Intervention de François Marc

Réunion du 10 avril 2015 à 14h45
Croissance activité et égalité des chances économiques — Article 10 A, amendements 1646 1700

Photo de François MarcFrançois Marc :

Nous sommes face à deux positions.

D’un côté, il y a celle de la commission spéciale. J’ai bien entendu les arguments de Mme la corapporteur, qui a expliqué les raisons pour lesquelles il était opportun de surseoir et de ne pas retenir le dispositif issu des travaux de l’Assemblée nationale. Je partage l’essentiel de son argumentation.

De l’autre côté, vous nous proposez, monsieur le ministre, de rétablir sans changement un dispositif qui, vous l’avez reconnu vous-même, n’est pas satisfaisant. Il traite en effet à l’identique le statut des franchisés simples et celui des commerçants coopérateurs et associatifs.

Si l’article 10 A était adopté dans la rédaction retenue par l’Assemblée nationale, on sait bien que les conséquences seraient néfastes pour le modèle coopératif.

Je le rappelle, les commerçants associatifs ou coopératifs, par opposition aux franchisés, qui sont de simples utilisateurs des services de leur franchiseur, investissent dans leurs outils et partagent les risques en tant que copropriétaires de ces investissements, lesquels sont essentiels au fonctionnement de leur réseau.

En limitant à neuf ans la durée des contrats, on fragilisera ces réseaux en créant un manque de visibilité et une incertitude sur ces investissements, lesquels pourraient porter sur des périodes supérieures à neuf ans.

Cette inquiétude appelle une réaction, laquelle nous est proposée immédiatement : vous nous suggérez, monsieur le ministre, d’améliorer la rédaction de l’amendement n° 1646. Je considère, pour ma part, que le sous-amendement n° 1700 permettrait de résoudre cette difficulté à laquelle nous essayons de trouver une solution.

Il nous faut aussi veiller à préserver la concurrence en assurant la pérennité de la diversité des enseignes. Or des craintes pèsent sur le maintien de toutes ces enseignes, qui créent cette concurrence dans la distribution et contribuent aussi, sans doute, à la baisse des prix.

Mettre en place un système qui tend à concentrer davantage les enseignes, ce qui pourrait être la conséquence de la disposition en l’état, serait sans doute préjudiciable aux consommateurs, en termes tant de politique des prix que d’emploi. Nous ne pouvons que partager cette préoccupation.

Enfin, je crois que le modèle coopératif appelle un regard particulier. Marie-Noëlle Lienemann l’a dit à l’instant, et je souscris à certains de ses arguments. Il nous faut donc être vigilants quant à la préservation de ce modèle.

Pour conclure, monsieur le ministre, je rappelle qu’ont été évoqués le manque d’étude d’impact et la difficulté à évaluer les conséquences et les incertitudes qui entourent les hypothèses futures, au travers de la mise en œuvre d’un tel dispositif. Je tiens à dire, à cet égard, que d’autres ont procédé à des anticipations et à des simulations.

Je pense en particulier à Bank of America Merrill Lynch, qui a publié la semaine passée une recommandation financière et boursière, dont vous me permettrez de citer les termes : « La loi Macron prévoit de raccourcir les contrats de franchise et d’affiliation afin d’augmenter la concurrence. Merrill Lynch considère que les groupes intégrés comme Carrefour, Casino ou Auchan ont plus à gagner dans ce contexte que les autres réseaux coopératifs ou associatifs. En effet, la mesure pourrait offrir des opportunités d’acquisition de magasins indépendants ou de franchisés pour agrandir la force de frappe des distributeurs. »

On voit bien quelles pourraient être les conséquences d’un tel dispositif, si l’on n’y prêtait pas garde : une forme de dépeçage du réseau coopératif. Le sous-amendement n° 1700 permettrait, en apportant une réponse immédiate à cette difficulté, de prévenir ce risque et de rassurer les investisseurs, qui sont aujourd’hui dans l’attente. Nous avons en effet, les uns et les autres, été interrogés à ce sujet par des investisseurs : ils souhaitent savoir ce qui adviendra dans le secteur de la distribution.

Je préconise, pour ma part, dans l’hypothèse où l’amendement du Gouvernement devait être adopté, qu’il soit sous-amendé. Ce serait une bonne manière de rassurer l’ensemble de nos interlocuteurs.

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