Le premier amendement prévoit une compensation des pertes de recettes par l'État, et second, par la dotation globale de fonctionnement.
Ces amendements prévoient la compensation intégrale des pertes de recettes subies par les collectivités locales qui sont visées par la politique de la ville au titre de l'exonération de taxe sur les propriétés bâties dont bénéficient les logements locatifs sociaux pendant quinze ans, s'agissant cette fois non plus seulement du flux, c'est-à-dire les nouveaux logements sociaux, mais aussi des logements qui existent sur le territoire et qui pèsent sur les recettes des collectivités locales.
Afin que les collectivités locales les plus fragiles et les plus sollicitées en termes de services au quotidien ne soient pas financièrement pénalisées par la construction de logements locatifs sociaux, il est donc proposé de prévoir une compensation intégrale tout au long de la période, tant pour les logements sociaux achevés il y a moins de quinze ans que pour les logements construits après la date de promulgation de la présente proposition de loi.
Cette compensation intégrale concernerait les communes dont une partie du territoire est constituée d'une ZUS. Ces dernières semaines nous ont une fois de plus montré la fragilité de ces territoires, la souffrance de leurs habitants et l'impuissance de leurs élus.
Malgré leur engagement et leur capacité d'imagination, ces élus manquent en fait souvent des capacités d'investir au quotidien sur des actions.
La dotation de solidarité urbaine a été conçue pour compenser les disparités fiscales criantes et pour aider les grands territoires solidaires du logement social à organiser des actions au quotidien portées soit par des services communaux, soit par des associations missionnées par les maires.
Jamais dans les débats relatifs à la création de la DSU il n'a été fait référence à une compensation de l'exonération de la TFPB, et il n'en a d'ailleurs pas davantage été question l'an dernier lorsque la DSU a été revalorisée.
La DSU n'a pas été conçue pour compenser les pertes de recettes liée à la TFPB.
L'explosion des banlieues est aussi un appel au secours qui exprime l'attente d'une prise en compte des fragilités humaines et des handicaps qui souvent se cumulent sur ces territoires. Face à cette attente, les communes, trop seules, consacrent leurs rares disponibilités financières aux réponses du court terme, réponses qu'elles pourraient « muscler » si on leur donnait, tout simplement, leur dû.
Si l'on met en regard les cartes des quartiers où des événements douloureux se sont déroulés au cours des dernières semaines qu'ont publiées les différents grands journaux et la liste des communes sur lesquelles la non-compensation par l'État de l'exonération de TFPB pèse le plus, on constate une certaine corrélation.
Ainsi, en 2004, Trappes a perdu, à 2 000 euros près, un million d'euros. Quant à la ville de Villeurbanne, monsieur le président du conseil général du Rhône, elle a perdu plus de un million d'euros. Vaulx-en-Velin a perdu 300 000 euros, Grenoble, 1 million d'euros, et Paris 7, 3 millions d'euros.
D'autres communes, qui ont construit moins de logements sociaux, ont perdu beaucoup moins : sans faire de focalisation sur une ville dont on a souvent parlé, j'indique que Neuilly n'a perdu que 22 000 euros ; quant au Raincy, il n'a perdu que 30 000 euros. La différence est sensible...
Le manque à gagner pèse d'autant plus que vous avez joué par le passé le jeu de la solidarité.
Nombre de villes moyennes perdent, je l'ai dit, environ un million d'euros. Un exemple très précis vous permettra de vous représenter ce qu'une commune peut faire au quotidien avec un million d'euros.
En termes de prévention, c'est un service de correspondants de nuit de douze équivalents temps plein.
En termes de lien social, c'est, en pleine ZUP, un lieu ouvert de dix-huit heures à minuit animé par des travailleurs sociaux qui accueillent des jeunes en déshérence ; ce sont, dans le même quartier, trois centres socioculturels.
En termes de sport, c'est le développement du lien social à travers le soutien d'un club qui compte 450 jeunes adhérents.
En termes culturels, c'est un équipement culturel reconnu par la région Rhône-Alpes qui dispense une formation professionnelle qualifiante ; c'est une maison des jeunes et de la culture située en centre-ville qui programme des manifestations culturelles dans le quartier ; c'est le développement des musiques actuelles et la programmation de spectacles.
En termes d'emplois, c'est un point d'information et d'accompagnement des personnes en recherche d'emploi.
En termes d'action sociale, ce sont les actions menées avec des associations en matière d'alphabétisation et de lutte contre l'illettrisme.
Enfin, puisque nous en avons parlé, en termes de gestion urbaine de proximité, c'est le complément d'entretien au travers des régies de quartier.
Tout cela coûte un million d'euros à la collectivité communale, qui mobilise des partenaires : agglomération, département, région, État et même le fonds social européen.
Comme le manque à gagner dû à la non-compensation par l'État de la TFPB s'étale sur quinze ans, c'est quinze fois un million d'euros, soit quinze fois l'ensemble de ces actions du quotidien dans un quartier de 15 000 habitants, qu'il faut prendre en compte !
Après les événements des dernières semaines, on est en droit de se demander s'il n'est finalement pas légitime que l'État redonne à ces territoires les richesses créées qu'un décret condamnable n'a pas permis de leur distribuer, ce qui aurait peut-être permis d'éviter le résultat auquel nous sommes parvenus dans les quartiers.
Si je fais ce plaidoyer, c'est parce que l'enjeu est de taille et qu'il me semble que le Sénat pourrait peut-être faire preuve d'ouverture pour répondre concrètement aux attentes des habitants de ces quartiers, et notamment des ZUS.