Monsieur le secrétaire d’État, dans notre monde, une personne sur neuf souffre encore de la faim. Des apprentis sorciers nous expliquent que c’est par manque de nourriture, et que ce sont des OGM qu’il nous faudrait pour nourrir les plus pauvres.
En réalité, les famines sont dues non au manque de nourriture mais aux conflits armés, au changement climatique, à la concurrence déloyale de nos pays développés et, surtout, au prix de la nourriture.
Non seulement le prix moyen des matières premières agricoles augmente constamment, mais il est de plus en plus volatil, c’est-à-dire qu’il connaît des pics brutaux et très élevés, dont les effets sont dévastateurs pour l’accès à la nourriture des populations les plus fragiles.
Cette volatilité des prix est la conséquence directe de la financiarisation des marchés alimentaires et agricoles. Dans l’une de ses études, la Banque mondiale a montré que « les activités des fonds indiciels de matières premières ont joué un rôle clé dans la flambée des prix alimentaires de 2008. »
Or qui propose ces fonds indiciels aux investisseurs ? Ce sont les banques, et en particulier les banques françaises. Dans un récent rapport, l’ONG Oxfam indique que BNP Paribas, la Société Générale et Natixis gèrent, à elles trois, 3, 5 milliards d’euros d’actifs dans des fonds indiciels agricoles.
Monsieur le secrétaire d’État, dans le cadre de la loi bancaire, des amendements adoptés au Sénat, notamment sur l’initiative des écologistes, avaient introduit davantage de contrôle et de transparence sur la spéculation agricole. Pouvez-vous nous dire où en est l’application de ces mesures par l’Autorité des marchés financiers, l’AMF ?
Au-delà des dispositions légales, monsieur le secrétaire d’État, considérez-vous qu’il est politiquement acceptable que des banques françaises spéculent sur la faim ?
Une chose est sûre : à voir la facilité avec laquelle BNP Paribas a absorbé son amende américaine de 9 milliards de dollars, le monde des spéculateurs ne connaît pas la famine !
Le Gouvernement, qui vient de négocier pour les banques plusieurs milliards d’euros de rabais sur leur contribution au Fonds de résolution européen, ne peut-il pas user du rapport de force pour les ramener à la raison ?