L'analyse que vient de faire notre collègue François Fortassin, que nous avons écouté avec une attention soutenue, aura marqué ce débat sur le sujet primordial du logement. Monsieur le ministre, je vais le reprendre sous un autre angle dont il m'arrive de désespérer que le Gouvernement l'envisage avec le sérieux nécessaire.
Il existe deux façons de remédier à la crise territoriale qui engendre une crise sociale. Il y a une intervention plus massive et plus sélective de l'État, mais il y a aussi une autre répartition des ressources entre les collectivités territoriales, qui s'appelle la péréquation. Depuis qu'elle est inscrite dans la Constitution, elle est bannie de toutes les propositions qui nous sont faites par le Gouvernement et refusée, hélas ! par une étroite majorité de cette assemblée.
Or, je voudrais attirer votre attention, monsieur le ministre, mes chers collègues, sur le fait que, si l'article 55 de la loi SRU, si les fameux 20 % de logements sociaux manquants dans une liste maintenant bien connue ont eu tellement d'impact dans l'opinion publique, c'est qu'il est enfin apparu à des gens qui ne s'intéressaient pas forcément à ces questions que l'inégalité de ressources entre les individus était considérablement aggravée par l'inégalité des ressources entre les collectivités territoriales. Ces mêmes collectivités territoriales qui ont les habitants les plus pauvres sont, bien évidemment, elles-mêmes très pauvres.
J'ai organisé ici même, il y a un an, un colloque sur la péréquation. J'y avais invité de grands universitaires français et étrangers spécialistes de cette question. J'ai eu la surprise, moi qui m'intéresse depuis de longues années à ces questions, d'entendre le meilleur spécialiste européen de la péréquation nous dire, démonstration à l'appui, que la différence de ressources entre les communes allait de 1 à 8 500.
Aussitôt après, il a dit qu'il s'agissait de ratios qui ne valaient que par l'ordre de grandeur et qu'il fallait distinguer, par exemple, les communes de 30 habitants et les grandes villes de notre pays. Entre les unes et les autres, on ne peut pas vraiment comparer. Mais, depuis, ces chiffres tournent dans ma tête, et je ne cesse d'y repenser.
Je voudrais maintenant tempérer le propos de mon collègue et ami François Fortassin. Nous avons pu exposer ces sujets en recueillant l'attention du ministre, plutôt d'ailleurs que du Gouvernement, sans haussements d'épaules ni ricanements, comme j'en ai trop souvent vu par le passé.
Il me semble que se manifeste un début de prise de conscience. Nous sommes sur le bon chemin, mais il faut faire attention, car la situation autour de nous est si grave qu'il ne faut pas trop tarder, sinon pourraient se produire de nouveaux événements graves au terme desquels l'état d'urgence sera décrété, non pour trois mois, mais en permanence.