Je le dis d’emblée, l’avis du Gouvernement est favorable, mais je veux profiter de ce moment pour évoquer le fond de la réforme, ce que je n’ai pas encore fait, ce qui me permettra d’apporter les éclaircissements demandés par M. Desessard.
C’est un fait, nous ne parviendrons pas à un accord avec la commission spéciale. Je crois vraiment qu’elle est trop frileuse sur le sujet.
Ne jouons pas à nous faire peur ! De quoi parlons-nous ? Il n’est question ici que du droit civil. En matière pénale ou prud’homale, il n’y a pas de postulation territoriale. C’est la conséquence logique de la suppression des avoués votée en 2011.
Comment expliquer que, dans une affaire pénale, l’avocat peut aller plaider à l’autre bout de la France, et donc a fortiori dans la cour d’appel voisine, alors qu’en matière familiale, pour divorcer à Annecy si vous vous trouvez à Chambéry, vous devez passer par la postulation ? Cette situation entraîne un coût pour nos concitoyens et conduit à rendre une moins bonne justice. Au regard de l’organisation générale de notre système juridique, elle constitue véritablement un archaïsme inexplicable.
L’évolution que nous proposons risque-t-elle d’emporter une profonde déstabilisation ? Le chiffre d’affaires de la profession d’avocat s’élève à 11 milliards d’euros environ. La postulation représente 50 millions d’euros. Sauf à ce que cette somme soit concentrée dans quelques barreaux que la réforme anéantirait, elle n’est pas significative d’un point de vue macroéconomique. Il ne s’agit que d’un ajustement, qui ne touche en rien à l’essentiel de la matière de la profession.
J’ai bien entendu les chiffres qu’a cités M. le corapporteur à propos des barreaux d’Alès et de Nîmes, mais sont-ils vraiment la conséquence de l’expérimentation qui a été menée ? Je n’en suis pas certain, et nous n’en avons d’ailleurs pas la preuve. Quelle était la situation avant la réforme ? D’ailleurs, la profession d’avocat n’a jamais pu fournir les chiffres arguant du fait qu’il serait catastrophique de mettre fin à la postulation territoriale.
Cela a été rappelé, nous avons déjà fait un compromis : la postulation n’a pas été supprimée, elle a été élargie au ressort des cours d’appel. Certaines affaires, qui ont été définies, restent du ressort du tribunal de grande instance, même pour ce qui concerne les affaires civiles, et continueront à être plaidées avec la postulation ; on a déjà procédé à des aménagements. On ne saute donc pas dans le grand bain.
Procéder à une expérimentation, alors même que cette réforme est relativement logique, très marginale et qu’elle a déjà fait l’objet d’un compromis, ce n’est pas, selon moi, à la hauteur de l’enjeu qui est le nôtre.
Cela a également été dit, il existe un système d’informatisation des actes. Il est déployé à 80 %, précisément en matière civile. L’automaticité de la postulation sera supprimée, mais, si besoin est, cela n’empêche pas de rencontrer le magistrat, ce qui est possible, concernant la cour d’appel, dans de nombreux territoires, ou de choisir un correspondant ; cette liberté demeure.
Très honnêtement, la réforme est encadrée, aménagée, marginale et va dans le sens de l’histoire. Eu égard à l’ampleur du sujet et à la réforme que nous sommes en train de mettre en place, avançons !
Monsieur le corapporteur, prévoir, dans un an, une expérimentation sur trois ans, cela signifie qu’on ne bougera pas avant 2019.