Intervention de Michel Le Scouarnec

Réunion du 15 avril 2015 à 14h30
Croissance activité et égalité des chances économiques — Article 30

Photo de Michel Le ScouarnecMichel Le Scouarnec :

L’article 30 du projet de loi, qui se rapporte aux architectes, m’offre l’occasion de soulever un problème important : la modification du seuil de surface de plancher déterminant le recours obligatoire à un architecte.

Une mission commune au ministère de la culture et de la communication et à celui de l’égalité des territoires et du logement a rendu, en septembre 2013, un rapport d’évaluation sur les conséquences de la réforme du calcul des surfaces. Elle a conclu à la nécessité d’abaisser à 150 mètres carrés de plancher le seuil du recours obligatoire à un architecte.

En effet, le décret du 7 mai 2012 relatif à une des dispenses de recours à un architecte a modifié les conditions de calcul de la surface des bâtiments en substituant à la mesure en surface hors œuvre nette – SHON – la mesure en surface de plancher. Il s’agissait de ne pas faire entrer dans le calcul de la surface l’épaisseur des parois de façade, afin de favoriser la meilleure isolation thermique et de réduire la consommation énergétique globale des constructions.

Le problème réside dans le fait que le seuil obligatoire de recours à l’architecte est resté fixé à 170 mètres carrés, mais en passant d’une mesure en SHON à une mesure en surface de plancher, ce qui a pour effet indirect de pénaliser les architectes : 170 mètres carrés de surface de plancher équivalent en effet à 190 mètres carrés de SHON.

Paradoxalement, les lois Grenelle 1 et Grenelle 2, qui fixent l’objectif d’une réduction de la consommation énergétique des logements et dont découle le décret mentionné, ont donc eu pour effet indirect, comme le précise le rapport interministériel, de septembre 2013, de pénaliser les acteurs les plus performants dans ce domaine, à savoir les architectes.

Si l’impact économique de cette mesure ne représente que 0, 14 % du marché global de la maison individuelle, puisque la surface moyenne des maisons individuelles n’est en France que de 110 mètres carrés et que près de 90 % d’entre elles font moins de 170 mètres carrés, cette variation du seuil a une incidence considérable sur l’activité des cabinets d’architecture, déjà particulièrement touchés par la crise.

Au demeurant, cela n’a pas eu d’effet positif sur la construction de maisons individuelles, qui a vu son effondrement se poursuivre, passant de 170 000 unités en 2010 à 105 000 en 2013.

Loin d’être une contrainte, le recours à l’architecte constitue une véritable garantie de qualité pour le consommateur. C'est en effet un professionnel qualifié et diplômé par l’État ; il établit des actes professionnels conformes au code de déontologie de la profession, il est transparent sur ses honoraires, qui sont clairement identifiés, et il est indépendant vis-à-vis des entreprises de construction.

Il convient de souligner ici que le marché de la maison individuelle est largement tenu par des professionnels moins qualifiés et respectueux des dispositions réglementaires et législatives.

En 2013, les services du ministère de l’économie et des finances eux-mêmes ont ainsi relevé 40 % d’infractions dans les pratiques commerciales des constructeurs de maisons individuelles, avec des maisons ne correspondant pas aux modèles présentés, des indications de prix sans précisions techniques et une certaine opacité quant à la répartition entre les coûts commerciaux, les coûts de conception, les coûts de suivi de chantier, les coûts de construction et le coût du foncier.

C’est pourquoi, monsieur le ministre, nous vous demandons si vous pouvez nous donner des garanties quant à la modification consistant à ramener à 150 mètres carrés le seuil de recours obligatoire à un architecte.

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