Dans la suite des interventions de Brigitte Gonthier-Maurin et Michel Billout, je tiens à intervenir sur cet article 47, qui vise à fusionner l’entreprise nationale d’armement Nexter avec l’entreprise allemande KMW.
L’État et cette entreprise familiale allemande, qui connaît d’ailleurs quelques soucis, seraient ainsi associés et détiendraient à parts égales 50 % d’une nouvelle entreprise appelé NEWCO.
Notre crainte est de voir Nexter abandonner son rôle initial, qui était de répondre aux besoins spécifiques de défense de notre pays, pour s’aligner sur le marché international des exportations d’armes.
Alors que l’État ne sera plus majoritaire, à l’issue de la fusion, comment pourra-t-il exercer pleinement un contrôle sur les exportations d’armes ? Cette privatisation et cette fusion ne précèdent-elles pas l’entrée de nouvelles entreprises dans cette alliance industrielle ? Dans ce cas, si l’État est affaibli, comment pourra-t-il s’assurer que nos armes ne tombent pas dans de mauvaises mains, sous la pression de considérations financières ? Les armes sont tout de même loin d’être des marchandises comme les autres !
Un autre sujet d’inquiétude tient à la similitude entre les gammes de produits de KMW et de Nexter. Les deux gammes peuvent quasiment être calquées l’une sur l’autre. Dans le segment des chars lourds, Nexter a le Leclerc, KMW, le Leopard ; dans le domaine des véhicules d’accompagnement pour l’infanterie, le VBCI de Nexter est en concurrence avec le Boxer de KMW ; dans le domaine des véhicules plus légers et fortement protégés, l’Aravis de Nexter fait face au Dingo de KMW.
Cette opposition frontale entre les matériels phare des deux entreprises met en péril les emplois et les sites.
Il paraît clair qu’il faudra choisir entre ces produits pour éviter de dupliquer les frais liés aux développements complémentaires et aux traitements de l’obsolescence des matériels. Quelles seront alors les conséquences pour les activités des bureaux d’études et de fabrication ? Comment seront partagés les futurs programmes ?
Cette fusion aura également des impacts significatifs pour les fournisseurs et les sous-traitants.
Les fournisseurs français risquent, en effet, plus gros que leurs homologues allemands, car ces derniers sont avantagés en termes de volume : on sait combien les entreprises allemandes soignent leurs entreprises industrielles. Ainsi, KraussMaffei a écoulé plus de 4 000 chars lourds Leopard, à comparer aux 600 Leclerc.
De plus, les fournisseurs pourraient être mis plus systématiquement en concurrence. Typiquement, Renault Trucks Defense et Mercedes sont les deux sources pour les véhicules porteurs du canon Caesar de Nexter Systems. Demain, il n’y en aura peut-être plus qu’un…
C’est donc en raison des menaces claires et dangereuses sur l’emploi et parce que nous sommes opposés à la privatisation de notre industrie de défense, qui fait partie de notre souveraineté, que nous nous opposons à la fusion entre Nexter et KMW.