Vous avez trahi mes propos : nous envisageons de constater une diminution des dépenses des collectivités locales de 1,2 milliard d'euros ; nous ne demandons pas une baisse supplémentaire de 1,2 milliard.
Il ressort du rapport d'étape de la députée Christine Pires Beaune et de votre regretté collègue Jean Germain que les écarts de dotations par habitant entre des communes comparables peuvent aller de un à quatre voire à six. Je vous mets au défi d'expliquer les modalités de calcul de la dotation de garantie... Nous sommes tous coupables de cette complexité, mais reconnaissons qu'une grosse part est à imputer à la suppression de la taxe professionnelle. Nous devons entamer une réforme des dotations de l'État afin de les rendre lisibles - et parce que certains écarts n'ont aucune justification. Cela sera une tâche passionnante.
La baisse des dotations est certes difficile à entendre - moins d'ailleurs semble-t-il au Sénat qu'à l'Assemblée. Les dotations représentent un quart des recettes des collectivités locales. Nous les diminuons cette année de 6 %, soit une baisse de 1,5 % des recettes. Les autres recettes proviennent à 60 % d'impositions et, pour le solde, de loyers et des produits d'activités. Les recettes fiscales ont été accrues mécaniquement de 0,9 % du fait de vos votes sur la revalorisation des valeurs locatives, qui représente environ 580 millions d'euros. S'y ajoute l'impact des variations physiques des bases. Au total, la situation n'est pas facile mais, si l'on tient compte de la dotation de solidarité rurale (DSR), de la DSR-cible, de la dotation de solidarité urbaine (DSU), de la DSU-cible, du fonds national de péréquation (FNP), on s'aperçoit que, dans bon nombre de cas, la baisse de recettes au titre des dotations de l'État - sans citer le fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales (FPIC) dont certains peuvent se féliciter - n'est pas si significative. Les discours catastrophistes entretiennent le doute, minent la confiance : nous avons tous intérêt à travailler dans un esprit de responsabilité.
Nous sommes confrontés à des difficultés d'organisation au niveau de l'État, qui s'impose à lui-même un effort proportionnellement plus important que dans les autres secteurs de la dépense publique. Nous avons un objectif de stabilité en matière d'effectifs, que nous essayons de tenir sur l'ensemble de la législature. L'État exerce ainsi une action volontariste dans l'Éducation nationale, la justice et la sécurité, tout en demandant aux autres ministères de réduire leurs dépenses. Des milliers d'emplois ont donc été supprimés à la direction générale des finances publiques (DGFIP), dans les douanes, aux ministères de la culture, du travail ou de l'environnement. La tâche est rendue encore plus difficile par la loi de programmation militaire (LPM) que vous avez citée. À cause des impératifs de sécurité, le Président de la République a décidé de ne pas suivre le rythme prévu de réduction des effectifs en matière de défense.
Chacun souhaite la réduction de la dépense publique. Mais, tout est une priorité, de l'armée à la culture désormais sacralisée, ou aux dépenses de logement, essentielles aux dires d'un ancien Premier ministre. Lorsque la loi de santé a été discutée, les députés ont été nombreux à dire qu'il fallait revaloriser les honoraires de certaines professions médicales. Que reste-t-il alors pour faire les 150 milliards ou même les 120 milliards d'économie que demandent certains ? L'Éducation nationale et les retraites !
La loi de programmation militaire prévoit une recette exceptionnelle dégagée par la vente des fréquences hertziennes aux opérateurs de téléphonie mobile à hauteur de 2,2 milliards d'euros. Personne ne la remet en cause. En revanche, la date reste incertaine et un délai sera nécessaire pour encadrer les aménagements techniques qu'une telle opération nécessite. Une proposition de loi est en préparation. On a imaginé un dispositif impliquant des sociétés de projets (Special Purpose Vehicle ou SPV), dont tout le monde sait désormais qu'elles seront considérées comme de la dépense au sens maastrichtien et que leur création est coûteuse. Nous avons une question de délai. S'il s'agit seulement de gagner quelques mois, voire une demi année pour 2 milliards d'euros qui seraient comptabilisés à un moment plutôt qu'à un autre moment, autant mettre des crédits budgétaires. C'est notre position.
Des discussions sont en cours avec le ministère de la défense. Pour préserver nos options, nous avons proposé un amendement au projet de loi « Macron » prévoyant la possibilité de mettre en place des SPV. Un Conseil de défense doit se réunir le 29 avril, où le Président de la République fera connaître ses arbitrages. Les 2,2 milliards prévus seront réalisés, peut-être pas dès cette année mais au début de l'année prochaine et, s'il s'agit de « faire le joint » pour quelques mois voire une année, nous arriverons à trouver les moyens en termes de livraison de matériel et de commande. Si l'arbitrage est rendu pour les sociétés de projet, il sera soumis au Parlement.