Loin de moi l'idée qu'il faille restreindre le droit d'asile. Cet héritage de la Révolution française doit être préservé. Mais peut-on considérer qu'il fonctionne bien aujourd'hui ? Ceux à qui on l'accorde sont-ils accueillis, aidés, accompagnés ? La réponse est non. Il faut lutter contre les réseaux mafieux qui détournent la procédure pour organiser des filières lucratives d'immigration économique, et qui sont comme l'hydre de Lerne : il en renaît cinq quand on en démantèle un. C'est là un vrai sujet. Certes, il est plus difficile de traiter ensemble des dispositions relatives à l'asile et de celles qui relèvent de la politique d'immigration, mais c'est le moyen d'avoir une politique digne, assortie de moyens - dont on sait qu'ils ne sont pas illimités.
Albéric de Montgolfier me demande s'il est procédé à un tri préalable tenant compte des zones de conflit. Il existe bien une liste de pays en provenance desquels les demandes font l'objet d'un a priori défavorable, mais le problème est que cette liste n'est pas toujours adaptée. Alors que le conflit au Kosovo remonte à plus de dix ans, ce pays n'y figure pas toujours. Même chose pour le Bangladesh, alors que l'on sait bien que l'immigration qui en est issue aujourd'hui est essentiellement économique. Le Kosovo avait certes été inscrit dans la liste, mais à la suite de recours portés par des associations, il en a été sorti... Autant je comprends que des pays comme la Syrie ou l'Irak ne soient pas des pays d'origine sûrs, autant je m'explique mal la manière dont on envisage des pays où la situation a beaucoup évolué.
Dispose-t-on d'éléments de comparaison ? Ce que je puis vous dire, c'est que dans un pays qui doit faire face à beaucoup de demandes comme l'Allemagne, les délais d'instruction sont, fin 2014, d'environ cinq mois, soit moitié moins que chez nous. La situation a cependant beaucoup évolué en Allemagne, pays qui a dû faire face, en 2014, à un afflux de demandes, dont le nombre a atteint 170 000. Par ailleurs, quand le demandeur n'est pas soumis à un délai à compter de son entrée sur le territoire national pour déposer sa demande, il n'a que vingt-et-un jours au Royaume Uni. Il est vrai, comme le rappelle Richard Yung, que le pays a réduit drastiquement ses effectifs, y compris dans le domaine de l'asile et de l'immigration, mais il a pris des mesures beaucoup plus rigoureuses, si bien que la durée normale d'instruction est moins longue, d'environ six mois.
La philosophie générale de ce texte va dans le bon sens, puisqu'il s'agit de raccourcir les délais, mais il y faut des moyens, parce que la demande a été multipliée par deux en cinq ans. Pour atteindre l'objectif fixé, il faudrait, de surcroît, l'assortir de contraintes, en prévoyant des sanctions en cas de dépassements. J'ajoute que si l'on ouvre des possibilités de recours tous azimuts, comme l'ont fait les députés, on n'y arrivera pas.
Le problème des mineurs étrangers placés qu'évoque Michel Bouvard relève de la politique de l'immigration plus que de l'asile. Mais il est vrai qu'il pose aussi des questions financières.
Richard Yung a raison de dire que la centralisation de l'hébergement va dans le bon sens, sachant que l'essentiel de la charge est actuellement concentré sur deux ou trois régions. Mais encore une fois, il y faut des moyens financiers. On a accru le nombre de places en CADA, mais pas suffisamment et pas en centres provisoires d'hébergement (CPH) pour les réfugiés.
J'ai, pour finir, le regret de dire à Marie-Hélène Des Esgaulx que les magistrats, qui avaient pourtant demandé des travaux pour améliorer l'accueil à Roissy, ne jugent toujours pas utile de s'y rendre.