Intervention de François Pillet

Réunion du 13 avril 2015 à 16h00
Croissance activité et égalité des chances économiques — Article 17 bis

Photo de François PilletFrançois Pillet, corapporteur :

Le Gouvernement propose, par un amendement rédigeant intégralement l’article, de revenir au texte adopté par l’Assemblée nationale.

Or le dispositif voté par les députés présente plusieurs points contestables, sur lesquels la commission spéciale souhaiterait à nouveau connaître votre analyse, monsieur le ministre.

Le premier a simplement trait à la compétence de l’Autorité de la concurrence pour évaluer le nombre nécessaire d’offices d’avocats aux conseils pour garantir que ceux-ci peuvent continuer à jouer correctement leur rôle de filtre.

Il n’a pas semblé à la commission spéciale que l’Autorité de la concurrence, quelle que soit la compétence de ses membres, était l'organisme le mieux placé pour évaluer ce qu’impliquent « les exigences d’une bonne administration de la justice ». À cet égard, il est symptomatique que la consultation des plus hautes autorités des juridictions suprêmes n’ait pas été prévue, alors que le garde des sceaux doit aujourd’hui les consulter avant de proposer la création d’un nouvel office.

Le deuxième point est encore plus problématique. Dans la rédaction proposée par le Gouvernement, il serait indiqué, à l’article 3 de l’ordonnance de 1817, que le ministre de la justice ne pourra refuser l’installation d’un nouvel office qui resterait dans les limites fixées par l’Autorité de la concurrence. Cela signifie donc que l’avis de cette instance est non seulement consultatif, mais aussi prescriptif, puisqu’il lie l’appréciation du garde des sceaux et offre aux nouveaux arrivants un droit absolu à s’installer. Le garde des sceaux n’aura pas d’autre choix que d’accepter toutes les installations comprises dans les limites décidées par l’Autorité de la concurrence.

À l’article 13 bis du texte, la rédaction du Gouvernement retenait non pas le terme d’« avis », qui renvoie à une compétence seulement consultative, mais celui de « proposition », qui implique une compétence prescriptive. En l’occurrence, le texte évoque ici un « avis », mais définit un régime juridique, celui d’une décision qui produit des effets de droit et s’impose donc aux autres autorités.

Le troisième point tient, encore une fois, aux lacunes du dispositif s’agissant des cas de concurrence d’installation : rien n’est dit sur la possibilité pour le garde des sceaux de refuser certaines installations, à moins que vous ne reteniez exclusivement la règle du « premier arrivé, premier servi », qui n’est pas toujours la meilleure dans un marché régulé.

Enfin, et c’est le quatrième point, le texte des députés contient des dispositions dont on peine à comprendre l’intérêt ou l’objectif. Pourquoi, dans un texte qui vise à encourager l’arrivée de nouveaux professionnels, exclure la possibilité pour des professeurs de droit ou d’anciens membres du Conseil d’État ou de la Cour de cassation de s’installer comme avocat aux conseils ?

La commission spéciale a défendu un dispositif équilibré, qui fait droit à la nécessité d’ouvrir plus largement l’accès à la profession, en imposant au garde des sceaux d’examiner l’opportunité de nouvelles créations d’offices, en consultant toutes les autorités compétentes, dont l’Autorité de la concurrence.

Pour ces raisons, la commission spéciale souhaiterait obtenir de votre part des explications sur ces différents points, monsieur le ministre. De toute manière, le texte ne comprenait au départ aucune disposition en ce domaine.

L’avis de la commission est évidemment défavorable.

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