Il s’agit d’un point important parmi les ajouts introduits dans ce texte par la commission spéciale.
L’été dernier, j’ai voté, avec les membres de mon groupe, la loi portant réforme ferroviaire. Or nous avons eu à l’époque une impression d’inachevé. Nous avons eu le sentiment que l’on faisait le pari d’un groupe quasi intégré, qui respectait les contraintes européennes, mais gérait le réseau et le transport, tout en se modernisant dans l’intérêt des cheminots, pour permettre la continuité d’un outil de travail au service de nos concitoyens, à un coût assurant sa pérennité : tel est, selon moi, le véritable enjeu.
Nous avons voté cette réforme en pensant qu’elle était une chance pour le ferroviaire, malgré les difficiles, voire colossaux, efforts d’adaptation qu’elle nécessitait en interne, aux yeux de l’ensemble des organisations syndicales. Il s’agit d’un défi à relever, nous en avons conscience.
Si, à l’époque, cette réforme nous a laissé un goût d’inachevé, c’est parce que nous avions conscience d’avoir encore une fois repoussé la principale échéance, pas si lointaine, monsieur le ministre, de l’ouverture à la concurrence.
Si nous continuons à nier sa réalité, nous ne rendrons service ni aux cheminots ni à la SNCF, qui a besoin de se préparer à ce qui interviendra un jour.
Monsieur le ministre, notre désaccord est simple. D’un côté, vous avez raison, nous sommes encore dans l’attente du quatrième paquet ferroviaire. De l’autre, un règlement du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transports de voyageurs prévoit que, à compter du 3 décembre 2019 – j’y insiste –, « toute autorité compétente qui recourt à un tiers autre qu’un opérateur interne attribue les contrats de service public ferroviaire par voie de mise en concurrence ». C’est déjà un élément du droit européen !
Ainsi la commission spéciale propose-t-elle un léger changement, à savoir le remplacement de la date du 3 décembre 2019 par celle du 1er janvier 2019, onze mois plus tôt. Une telle modification n’est donc pas d’une portée considérable ! Elle revient simplement à dire à tous les acteurs du monde ferroviaire, qui est très apprécié sur ces travées, quelles que soient les régions d’origine de nos collègues – le débat de tout à l'heure l’a montré – qu’il faut se préparer.
En la matière, deux attitudes sont possibles. Soit on attend la décision européenne, qui tombera un jour, soit les régions et la SNCF commencent à préparer une telle évolution.
Nous privilégions cette seconde démarche, qui est également, d’une certaine manière, protectrice pour le monde ferroviaire, même si elle peut apparaître comme un élément de perturbation. Plutôt que de voir arriver la déferlante, un jour, des « trains de l’étranger », il s’agit de réfléchir à l’adaptation de la SNCF, à la manière dont l’entreprise peut relever le défi. En avançant de onze mois l’échéance, on signifie à la SNCF et à tous les acteurs ferroviaires qu’il faut se préparer.
Très franchement, nous le constatons lors de nos discussions, les régions ont d’ores et déjà à l’esprit que la SNCF, pour bâtir son avenir, doit se confronter aux autres plutôt que de subir. Nous nous contentons de dire : ne faisons pas l’autruche, ouvrons doucement les yeux. C’est un changement, certes, mais nous pensons qu’il est utile, car il rendra service au monde ferroviaire, en montrant que cette évolution est une réalité qu’il faut préparer tout doucement.