses régionales, idée défendue à l’Assemblée nationale par le groupe UDI, ou encore à la réutilisation sociale des avoirs saisis au crime organisé.
Le projet de loi esquive le sujet, qui revient souvent sur la table, de la durée légale du temps de travail de 35 heures, de ses aménagements et de ses effets sur l’activité économique. Ces points pourraient faire l’objet d’une conférence sociale spécifique réunissant les partenaires sociaux, comme l’a proposé le porte-parole du groupe UDI à l’Assemblée nationale lors de l’examen du texte. Nous n’avons pas souhaité rouvrir le débat au détour d’un amendement, mais la question reste posée.
Nous défendrons un amendement visant à supprimer la durée hebdomadaire minimum de 24 heures. Même s’il existe des possibilités de dérogation, cette règle entraîne d’importantes difficultés de mise en œuvre au détriment des employeurs, mais aussi des salariés, là où les négociations et les accords de branche ne sont pas possibles. Cela ne peut qu’encourager une résurgence du travail dissimulé.
Monsieur le ministre, je suis moins optimiste que vous sur les effets de levier directs ou indirects de votre projet de loi sur l’activité et sur la croissance. Les agents économiques, employeurs ou salariés, attendent des signaux plus forts sur le front des réformes.
Je suis impliqué depuis longtemps dans des responsabilités d’entreprises ; à mon sens, il faudra d’autres signes, plus tangibles, pour redonner aux entrepreneurs la confiance qui pèse au moins pour moitié dans une politique de relance.
Le projet de loi, malgré ses insuffisances et ses imperfections, peut contribuer à mettre en place un environnement plus favorable à la prise d’initiative et à l’investissement, sous réserve de permettre au Sénat de l’améliorer et de le compléter. Une telle ouverture, répondant à la nôtre, constituerait un gage d’unité dans l’effort de redressement économique auquel les entrepreneurs, les salariés et l’ensemble de nos concitoyens seraient sans doute sensibles.