Intervention de Emmanuel Macron

Réunion du 16 avril 2015 à 21h30
Croissance activité et égalité des chances économiques — Articles additionnels après l'article 35

Emmanuel Macron, ministre :

Je souhaiterais apporter quelques précisions en réponse à certaines interventions.

Monsieur Gabouty, prendre la date de livraison comme référence, plutôt que l’accord sur le prix et la chose, produirait des effets pervers beaucoup plus importants que vous ne l’imaginez. D’abord parce qu’une décision d’investissement prise aujourd’hui n’entraînant pas nécessairement une livraison dans l’année, il faudrait étendre la période, ce qui induirait une perte d’efficacité. Ensuite et surtout parce que vous seriez confronté à un effet d’aubaine maximal : à partir du 15 avril vont intervenir de très nombreuses livraisons correspondant à des décisions d’achat prises antérieurement à l’entrée en vigueur de ce dispositif.

C'est la raison pour laquelle je pense que l’accord sur le prix et la chose est le bon critère : c’est bien cet accord qui entérine la décision d’investir.

Par ailleurs, il est juste et raisonnable de borner à un an la durée d’application du dispositif : s’il était pérenne, il s’agirait d’une réforme structurelle de l’impôt sur les sociétés ; s’il était plus court, il serait inefficace. Un an, c’est la bonne fenêtre de tir, à condition de retenir comme critère l’accord sur le prix et la chose, et non la livraison.

Vous avez également soulevé la question du crédit-bail. Le texte précise que l’avantage bénéficie au crédit preneur, c’est-à-dire à celui qui dispose de l’option d’achat, et en aucun cas à l’établissement qui porte le crédit-bail, sous peine d’entraîner un effet pervers massif. Il s’agit d’une restriction qu’il fallait apporter.

Enfin, il est important de viser les équipements neufs, puisqu’il s’agit de soutenir le renouvellement productif, l’activité et donc l’emploi.

Les types d’investissements concernés par ce dispositif sont extrêmement variés : cela va des investissements en recherche et développement au renouvellement d’un appareil de chauffage, en passant par une installation d’épuration, la bétonneuse d’un artisan, un four à pain ou une moissonneuse-batteuse…

Monsieur le président Foucaud, le choix macroéconomique des aides aux entreprises s’est opéré par sédimentation. On pourrait décider collectivement de baisser l’impôt sur les sociétés, de revenir sur des dispositifs structurels de compensation ou d’allégements de charges. Il reste que nous avons construit l’histoire économique des trente dernières années sur de telles mesures.

Quand on parle des 200 milliards d’euros d’aides aux entreprises, on additionne très souvent des choux et des carottes, et notamment tous les allégements de charges décidés par l’ensemble des gouvernements pour accompagner le passage aux 35 heures. Je veux bien qu’on se fasse plaisir en disant qu’il s’agit d’aides aux entreprises, mais ces mesures ont accompagné des choix macroéconomiques votés de toutes parts.

Je persiste à considérer que le crédit d’impôt recherche est un élément clé de notre efficacité collective. Si vous voulez évaluer l’impact du crédit impôt recherche, je vous suggère de vous demander pourquoi, dans les deux opérations de fusion récentes Lafarge-Holcim et Alcatel-Lucent-Nokia, dont on peut déplorer une partie des caractéristiques, les grands champions mondiaux qui se créent à travers ces rapprochements décident d’installer leurs quartiers généraux dans les autres pays, mais gardent leurs centres de recherche et développement en France ? C’est grâce au crédit impôt recherche, dont l’efficacité est ainsi prouvée !

Nous avons en effet besoin d’y aller plus fort et plus vite en matière d’investissement : notre retard est évalué à 17 milliards d’euros, soit environ un an d’investissement productif privé. Ce dispositif est un élément qui contribuera à le renforcer.

Enfin, je veux dire que le travail collectif commencé en commission spéciale hier et poursuivi au cours de la discussion d’aujourd'hui est à la hauteur de l’ensemble de nos débats.

Vous l’avez vu, je défends ce texte avec fougue : j’y crois. Certes, nous pouvons avoir des désaccords, mais le souci constant de l’intérêt général qui se manifeste ici et la qualité des travaux que nous menons ensemble me donnent raison : j’avais en effet plaidé au sein du Gouvernement pour que cet amendement arrive en discussion au Sénat, quelle que soit la sensibilité qui y prévaut.

Depuis le début, vous avez toutes et tous démontré votre volonté de faire repartir notre économie et de défendre l’intérêt général.

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