C’est autant le fond que la forme de l’alinéa 3 qui nous conduit à en proposer la suppression.
Nous l’avons dit et nous le dirons encore, nous sommes opposés à la pratique des ordonnances. En effet, l’article 38 de la Constitution crée un moyen, pour le Gouvernement, de contourner les règles usuelles de la démocratie, notamment celles qui concernent l’élaboration et l’adoption de la loi par le Parlement. Si les ordonnances doivent, in fine, faire l’objet d’un projet de loi de ratification déposé devant le Parlement, elles n’en constituent pas moins un empiètement du pouvoir exécutif sur le pouvoir législatif et donc une atteinte au principe de séparation des pouvoirs, fondement de l’état de droit.
Le Gouvernement peut donc passer outre le rôle du Parlement, sans que l’article 38 de la Constitution limite son domaine d’intervention puisqu’il est simplement question de « l’exécution de son programme », ce qui n’exclut a priori aucun secteur. De plus, si le Conseil constitutionnel effectue un contrôle a posteriori, ce dernier n’est pas suffisant.
Constituant une procédure dérogatoire à l’élaboration de la loi qui permet de contourner l’examen par les deux chambres du Parlement, les ordonnances privent les élus de la République que nous sommes de leur droit à modifier par amendement les textes proposés par le Gouvernement. Pour constitutionnelle qu’elle soit, cette pratique n’est, à notre sens, ni légitime ni souhaitable dans un État de droit.
Nous mettons d’autant plus en garde contre la banalisation du recours aux ordonnances que celui-ci concerne des domaines de plus en plus larges et tend à devenir systématique. On pourrait éventuellement concevoir cette procédure dans une situation d’urgence, mais nullement de manière régulière, comme nous le constatons avec le gouvernement actuel et ainsi que l’illustre parfaitement ce projet de loi : le recours aux ordonnances y est omniprésent, au point qu’un article sur sept y fait référence.