La séance, suspendue à dix-neuf heures cinquante, est reprise à vingt et une heures quarante-cinq, sous la présidence de M. Jean-Pierre Caffet.
La séance est reprise.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 40 bis B.
(Non modifié)
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, toutes mesures relevant du domaine de la loi visant à :
1° Modifier le chapitre III du titre II du livre II du code monétaire et financier, afin notamment de renforcer la protection des souscripteurs et de préciser les obligations des émetteurs de bons de caisse, et à prendre toute mesure de coordination rendue nécessaire ;
2° Adapter les dispositions relatives au financement participatif et celles des chapitres Ier et III du titre Ier du livre II, de l’article L. 312-2 et de la section 2 du chapitre Ier du titre Ier du livre V du code monétaire et financier, notamment pour permettre l’intermédiation des bons de caisse définis au chapitre III du titre II du livre II ou faciliter l’intermédiation des titres de créances dans le cadre du financement participatif.
Les amendements n° 461, 510 et 810 ne sont pas soutenus.
Je mets aux voix l'article 40 bis B.
L'article 40 bis B est adopté.
(Supprimé)
(Non modifié)
I. – L’article L. 144-1 du code monétaire et financier est ainsi modifié :
1° Au deuxième alinéa, après la première occurrence du mot : « financement, », sont insérés les mots : « aux entreprises d’assurance, aux mutuelles et aux institutions de prévoyance qui investissent dans des prêts et titres assimilés dans les conditions prévues, respectivement, par le code des assurances, le code de la mutualité et le code de la sécurité sociale, à certaines sociétés de gestion » ;
2° À la fin de l’avant-dernier alinéa, les mots : « de ces entreprises » sont remplacés par les mots : « des entités mentionnées aux deuxième et troisième alinéas lorsqu’elles consentent des prêts, investissent dans des prêts et titres assimilés ou effectuent des opérations d’assurance-crédit ou de caution » ;
3° Au dernier alinéa, les mots : « de ces entreprises » sont remplacés par les mots : « des entreprises d’assurance mentionnées au troisième alinéa » ;
4° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret définit les sociétés de gestion mentionnées au deuxième alinéa et fixe les modalités d’application des deuxième et quatrième alinéas aux entreprises d’assurance, aux mutuelles et aux institutions de prévoyance et à ces sociétés de gestion. »
II. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi afin d’aménager les dispositifs de suivi du financement des entreprises mis en place par la Banque de France et l’Autorité des marchés financiers.
L'amendement n° 1713, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 2
1° Remplacer les mots :
après la première occurrence du mot : « financement, »
par les mots :
après les mots : « sociétés de financement, »
2° Remplacer les mots :
à certaines sociétés de gestion
par les mots :
à des sociétés de gestion définies par décret
II. – Alinéa 6
1° Supprimer les mots :
définit les sociétés de gestion mentionnées au deuxième alinéa et
2° Remplacer les mots :
à ces sociétés de gestion
par les mots :
aux sociétés de gestion
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Avis favorable.
L'amendement est adopté.
L'article 40 bis est adopté.
(Non modifié)
Au premier alinéa de l’article L. 511-6 du code monétaire et financier, après le mot : « réassurance, », sont insérés les mots : « ni les institutions de prévoyance régies par le titre III du livre IX du code de la sécurité sociale, » et les mots : « pour les opérations visées au e du 1° de l’article L. 111-1 dudit code » sont supprimés. –
Adopté.
Je rappelle que l’article 40 ter, appelé par priorité, a déjà été examiné.
L'amendement n° 1340 rectifié bis, présenté par M. Delattre, Mme Imbert, MM. Carle, de Nicolaÿ, Laufoaulu, Vasselle, Mouiller, J. Gautier, D. Laurent et Mayet, Mme Micouleau, M. Bouchet, Mme Lamure, MM. Bignon, Pintat, Milon et Calvet, Mme Mélot, MM. G. Bailly, Pierre, Doligé et Laménie, Mme Gruny, MM. Houel et Perrin, Mme Primas et MM. Leleux, Trillard, P. Dominati et Malhuret, est ainsi libellé :
Après l’article 40 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Les troisième et quatrième alinéas de l’article L. 131-6 du code de la sécurité sociale sont supprimés.
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Sophie Primas.
Cet amendement vise à supprimer l’assujettissement aux charges sociales des dividendes versés aux dirigeants des sociétés à responsabilité limitée, ou SARL.
La loi du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 a élargi l’assiette des cotisations et contributions sociales aux gérants majoritaires de SARL soumis au régime de travailleur non salarié.
La fraction des revenus distribués et des intérêts payés qui excède 10 % du capital social, des primes d’émission et des sommes versées en compte courant doit être réintégrée dans l’assiette des cotisations sociales sur les revenus d’activité des gérants majoritaires dirigeant une société assujettie à l’impôt sur les sociétés.
Les dividendes ne sont pas un salaire ; ils rémunèrent la prise de risque. Ils sont donc liés aux résultats de l’entreprise, qui sont déjà eux-mêmes soumis à l’impôt.
Un tel assujettissement est injuste, car il y a double imposition, et contraire à l’esprit d’entreprendre.
La commission demande le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
Un amendement identique a déjà été adopté par le Sénat lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, ou PLFSS, pour 2015, mais contre l’avis de la commission des affaires sociales. Le coût de la mesure est évalué entre 75 millions d’euros et 100 millions d’euros par an, alors que le régime social des indépendants, le RSI, est structurellement déficitaire. Un tel amendement aurait plus sa place en loi de financement de la sécurité sociale.
Néanmoins, nous sommes dans un contexte de grogne des travailleurs indépendants. Le Gouvernement doit nous indiquer les mesures qu’il compte prendre pour les rassurer. L’article 12 bis, qui a été introduit à l’Assemblée nationale lors de l’examen du PLFSS pour 2015, prévoyait d’étendre l’assiette des cotisations sociales aux dividendes versés aux dirigeants majoritaires des sociétés anonymes, les SA, et des sociétés par actions simplifiées, les SAS.
Le Gouvernement avait annoncé vouloir mener une réflexion sur le seuil des 10 %. Nous souhaiterions savoir où cela en est aujourd’hui.
Le Gouvernement demande également le retrait de cet amendement. À défaut, l’avis serait défavorable.
La réflexion est actuellement menée au niveau interministériel. Le député Fabrice Verdier a été chargé d’une mission parlementaire sur ces sujets. Des propositions devraient être formulées d’ici à l’été prochain.
Non, je le retire ; il a effectivement peut-être plus sa place en loi de financement de la sécurité sociale.
Cela étant, madame la corapporteur, avec toute l’affection que j’ai pour vous, je ne peux pas entendre votre argument selon lequel il faudrait imposer deux fois les mêmes personnes sous prétexte que le RSI est déficitaire !
(Supprimé)
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 818 rectifié quinquies, présenté par M. Gabouty, Mme Loisier, MM. Guerriau, Médevielle, Kern et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la possibilité pour chaque région française de créer et d’animer une place de marché de valeurs mobilières avec une cotation régulière des titres émis par les sociétés ou collectivités inscrites, présentes ou représentées sur la place.
Ce rapport évalue la possibilité que :
- Le conseil régional gère cette place de marché ;
- Ces places de marché assurent la cotation des valeurs mobilières, en actions ou en obligations, émis par les sociétés ou collectivités inscrites sur la place sur la base d’un règlement validé par l’Autorité des marchés financiers ;
- La gouvernance de la place de marché soit coordonnée par le conseil régional. Sa gestion est assurée par un opérateur, après une mise en concurrence auprès des professionnels spécialisés ;
- L’animation de la place de marché soit organisée de façon collégiale avec la direction régionale de la Banque publique d’investissement, la Caisse des dépôts et consignations, les banques privées régionales, les organismes consulaires et tout autre opérateur agréé en mesure de participer à l’animation du marché.
La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.
Cet amendement a pour objet d'améliorer le financement des entreprises, notamment des PME régionales. Nous proposons la mise en place des bourses régionales, créant ainsi un outil de circuits courts de financement régional en actions ou en obligations. Cela permettra de mutualiser des emprunts, en partenariat notamment avec l'Agence France Locale.
Le mécanisme envisagé viendrait consolider les nouvelles compétences des régions en matière de développement économique, que le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, ou NOTRE, tend à définir.
Les régions et les métropoles pourraient en assurer l'animation, avec l'aide de la Caisse des dépôts et consignations et de la Banque publique d'investissement, en partenariat avec un acteur professionnel, tandis que la régulation serait assurée par l'Autorité des marchés financiers.
L'amendement n° 304 rectifié quater, présenté par MM. Gabouty et Médevielle, Mme Loisier, MM. Guerriau, Kern et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la création de plates-formes de cotations régionales ou de bourses régionales dans chaque métropole régionale, en hexagone et dans les outre-mer, afin de fournir un outil de circuits courts de financement régional.
La parole est à M. Jean-Marc Gabouty.
L'amendement n° 562 rectifié quater, présenté par M. Guillaume, Mme Bricq, MM. Lalande, Patient, Chiron, Yung, Botrel, Raynal, Vincent, Raoul, Boulard, F. Marc et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la création de plates-formes de cotations régionales ou de bourses régionales dans chaque métropole régionale, en hexagone et dans les outre-mer, afin de fournir un outil de circuits courts de financement régional.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
La commission spéciale a érigé en principe le fait de ne pas encombrer la loi de rapports inutiles. Nous y souscrivons pour partie.
Toutefois, comme je l’ai indiqué, certains rapports sont utiles. C’est le cas de celui que nous demandons maintenant.
Il n’existe actuellement qu’une seule bourse régionale, celle de Lyon. Il faut tout de même vérifier ce que l’on appelle les « effets de place ».
Les nouvelles mesures de décentralisation, notamment la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles, ou loi MAPTAM, et la loi NOTRE, qui est en cours d’examen, donnent à la région un rôle de chef de file économique.
Or l’économie, c’est aussi le financement des entreprises. Avec la création des grandes régions et des métropoles, nous devons pouvoir disposer d’éléments sur les bourses régionales. Je pense d'ailleurs que nous sommes d’accord sur ce point, en tout cas avec M. Gabouty.
Les bourses régionales peuvent être un outil formidable pour relocaliser des places financières en agrégeant les acteurs des territoires, le Sénat étant, je le rappelle, la chambre des territoires.
À mon sens, un tel rapport se justifie vraiment. Je ne défendrai pas tous les rapports, mais il y en a deux auxquels je tiens, dont celui-là !
La commission a pris le parti de supprimer toutes les demandes de rapport au Gouvernement. Nous sollicitons donc le retrait de ces trois amendements. À défaut, l’avis serait défavorable.
Certes, il s’agit d’un vrai sujet. L’intérêt pour ces bourses est tout à fait légitime. Nous savons que les PME et les entreprises de taille intermédiaire, ou ETI, ont besoin de fonds propres. La mobilisation de l’épargne régionale au service des PME et des ETI locales, ainsi que la création de circuits courts de financement sont des idées à creuser, voire à mettre en œuvre, comme c’est le cas à Lyon. Le Sénat peut d’ailleurs y travailler. Dès lors, pourquoi demander un rapport au Gouvernement alors que la Haute Assemblée est tout à fait légitime pour se saisir de la question ?
Au demeurant, monsieur Gabouty, vos deux amendements sont exclusifs l’un de l’autre ; en tout état de cause, nous ne pourrions en adopter qu’un seul.
Rendons à César ce qui appartient à César : ces propositions sont issues d’un amendement adopté à l’Assemblée nationale. L’auteur de cette initiative, le député Jean-Christophe Fromentin, tenait à mettre le sujet en lumière, et nous partageons cette volonté.
Une première bourse régionale connaît ses premiers succès à Lyon ; elle a été largement promue. Nous pourrions avancer en ce sens, soit par la remise d’un rapport, soit par l’introduction de quelques dispositions dans le texte, si nous voulons aller plus loin d’ici à la nouvelle lecture à l’Assemblée nationale.
Cela étant, l’amendement n° 818 quinquies m’inspire une réserve rédactionnelle. Le fait de proposer que les conseils régionaux assurent le pilotage revient, d’une certaine manière, à préempter l’organisation du dispositif. Le rôle d’animation peut être assuré par les chambres de commerce, comme le montre l’exemple lyonnais. La rédaction choisie me paraît donc quelque peu restrictive.
C’est pourquoi je vous suggère de retirer cet amendement au bénéfice de l'amendement n° 562 rectifié quater ou de l’amendement n° 304 rectifié quater, auxquels le Gouvernement est favorable.
Monsieur Gabouty, l'amendement n° 818 rectifié quinquies est-il maintenu ?
Non, je le retire, monsieur le président.
En revanche, je maintiens l'amendement n° 304 rectifié quater, qui est presque identique à l’amendement n° 562 rectifié quater, présenté par Mme Bricq.
L’amendement n° 818 rectifié quinquies est retiré.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Le texte initial de notre amendement prévoyait un délai de trois mois. On nous a fait remarquer en commission spéciale que c’était peut-être un peu court. Nous avons donc décidé de le porter à neuf mois. Mais si le Sénat opte pour un délai de trois mois, nous n’y verrons aucun inconvénient.
Madame la corapporteur, la remise de rapports du Gouvernement n’est en rien contradictoire avec le travail sénatorial. Une commission qui décide de constituer un groupe de travail s’adresse en premier lieu au Gouvernement, qui dispose d’informations de nature à étayer la recherche des parlementaires.
Le dépôt d’un rapport du Gouvernement ne représente donc pas une entrave pour les travaux du Sénat. Au contraire, il me paraît tout à fait appréciable de pouvoir s’appuyer sur un rapport pour mener des investigations, notamment sur bourse régionale créée à Lyon.
À cet égard, le Sénat peut bénéficier de l’expérience d’Élisabeth Lamure, présidente de la délégation sénatoriale aux entreprises, de celle de Gérard Collomb, président de la métropole, ou de celle de Michel Mercier, qui connaît très bien le département, du moins ce qu’il en reste. Nous pouvons avancer à partir d’un travail de récolement des informations du Gouvernement.
Je suis donc saisi d’un amendement n° 304 rectifié quinquies, présenté par MM. Gabouty et Médevielle, Mme Loisier, MM. Guerriau, Kern et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, et ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la création de plates-formes de cotations régionales ou de bourses régionales dans chaque métropole régionale, en hexagone et dans les outre-mer, afin de fournir un outil de circuits courts de financement régional.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Dans nos territoires, nous avons besoin de boucles locales de financement pour soutenir les entreprises et les collectivités locales.
Certes, je suis par principe réservé sur les demandes de rapport au Gouvernement ; beaucoup de demandes ont d’ailleurs été rejetées.
Toutefois, dans le cas présent, l’initiative de nos collègues me semble particulièrement opportune. Nous avons besoin de l’outil de financement que sont les bourses régionales, d’autant que le périmètre des régions est amené à s’étendre de manière importante.
L’amendement est adopté.
En conséquence, l’article 40 quater est rétabli dans cette rédaction, et l’amendement n° 562 rectifié quater n’a plus d’objet.
Section 3
Innover
(Non modifié)
La quatrième phrase du premier alinéa de l’article L. 111-6 du code de la recherche est complétée par les mots : «, et à ce qu’une information soit apportée aux membres de la communauté scientifique dans les domaines qui touchent aux mondes de l’entreprise et de l’administration ».
L’amendement n° 46, présenté par Mmes Assassi, Gonthier-Maurin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
L’ajout de la mention visée au code de la recherche résulte d’un amendement adopté par l’Assemblée nationale, sur l’initiative notamment du président de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, l’OPESCT, le député Jean-Yves Le Déaut.
Nous pourrions reprendre ici le débat qui nous a opposés au moment de l’examen de la loi du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, dite loi Fioraso, et de l’article relatif à la définition d’une stratégie nationale de recherche.
L’article 41 A reprend l’idée ressassée de la « méconnaissance » par la communauté scientifique et les « chercheurs » des codes et usages du monde économique. Il s’agit d’une vision pour le moins caricaturale des chercheurs français, qui seraient « enfermés dans leurs labos » !
En tant que rapporteur de la commission d’enquête sur le crédit d’impôt recherche, je peux témoigner que cette vision ne correspond nullement à la réalité. Au contraire ! Nombre d’exemples en France montrent l’existence de solides collaborations et d’un partage quotidien des cultures entre acteurs de terrain, chacun dans son domaine de compétence. Ce travail s’effectue dans le respect des pratiques de chacun, et non en essayant d’inféoder l’activité des chercheurs au monde de l’entreprise. Quelques jours de formation ne sauraient s’y substituer pour les professionnels concernés par des applications de la recherche fondamentale, comme certaines innovations à débouchés de marché.
De plus, une telle proposition ignore l’état exsangue de nos universités et de nos centres de recherche publics, qui peinent déjà à assurer correctement leurs missions faute de crédits suffisants et qui ont vu les budgets dévolus à la formation continue fondre comme neige au soleil. Pourtant, c’est sur ces budgets que les auteurs du dispositif envisagé souhaitent s’appuyer !
L’amendement traduit une vision très réductrice de la recherche. Bien d’autres domaines scientifiques existent ; ils sont tout aussi importants, mais portent sur des questions qui ne sont pas liées aux entreprises. Cela peut d’ailleurs être le cas dans certains laboratoires qui travaillent sur des sujets à potentiel commercial. Or, dans toute l’Europe, des départements de lettres, de langues, de philosophie et d’autres disciplines fondamentales pour la transmission des connaissances disparaissent, du fait de leur moindre engagement dans des domaines liés aux marchés
Cet accent mis sur les « priorités des entreprises », dont était fortement empreinte la loi Fioraso – elle a été suivie de près par l’initiative de notre collègue Jean-Yves Le Déaut – ressemble de plus en plus à une injonction adressée à la recherche publique pour qu’elle se recentre sur des activités potentiellement marchandes. Nous ne nions pas la nécessité des relations entre le monde scientifique et les entreprises ; mais cela ne peut pas devenir l’unique visée de la recherche publique. Je le rappelle tout de même, la mission fondamentale des personnels des organismes de recherche est de faire non pas du commerce, mais de la recherche, en vue de l’élévation du niveau des connaissances !
De la subordination à l’impératif économique découle nécessairement une hiérarchisation des savoirs et des recherches. Une telle vision privilégie la recherche appliquée au détriment de la recherche fondamentale et marginalise les sciences humaines et sociales.
En conséquence, nous proposons la suppression de cet article 41 A, qui a été adopté malgré un avis défavorable de la commission, …
… pour, selon les termes alors utilisés, le « message politique qu’il permettrait de faire passer ». Voilà qui avait le mérite de la clarté ! Mais cela justifie bien notre demande de suppression.
Ma chère collègue, la commission spéciale n’a pas émis d’avis défavorable sur l’article. Je me souviens très bien de la position que j’avais suggéré d’adopter.
Dans un premier temps, sans forcément partager les craintes que vous exprimez, la commission avait hésité à supprimer l’article. Elle s’interrogeait sur la pertinence de l’information que pourrait recevoir la communauté scientifique sur les mondes de l’administration et de l’entreprise.
Quoi qu’il en soit, la commission émet un avis de sagesse sur cet amendement, cette sagesse pouvant même se traduire par un vote positif.
L’amendement est adopté.
(Supprimé)
I. – Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° L’article L. 423-1 est ainsi rédigé :
« Art. L. 423 -1. – Les conseils en propriété industrielle sont autorisés, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État, à recourir à la publicité ainsi qu’à la sollicitation personnalisée. » ;
2° Aux premier et second alinéas de l’article L. 811-1, la référence : « L. 422-13 et » est supprimée ;
I bis (nouveau). – Après les mots : « n’est », la fin du second alinéa de l’article 66-4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques est ainsi rédigée : « applicable ni aux avocats ni aux conseils en propriété industrielle qui, en toutes matières, restent soumis respectivement à l’article 3 bis de la présente loi et à l’article L. 423-1 du code de la propriété intellectuelle. »
II. –
Supprimé
L’amendement n° 47, présenté par Mmes Assassi, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
L’article 41 du projet de loi vise à autoriser les conseils en propriété industrielle à recourir à la publicité et à la sollicitation personnalisée.
En nous fondant sur le principe de la prohibition du démarchage en matière de prestations juridiques, nous souhaitons la suppression de cet article. L’autorisation du recours à la publicité est justifiée par un arrêt du 5 avril 2011 de la Cour de justice de l’Union européenne sur l’interdiction du démarchage aux experts-comptables, qui a conclu à la contrariété de cette interdiction générale avec la directive « Services ».
Le Gouvernement a déjà ouvert une brèche dans ce principe, en introduisant dans la loi du 17 mars 2014 relative à la consommation une exception pour les avocats, ce que nous regrettons. Le principe de publicité demeure néanmoins prohibé en droit et punissable de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 150 000 euros, sauf pour les avocats, qui peuvent recourir à une sollicitation personnalisée.
Au motif que d’autres professions relevant de la directive « Services » sont, elles aussi, autorisées à pratiquer le droit à titre d’activité principale, comme les conseils en propriété industrielle, l’article vise donc à étendre cette exception, afin de favoriser l’activité des conseils en propriété industrielle auprès des entreprises.
Cet article, qui est sans doute le fruit d’un lobbying efficace et sans enjeux fondamentaux, se fonde sur une directive que nous contestons et remet en cause un principe du droit que nous ne souhaitons pas abandonner. Nous en demandons donc la suppression.
Ma chère collègue, je salue l’honnêteté de votre analyse juridique.
Comme vous l’avez indiqué, la Cour de justice de l’Union européenne pourrait sanctionner la France si nous adoptions à votre amendement. Elle a déjà condamné notre pays pour avoir interdit la possibilité du démarchage aux experts-comptables.
Lorsque nous avions étendu la directive aux avocats, notre collègue Thani Mohamed Soilihi avait d’ailleurs souligné que notre travail risquait d’être imparfait si nous n’étendions pas la directive à d’autres professions.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
Au demeurant, je me permets de noter que tout irait mieux si nous avions un code de l’accès au droit. Je vous invite donc à donner suite aux dispositions que le Sénat a votées à cet égard, monsieur le ministre.
Je ne voterai pas cet amendement.
Le travail des conseils en propriété industrielle est de nature bien moins juridique que scientifique. Les professionnels proposent aux entreprises de les aider à protéger leurs recherches, qu’il s’agisse de dessins, de modèles ou du design d’objets fabriqués. Une telle démarche n’est pas spontanée ; elle nécessite un certain nombre de connaissances, notamment scientifiques, par exemple en physique, en chimie…
L’article 41 me semble donc plutôt positif pour nos PME, qui sont relativement démunies en la matière. Les conseils en propriété industrielle les aideront à déposer davantage de brevets et à se protéger, en France comme à l’étranger.
L’amendement n’est pas adopté.
L’article 41 est adopté.
(Supprimé)
L’amendement n° 563 rectifié bis, présenté par M. Guillaume, Mme Bricq, MM. Lalande, Patient, Chiron, Yung, Botrel, Raynal, Vincent, Raoul, Boulard, F. Marc et les membres du groupe socialiste et apparentés et apparentés, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le e du 1° de l’article L. 432-2 du code des assurances est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er octobre de chaque année, un rapport d’évaluation sur l’application du présent e ; ».
La parole est à M. Roland Courteau.
La jurisprudence de la commission spéciale sur les rapports semble avoir été, encore une fois, appliquée avec un peu trop de rigidité.
Le problème que nous soulevons est d’une ampleur suffisamment importante pour que le Parlement s’en saisisse.
Comme vous le savez, un dispositif de soutien aux exportations des entreprises a été créé en loi de finances rectificative pour 2013. Une garantie est accordée par l’État à la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur, la COFACE, pour les opérations de réassurance crédit de court terme. À ce titre, la COFACE est dans son bon droit en renégociant unilatéralement certains de ces contrats ; il s’agit même de sa partie publique.
Toutefois, plusieurs responsables de PME de nos territoires ont signalé un nombre extrêmement important de renégociations. Il serait donc étrange que le Parlement ne se sente pas concerné et refuse de contrôler le phénomène.
Nous demandons au Gouvernement un rapport d’évaluation. Je ne crois pas qu’une question orale suffise à traiter un sujet aussi préoccupant pour un grand nombre d’acteurs économiques de nos territoires. Une telle requête avait d’ailleurs déjà été formulée par le précédent rapporteur général du budget à l’Assemblée nationale.
L’article 41 bis A, qui a été supprimé, visait à obtenir du Gouvernement un rapport annuel sur une garantie publique octroyée à la COFACE sur la réassurance crédit de court terme.
Nous avons déjà rappelé la position de principe de la commission spéciale sur les demandes de rapports. Je n’y reviens donc pas.
Mme Nicole Bricq proteste.
En outre, le Gouvernement a annoncé que les garanties publiques à l’export pourraient désormais être gérées par la BPI, et non plus par la COFACE. Le dispositif juridique visé par l’amendement pourrait très bien avoir été modifié d’ici à l’entrée en vigueur de la présente loi : le rapport se résumerait alors à une page blanche !
Vous l’aurez compris, la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.
L’amendement n° 563 rectifié bis est retiré.
En conséquence, l’article 41 bis A demeure supprimé.
(Supprimé)
(Supprimé)
(Supprimé)
L'amendement n° 258, présenté par MM. Guillaume et Yung, Mme Bricq, MM. Bigot, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Rétablir cet article dans la rédaction suivante :
Le Gouvernement remet au Parlement, avant le 1er janvier 2016, un rapport relatif à l’opportunité et aux conditions de la spécialisation en droit de la propriété industrielle d’un petit nombre de magistrats.
La parole est à M. Richard Yung.
Cet amendement concerne la spécialisation des juges en propriété industrielle ou intellectuelle. Le sujet n’est pas nouveau ; nous en avions déjà discuté à de nombreuses reprises en commission des lois.
En effet, mon cher collègue. Nous les avions intégrées dans la première version du texte sur la contrefaçon.
Mais nous nous heurtons au ministère de la justice et au Conseil supérieur de la magistrature.
Nous sommes sur une matière compliquée. Seulement dix tribunaux de grande instance traitent des dossiers de propriété industrielle en France. D’ailleurs, c’est trop ; il suffirait d’un seul.
Nous avions aussi envisagé une certaine spécialisation des juges. La discipline exige de la pratique. Il faut avoir été juge pendant de nombreuses années et avoir traité de cas autres que les divorces à Romorantin-Lanthenay !
Exclamations.
Ce n’est pas parce qu’un juge est à Romorantin-Lanthenay qu’il est mauvais !
Mais je maintiens qu’il faut avoir de la pratique.
Dans de nombreux autres pays, les juges en propriété industrielle sont spécialisés ; il existe même des juges techniciens en Allemagne. Et tous ces juges, techniciens ou non, restent en place pendant dix ou quinze ans. Du coup, nos entreprises saisissent plutôt les tribunaux allemands, qui rendent une jurisprudence stable et de haute qualité.
Certes, nous connaissons l’hostilité de la Chancellerie et du Conseil supérieur de la magistrature. Mais, à nos yeux, il serait bon d’avoir en France des juges formés et restant longtemps en place.
M. François Pillet, corapporteur. Les auteurs de cet amendement demandent un rapport sur « l’opportunité » et les « conditions de la spécialisation » de certains magistrats. Dans ce cas, pourquoi se cantonner au droit de la propriété industrielle ? Et d’ailleurs, pourquoi se limiter aux seuls magistrats ?
Souriressur les travées de l'UMP.
La commission spéciale s’en tient à sa jurisprudence et reste favorable à la suppression de l’ensemble des demandes de rapports.
Au demeurant, il n’est même pas certain que le sujet mériterait un rapport de la commission des lois. Une simple question d’actualité du jeudi, voire une question orale du mardi matin, avec une réponse pointue du Gouvernement, ferait sans doute très bien l’affaire.
Je connais la rigueur de la commission spéciale sur la question des rapports.
Si le Gouvernement a eu le même avis que la commission sur l’amendement précédent, c’est en raison des mutations qui sont à l’œuvre, et non de l’action passée.
M. Yung soulève un sujet très compliqué. Un rapport pourrait être un bon stimulus. L’avis du Gouvernement est donc favorable.
L'amendement n'est pas adopté.
Le premier alinéa du 1 de l’article L. 611-7 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Après la première phrase, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« L’employeur informe le salarié, auteur d’une telle invention, lorsque cette dernière fait l’objet du dépôt d’une demande de titre de propriété industrielle et lors de la délivrance, le cas échéant, de ce titre. » ;
2° À la seconde phrase, les mots : « telle invention » sont remplacés par les mots : « invention appartenant à l’employeur ». –
Adopté.
(Supprimé)
L'amendement n° 257, présenté par MM. Guillaume et Yung, Mme Bricq, MM. Bigot, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’article 41 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :
1° Le second alinéa de l’article L. 311-1 est complété par les mots : «, ou de leur reproduction par une technologie d’impression en trois dimensions » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 311-5, après le mot : « support », sont insérés les mots : « ou de technologie ».
La parole est à M. Richard Yung.
Cet amendement concerne l’impression en trois dimensions, ou 3D. C’est un domaine nouveau.
Désormais, on peut maintenant installer chez soi des imprimantes qui coûtent entre 500 euros et 1 500 euros et permettent, grâce à l’achat, voire au piratage d’un logiciel, de fabriquer pratiquement tout objet matériel dans sa cuisine ou son salon !
Cela pose le problème des droits de propriété industrielle : il y a reproduction d’un objet, invention, marque, dessin ou modèle, sans contrepartie pour le titulaire du droit.
Les imprimantes ont longtemps été réservées à l’industrie. Aujourd’hui, c’est dans le domaine public. La combinaison de la technologie 3D et du scanner permet de fabriquer tout objet.
J’ai le sentiment que nous sommes au début d’une grande évolution, avec la généralisation des imprimantes 3D. Ces machines, qui ne sont ni très rapides ni très commodes pour l’instant, seront efficaces dans cinq ou dix ans. Dès lors, elles se généraliseront.
Nous avons cherché une solution pour régler le problème des droits de propriété industrielle. L’une de nos propositions, celle qui fait l’objet de l’amendement n° 257, consiste à s’inspirer du principe de la protection du droit d’auteur.
Prenons le cas de la musique. Quand vous achetez un support audio, vous payez la redevance pour copie privée, qui est assez modeste, mais qui alimente un fonds destiné à dédommager les auteurs dont les œuvres sont copiées.
Par parallélisme, nous avons imaginé la création d’une redevance pour copie privée qui s’appliquerait à l’imprimante 3D. Lors de l’achat d’une machine, on paierait une redevance qui permettrait aux inventeurs ou titulaires de brevets, marques, dessins et modèles, de percevoir une rémunération.
Les auteurs de cet amendement soulèvent un sujet important. Mais le dispositif envisagé n’est pas abouti.
Par nature, les œuvres d’art matérielles sont exclues de l’autorisation légale de copie privée. Certes, on peut graver chez soi, à titre privé, un CD ; c’est pour cette raison qu’une taxe sur les CD existe. Mais il ne saurait y avoir de rémunération pour copie privée pour les dessins ou les sculptures.
L’extension qui nous est proposée reviendrait à taxer la technologie de reproduction, et non le support d’enregistrement. Une telle innovation du dispositif n’est pas prévue par l’article L. 311-4 du code de la propriété intellectuelle. Il manque donc une coordination.
Du point de vue de la protection, un objet fabriqué par une imprimante 3D, au mépris des règles, est, en soi, une contrefaçon.
De plus, des questions fondamentales sur la nature des œuvres matérielles se posent. Imaginez que vous vouliez faire une copie d’un bronze ou d’une sculpture en marbre de Carrare d’un grand artiste, comme Pompon : l’imprimante 3D va vous faire une copie en résine, et non en bronze. S’agit-il là du même objet ? Cela pose un problème.
Il serait malavisé de clore une réflexion qui en est à ses débuts par une loi imparfaite.
D’ailleurs, nos collègues de l'Assemblée nationale travaillent actuellement sur un sujet connexe, celui de la répartition de la rémunération pour copie privée. Attendons donc le résultat de leurs travaux, qui interviendra assez rapidement.
Eu égard à ces observations juridiques et pratiques, je sollicite le retrait de cet amendement, qui porte, certes, sur un vrai sujet. À défaut, l’avis serait défavorable.
La question est en effet complexe du point de vue de la propriété intellectuelle et de l’organisation de notre chaîne de valeur productive. C’est à juste titre que M. Yung la soulève.
Nous sommes progressivement en train d’investir et de réorganiser la production des imprimantes 3D. Mais ces équipements et les éléments qui en découlent sortent du champ des œuvres culturelles protégées par la rémunération pour copie privée. Ce sont des composantes industrielles ; il faut donc trouver le bon critère de protection.
Aujourd'hui, le secteur se développe. D’ailleurs, certains acteurs français se débrouillent très bien. Ils sont de véritables concurrents des acteurs internationaux. Je pense, entre autres, au groupe Gorgé.
L’enjeu est de connaître le bon critère de protection, surtout au regard de la compétition internationale, sans pour autant contraindre de manière excessive les acteurs concernés et les gêner dans leur développement industriel. La protection des œuvres culturelles est supérieure à celle qui s’applique pour les composants industriels classiques.
L'Assemblée nationale a engagé une réflexion sur le sujet. Je suggère que la Haute Assemblée mette en place un groupe de travail, en collaboration avec mon ministère, qui est également saisi. Nous devons avancer de manière patiente, mais résolue, afin de trouver le cadre adéquat dans les prochains mois ; le bon agenda serait d’ici à la fin de l’année. Les Allemands sont aussi très actifs dans ce domaine. À mon avis, la solution ne saurait être une application classique de la copie privée.
À la lumière de cet engagement, je vous invite à bien vouloir retirer cet amendement, monsieur le sénateur.
Non, je vais le retirer, monsieur le président.
Je souhaite toutefois répondre à M. le corapporteur. La redevance pour copie privée a été créée pour les droits d’auteur. Mais rien n’interdit d’en élargir le champ. Il faut avoir une certaine souplesse dans l’approche des choses. Je signale d’ailleurs qu’un excellent rapport du Conseil économique, social et environnemental traite de la question des imprimantes 3D. Une autre possibilité serait de taxer les programmes utilisés pour activer l’impression. On pourrait imaginer une redevance sur les programmes informatiques.
Quoi qu’il en soit, je prends la balle au bond, monsieur le ministre. J’accepte votre offre de travailler ensemble pour affiner les propositions, et je retire mon amendement.
(Non modifié)
Le code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Après le 7° de l’article L. 6143-1, il est inséré un 8° ainsi rédigé :
« 8° Les prises de participation et les créations de filiales mentionnées à l’article L. 6145-7. » ;
2° Au 1° de l’article L. 6143-4, la référence : « et 7° » est remplacée par les références : «, 7° et 8° » ;
3° Après le 16° de l’article L. 6143-7, il est inséré un 17° ainsi rédigé :
« 17° Soumet au conseil de surveillance les prises de participation et les créations de filiale mentionnées à l’article L. 6145-7. » ;
4° Le deuxième alinéa de l’article L. 6145-7 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les centres hospitaliers universitaires peuvent prendre des participations et créer des filiales pour assurer des prestations de services et d’expertise au niveau international, valoriser les activités de recherche et leurs résultats et exploiter des brevets et des licences, dans des conditions et limites fixées par décret en Conseil d’État.
« Le déficit éventuel des activités mentionnées aux deux premiers alinéas n’est pas opposable aux collectivités publiques et aux organismes qui assurent le financement des établissements. »
À l’instar de l’ensemble de mes collègues du groupe CRC, je suis très inquiète : cet article s’attaque aux trente-sept centres hospitaliers universitaires, les CHU.
Au regard de l’intitulé du projet de loi, nous aurions pu croire – d’ailleurs, nous l’espérions – que l’objectif de croissance et d’activité conduirait à donner des moyens nouveaux aux établissements. Malheureusement, ce n’est pas le choix qui a été effectué.
Monsieur le ministre, vous préférez que les CHU puissent investir à l’étranger, rompant ainsi avec la législation actuelle, selon laquelle l’objet principal des établissements publics de santé « n’est ni industriel ni commercial ».
En autorisant les CHU à créer des filiales à l’étranger, à prendre des participations dans des sociétés commerciales ou à créer leurs propres antennes à l’étranger, vous entendez mettre fin à des prétendues « rigidités françaises », qui constituent au contraire, à nos yeux, une garantie contre la privatisation de la santé et du système hospitalier.
Nous nous félicitons de la reconnaissance du savoir-faire français en matière de soins, d’accueil et de prise en charge des patients. Mais nous estimons que les échanges peuvent continuer à s’effectuer dans le cadre de coopérations internationales, notamment en matière de recherche. De nombreux partenariats existent déjà, que ce soit au Vietnam ou en Algérie, pour ne prendre que ces exemples. L’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, ou AP-HP, y joue un rôle important.
Mais, monsieur le ministre, ce n’est pas ce que vous souhaitez développer ! Vous voulez passer à une logique d’« hôpital-entreprise » à l’étranger. Au lieu de créer les conditions économiques pour renforcer notre système hospitalier public, vous allez permettre à ces établissements de se « refaire une santé » à l’étranger avec des opérations financières et commerciales !
Alors que notre système public se meurt, notamment depuis la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, ou loi HPST, et depuis les économies drastiques qui sont imposées année après année – je le rappelle, 21 milliards d’euros d’économies sont prévus d’ici à 2017, pour la sécurité sociale et la santé, dans le cadre du pacte de responsabilité et de solidarité –, vous cherchez à investir l’international.
Il ne faut pas être devin pour savoir que la situation actuelle risque fort de s’aggraver. En clair, les activités jugées non rentables seront abandonnées.
Ce qui fait la renommée de notre système de santé, c’est précisément son caractère de service public, qui allie excellence et proximité. Depuis plusieurs années, ce modèle est remis en cause. Vous entendez bien franchir une nouvelle étape, ce que nous ne pouvons pas trouver juste.
Nous proposerons donc la suppression de l’article 42.
L'amendement n° 48, présenté par Mmes Assassi, Cohen, David et Gonthier-Maurin, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Cet amendement tend à la suppression de l’article 42, qui a été adopté sans modification par la commission spéciale.
Il nous paraît inopportun, voire pour le moins dangereux de permettre aux CHU de créer des filiales dans d’autres pays. Il y a là comme une incompatibilité d’activités, un mélange des genres entre le public et le privé.
Selon nous, la vocation des CHU n’est pas de vendre leur savoir-faire. L’esprit mercantile qui sous-tend l’article 42 nous dérange et nous inquiète, d’autant que la mesure prend place dans ce projet de loi d’inspiration très libérale.
De notre côté, nous sommes favorables à ce que des coopérations avec d’autres pays continuent à se développer, pour que l’excellence de nos CHU puisse être utile à l’international. Le cadre actuel a peut-être besoin d’être renforcé, mais il ne faut pas aller jusqu’à une libéralisation de certaines des activités.
Monsieur le ministre, vous concevez la santé comme une activité marchande, et tous les moyens sont bons pour faire du profit. Cela se retrouve pleinement dans cet article.
En réalité, ce dont ont besoin les CHU, c’est d’une politique d’investissements dans le cadre de leurs missions de service public. Voilà des années que les hôpitaux français sont délaissés, que les conditions de travail des salariés hospitaliers, donc la prise en charge des patients, se dégradent.
Compte tenu des économies drastiques que l’on exige des établissements, nous ne pensons pas qu’il leur semble opportun de créer des filiales à l’étranger.
Dans le contexte actuel, où la santé est plus que malmenée par les politiques successives, une telle mesure nous semble une aberration, voire une provocation !
C'est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 42.
L’article 42 vise à autoriser les hôpitaux à créer des filiales, afin de développer leurs prestations à l’international et de valoriser leur recherche.
Pourquoi refuser aux hôpitaux ce qui a été reconnu à d’autres structures publiques de recherche, comme les universités ou le Centre national de la recherche scientifique, le CNRS ?
Dans un contexte de concurrence internationale et de diminution de leurs ressources, il est tout à fait souhaitable que nos CHU puissent promouvoir leur savoir-faire et les compétences de nos médecins, de nos chercheurs et de nos équipes de gestion à l’étranger.
La commission donc est tout à fait défavorable à l’amendement n° 48.
Mme Nicole Bricq. Je souhaite m’adresser à mes chers camarades du groupe communiste.
Exclamations ironiques sur les travées de l'UMP.
Les plateaux techniques de nos CHU sont extraordinaires et reconnus dans le monde entier. D’ailleurs, les établissements emploient un nombre non négligeable de praticiens étrangers.
MM. Michel Bouvard et Roland Courteau acquiescent.
Nos hôpitaux, notamment ceux de l’AP-HP, ont noué des partenariats avec des instituts privés ; je pense par exemple à l’Institut Pasteur.
Oui ! sur les travées du groupe CRC.
Chers collègues, si vous voulez donner une projection au service public, votez l’article 42 ! En effet, le développement de l’excellence française est entravé, alors que nous savons très bien construire des hôpitaux, notamment grâce aux grands groupes français du BTP, mais aussi les gérer et les exploiter.
Lorsque j’étais ministre, j’ai exporté toute cette excellence française en Algérie. M. Jean-Marie Le Guen, le secrétaire d'État chargé des relations avec le Parlement, qui présidait alors l’AP-HP, nous avait accompagnés dans ce pays.
Nous avons obtenu un contrat. Nous voulions Alger ; nous avons eu Constantine. Nous nous en sommes contentés.
Au Vietnam, nous avons obtenu un contrat pour équiper l’hôpital de Can Tho, dans le cadre non pas de la coopération, mais de la promotion à l’extérieur de l’offre française, à la fois évidemment de nos entreprises, mais aussi de notre savoir-faire.
Nous ne sommes pas les meilleurs au monde dans le domaine des dispositifs médicaux, mais nous sommes loin d’être nuls ! Il y a une excellence française en la matière.
Aujourd'hui, à l’étranger, on nous demande l’ensemble de notre chaîne de valeur.
L’article 42 permettra à nos CHU de disposer de filiales qui feront la promotion de l’offre française en matière de santé publique.
Je ne comprends donc pas que vous en demandiez la suppression. Vous préférez avoir des cliniques américaines partout ? §La clinique Mayo, c’est du privé dur !
L’adoption de cet article ne nuira pas à la défense de l’hôpital dans notre pays. Nous le verrons au moment de l’examen du texte sur la santé.
Franchement, vous avez tort de vouloir supprimer cet article !
Il est intéressant de voir surgir dans le projet de loi Macron des suggestions qui n’apparaissent pas dans les débats sur l’hôpital, où nous restons alors dans les schémas traditionnels, avec des discussions sur les moyens de développer le secteur de la santé.
Le dispositif en cause soulève une autre question : peut-on toujours concevoir la santé au travers de son mode de financement actuel, qui est assis sur des cotisations sociales ? D’un côté, on nous dit que le secteur doit se développer, pour la santé de la population et la création d’emplois. De l’autre, on insiste sur la nécessité d’en réduire le financement au nom des économies à réaliser. Il y a là une contradiction fondamentale. Cela fait une dizaine d’années que nous ne parvenons pas à la résoudre.
Monsieur le ministre, qu’apporte véritablement à l’économie française la création de filiales dans d’autres pays ? Mme Bricq a dit que c’était merveilleux.
Elle a souligné combien nous étions excellents, combien notre savoir-faire était intéressant… Elle a rappelé que nous étions engagés dans des projets, au Vietnam ou ailleurs. Elle a vanté la qualité française. C’est bien ! Sur tous ces points, nous sommes d’accord avec elle.
À l’écouter, nos médecins, qui sont brillants, vont aller au Vietnam, au Brésil… Sauf que nous manquons déjà de médecins dans notre pays !
Certes, pour la promotion de la France, il est très intéressant d’envoyer nos médecins brillants à l’étranger. Mais, dans le même temps, la France est en train de supprimer beaucoup d’instituts français à l’étranger.
Il faudrait donc savoir ce que l’on veut pour l’image de la France !
Monsieur le ministre, puisque vous dites vouloir développer l’excellence française, êtes-vous prêt à mettre un terme au numerus clausus qui caractérise la formation des médecins et des infirmières ?
Je ne nie pas l’intérêt de créer des filiales à l’étranger pour développer un savoir-faire et transmettre notre expérience.
Mais allez-vous former suffisamment de médecins et d’infirmiers dans les prochaines années pour faire face à la fois aux besoins existant en France et aux besoins que fait naître la création de ces filiales dotées de la qualité française ? Êtes-vous prêt à débloquer leur formation ? Convenez-en, devoir importer des médecins de Roumanie ou d’autres pays de l’Est pour exporter l’excellence française, cela ne servirait pas à grand-chose !
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour explication de vote.
Après le service public des transports, après celui de la justice, c’est le tour du service public de la santé !
Personne ne peut se plaindre que l’excellence française, dans tout le champ de la filière médicale, soit reconnue à l’étranger et sollicitée partout dans le monde. Mais, selon nous, elle ne doit pas être vue seulement comme une marchandise ou un bien propre à la vente.
Madame Bricq, ne voyez pas dans la position de notre groupe politique une volonté de garder pour nous, de manière presque chauvine, le savoir-faire national en matière de soins, d’accueil et d’accompagnement des patients.
Oui, le cadre juridique est contraignant. Personne ne le nie ! Mais il s’agit justement d’éviter les dérives qu’entraînerait la transformation de nos CHU en entreprises.
Oui, madame Bricq, nous voulons croire en la possibilité de faire profiter l’étranger de nos savoir-faire dans le cadre de protocoles de coopération et de solidarité internationaux ! Mais, comme cela a été souligné en commission spéciale, l’enjeu de l’article 42 est non pas de favoriser la coopération entre les États, mais de « vendre notre expertise » et « notre force de frappe ».
M. Jean Desessard s’exclame.
On peut comprendre l’intérêt qu’a le Gouvernement à encourager la course aux capitaux étrangers. La situation financière des centres hospitaliers universitaires, malgré leur excellence avérée, est calamiteuse. Ainsi, à la fin de l’année 2012, les emprunts toxiques des CHU représentaient 2, 5 milliards d’euros, d’après la Cour des comptes.
La dette à moyen et long termes des établissements publics de santé a triplé en dix ans, notamment sous l’impulsion des plans Hôpital 2007 et Hôpital 2012, qui ont encouragé le recours à l’emprunt. Il apparaît aujourd’hui de plus en plus difficile aux professionnels hospitaliers de pallier les manques financiers des établissements.
Les rentrées d’argent qui résulteraient de l’adoption de l’article 42 permettraient, à court terme, de résorber à la marge ce trou béant. Mais à quel prix ? Celui de la marchandisation des actes de soin !
La santé ne peut pas être appréciée sous le prisme du commerce. Certains le font déjà. Leur vision des choses est détestable, et l’on ne saurait tolérer que la France se joigne à eux. Ce processus de marchandisation de la santé conduira à terme à la disparition des opérations de solidarité internationale. Cela constitue un facteur important d’incitation à la vente par les CHU de leur savoir-faire aux États qui peuvent se permettre de les acquérir.
Faut-il le rappeler, l’accès à la santé est prescrit par la Déclaration universelle des droits de l’homme ? Certes, ce texte n’est pas contraignant juridiquement ; on peut d’ailleurs le regretter. Mais il doit tout de même rester une référence pour nous.
Parce que la vision de la santé du Gouvernement nous semble aller dans la mauvaise direction et engager un recul des principes du service public, parce que, pour nous, la santé ne peut pas être vue comme une marchandise et parce que nous estimons que la coopération internationale est le meilleur moyen de valoriser notre savoir-faire, nous proposons de supprimer l’article 42 du projet de loi !
Les débats sur l’avenir du système de santé sont très intéressants, mais ce n’est pas le sujet !
L’article 42 porte sur des cas très concrets. La ville de Constantine veut créer un CHU. Elle pose des conditions, avec des garanties financières. Elle veut passer des contrats avec un prestataire pour trouver les meilleurs partenaires.
L’AP-HP est emblématique de l’excellence médicale et scientifique à la française ; nous nous en félicitons.
Mme Éliane Assassi acquiesce.
Mesdames, messieurs les sénateurs du groupe CRC, si vous considérez que la défense du service public consiste à lui interdire de se développer et à favoriser à la place les Allemands, les Américains ou les Anglais, vous en avez une vision particulièrement obtuse !
M. Emmanuel Macron, ministre. Pour vous, le meilleur moyen de protéger le service public français, c’est de l’empêcher de rayonner à l’étranger !
Protestations sur les travées du groupe CRC.
Aujourd’hui, le code de la santé publique ne permet pas de procéder à de telles opérations. Lisez attentivement l’article 42. Nous ne proposons pas de retirer de l’argent aux hôpitaux français ! Au contraire ! Les décisions sont sous le contrôle du conseil de surveillance de l’AP-HP et de l’agence régionale de santé.
Monsieur le sénateur, nous n’allons pas refaire le débat sur la situation de la santé publique en France. Ne mélangeons pas tout !
Pas du tout ! Lisez l’article !
Le cadre législatif actuel limite la capacité d’exportation de l’expertise française. L’article L. 6141-1 du code de la santé publique dispose que l’objet principal des établissements publics de santé n’est « ni industriel ni commercial ». Cela ne leur permet pas de développer leur expertise et de créer des filiales à l’international.
Nous voulons que l’AP-HP ou les hospices civils de Lyon puissent se développer et répondre à des clauses de garantie. Je reprends l’exemple de Constantine : aujourd’hui, les établissements publics de santé ne sont pas en mesure de donner une garantie bancaire, car ils n’en ont pas la possibilité juridique.
(Exclamations sur les travées du groupe CRC.) Votre vision du service public consiste à lui interdire de se développer et de rayonner !
Mêmes mouvements.
Je donnerai ensuite un avis plus laconique sur les autres amendements. Je crois que je n’arriverai pas à vous convaincre et que, quelque part, vous n’avez pas envie d’être convaincus ! §
M. Emmanuel Macron, ministre. Vous avez une conception étriquée : le service public doit rester dans les limites de l’Hexagone !
Protestations sur les travées du groupe CRC. – Brouhaha.
Les Pères fondateurs ont toujours défendu l’idée d’un modèle universel à la française ! Persévérez dans votre voie si c’est ce que vous voulez ! Mais ce n’est pas notre idée du service public, et ce n’est pas celle que nous continuerons à défendre !
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Il m’arrive parfois de soutenir des amendements de nos collègues du groupe CRC.
Le sujet est très sensible, entre la complexité du code de la santé publique et le respect dû aux personnels des hôpitaux, notamment des CHU. Prenons un peu de recul et ayons confiance.
En l’occurrence, même si l’intervention de M. le ministre ne m’a pas entièrement convaincu, je suivrai l’avis de la commission. La suppression de l’article 42 rendrait plus difficile la création de filiales. Nous sommes entravés par le code de la santé publique. Il y a besoin d’une démarche positive. En matière de recherche, de savoir-faire, la tâche reste immense. Il faut surmonter les blocages.
J’ai trouvé les propos de mon collègue Jean Desessard un peu caricaturaux. Et quand le groupe CRC évoque les emprunts toxiques, je ne suis pas sûr que cela ait un lien avec le sujet. Nous n’allons pas traiter les difficultés de financement des hôpitaux, qui sont réelles, dans cet article.
Je sais d’expérience que l’excellence française en matière hospitalière est reconnue dans le monde.
M. Claude Raynal. Chaque fois que nous nous rendons dans un pays étranger, par exemple en Inde ou au Vietnam, on nous demande un projet « clés en main » ! Ce qui est attendu, c’est la fourniture d’équipes et de matériel. C’est une chance pour nous.
M. Jean Desessard s’exclame.
Dans le même ordre d’idées, Aéroports de Paris, ou ADP, a été un formidable catalyseur d’entreprises. Des bureaux d’études ont monté des projets géniaux. Ne freinons surtout pas !
On nous dit que de telles mesures vont faire perdre des personnels. C’est exactement l’inverse ! L’idée est évidemment de former du personnel sur place, en s’appuyant sur notre excellence.
Mme Éliane Assassi s’exclame.
Faisons preuve de réalisme. Nous avons des filières d’excellence qui assurent un service public. Donnons-leur une plus grande liberté pour leur permettre de diffuser leur expérience à l’étranger !
Je partage l’analyse de mon collègue Claude Raynal. Il s’agit non pas de distribuer des soins, mais de transmettre notre expertise et notre expérience.
Nous avons une expertise médicale d’excellente qualité, en particulier en matière de soins, même si nous sommes un peu moins performants sur la prévention. Nous en discuterons lors de l’examen du texte sur la santé.
Soyons fiers d’être sollicités et d’incarner l’excellence ! L’article 42 nous permet d’apporter notre compétence et notre expertise à l’international ; nous ne pouvons y être que favorables.
Monsieur le ministre, contrairement à ce que vous affirmez, nous ne mélangeons pas les genres ! C’est votre texte qui aborde la santé.
Mes chers collègues, nous marchons sur la tête ! Certains n’ont de cesse d’évoquer « l’excellence » de nos hôpitaux et de nos médecins ; d’ailleurs, je partage ce sentiment. Mais je ne comprends pas qu’il n’y ait pas plus de voix dans cet hémicycle pour s’élever contre les économies drastiques dans la santé !
Marques d’approbation sur les travées du groupe socialiste et de l'UMP.
Protestations sur les mêmes travées.
Monsieur le ministre, vous considérez les hôpitaux comme des filiales commerciales allant apporter leur expertise à l’étranger ! Mais c’est déjà possible de transmettre nos compétences, par exemple dans le cadre de la coopération internationale ! §Madame Bricq, qu’allez-vous dire aux médecins, par exemple de Bichat ? Vous pensez qu’ils seront contents ? Bien sûr que non ! Aujourd’hui, des hôpitaux sont complètement cassés ! L’excellence française, on est en train de la piétiner !
Monsieur le ministre, vous nous faites un laïus sur le thème : « Il faut exporter l’excellence ». Mais cette « excellence », pour le rester, elle a besoin de moyens humains et financiers. Assez de faux-semblants !
Vous nous demandez de ne pas nous inquiéter, vous prétendez qu’il n’y a aucun souci… Vous avez fait exactement pareil à propos du service public des transports ! Vous êtes en train de casser tout le service public !
Nous n’avons effectivement pas la même conception que vous ; ça, c’est certain ! Nous sommes en profond désaccord. Mais admettez au moins que l’on ne peut développer l’excellence avec un budget restreint et des économies ! Aujourd’hui, les hôpitaux, et pas seulement Bichat, sont littéralement asphyxiés. Après un certain temps, le choix devient extrêmement marginal. Les conditions sont tellement dramatiques que certains médecins préfèrent aller travailler à l’étranger ! Ne nous faites pas croire qu’il n’y a pas de lien de cause à effet ! Dans une politique de santé, tout se tient !
Vous êtes en train de libéraliser encore plus, au détriment du service public et des soins accordés à la population !
M. Jean-Claude Requier. Je ne voterai pas cet amendement de suppression. Je trouve normal que les entreprises françaises aillent à l’étranger et y investissent. Je préfère avoir des Français sur place plutôt que des Américains, des Chinois ou des Coréens !
M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.
Monsieur le ministre, vous êtes confronté à ce que j’appelle « l’effet Baudelaire » !
En 1940, lorsque la France a déclaré la guerre à l’Allemagne, il y a eu la « drôle de guerre » : on se tenait derrière la ligne Maginot sans bouger. Pendant que les Allemands envahissaient la Pologne, le général en chef de l’armée française, qui s’appelait Maurice Gamelin – vous ne le connaissez pas, car il n’a ni rue, ni avenue, ni statue à son nom, étant donné qu’il n’a rien gagné –, ne faisait rien. Les soldats étaient là, mais ils attendaient que ça passe. §Ce général Gamelin, on l’avait surnommé Baudelaire, en raison d’un poème qui figure dans Les Fleurs du mal et où il est écrit ceci : « Je hais le mouvement qui déplace les lignes ».
Cela correspond tout à fait au débat que nous avons sur ce texte. Dès que l’on veut changer quelque chose dans ce pays, il y a des résistances ! Monsieur le ministre, vous devez lutter contre « l’effet Baudelaire » ou « l’effet Gamelin » !
Applaudissements sur les travées du RDSE, de l'UDI-UC et de l'UMP, ainsi que sur plusieurs travées du groupe socialiste.
En tant que sénateur représentant les Français établis hors de France, je peux attester de l’intérêt qui est porté à notre système de santé à l’étranger. Nombreux sont ceux qui louent son excellence.
D’ailleurs, un certain nombre de personnes viennent se faire soigner en France. Ils sont souvent très surpris de ne pas avoir à payer la note en quittant l’hôpital. Il arrive même qu’ils s’en plaignent. On leur explique qu’ils ne doivent pas payer tout de suite et que les choses fonctionnent ainsi !
Exclamations sur les travées du groupe CRC.
Le dispositif prévu à l’article 42 est donc une très bonne idée. Monsieur le ministre, vous allez peut-être entrer dans l’Histoire ! Grâce à vous, l’on pourra dire : « Si tu ne viens pas au CHU, le CHU ira à toi ! » Cette disposition est une grande innovation. Je soutiens cette approche.
Si nous ne faisons pas des hôpitaux à l’étranger, d’autres pays le feront. Certains n’ont manifestement pas compris que la santé était aujourd’hui une offre privée. Des hôpitaux américains s’installent partout.
De même, dans le secteur de l’éducation, les écoles américaines et anglaises se développent beaucoup plus vite que les nôtres, car elles sont bien plus dynamiques.
Si l’on veut que la santé à la française puisse continuer à exister, elle doit pouvoir se développer à l’étranger. Je ne peux donc qu’apporter mon plein soutien à cette initiative. Encore une fois, bravo, monsieur le ministre !
Applaudissements sur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1121, présenté par Mmes Assassi, Cohen, Gonthier-Maurin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. - Le premier alinéa de l’article L. 6145-7 du code de la santé publique est ainsi rédigé :
« Sans porter préjudice à l’exercice de leurs missions, les établissements publics de santé peuvent développer des actions de collaborations et des échanges internationaux relatifs à leurs pratiques et leurs activités de recherche. Ce partage ne peut donner lieu à des échanges commerciaux et permet d’améliorer la recherche et les pratiques des centres hôpitaux universitaires. »
II. - La perte de recettes résultant pour les établissements publics de santé du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Pierre Laurent.
Cet amendement et les amendements n° 1119 et 1120, que nous présenterons dans quelques instants, s’inscrivent dans le droit-fil du débat que nous venons d’avoir. Nous espérons que l’un d’entre eux au moins sera adopté.
L’amendement n° 1121 vise à réécrire le premier alinéa de l’article L. 6145-7 du code de la santé publique, afin de maintenir la valorisation de l’échange et de la coopération internationale non commerciale en matière de santé son caractère d’orientation première.
Pensez-vous réellement que le développement de l’excellence dans des pays comme le Vietnam ou l’Algérie ne peut s’effectuer que sur le mode commercial, celui que l’on essaye de nous imposer ? Bien sûr que non ! Les besoins de santé de ces pays impliquent une coopération internationale de haut niveau qui ne soit pas commerciale, sous peine de ne jamais accéder à l’excellence et au meilleur de la santé publique.
Avec le modèle qui nous est proposé, nous aurons une compétition commerciale contre les Américains et d’autres, mais ce ne sera sûrement pas au profit des Algériens ou des Vietnamiens ! Nous contestons ce choix.
Au demeurant, nous parlons de santé. On peut toujours faire comme si les enjeux de marchandisation de la santé n’allaient pas se poser à une échelle grandissante. Mais le problème est pourtant extrêmement sérieux.
Nous voulons promouvoir un mode de développement et de coopération internationale différent de la compétition commerciale. La bataille à mener n’est pas sur les marchés ; elle est à mener sur les modèles de diffusion de la santé, des connaissances et du meilleur de la science ! C’est, me semble-t-il, sur ce terrain que la France devrait se battre, au lieu de se précipiter dans une bataille uniquement commerciale, guidée par des enjeux seulement financiers.
L'amendement n° 1119, présenté par Mmes Assassi, Cohen, Gonthier-Maurin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 2 à 6
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Pierre Laurent.
L'amendement n° 1120, présenté par Mmes Assassi, Cohen, Gonthier-Maurin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 7 à 9
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Pierre Laurent.
Ces amendements tendent tous les trois, sous des déclinaisons différentes, à restreindre la portée de l’article 42. Ne refaisons pas le débat. La commission spéciale est totalement défavorable à ces trois amendements.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 42 est adopté.
Chapitre II
Entreprises à participation publique
Section 1
Ratification et modification de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique
(Non modifié)
I. – Au premier alinéa du V des articles L. 225-27-1 et L. 225-79-2 du code de commerce, la référence : «, du I » est remplacée par la référence : « ou du I » ;
II. – Au premier alinéa de l’article 1136 du code général des impôts, les mots : « régies par le titre II de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations » sont remplacés par les mots : « réalisées par l’État régies par le titre III de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique ».
III. – La loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa de l’article 4, les mots : « au sens de l’article 1er » sont remplacés par les mots : « comprenant des représentants des salariés relevant du I de l’article 8 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique » ;
2° Au premier alinéa de l’article 6-2, les mots : « et sociétés » sont supprimés ;
3° L’article 14 est ainsi rédigé :
« Art. 14. – Les représentants des salariés sont élus, dans chacune des entreprises relevant de la présente loi, par les salariés qui remplissent les conditions requises pour être électeur au comité d’entreprise ou à l’organe en tenant lieu soit dans l’entreprise elle-même, soit dans l’une de ses filiales comprenant des représentants des salariés relevant du I de l’article 8 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée, dont le siège social est fixé sur le territoire français. » ;
4° Au premier alinéa de l’article 15 et à la première phrase du dernier alinéa du 3 de l’article 17, les mots : « au sens du 4 de l’article 1er » sont remplacés par les mots : « comprenant des représentants des salariés relevant du I de l’article 8 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée ».
Ce débat a commencé au mois de décembre 2013 lors de la discussion du texte portant prétendument sur la « simplification de la vie des entreprises », qui a en fait servi de support à quelques ordonnances de plus.
Le Gouvernement avait alors proposé un article 10 ainsi rédigé : « Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance toute mesure relevant du domaine de la loi en vue de :
« 1° Simplifier et rapprocher du droit commun des sociétés les textes régissant les entreprises dans lesquelles l’État ou ses établissements publics détiennent seuls ou conjointement, directement ou indirectement, une participation, majoritaire ou minoritaire ;
« 2° Assouplir et adapter les règles relatives à la composition des conseils, à la désignation, au mandat et au statut des personnes appelées à y siéger, sans remettre en cause la représentation des salariés, ainsi qu’à la désignation des dirigeants ;
« 3° Clarifier les règles concernant les opérations en capital relatives à ces entreprises, sans modifier les dispositions particulières imposant un seuil minimum de détention du capital de certaines de ces entreprises par l’État ou ses établissements publics ;
« 4° Adapter les compétences de la Commission des participations et des transferts. »
Cet article d’habilitation a servi de support à la confection de l’ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique.
C’était Mme Fleur Pellerin, alors ministre déléguée aux PME, qui était chargée de défendre ce texte. Elle avait déclaré : « Le projet de loi d’habilitation présenté par le Gouvernement vise à modifier la législation portant sur la gouvernance et les opérations en capital des entreprises publiques […] »
Elle ajoutait ceci : « […] ces législations sont sources de difficultés tant juridiques que pratiques, compte tenu notamment de l’existence de textes désuets qui complexifient inutilement la gouvernance des entreprises et participent ainsi à son manque d’efficacité.
« Nous comprenons bien vos interrogations, mais la technicité de la matière requiert la réalisation d’un vaste chantier rédactionnel ; cela explique le recours aux ordonnances dès lors qu’il s’agit d’éviter au Parlement l’examen de nombreuses dispositions techniques qui entraînerait un encombrement excessif de l’agenda parlementaire.
« Pour autant, le Parlement n’est bien sûr pas dépossédé de son droit de regard, puisque, en votant le projet de loi d’habilitation, il détermine le domaine et les finalités des ordonnances. »
Cela appelle des objections.
Ce qui a compliqué la vie des entreprises du secteur public, ce sont plutôt des lois de privatisation, notamment celles de 1986 et de 1993 ; ce sont les textes consternants sur l’ouverture à la concurrence des télécommunications, source des zones blanches de la couverture de téléphonie mobile et internet ; c’est encore la privatisation de GDF et son futur rapprochement avec le groupe Suez…
Nous allons maintenant prendre le temps d’examiner les mesures contenues dans les articles de validation de l’ordonnance. Force est de le constater, les dispositions relatives à la démocratie sociale vont quelque peu souffrir : nombre d’entreprises sont étrangement appelées à tomber dans la banalité du code de commerce.
Nous regrettons la modicité des éléments d’information disponibles au regard des privatisations envisagées. Le vote sur le contenu de cette partie du texte apparaît à nos yeux comme un jeu de « cache-tampon » : nous sentons confusément que quelque chose a été dissimulé aux élus de la Nation quant à la portée réelle du texte proposé.
Avec ce chapitre consacré aux entreprises à participation publique, nous abordons, comme hier avec l’article 34 sur les actions gratuites, un débat politique important, fondamental, du même type que celui que nous venons d’avoir sur notre système de santé.
Monsieur le ministre, ce chapitre aurait dû s’intituler : « Organisation concrète de la privatisation des entreprises publiques ». Nous aurions été plus près de la réalité, car c’est bien de cela qu’il s’agit.
Ce chapitre a trait à la mise en œuvre concrète, au prix de certaines adaptations, de l’ordonnance du 20 août 2014, qui procède, et ce n’est pas rien, à la refonte de l’ensemble du cadre juridique applicable à l’État en tant qu’actionnaire de sociétés commerciales.
Il est inconcevable d’un point de vue démocratique qu’un tel dispositif juridique ait pu s’organiser et prendre force de loi sans le moindre débat au Parlement. La logique autoritaire des ordonnances se trouve ici poussée jusqu’à la caricature : ce sont 1 300 sociétés, filiales incluses, qui sont concernées.
Si l’article 43 A peut apparaître comme un dispositif de simple coordination, il est en fait le préalable à tout ce qui va suivre. Nous entrons donc dans un débat de fond, que le Gouvernement a souhaité confisquer au Parlement.
Vous l’aurez compris, les sénateurs du groupe CRC le mèneront point par point, quelle que soit l’heure ou le jour. Il y va de la dignité de notre Haute Assemblée et de la démocratie parlementaire ! Monsieur le ministre, le secteur privé, dont vous vous faites le héraut depuis des mois, est-il paré de tant de vertus qu’il faille lui céder petit à petit le bien commun ? Le fait de livrer progressivement l’ensemble de notre économie à l’actionnariat national ou étranger – il s’agit toujours du marché – vous apparaît-il comme une perspective de progrès répondant à l’attente de ceux qui vous ont porté, vous et vos amis, au pouvoir le 6 mai 2012 ?
En 2013, ont été vendus 3, 7 % du capital d’EADS, 7, 8 % de celui de SAFRAN, 9, 5 % de celui d’Aéroports de Paris et, en 2014, 3, 1 % de celui de GDF et 1, 9 % de celui d’Orange. La vente d’Alstom à General Electric et celle de la moitié du capital de l’Aéroport de Toulouse-Blagnac ont couronné le tout !
Les privatisations sont, pour vous, non seulement une méthode de gouvernement, mais aussi un dogme, un objectif de changement de société !
Le souci de l’intérêt général, les valeurs de solidarité, en un mot la République, puisent en partie leur force dans leur capacité et dans celle de l’État à s’appuyer sur des leviers économiques forts. Briser ce socle, c’est exposer notre pays à la déferlante libérale !
Monsieur le ministre, vous tentez de caricaturer nos propos – on l’a encore vu à l’instant –, en faisant notamment référence à l’époque soviétique. Pourtant, notre combat est de la plus grande modernité qui soit : nous voulons faire obstacle à la revanche libérale démarrée sous l’ère Thatcher et Reagan dans les années quatre-vingt !
Le 26 avril 2014, vous avez déclaré à l’AFP : « La gauche est censée changer le réel, mais, compte tenu des contraintes, changer le réel sera compliqué. » Votre aveu de soumission à la réalité libérale est accablant. En connaissez-vous les conséquences ? Les revendiquez-vous ? C’est la précarité pour des milliers de nos concitoyens, une société de concurrence et d’individualisme, et la pauvreté pour une part croissance de la population !
On a parlé de « l’esprit du 11 janvier », des valeurs républicaines, du « vivre ensemble ». Ces valeurs, nous les portons en résistant à votre projet de société aux services des puissants !
Marques d’approbation sur les travées de l'UMP.
L'amendement n° 49, présenté par Mme Assassi, M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Nous proposons la suppression de l’article 43 A.
Mes deux collègues ont parfaitement exposé les raisons pour lesquelles nous nous opposons au dispositif envisagé. On peut d’ailleurs s’interroger sur les raisons qui conduisent le Gouvernement à modifier une ordonnance qu’il a prise voilà moins d’un an, au mois d’en août 2014.
Même si cette ordonnance concerne la gouvernance et les opérations sur le capital des sociétés à participation publique, même si elle définit la composition des conseils de surveillance, et notamment la participation des salariés dans ces conseils, il nous semble tout de même un peu tôt pour la modifier.
Nous nous étions opposés à l’ordonnance au mois d’août 2014. Nous nous opposons également à cet article.
L’État s’attribue un certain nombre de sièges aux conseils d’administration ou de surveillance d’entreprises dont il n’est pas l’actionnaire majoritaire, voire où il est très minoritaire. Certains ont crié au scandale, arguant que des actionnaires privés ne représentant que 10 % du capital d’une société n’ont pas forcément accès au conseil d’administration.
Pour notre part, nous ne saurions considérer d’un mauvais œil le fait que la puissance publique ait un pouvoir de décision dans les sociétés dont elle est actionnaire. Nous sommes pour que l’État siège dans les conseils d’administration et de surveillance des sociétés dont il détient des parts. Ces dernières sont tout de même financées par de l’argent public, par le bien commun !
Au-delà de notre volonté de supprimer l’article 43 A, nous souhaitons vous poser quelques questions, monsieur le ministre. Pourquoi réduire la durée du mandat des représentants des salariés ? Pourquoi limiter à trois le nombre des représentants du personnel dans les sociétés anonymes « dans lesquelles l’État ou ses établissements publics industriels et commerciaux ou ses autres établissements publics détiennent directement ou indirectement plus de 50 % du capital et dont le nombre de salariés employés en moyenne au cours des vingt-quatre derniers mois est au moins égal à deux cents » ? Devons-nous comprendre que ces entreprises possèdent un conseil d’administration à neuf têtes ? Et quelles sont-elles ? Combien de salariés sont concernés ?
Vous le voyez, nos questions, qui concernaient l’ordonnance, portent de fait sur cet article, qui vise à la modifier alors qu’elle a moins d’un an !
Avec votre permission, monsieur le président, je donnerai l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements qui suivent.
Je serai ensuite beaucoup plus laconique, puisque le groupe CRC adopte une position de principe tendant à rejeter les dispositions de la nouvelle ordonnance du 20 août 2014.
La commission spéciale estime que l’ordonnance est utile, car elle a permis de rassembler en un seul document le droit applicable à l’État actionnaire, alors que de nombreuses dispositions avaient été votées depuis 1986. Il s’agit donc d’abord d’un travail de clarification.
Cette ordonnance permet aussi de moderniser le droit applicable à l’État actionnaire, en le rapprochant du droit commun des sociétés. Là encore, de nombreuses dispositions ad hoc s’étaient empilées sans qu’elles soient encore justifiées. À titre d’exemple, le nombre d’administrateurs représentant l’État était limité à un tiers, même s’il possédait l’intégralité du capital.
Le rôle du législateur est renforcé s’agissant des opérations de cession ; nous aurons l’occasion d’y revenir. C’est d’ailleurs sur ce fondement que nous examinerons l’article 47, relatif à Nexter, et l’article 49, qui concerne la privatisation des aéroports de Nice et de Lyon.
Pour l’ensemble de ces raisons, la commission spéciale est défavorable à l’ensemble des amendements du groupe CRC, de l’article 43 A à l’article 46.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1124, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, MM. Foucaud, Bosino et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Annie David.
Cet amendement vise à supprimer l’alinéa 1 de l’article 43 A, qui tend à limiter encore la participation des salariés aux conseils de surveillance. Cela nous renvoie à ce que nous disions à propos du projet de loi relatif à la sécurisation de l’emploi et de l’Accord national interprofessionnel, l’ANI.
Le Gouvernement nous avait alors présenté cette mesure comme étant de nature à accroître la participation des salariés à la gouvernance des sociétés. Il y avait de petites avancées. Néanmoins, nous avions alors émis des doutes. Nous avions raison, puisque le texte revient aujourd'hui sur ce qui avait été proposé alors.
L’article 43 A du projet de loi aura très certainement pour conséquence de revenir sur une situation que l’on croyait dépassée. En effet, la participation des salariés au conseil de surveillance était facultative. L’ANI l’avait rendue obligatoire sans que les salariés aient pour autant réellement droit de prendre part aux votes et encore moins d’exercer un droit de veto.
Une telle option avait été choisie pour ne pas briser l’équilibre établi entre les « sachants », ceux qui ont fait l’ENA ou n’importe quelle autre grande école. Cet « entre soi » est bien entendu néfaste, dans le privé comme dans le public.
La préconisation de faire entrer les salariés dans les conseils d’administration était tirée du rapport Gallois, de novembre 2012.
Comprenez notre inquiétude. Au mois de novembre 2014, M. le ministre de l’économie avait annoncé dans les colonnes du journal Le Monde que le Gouvernement souhaitait privatiser entre cinq milliards et dix milliards d’euros d’actifs. C’est la vente du patrimoine de l’État, patrimoine qu’il a, bien entendu, valorisé avant de le céder.
Dans ce contexte, il est totalement inacceptable de restreindre la participation des salariés !
Dans l’objet de cet amendement, il est écrit : « Cet alinéa valide, là encore, l’ordonnance de privatisation d’août 2014, qui permet la vente à l’encan du patrimoine public. »
À mes yeux, l’expression « vente à l’encan », est particulièrement malheureuse, pour ne pas dire insupportable ! Être en désaccord avec la gestion des actifs, c’est une chose ; employer une telle formule, c’en est une autre !
Monsieur Bosino, vous avez mentionné un certain nombre d’entreprises où il y a eu des ventes de participations publiques. Mais vous n’expliquez pas que cet argent a servi à des prises de participation dans les sociétés Alstom et Peugeot, nous permettant ainsi de conserver ces entreprises majeures, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter.
Quoi qu’il soit, vous pourriez trouver un autre terme que « vente à l’encan » !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1706, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Après les mots :
par l'État
insérer le mot :
et
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 1125, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 3 à 5
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Cet amendement de repli vise à supprimer les alinéas 3 à 5 de l’article, dont nous ne partageons pas l’esprit, ainsi que nous l’avons déjà expliqué.
Il ne nous semble pas opportun que l’État puisse proposer des administrateurs n’ayant pas le statut d’agents publics ; il faut des garde-fous. Et quid des cas où l’État est majoritaire ?
Si nous avons bien compris les modifications apportées, nous serions dans la situation suivante. Dans les sociétés dont l’État détient directement plus de la moitié du capital et dont le nombre de salariés employés est au moins égal à cinquante, le conseil d’administration et le conseil de surveillance ou l’organe délibérant en tenant lieu comprend un tiers de représentants des salariés.
La situation sera identique dans les sociétés anonymes dans lesquelles l’État ou les établissements publics détiennent directement ou indirectement plus de 50 % du capital et dont le nombre de salariés employés est au moins égal à deux cents. Cependant, le nombre maximal de représentants des salariés y est limité à trois.
Enfin, dans les autres sociétés relevant de la présente ordonnance, c'est-à-dire les sociétés où l’État ne détient pas 50 % du capital, les représentants des salariés sont désignés selon les modalités prévues par le code de commerce, auquel ils sont soumis.
Ainsi, excepté dans le premier cas de figure, le nombre de représentants des salariés est sensiblement en baisse, puisqu’il est limité à trois contre cinq ou six, selon les cas de figure prévus dans la loi de 1983.
Nous souhaiterions donc avoir des précisions sur ces points. Certes, j’ai bien compris que M. le ministre ne souhaitait plus répondre. Quoi qu’il en soit, une telle baisse de participation ne nous paraît pas une bonne chose.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1126, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 6 à 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Nous souhaitons supprimer les alinéas 6 à 8 de l’article 43 A.
L’ordonnance du 20 août 2014 prévoit une représentation des salariés pour les seules sociétés dont l’État dispose d’au moins 50 % du capital. Cela se limite donc aux entreprises publiques, notamment la SNCF, GDF ou Aéroports de Paris.
En dehors de ces entreprises publiques, les règles de représentation relèveraient du code de commerce. Or l’article L. 225-27-1 de ce code prévoit que « le nombre d’administrateurs représentant les salariés est au moins égal à deux dans les sociétés dont le nombre d’administrateurs […] est supérieur à douze et au moins à un s’il est égal ou inférieur à douze. »
Nous voyons donc bien quel sera le recul pour les salariés représentés actuellement dans les sociétés à participation publique, dans lesquelles s’appliquait la loi de 1983 relative à la démocratisation du secteur public. L’application du code de commerce aura pour conséquence de réduire considérablement la représentation des salariés dans les anciennes entreprises publiques.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 43 A est adopté.
(Non modifié)
L’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique est ainsi modifiée :
1° Au premier alinéa du I de l’article 7, après le mot : « comprend », sont insérés les mots : « au moins » ;
2° L’article 8 est ainsi modifié :
a) Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Après le même premier alinéa, il est inséré un II ainsi rédigé :
« II. – Les représentants des salariés sont élus :
« 1° Dans chacune des filiales détenues, à lui seul, par l’un des établissements publics mentionnés au second alinéa du I de l’article 7 ou par l’une des sociétés mentionnées au premier alinéa du même I, par les salariés qui remplissent les conditions requises pour être électeur au comité d’entreprise ;
« 2° Dans les autres filiales mentionnées au second alinéa dudit I ou dans les sociétés mentionnées au premier alinéa du même I, par les salariés qui remplissent les conditions requises pour être électeur au comité d’entreprise ou à l’organe en tenant lieu soit dans la société elle-même, soit dans l’une de ses filiales comprenant des représentants des salariés en application dudit I, dont le siège social est situé sur le territoire français. » ;
c) La première phrase du deuxième alinéa est ainsi modifiée :
– au début, est ajoutée la mention : « III. – » ;
– la référence : « précédent alinéa » est remplacée par la référence : « présent article » ;
3° La première phrase du second alinéa de l’article 16 est complétée par les mots : « ou des autres dispositions équivalentes du même code » ;
4° L’article 22 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa du II, après le mot : « participations », sont insérés les mots : « au secteur privé » ;
b) Au IV, après le mot : « personnes », sont insérés les mots : «, appréciés sur une base consolidée, » ;
c) Le V est ainsi modifié :
– à la fin du premier alinéa, le mot : « article » est remplacé par le mot : « titre » ;
– il est ajouté un d ainsi rédigé :
« d) Les participations détenues par un établissement public de l’État ayant pour objet principal la détention de titres sont assimilées à des participations détenues directement par l’État. » ;
5° L’article 23 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, la référence : « à l’article 22 » est remplacée par la référence : « au présent titre » ;
b) Le 1° est complété par les mots : « ainsi que les opérations assimilées réalisées simultanément à de telles prises de participation en faveur des salariés situés à l’étranger » ;
6° L’article 24 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Est assimilée à une opération d’acquisition toute opération de constitution d’une société. » ;
7° L’article 34 est ainsi modifié :
a) Le I est ainsi modifié :
– à la dernière phrase du premier alinéa, la référence : « au VI » est remplacée par les références : « aux a à c du VI » ;
– après le deuxième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« L’assemblée générale, saisie dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent I, peut statuer également sur la composition de l’ensemble du conseil d’administration, du conseil de surveillance ou de l’organe délibérant en tenant lieu, notamment sur la nomination ou le maintien en fonction des membres qu’il lui appartient de désigner. » ;
b) Le II est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Après la date limite fixée pour la mise en conformité, toute clause des statuts contraire à la présente ordonnance est réputée non écrite. »
Monsieur le président, afin d’accélérer nos débats, je renonce à ma prise de parole. Vous voyez que nous faisons des efforts, mes chers collègues.
L'amendement n° 50, présenté par Mme Assassi, M. Foucaud, Mme Beaufils, M. Bocquet et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Nous proposons de supprimer l’article 43 B.
La commission spéciale de l’Assemblée nationale a introduit dans le texte initial du projet de loi un grand nombre de dispositions qui n’étaient pas contenues dans l’ordonnance du 20 août 2014. Le nombre d’articles entre l’article 43 et l’article 53, qui était logiquement de onze au début, a plus que doublé, avec des dispositions importantes. L’article 43 B fait partie de cet ensemble. Il tend à accélérer le rythme de mise en œuvre des dispositions de l’ordonnance du 20 août 2014.
On pourrait nous rétorquer que les articles initiaux de ce volet consacré au secteur public et à sa gouvernance sont de simples mesures de « coordination » avec l’esprit de l’ordonnance, purement rédactionnelles.
Mais l’article 43 B modifie assez profondément les conditions de formation des conseils d’administration des entreprises à participation publique, majoritaire ou non.
Les conditions de formation ont été fixées à l’origine par la loi de nationalisation du 11 février 1982, signée par François Mitterrand, Pierre Mauroy, Claude Cheysson, Jacques Delors, Laurent Fabius, Robert Badinter, Pierre Dreyfus, Jean Auroux et Jean Le Garrec. Elles ont été confirmées par la loi relative à la démocratisation du secteur public de juillet 1983, signée par une bonne partie des mêmes personnalités, ainsi que par le regretté Pierre Bérégovoy, alors ministre des affaires sociales, Charles Fiterman, alors ministre des transports, ou encore Charles Hernu, alors ministre de la défense.
La combinaison des articles 7, 8 et 34 de l’ordonnance devrait conduire à la réduction du nombre de représentants de l’État au sein des conseils d’administration et organes de direction et, plus encore, à celle des salariés, dont la nomination dépendra pour l’essentiel de l’application non plus du texte de 1983 – de notre point de vue, c’est tout à fait regrettable –, mais, plus banalement, des dispositions du code de commerce.
Il est donc à craindre que la parole ouvrière ne soit guère entendue dans les organes dirigeants des entreprises demeurées dans le périmètre des participations gérées par l’Agence des participations de l’APE, dont l’action se résume en général à un arbitrage en faveur du choix de l’État actionnaire.
L’article 43 B fragilise la présence de l’État et des salariés au sein des organes dirigeants des entreprises à participation publique. Nous ne pouvons donc qu’en réclamer la suppression.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1127, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud, Mme David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 12
Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés
« 3° L’article 16 est ainsi rédigé :
« Art. 16 - Les contrats de plan élaborés en application de la loi n° 82-653 du 29 juillet 1982 susvisée et les contrats d’entreprise prévus par l’article 140 de la loi n° 2001-420 du 15 mai 2001 sont examinés par le conseil d’administration ou le directoire, après avis du conseil de surveillance. Les représentants des salariés disposent dans ce cadre d’un droit de veto.
« Ce veto emporte nécessité de présenter un nouveau projet de contrat de plan ou de contrat d’entreprise, dans un délai de deux mois maximum. » ;
La parole est à Mme Annie David.
Je constate que nos collègues étaient beaucoup plus nombreux à prendre la parole lorsqu’il s’agissait d’accorder des exonérations fiscales aux entreprises ou, il y a quelques jours, de privatiser les services de transports…
Il y a un instant encore, lorsque nous débattions de la participation salariale, nos collègues prenaient volontiers la parole, en particulier sur les travées de la droite.
Maintenant qu’il s’agit de maintenir la présence des salariés dans les conseils d’administration et d’asseoir le rôle de l’État dans les entreprises publiques, étrangement, il n’y a plus grand-monde au rendez-vous – excepté le groupe communiste, qui s’efforce de préserver, en dépit de tout, la présence de l’État dans les entreprises de service public, où il nous semble très important que la puissance publique joue tout son rôle.
Je vous rappelle, mes chers collègues, que le rôle des travailleurs dans les entreprises, notamment dans les entreprises publiques, est garanti au plan constitutionnel, puisque le préambule de la Constitution de 1946 dispose que « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises ».
Les instances de participation n’accordent généralement aux représentants des salariés qu’un droit d’information et une voix consultative. Or il serait véritablement illusoire de croire que la seule présence de leurs représentants au sien de ces organes suffirait à renforcer automatiquement le pouvoir des salariés.
Parmi les diverses formes de participation des salariés aux instances de décision de l’entreprise figurent les administrateurs et administratrices salariés, qui, en France, sont les seuls représentants du collectif de travail à avoir voix délibérative en tant que tels. Leur participation aux décisions n’en reste pas moins partielle, faute d’une réelle capacité d’influence. Certes, les représentants des salariés assistent aux débats, mais le conseil d’administration n’est pas un lieu de négociation, surtout pas en ce qui concerne la stratégie de l’entreprise.
Les élus du personnel rendent donc des avis qui ne contraignent aucunement les employeurs. Ils peuvent émettre des avis négatifs dans les négociations rendues obligatoires, obtenir l’appui d’experts-comptables et de cabinets économiques pour prouver la viabilité des activités menacées, mettre en évidence les conséquences dramatiques des choix opérés, non seulement pour les salariés, mais aussi pour les populations et les territoires, et, surtout, suggérer des stratégies alternatives. En règle générale, cependant, leurs contre-propositions sont balayées d’un revers de la main !
Dans les faits, les institutions représentatives du personnel sont des chambres d’enregistrement qui ne peuvent que retarder les échéances.
Ce caractère facultatif de leurs avis empêche toute prise en compte du point de vue du personnel sur les choix stratégiques des entreprises, dont les salariés sont pourtant les principaux artisans.
C’est pourquoi nous proposons d’accorder aux représentants des salariés un véritable pouvoir, sous la forme d’un droit de veto qui leur permette de peser sur les décisions stratégiques de leur entreprise. Ce droit de veto emporterait l’obligation de présenter un nouveau projet de contrat de plan ou de contrat d’entreprise dans un délai maximal de deux mois.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1128, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. - Alinéas 13 à 19
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés :
…° L’article 22 est ainsi rédigé :
« Art. 22. - I. - Les opérations par lesquelles l’État transfère tout ou partie du capital qu’il détient ne peuvent être décidées par décret qu’après avoir été autorisées par la loi.
« II. - Les opérations par lesquelles un établissement public de l’État ou une société dont l’État ou ses établissements publics détiennent directement ou indirectement, seuls ou conjointement, tout ou partie du capital sont soumises aux mêmes règles. »
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
Comme ma collègue Annie David, je trouve ce débat passablement curieux.
Alors que nous traitons d’un problème grave, la privatisation d’un certain nombre de sociétés, quelle image du Parlement, quelle image du Sénat donnons-nous à nos concitoyens, qui en ont déjà une idée bien mauvaise ?
J’observe simplement que tout le monde se tait sur les questions que nous soulevons, en particulier M. le ministre, qui ne veut même plus répondre aux sénateurs communistes, ce qui est pour le moins étrange !
Fidèles à leur opposition à l’ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, les auteurs du présent amendement proposent d’en réécrire l’article 22.
On a parlé de l’utilisation des privatisations et des cessions d’actifs détenus dans les entreprises publiques. Peut-être ont-elles eu une petite utilité dans le cas d’Alstom ; mais elles servent surtout à respecter les règles fixées par Bruxelles en matière de limitation du déficit public !
C’est pourquoi nous proposons que les opérations de transfert ou de cession ne puissent être décidées par décret qu’après avoir été autorisées par la loi.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1129, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 20 à 22
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
…° L’article 23 est abrogé ;
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
Dans sa rédaction actuelle, l’article 23 de l’ordonnance du 20 août 2014 vise à permettre le dépeçage, au profit du privé, d’un certain nombre d’entreprises dans lesquelles la participation de l’État est minoritaire, par le recours à des ordonnances, et non à la loi.
Ce dispositif est à nos yeux désastreux, car il ouvre la voie à des cessions d’actifs de l’État décidées sans que le Parlement ait son mot à dire. Il risque aussi de faire s’éloigner encore un peu plus la perspective d’un État stratège, artisan d’une véritable politique industrielle ; cette perspective s’effrite depuis au moins trente ans, en raison d’un mouvement général de désengagement massif de l’État de notre économie.
Les cessions d’actifs de l’État par ordonnance pourraient concerner notamment Thales, dont l’État possède 27 % du capital, Renault, dont l’État détient 15 %, Orange ou Airbus.
Après les privatisations de ces grands fleurons de l’industrie française, qui ont souvent rimé avec licenciements, la vente d’actifs de l’État risque de nuire de nouveau à l’emploi et aux conditions de travail.
De plus, sous la pression des actionnaires privés, la perte d’influence de l’État dans ces grands groupes industriels va favoriser une vision à court terme, alors que c’est une vision à long terme dont ces entreprises ont besoin.
L’exemple le plus flagrant est celui des groupes aéronautiques comme Thales ou Airbus, dont nous aurons certainement l’occasion de reparler. Ces groupes sont actuellement dans une forme éblouissante ; les commandes se multiplient et les cadences de production augmentent. Ainsi, Airbus a annoncé, le 7 avril dernier, 101 commandes nettes et 134 livraisons d’avions commerciaux pour le premier trimestre de 2015.
Or les défis que notre industrie aéronautique doit relever sont encore nombreux : la filière doit continuer d’investir pour conserver son avance sur la concurrence plutôt que de satisfaire les intérêts immédiats d’actionnaires toujours plus gourmands.
Pour favoriser une vision stratégique de long terme visant à consolider la compétitivité française – objectif dont on parle beaucoup – et à créer des richesses et des emplois, il faut une influence forte de l’État dans ces entreprises !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1130, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 23 et 24
Remplacer ces alinéas par trois alinéas ainsi rédigés
6° L’article 24 est ainsi rédigé :
« Art. 24. - Les opérations par lesquelles l’État se porte acquéreur d’une participation sont décidées par décret.
« Il en est de même pour les créations de sociétés dans lesquelles l’État est détenteur de tout ou partie du capital. » ;
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Cet amendement vise à assurer la transparence dans la gestion des actifs publics.
La Cour des comptes a consacré un chapitre de son rapport public annuel pour 2014 aux prises de participations publiques, dénonçant « une opération mal conduite dans le secteur de l’armement » ; plus précisément, elle a employé les mots d’« incohérences », « faiblesses », « confusion » et « ambiguïté » au sujet de l’entrée de deux entreprises publiques, GIAT Industries et SOFIRED, au capital de Manurhin. La Cour a également souligné « les difficultés rencontrées par l’État pour exercer pleinement ses pouvoirs d’actionnaire et pour arbitrer entre ses intérêts patrimoniaux et stratégiques ».
Dans une partie de son rapport public annuel pour 2008 intitulée « L’État actionnaire : apports et limites de l’Agence des participations de l’État », la Cour des comptes a critiqué notamment une « ligne stratégique peu lisible » et une « information budgétaire insuffisante ». Elle a également constaté que les cessions de titres ont assez souvent servi à financer des politiques qui relevaient normalement, pour leur financement, du budget général de l’État.
La Cour des comptes conclut sans appel : « L’impératif de transparence devrait pourtant obliger le ministère à énoncer clairement, à l’appui de la loi de finances, les objectifs assignés à la gestion des participations financières de l’État, et à rendre compte ensuite dans le détail de toutes les opérations significatives, notamment pour l’utilisation des produits de cession. »
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1131, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 25 à 31
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
7° Les articles 34, 37, 38 et 39 sont abrogés.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Le rapport de la commission spéciale du Sénat est peu disert sur l’article 43 B du projet de loi. Il se borne à expliquer que cet article, comme les articles 43 A et 43 C, corrige ou complète l’ordonnance du 20 août 2014 afin de clarifier le droit applicable, notamment en ce qui concerne les règles de représentation des salariés au sein des organes de gouvernance des sociétés à participation publique.
Cette série d’articles est censée permettre « l’élaboration d’une doctrine de l’État actionnaire et le renforcement du pilotage stratégique de l’Agence des participations de l’État ». Tout un programme ! Reste que ces dispositions, disons-le tout net, vont permettre à l’État de faciliter la mise sur le marché de 5 à 10 milliards d’euros d’actifs de sociétés dans lesquelles il détient des parts.
Si nous proposons l’abrogation des articles 34, 37, 38 et 39 de cette ordonnance, c’est parce qu’ils alignent les règles relatives à la composition de l’ensemble des conseils d’administration sur celles qui sont fixées par le code de commerce ; ces modifications toucheraient notamment le nombre des administrateurs publics et des représentants des salariés.
Nous appelons le Sénat à faire échec à ces nouvelles règles qui s’appliqueraient dans un terrible jeu de Monopoly !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1132, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Les six premiers alinéas de l’article 7 de l’ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d’investissement sont ainsi rédigés :
« Le conseil d’administration de la société anonyme Bpifrance comprend vingt et un administrateurs :
« 1° Huit représentants des actionnaires, dont quatre représentants de l’État nommés par décret et quatre représentants de la Caisse des dépôts et consignations ;
« 2° Quatre représentants des régions, nommés par décret sur proposition d’une association représentative de l’ensemble des régions ;
« 3° Quatre personnalités qualifiées choisies en raison de leur compétence en matière économique et financière ainsi que de développement durable, nommées par décret ;
« 4° Une personnalité qualifiée choisie en raison de sa compétence en matière économique et financière, nommée par décret pour exercer les fonctions de directeur général de la société anonyme Bpifrance ;
« 5° Deux hommes et deux femmes comme représentants des salariés de la société et de ses filiales dans lesquelles elle détient, directement ou indirectement, la majorité du capital, élus dans les mêmes conditions que celles prévues au chapitre II du titre II de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, les modalités du scrutin permettant de respecter l’élection de deux femmes et de deux hommes étant précisées par les statuts. »
La parole est à M. Pierre Laurent.
Cet amendement vise à modifier la composition du conseil d’administration de Bpifrance.
Comme je sais que nos collègues, en particulier ceux du groupe socialiste, accordent une grande importance à cette institution, peut-être aurons-nous la chance d’obtenir une réponse – à moins que la consigne de silence qui a visiblement été négociée à la suspension entre la commission spéciale, le Gouvernement et le groupe socialiste au sujet des articles portant sur les privatisations, ne nous en prive, ce qui serait dommage.
Exclamations sur les travées du groupe socialiste.
Nous proposons de porter de quinze à vingt et un le nombre des administrateurs de Bpifrance afin de faire respecter la loi du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public. Cette loi, comme le précise son article 1er, s’applique de droit aux « établissements publics industriels et commerciaux de l’État autres que ceux dont le personnel est soumis à un régime de droit public » et aux « autres établissements publics de l’État qui assurent tout à la fois une mission de service public à caractère administratif et à caractère industriel et commercial lorsque la majorité de leur personnel est soumise aux règles du droit privé ».
Bpifrance, société anonyme publique sous contrôle de l’État et exerçant une mission de service public en faveur du financement et du développement des entreprises, entre manifestement dans le champ d’application de cette loi. Elle est donc tenue d’appliquer les règles que celle-ci prévoit en ce qui concerne la composition de son conseil d’administration. Or la composition actuelle du conseil d’administration de Bpifrance est très en deçà des exigences démocratiques fixées par la loi du 26 juillet 1983, puisque, sur quinze administrateurs, seuls deux représentent les salariés.
Nous proposons que le conseil d’administration de Bpifrance soit composé de la façon suivante : huit représentants des actionnaires, quatre pour l’État et quatre pour la Caisse des dépôts et consignations, quatre représentants des régions, quatre personnalités qualifiées, une personnalité qualifiée choisie en raison de sa compétence en matière économique et financière et quatre représentants des salariés, deux hommes et deux femmes.
Il serait étonnant que cette proposition ne recueille pas l’assentiment de ceux qui, comme nous, attachent de l’importance au développement de l’action publique de Bpifrance dans un cadre démocratique donnant une voix importante aux salariés dans la gestion de l’institution !
Je veux d’abord préciser à M. Laurent qu’aucune consigne n’a circulé entre la commission spéciale, le Gouvernement ou le groupe socialiste.
Je l’ai rappelé à l’occasion de la discussion de votre premier amendement sur l’article 43 B : vous avez adopté une position de principe ; pour notre part, nous avons fait de même, au nom de la commission spéciale.
Vous considérez qu’il ne fallait pas aller plus loin que l’ordonnance du 20 août 2014. Or nous avons estimé que l’ordonnance était utile, et nous en avons donné les raisons. Dès lors, nous ne pouvons qu’être défavorables à ces amendements et je ne vois pas ce que je pourrais ajouter.
Concernant l’amendement n° 1132, sa justification ne me paraît pas évidente, puisqu’il ne tend qu’à augmenter le nombre de membres de chacune des catégories composant les conseils d’administration.
Pour cette raison, l’avis est également défavorable.
Je suis très étonné par cet amendement.
Soyons clairs : d’une certaine manière, la BPI est issue du regroupement du Fonds stratégique d’investissement, d’OSEO et de CDC Entreprises. Or la représentation demandée par nos collègues communistes ne se retrouvait dans aucune de ces structures.
J’attire votre attention sur le fait que, si nous devions nous orienter vers ce type de répartition des membres du conseil d’administration, sur vingt et un administrateurs, nous n’en retrouverions que quatre de la Caisse des dépôts et consignations, alors que cette dernière apporte la moitié des financements en capital de la BPI. Cela pose un vrai problème !
Par ailleurs, la Caisse des dépôts et consignations étant sous le contrôle et la tutelle du Parlement, comment des parlementaires pourraient-ils demander un affaiblissement de la représentation de la Caisse dans l’une de ses principales filiales, qui participe aux résultats et à son modèle économique ?
J’appelle donc mes collègues à ne pas adopter, en tant que parlementaires, une position qui affaiblisse la représentation d’une institution placée sous notre propre contrôle.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 43 B est adopté.
(Supprimé)
L’article dont nous débattons ici a été supprimé par la commission spéciale du Sénat au motif de son imprécision et d’un caractère normatif pour le moins limité.
Selon les attendus du rapport au fond, la notion d’« intérêts essentiels de la Nation », invoquée dans l’article et l’amendement de notre collègue Clotilde Valter, rapporteure de cette partie du projet de loi, souffrirait d’imprécision et pourrait être combattue au plan juridique.
Cependant, s’il fallait trouver une illustration de ce principe, peut-être le pourrions-nous dans le neuvième alinéa du préambule de la Constitution de 1946, élément du bloc de constitutionnalité : « Tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité ».
Je rappellerai ici que c’est au motif de ce texte que l’État ne peut, dans la gestion de moyen et long terme de ses participations, décider de se délester de plus de la moitié du capital d’Aéroports de Paris, ou de plus de 70 % de celui d’EDF.
Toujours est-il que la commission spéciale a voulu faire disparaître cette disposition. Pour notre part, si nous n’avons pas souhaité la réinscrire dans le texte, nous en comprenons parfaitement les attentes.
Quoi qu’il en soit, la véritable question au cœur de la controverse est bel et bien d’une autre nature. Sur le fond, la proclamation de l’article 43 CA constituait une sorte d’aveu de reconnaissance sur la nature et les effets d’une cession d’entreprise publique au privé.
Nous l’avons dit, le cadre apparemment protecteur fixé par l’ordonnance d’août 2014 ne concerne in fine qu’un nombre réduit d’entreprises cotées à participation publique, alors même que ces entreprises constituent une part importante du patrimoine industriel et commercial de la Nation.
Pour le reste, nous nous situons presque dans le droit commun, qui viendra à s’appliquer partout ou presque, en fonction du bon vouloir du ministre de l’économie ou des estimations d’une commission indépendante dont les membres seront peut-être d’anciens spécialistes de la gestion d’actifs…
Le recours à la loi, le passage des projets de cession et leur contrôle par le Parlement, tout cela sera secondaire. Et le dispositif d’action privilégiée – ce que les Anglais appellent « golden share » – ne fera pas le compte.
À la vérité, mes chers collègues, nous sommes dans une période où il convient de faire un choix clair.
Les sociétés cotées dans lesquelles l’État dispose de parts ont rapporté l’an dernier 4 milliards d’euros de dividendes, soit un rendement proche de 4 % pour un portefeuille valant environ 100 milliards d’euros et, pour l’essentiel, largement incessible.
Dans le même temps, depuis le 25 août 2014, France Trésor émet des bons du Trésor sur formule dont le taux d’intérêt est négatif, et le TEC 10, le taux à échéance constante à dix ans, se positionne désormais aux alentours de 0, 45 %.
Cela n’est pas sans inspirer – nous l’avons vu – quelques intrépides parlementaires pour faire en sorte que nous assistions à la diversification des placements de l’épargne salariale. Comme les titres d’origine publique ne rapportent plus suffisamment, il faut trouver autre chose !
Mais la vérité est que la France, dans un tel contexte, renforcé par la mise en œuvre du quantitative easing de la BCE – c'est-à-dire la création monétaire –, n’a strictement aucun intérêt à céder son patrimoine pour payer une dette dont le service s’amenuise et la progression se ralentit.
C’est aussi cela qu’il convenait de rappeler ici : la situation actuelle a beaucoup à voir avec les tendances déflationnistes qui affectent l’économie de la zone euro, tendances que les politiques de rigueur budgétaire imposées aux peuples européens conduisent d’ailleurs peu à peu à renforcer, et l’on en voit les effets.
Je souhaite simplement préciser que, sur cet article, le Gouvernement avait déposé un amendement visant à rétablir l’article 43 CA, que la commission avait rejeté. À la suite d’échanges informels avec votre cabinet, monsieur le ministre, vous avez retiré cet amendement, ce dont nous vous remercions.
I. –
Non modifié
II. – Les opérations par lesquelles une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales transfère au secteur privé la majorité du capital d’une société réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 75 millions d’euros ou employant plus de 500 personnes, appréciés sur une base consolidée, sont décidées par l’organe délibérant de cette collectivité territoriale ou de ce groupement sur avis conforme de la Commission des participations et des transferts.
Le présent article porte sur l’encadrement des cessions des participations détenues par des collectivités territoriales.
Les différentes structures créées pour mettre en œuvre des actions économiques sous statut privé font partie du paysage. Sociétés d’économie mixte, sociétés publiques locales, sociétés d’économie mixte à opération unique servent à les mettre en œuvre. Elles peuvent avoir leur intérêt, à condition de ne pas glisser vers une conception totalement privée où les élus ne seraient que des faire-valoir.
Il faut dire que le terrain juridique a été bien préparé pour permettre la disparition de services publics, pour en faciliter aujourd’hui la vente. Les collectivités locales seraient-elles dans l’incapacité de gérer de tels secteurs ? Ou est-ce un outil facilitateur pour des privatisations futures ?
De notre point de vue, monsieur le ministre, la société publique locale devient ainsi, à partir de 2010, le cheval de Troie de la privatisation des services publics. Ces sociétés anonymes dirigées par des élus auraient été créées pour être plus efficaces, plus réactives et plus sûres afin de démontrer, comme vous le répétez à l’envi, l’incapacité a priori des établissements publics à accomplir leurs missions.
C’est là toute votre analyse, qui transpire par tous les articles de ce texte de loi : le privé serait économiquement plus efficace que le public ! Et vous vous acharnez contre tout ce qu’il peut y avoir de public dans nos territoires.
Vous n’avez pas compris, ni vous ni votre gouvernement, que les différentes défaites électorales de votre majorité sont essentiellement dues à vos politiques destructrices du lien social et destructrices de nos services publics.
Nous avons bien compris que l’objectif est en réalité de servir la finance et l’industrie, qui ne supportent pas que des activités publiques puissent être gérées financièrement de façon positive tout en remplissant leur objectif d’égalité de traitement.
Vous estimez donc qu’il est temps, avec ce texte, de faire fonctionner ces services non pas au nom de l’intérêt général, mais au seul bénéfice de quelques intérêts particuliers, tout cela sous couvert d’harmonisation européenne.
Faciliter ces transferts d’actifs, afin qu’ils puissent se faire sans aucune contrainte : telles sont vos ambitions.
Depuis 1986, différents textes ont permis de construire par paliers cette privatisation qui est la finalité même de toutes les politiques libérales développées.
Vous semblez ignorer que les services publics jouent un rôle indéniable dans le développement économique de notre pays. Le dogme est de les détruire au nom de la primauté du marché par rapport à l’intérêt de nos territoires.
Puisqu’il est aussi question d’emploi, dans ce projet de loi, précisons que le maintien des services publics, c’est le maintien de 800 000 emplois, y compris dans le privé, comme l’a démontré une étude qu’il faudrait réactualiser.
Notre pays a surmonté la crise de 2008 grâce à l’existence de ses différents services publics, chacun s'accorde à le reconnaître. Investir dans les services publics, c’est répondre aux besoins des habitants, c’est répondre au besoin d’aménagement du territoire. Pour vous, ce ne serait qu’une dépense qu’il faudrait réduire.
Votre souci est de mettre en concurrence nos communes, nos départements et nos régions, pour susciter plus d’activité et plus de croissance. La disparition des services publics dans nos campagnes et nos territoires périurbains est la conséquence directe des politiques libérales.
Avec votre texte, vous finalisez ainsi la destruction de nos services publics et faites la preuve que les services rentables financièrement ne peuvent rester dans le giron public, qu’ils doivent être obligatoirement cédés au privé – aucun opérateur privé ne décidera d’acquérir une société qui ne serait pas rentable, vous le savez aussi bien que moi. Pour cela, il suffit pour vous de leur faciliter la tâche. C’est tout l’objet de cet article 43 C.
Monsieur le ministre, vous allez entendre un discours totalement différent : il y a en effet deux lectures de cet article 43 C.
Un certain nombre de services publics ont pu être transformés en sociétés, et il se rencontre aussi des collectivités qui ont développé un domaine privé, des actifs patrimoniaux et des sociétés, au capital desquelles elles peuvent souhaiter un jour réduire leur participation.
Ce qui me préoccupe, c'est que cet article va limiter l’autonomie et la libre gestion des collectivités territoriales. En effet, il résulte du II de l’article 43 C qu’un avis conforme de la Commission des participations et des transferts est nécessaire pour effectuer une opération faisant passer sous le seuil de détention de 50 % du capital.
Pour le coup, je m'interroge : que devient la libre administration des collectivités territoriales si nous devons, lorsqu’une assemblée délibérante élue au suffrage universel a statué sur la gestion d’actifs qu’elle détient – actifs financés et constitués au fil des années –, recueillir un avis conforme de la Commission des participations et des transferts pour pouvoir réaffecter telle ou telle ressource dans des investissements patrimoniaux différents – en fonction, par exemple, des besoins du développement économique de son territoire ?
Cela signifie qu’un droit de veto est exercé par un service de l’État sur la libre administration des collectivités territoriales. Dans ces conditions, cet article me semble clairement poser un problème de fond, celui de la libre administration des collectivités. Il peut constituer une entrave à la gestion des actifs patrimoniaux d’un certain nombre de collectivités, compte tenu du montant retenu pour le chiffre d'affaires.
Et j’ai en tête des exemples très précis d’opérations qu’un certain nombre de collectivités ont pu réaliser par le passé à la suite de délibérations concordantes et prises de manière consensuelle, et qui, aujourd’hui, nécessiteraient de passer sous les fourches caudines de la Commission des participations et des transferts.
M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.
L'amendement n° 1134, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Michel Billout.
L’alinéa 1 de cet article 43 C prévoit d’abroger le II de l’article 41 de l’ordonnance du 20 août 2014 que nous devons par la même occasion ratifier. Nous ne reviendrons pas sur ce point, vous savez ce que nous en pensons.
Dans le détail, de quoi s’agit-il exactement ? Le III de cette ordonnance procède à une réécriture des règles régissant les opérations en capital des sociétés à participation publique. Si cette partie n’emporte pas par elle-même privatisation, elle n’en a pas moins une portée significative.
En effet, le I de cet article 41 abroge la loi du 2 juillet 1986 et certaines dispositions de la loi du 6 août 1986, plus particulièrement son article 21. Celui-ci prévoyait, pour les opérations concernant des entreprises dont l’effectif ne dépasse pas mille salariés et le chiffre d’affaires 150 millions d’euros, un régime de déclarations et d’approbations qui compliquait inutilement les opérations de cession de faible envergure. L’article 21, quant à lui, n’est pas remplacé dans le dispositif de l’ordonnance.
Ainsi, l’ordonnance conduit à abroger formellement les lois de 1986 tout en maintenant en vigueur leurs dispositions pour les opérations non régies par le III. C’est-à-dire que le régime des cessions non significatives est enterré, mais, paradoxalement, ressuscité au paragraphe suivant avec, qui plus est, un champ d’application redéfini.
Cette incohérence serait assez comique si cette ordonnance du 20 août 2014 n’avait pas été prise au titre de la loi du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à « simplifier et sécuriser la vie des entreprises ».
Par notre amendement, nous tenons à souligner ces incohérences, mais, surtout, nous souhaitons maintenir la protection offerte par le II de l’article 41 initialement prévu, qui concerne le régime des cessions dites « non significatives ».
Outre les autres éléments que nous avons déjà développés sur cette ordonnance, le champ d’intervention de l’autorité réglementaire est élargi aux opérations non constitutives d’opérations de privatisation et portant sur des participations minoritaires de l’État qui seront décidées par le ministre de l’économie. On pourra dès lors vendre par petits bouts, sans l’aval du Parlement.
Pour toutes ces raisons, nous vous proposons de voter cet amendement.
L’avis est également défavorable.
Je voudrais en profiter pour apporter quelques précisions, notamment à M. Bouvard.
L’article 43 C prévoit d’abord de baisser le seuil d’autorisation à 75 millions d’euros, contre 150 millions d’euros aujourd’hui, ce qui est un point important, puisque cela accroîtra la transparence et facilitera le contrôle du Parlement.
En outre, la libre administration des collectivités territoriales ne sera pas entravée. La Commission des participations et des transferts rendra un avis…
… conforme, en effet, monsieur Bouvard, parce que les collectivités territoriales doivent bien trouver le moyen technique de se conformer à un principe constitutionnel auquel elles sont aussi soumises, à savoir la préservation de la valeur de l’actif qui est à vendre.
Or, aujourd’hui, il n’y a pas d’équivalent de la Commission des participations et des transferts au niveau des collectivités territoriales, d’où ce seuil de 75 millions d’euros ou de plus de 500 personnes. C’est le même seuil auquel nous avons abaissé l’autorisation législative pour procéder à une privatisation.
Je le répète, en abaissant ce seuil, nous introduirons davantage de transparence au bénéfice du Parlement, puisque, jusqu’à la transposition de ces ordonnances, on pouvait tout à fait, pour une opération d’un montant de 80 millions d’euros, par exemple, procéder à une privatisation par décret.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1133, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
II. – Les opérations par lesquelles une collectivité territoriale ou un groupement de collectivités territoriales transfère au secteur privé tout ou partie du capital d’une société détenu par cette collectivité ou ce groupement, appréciés sur une base consolidée, font l’objet d’une autorisation préalable de l’État, dans des conditions déterminées par décret en Conseil d’État.
La parole est à M. Michel Billout.
Il s’agit d’un amendement de repli, car nous sommes contre la privatisation et l’ouverture du capital des sociétés publiques, qu’elles soient nationales ou locales.
Le présent amendement tend à modifier trois éléments essentiels de l’article 43 C. Celui-ci, issu d’un amendement de l’Assemblée nationale, autorise la privatisation de sociétés détenues par une collectivité territoriale et en prévoit les modalités, tout en limitant la portée de son application aux sociétés réalisant un chiffre d’affaires supérieur à 75 millions d’euros ou employant au moins 500 personnes, comme il vient d’être rappelé.
Nous vous proposons donc de supprimer cette clause. Ainsi, les modalités d’ouverture du capital seront les mêmes, quels que soient la taille et le chiffre d’affaires de l’entreprise.
Par ailleurs, nous souhaitons revenir à la formulation du texte gouvernemental, qui prévoyait une autorisation préalable de l’État sous la forme d’un décret pris en Conseil d’État, en lieu et place de l’amendement de la commission spéciale, qui a remplacé cette autorisation par un avis conforme de la Commission des participations et des transferts, autorité administrative indépendante chargée uniquement de donner un avis et de vérifier la valeur des actifs cédés et les conditions de cette cession.
À aucun moment la CPT ne peut donc juger de l’opportunité de cette cession ni des conflits d’intérêts qui pourraient survenir, du fait de la proximité éventuelle des acteurs en présence.
Enfin, notre amendement tend à supprimer la précision selon laquelle c’est l’organe délibérant de la collectivité territoriale qui décide de la cession, cette précision étant superfétatoire.
Aussi, par cet amendement, nous souhaitons rendre plus transparentes toutes les opérations de cession qui pourraient avoir lieu au niveau local, quels que soient la taille et le chiffre d’affaires de la société publique locale visée, et redonner ainsi tout son rôle à l’État, qui, tout en respectant la libre administration des collectivités territoriales, ne doit pas cesser d’être le garant du respect de la légalité des actes pris par elles.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 43 C est adopté.
L'amendement n° 1122, présenté par Mme Assassi, MM. Bocquet, Bosino et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 43 C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport sur les conséquences pour la société française de la privatisation de Gaz de France.
La parole est à Mme Annie David.
Nous demandons un rapport sur les conséquences de la privatisation de GDF.
En 2006, la Commission européenne nous avait promis que la concurrence ferait baisser les prix et améliorerait la qualité des services.
Résultat ? En dix ans, monsieur Lenoir, le prix du gaz…
… a augmenté de 66 % !
Quant aux missions de service public assurées pour la plupart gratuitement avant 2004, elles sont devenues payantes, sans parler des salariés dont les conditions de travail et salariales se sont dégradées au fil des années dans une recherche constante d’économies.
Je voudrais pourtant rappeler le neuvième alinéa du préambule de la Constitution de 1946 : « Tout bien, toute entreprise, dont l’exploitation a ou acquiert les caractères d’un service public national ou d’un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité. »
À l’heure où privatisations et cessions d’actifs sont prévues et facilitées par votre projet de loi, monsieur le ministre, il nous semble opportun de dresser le bilan, et de confronter les incantations libérales et autres recettes miracles à la réalité.
C’est cela aussi, faire preuve de responsabilité et de réalisme ! C’est cela aussi, vivre dans la réalité du quotidien de nos concitoyennes et de nos concitoyens !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1123, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, MM. Foucaud, Bosino et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 43 C
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport contenant des propositions pour la mise en place d’un pôle public bancaire.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Comme nous l’avons dit dès le début de la discussion de ce texte, une nouvelle politique de croissance ayant pour objectif le plein emploi et l’épanouissement humain doit, selon nous, se fonder sur une réforme en profondeur du secteur bancaire.
Les banques et les établissements de crédit jouent un rôle essentiel, c’est une évidence, dans l’utilisation de l’argent dans notre pays. Ce sont les banques qui déterminent les choix fondamentaux. C’est un débat fondamental : est-ce l’économie ou le politique qui doit l’emporter ? Vous le savez, pour nous, ce sont les choix politiques qui doivent en quelque sorte donner le la et fixer les lignes directrices de toute économie.
Or, aujourd’hui, c’est tout le système bancaire, en France et en Europe, qui est dominé par les exigences de rentabilité des détenteurs privés de capitaux et par les marchés financiers.
Mais quel rôle voulons-nous assigner collectivement aux banques ? Répondre à cette question, c’est définir les critères qui doivent motiver le financement d’un projet à travers le crédit. Aujourd’hui, seuls les projets les plus rentables pour les actionnaires sont financés. Cela conduit à privilégier les placements financiers et à rechercher des mécanismes spéculatifs sans cesse plus sophistiqués.
Or, monsieur le ministre, l’argent manque pour engager la politique de croissance que vous semblez appeler de vos vœux. Avec de nombreux économistes, nous proposons aux politiques de reprendre la main sur l’économie. Le pouvoir politique, aujourd’hui, manque indéniablement de leviers pour imposer une nouvelle orientation qui irait à l’encontre des intérêts du marché et de la finance.
Ce pôle public bancaire dont nous souhaitons la création serait fondé sur une nouvelle articulation des établissements publics financiers actuels et la nationalisation de nouveaux établissements qui donnerait les moyens de changer l’orientation du crédit en pénalisant, notamment, les investissements spéculatifs au moyen de taux élevés, et en encourageant les investissements réels et de recherche et développement des entreprises par des taux bas, voire nuls ou négatifs, s’ils étaient tournés vers la création d’emplois.
Le souci du progrès et de l’égalité exige de rechercher d’autres voies – vous le voyez, nous sommes donc aussi dans la construction de propositions – afin de sortir de cette impasse dans laquelle nous enferme la logique folle du profit.
L'amendement n'est pas adopté.
(Non modifié)
I. – L’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique est ratifiée.
I bis. – L’article 2 de la même ordonnance est complété par un III ainsi rédigé :
« III. – Pour les besoins de l’application de la présente ordonnance, les dispositions visant les établissements publics de l’État sont également applicables à la Caisse des dépôts et consignations, à l’exception du titre II. »
II. –
Supprimé
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1135, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 2 et 3
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Il ne semble pas souhaitable de prévoir des dispositions menant à la privatisation des filiales de la Caisse des dépôts et consignations.
L'amendement n° 1657, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 3
Rédiger ainsi cet alinéa :
« III. – Les articles 1, 2, le IV de l’article 22 et les articles 23 à 31 de la présente ordonnance sont seuls applicables aux opérations par lesquelles la Caisse des dépôts et consignations transfère au secteur privé la majorité du capital des sociétés dans lesquelles elle détient, directement ou indirectement, une participation. »
II. – Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Au deuxième alinéa du II de l’article 7 de la loi n° 2003-1365 du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Telecom, les mots : « de la participation directe et indirecte de l’État » sont remplacés par les mots : « des participations de l’État et de la société anonyme Bpifrance et ses filiales directes et indirectes ».
La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° 1657 et pour donner l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 1135.
Je comprends votre objectif, madame Assassi, qui est d’améliorer le contrôle sur les participations de la CDC, mais il me semble que l’adoption de votre amendement, tel qu’il est rédigé, conduirait à l’effet inverse.
Il ne vous semble pas souhaitable, dites-vous, de prévoir des dispositions menant à la privatisation des filiales de la CDC. Or, précisément, les alinéas 2 et 3 de l’article 43 rendent applicable aux filiales de la CDC le contrôle des opérations de cession tel que prévu au II de l’ordonnance du 20 août 2014.
La suppression de ces deux alinéas aurait pour conséquence de priver la Caisse des dépôts et consignations de toute faculté de contrôle sur les privatisations et la dépossèderait de l’exercice de son droit à autorisation.
Ce qui est exact, en revanche, c’est que les dispositions relatives à la gouvernance de la Caisse des dépôts et consignations étaient inadaptées, compte tenu de son statut particulier. L’Assemblée nationale a voté un amendement présenté par M. Emmanuelli et Mme Valter afin de lever toute ambiguïté quant à l’applicabilité à la Caisse des dépôts et consignations de l’ordonnance du 20 août 2014.
Comme cela a été est indiqué lors des débats, il est nécessaire d’améliorer ce texte sur deux points, ce qui est précisément l’objet de l’amendement n° 1657.
Il s’agit, d’une part, de préciser que sont applicables aux participations détenues par la Caisse des dépôts et consignations les dispositions des articles 1 et 2, du IV de l’article 22 et des articles 23 à 31 de la présente ordonnance, autrement dit toutes les dispositions relatives aux opérations sur le calcul des sociétés à participation publique parmi lesquelles la consultation de la Commission des participations et des transferts, pour être sûr que soit préservée la valeur patrimoniale – les autres dispositions de l’ordonnance, en particulier celles qui sont relatives à la gouvernance, resteront applicables à ces participations au titre des participations de l’État ou de ses établissements publics, lorsqu’il en existe .
Il s’agit, d’autre part, de modifier la disposition spéciale de la loi du 31 décembre 2003 relative aux obligations de service public des télécommunications et à France Telecom applicable à Orange afin de maintenir l’appréciation consolidée des participations détenues par l’État et le groupe Bpifrance pour l’application de l’ensemble des règles relatives à la gouvernance et aux opérations sur le capital chez Orange.
Comme vous le savez, le groupe Bpifrance, filiale qui est détenue par l’État et la Caisse des dépôts et consignations, possède aujourd’hui ces participations.
À la lumière de ces explications, je vous invite à retirer votre amendement n° 1135.
Je suis ravie de constater que, dès lors que M. le ministre accepte d’échanger et de débattre avec nous, nous pouvons nous mettre d’accord.
Je retire cet amendement, monsieur le président.
L'amendement n° 1135 est retiré.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 1657 ?
La commission spéciale émet un avis favorable, en précisant bien que cet amendement est le fruit d’un travail commun entre l’État et la Caisse des dépôts et consignations.
L'amendement est adopté.
L'article 43 est adopté.
(Non modifié)
Le 1° du I de l’article 22 de la même ordonnance est ainsi modifié :
1° Au a, le mot : « mille » est remplacé par les mots : « cinq cents » ;
2° Au b, le montant : « 150 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 75 millions d’euros ».
Je suis saisi de huit amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1141, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le 1° du I de l’article 22 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« 1° Lorsque l’État détient directement, depuis plus de cinq ans, au moins 15 % du capital social de la société ; ».
La parole est à M. Michel Billout.
Monsieur le président, avec votre permission, je défendrai également l’amendement n° 1142.
Ces amendements visent à préciser le champ d’application de l’ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique.
En effet, son article 22 prévoit que l’État peut transférer au secteur privé la majorité du capital de sociétés sans autorisation législative s’il ne détient pas, depuis plus de cinq ans, plus de la moitié du capital et si l’une des deux conditions suivantes n’est pas remplie : les effectifs de la société sont supérieurs à 1 000 personnes au 31 décembre de l’année précédant le transfert ou son chiffre d’affaires consolidé avec celui de ses filiales telles qu’elles viennent d’être définies est supérieur à 150 millions d’euros à la date de clôture de l’exercice précédant le transfert.
Si l’on y regarde d’un peu plus près, quelles sont les entreprises qui seraient donc soumises à autorisation législative ? Elles se comptent sur les doigts d’une main : EDF, Aéroports de Paris, La Poste, France Télévisions ou encore La Française des jeux, les autres étant souvent des établissements publics industriels et commerciaux.
Il est donc erroné de prétendre renforcer, par cette ordonnance, le droit des privatisations ou le clarifier. Ce n’est pas un dispositif de protection ; ce qui est organisé, c’est la vente par lots du patrimoine public, c’est une modification de la répartition antérieure des compétences entre l’exécutif et le législatif.
C’est pourquoi nous vous proposons une véritable protection du secteur public et de la compétence du législateur en étendant le champ d’application de l’article 22 de l’ordonnance.
L'amendement n° 1142, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le 1° du I de l’article 22 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« 1° Lorsque l’État détient directement, depuis plus de cinq ans, au moins 20 % du capital social de la société ; ».
Cet amendement a été précédemment défendu.
L'amendement n° 1143, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le 1° du I de l’article 22 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« 1° Lorsque l’État détient directement, depuis plus de cinq ans, au moins le quart du capital social de la société ; ».
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Mme Laurence Cohen. Une fois n’est pas coutume, je tiens à signaler que nous portons un regard bienveillant sur cet article 43 bis, qui, selon nous, va dans le bon sens.
Exclamations sur les travées de l'UMP.
En effet, bien que nous condamnions le transfert au privé de capitaux publics d’une société, nous apprécions de voir que le recours au décret sans passage législatif préalable va être encadré plus strictement.
En abaissant le seuil d’effectif de 1 000 à 500 salariés et le seuil de chiffre d’affaires annuel de 150 millions à 75 millions d’euros, le Gouvernement fait le choix de restreindre les possibilités de privatisation par décret sans que la représentation nationale soit consultée.
Cette décision, au milieu d’autres qui promeuvent le recours à l’ordonnance, est la bienvenue, même si nous craignons toujours quelque peu l’extension du principe de privatisation.
Cet amendement, dans la lignée de l’article 43 bis de ce projet de loi, vise à préciser le texte de l’ordonnance du 20 août 2014 et à encadrer plus strictement le recours au décret sans intervention parlementaire dans le cas de privatisations.
Ainsi, nous vous proposons d’étendre les dispositions de l’article 22 de l’ordonnance à toutes les sociétés dont l’État est propriétaire à hauteur de 25 %, au lieu des 50 % prévus actuellement.
Nous espérons, par cette mesure, ralentir le rythme des privatisations en vous convainquant au cours des débats – même si je sens qu’il reste encore beaucoup de travail – du caractère infondé de ces cessions de capitaux au privé. Quand on parle des services publics, des produits et services que d’aucuns jugeraient régaliens, on parle aussi des fleurons historiques et symboliques de notre patrimoine industriel, commercial et économique, bref des activités qui ne devraient en aucun cas revenir dans le giron de la loi du marché.
L’État, garant de l’accès des citoyens à des biens et des services fondamentaux et d’un maillage territorial efficace, doit rester pour nous le régulateur de cette activité.
Estimant que ces entreprises dont l’État est un actionnaire important font donc partie du patrimoine économique et industriel français, nous considérons qu’il est essentiel que ces ouvertures de capital soient débattues et adoptées par la représentation nationale. Il y va à la fois du respect de nos concitoyens que nous représentons et du travail parlementaire, que nous effectuons du mieux que nous pouvons.
C’est pour cette raison qu’il nous semble essentiel d’appuyer la démarche du Gouvernement en encadrant encore plus strictement l’usage du décret tel qu’il est prévu dans l’article 22 de l’ordonnance de 2014.
L'amendement n° 1140, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le 1° du I de l’article 22 de la même ordonnance est ainsi rédigé :
« 1° Lorsque l’État détient directement, depuis plus de cinq ans, plus du tiers du capital social de la société ; ».
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Je ferai référence à la société SEMMARIS, la société chargée de la gestion du marché d’intérêt national de Rungis.
La SEMMARIS est une société d’économie mixte. Son capital est réparti actuellement de la manière suivante : un tiers des parts appartient à l’État, la Ville de Paris en détient 13, 19 %, le département du Val-de-Marne, lieu d’implantation, 5, 6 %, la Caisse des dépôts et consignations, 4, 6 %, les professionnels du marché, 9, 93 %, le dernier tiers étant aujourd’hui entre les mains de la société foncière Altarea Cogedim.
La SEMMARIS compte aujourd’hui un peu plus de 200 salariés et son chiffre d’affaires s’est élevé, en 2013, à 97 millions d’euros, pour un résultat comptable de 13 millions d’euros.
L’entreprise est donc détenue par l’État pour un tiers – c’est la minorité de blocage –, mais ne remplit aucune des deux conditions visées au I de l’article 22 de l’ordonnance, pour ce qui est tant des effectifs salariés que du chiffre d’affaires.
Cela fragilise la SEMMARIS, et donc, pour une part, le marché de Rungis.
Avec cet exemple, on comprend d’autant mieux notre position de fond que nous exprimons à travers cet amendement, à savoir la référence à la part du capital détenu.
J’espère, mes chers collègues, que cet exemple vous aura convaincu de voter cet amendement.
L'amendement n° 1137, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Supprimer les mots :
1° du
II. – Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Au premier alinéa, les mots : « la majorité » sont remplacés par les mots : « le cinquième au moins » ;
III. – Alinéa 2
Après la référence :
a
insérer la référence :
du 1°
IV. – Alinéa 3
Après la référence :
b
insérer la référence :
du 1°
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
Cet amendement vise à poser les conditions de la cession partielle du capital des entreprises publiques.
L'amendement n° 1136, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Supprimer les mots :
1° du
II. – Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Au premier alinéa, les mots : « la majorité » sont remplacés par les mots : « le dixième au moins » ;
III. – Alinéa 2
Après la référence :
a
insérer la référence :
du 1°
IV. – Alinéa 3
Après la référence :
b
insérer la référence :
du 1°
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
Par cet amendement, nous voulons signifier que, dans un contexte marqué par l’existence d’un service de la dette moins coûteux que par le passé, il ne nous semble pas utile de « faciliter » et d’« assouplir » les conditions de cession des titres détenus par l’État dans des entreprises, des sociétés et des établissements publics ainsi que dans leurs filiales.
L'amendement n° 1138, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Supprimer les mots :
1° du
II. – Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Au premier alinéa, les mots : « la majorité » sont remplacés par les mots : « le quart au moins » ;
III. – Alinéa 2
Après la référence :
a
insérer la référence :
du 1°
IV. – Alinéa 3
Après la référence :
b
insérer la référence :
du 1°
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
Cet amendement tend à poser les conditions de la réalisation des opérations de cession d’actifs publics.
L'amendement n° 1139, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Supprimer les mots :
1° du
II. – Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
Au premier alinéa, les mots : « la majorité » sont remplacés par les mots : « le tiers au moins » ;
III. – Alinéa 2
Après la référence :
a
insérer la référence :
du 1°
IV. – Alinéa 3
Après la référence :
b
insérer la référence :
du 1°
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
Par l’amendement n° 1139, nous voulons signifier que la détention du tiers du capital d’une entreprise est souvent suffisante pour disposer de facultés décisionnelles essentielles dans ladite entreprise.
Le caractère public d’une entité s’apprécie au regard de la manière dont est réparti son capital. Pour reprendre votre exemple, le capital de la SEMMARIS est détenu pour un tiers par l’État, pour un tiers par les collectivités publiques et pour un dernier tiers par le groupe Altarea Cogedim. C’est donc une société publique, puisque plus de la moitié de son capital est détenu par une entité juridique publique. Et, en effet, sa privatisation nécessiterait le vote d’une disposition législative en ce sens.
Vous l’avez rappelé, l’article 22 de l’ordonnance d’août 2014 prévoit, dans sa rédaction modifiée, que la cession de la majorité d’une société au secteur privé est autorisée par le législateur si, entre autres conditions, son chiffre d’affaires est supérieur à 75 millions d’euros, et non plus 150 millions d’euros, qui était le seuil historique. Par conséquent, si vous ratifiez cette ordonnance, la SEMMARIS ne pourra plus être privatisée par voie de décret, ce que je pourrais faire aujourd’hui en cédant les 30 % du capital que l’État détient. Demain, ce ne sera plus possible, le nouveau seuil étant dépassé, il faudra que j’en passe par la loi.
L’autorisation législative ne doit être nécessaire que lorsque l’État détient plus de la moitié du capital social de la société, car c’est ce qui définit le caractère public ou privé de celle-ci. C’est pourquoi je suis hostile à ce qu’on modifie ce seuil, comme vous le proposez à travers ces différents amendements.
Le Gouvernement a eu à cœur de rendre plus transparents vis-à-vis du Parlement les processus de privatisation. À cet égard, l’exemple de l’aéroport de Toulouse tend à démontrer qu’un débat préalable est toujours préférable à un débat a posteriori mal mené et que le Parlement doit pouvoir se prononcer sur une privatisation autant que faire se peut. En revanche, imposer une autorisation législative préalable à toute modification du capital – même quand celle-ci porte sur 15 % à 20 % du capital – par définition postérieure à la privatisation, elle-même ayant été autorisée par le Parlement dès lors que la part du capital détenue par l’entité publique est passée sous le seuil de 50 %, me paraît excessivement contraignant. Ou alors l’exécutif n’a plus de place, pour ainsi dire.
S’il faut donc abaisser les seuils d’effectifs et de chiffres d’affaires, je ne suis cependant pas favorable à ce que l’autorisation du Parlement soit requise dès lors que l’État entend transférer au secteur privé 15 %, 20 % ou 25 % du capital d’une société.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 43 bis est adopté.
Mme Laurence Cohen. Monsieur le président, vous aurez remarqué que nous avons voté cet article !
Sourires.
(Non modifié)
Le 2° du I de l’article 26 de la même ordonnance est ainsi modifié :
1° Le mot : « mille » est remplacé par les mots : « cinq cents » ;
2° Le montant : « 150 millions d’euros » est remplacé par le montant : « 75 millions d’euros ».
L'amendement n° 1144, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Les articles 25 et 26 de la même ordonnance sont abrogés.
La parole est à M. Michel Billout.
L’article 43 ter est peu intelligible si l’on ne plonge pas dans les accords de l’ordonnance du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique.
L’article précité permet de rappeler que cette ordonnance a acté, sans aucun débat démocratique, la compétence d’une nouvelle autorité indépendante – encore une ! - en matière de cession d’actifs de l’État.
Il fait référence à l’article 26 de l’ordonnance qui établit le seuil de chiffre d’affaires et d’emplois à partir duquel le législateur n’est plus compétent, donc celui qui entraîne la compétence de cette autorité pour décider de la conformité de la procédure de privatisation.
La modification du seuil que vous proposez peut paraître favorable au débat démocratique, mais on découvre que, dans de très nombreux cas, c’est l’avis de la Commission des participations et des transferts qui sera décisif.
En effet, selon l’article 22 de l’ordonnance, les opérations de cession de l’État qui ne relèvent pas du domaine législatif, ces dernières étant extrêmement limitées, je l’ai dit, même avec la modification adoptée précédemment, sont décidées par décret, premièrement, lorsqu’elles entraînent le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société ; deuxièmement, lorsqu’elles entravent le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société, et, troisièmement, lorsque la participation de l’État est supérieure aux deux tiers du capital si la cession a pour conséquence de la ramener en dessous de ce seuil.
L’ordonnance du 20 août 2014 généralise le pouvoir de privatisation. Toutes les cessions au secteur privé dont l’importance est inférieure à ce seuil n’auront besoin que de votre signature, monsieur le ministre.
L’article 27 de l’ordonnance précise bien, dans son avant-dernier alinéa, la compétence de l’Autorité : « Le décret, l’arrêté ou la décision autorisant ou décidant l’opération concernée est conforme à cet avis » – il s’agit de l’avis de la Commission des participations et des transferts.
L’article 25 définit la composition de cette autorité qui, comme l’Autorité de la concurrence ou l’Agence des participations de l’État, recueillant en son sein – c’est un symbole – une ancienne dirigeante de la banque HSBC, cédera sans doute aux exigences du marché et de sa grande coordinatrice, la Commission européenne.
Par cet amendement de suppression, nous nous opposons au rôle de cette nouvelle autorité et dénonçons la pseudo-avancée que vous nous présentez, monsieur le ministre.
La Commission des participations et des transferts existe depuis près de trente ans. Ce n’est pas une autorité administrative indépendante ; c’est une commission qui a vocation à définir le juste prix, afin de s’assurer que nous ne bradons pas les actifs de l’État et que la valeur patrimoniale retenue pour la vente est adéquate.
Il s’agit évidemment pour nous d’une obligation constitutionnelle, mais la décision est prise par l’exécutif et soumise à une autorisation législative préalable, celle dont nous avons parlé, avec un seuil qui a été abaissé.
La Commission des participations et des transferts est saisie par le ministre et n’intervient pas elle-même librement. Elle ne prend aucune décision, je le répète, et rend simplement un avis auquel le ministre doit se conformer pour ce qui est des valeurs, dans le cadre d’un processus.
Cette commission est simplement indépendante en tant que telle. Je veux dire par là que ni le ministre de l’économie ni le ministre des finances ne peuvent lui donner d’instruction sur le prix ou la cession. Néanmoins, cette indépendance ne confère pas pour autant à cette CPT un statut d’autorité administrative indépendante, pas plus qu’il n’en fait – je réponds là à votre préoccupation –, une commission qui déciderait de la privatisation du bien.
La CPT éclaire simplement l’exécutif et empêche le ministre, si telle était sa tentation, de vendre le bien à un prix inférieur à celui qu’elle a défini.
Pour être tout à fait concret, quand le ministre décide, conformément au pouvoir qu’il détient, de céder des participations comme celles que vous avez citées, on demande un avis à la CPT. Celle-ci, avertie des cours de la bourse et des analyses intrinsèques, fournit une référence qui lie le ministre. Si le cours de la bourse vient à baisser fortement, par exemple, de 15 % trois jours après et que je souhaite vendre, il ne me sera pas permis de procéder à cette vente. Voilà à quoi sert la Commission des participations et des transferts.
Je vous suggère en conséquence de retirer votre amendement, monsieur le sénateur ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable, car la CPT n’est pas, contrairement à ce que vous soutenez, cette commission qui gère, en quelque sorte, le portefeuille de l’État.
Vous avez bien fait d’intervenir, monsieur le ministre, car, au vu de ces précisions, qui éclairent le débat, je retire mon amendement.
L'article 43 ter est adopté.
Monsieur le président, afin d’organiser au mieux les travaux du groupe CRC sur les articles suivants, je sollicite une courte suspension de séance.
Mes chers collègues, nous allons accéder à la demande de Mme la présidente du groupe CRC et interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
La séance, suspendue le samedi 18 avril 2015, à zéro heure trente-cinq, est reprise à zéro heure cinquante.
(Non modifié)
Au 2° de l’article 5 de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public, après le mot : « entreprise, », sont insérés les mots : « soit en raison de leur connaissance des problématiques liées à l’innovation et au développement d’entreprises innovantes, ».
L'amendement n° 1145, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – Le 1° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Cet amendement a pour objet la gestion du patrimoine mobilier de l’État. Il tend à supprimer les dispositions découlant de l’ordonnance de privatisation du 20 août 2014.
Madame Gonthier-Maurin, pour vous avoir écoutée et pour avoir lu l’objet de cet amendement, ainsi que celui des amendements qui suivent, il me semble que nous répondons déjà, par le présent texte, à votre préoccupation.
Que fait-on en rapprochant la gestion des sociétés publiques de la gestion des sociétés commerciales, mouvement sur lequel tendent à revenir les amendements déposés sur le présent article au nom de votre groupe ? Il s’agit simplement de donner de plus larges pouvoirs à l’État pour défendre ses droits. L’État doit disposer de capacités au moins équivalentes à celles dont bénéficie le secteur privé.
Vous proposez de modifier la loi relative à la démocratisation du secteur public, dite « loi DSP », dans la mesure où vous souhaitez supprimer les dispositions de l’ordonnance du 20 août 2014, sortant les sociétés publiques du champ considéré.
Les spécificités de la loi DSP, en particulier quant à la représentation des salariés au sein des conseils d’administration, sont conservées par cette ordonnance du 20 août 2014. Le travail qui vous est ici soumis prend cette loi pour point de départ.
Vous souhaitez maintenir les dispositions de cette loi DSP, par souci de conserver les facteurs de protection des salariés qu’elle garantit. Or l’ordonnance du 20 août 2014 le permet déjà ! Ce texte ne revient que sur un point, que vous avez mentionné il y a quelques instants, à savoir les règles de gestion.
Le mode de gouvernance applicable jusqu’à présent aux sociétés publiques était moins protecteur des intérêts de l’État. Nous y renonçons au bénéfice d’une gestion « de droit commun ». Cela signifie que nous souhaitons voir l’État disposer des mêmes pouvoirs qu’un actionnaire privé.
Par exemple, les conseils d’administration des sociétés publiques ne pouvaient compter plus d’un tiers de représentants de l’État. Désormais, cette proportion sera portée à deux tiers, dont un tiers de salariés. Vous constatez que cette mesure assure une meilleure protection des intérêts de l’État que la loi relative à la démocratisation du secteur public.
Pour autant, nous ne touchons pas aux éléments de protection des salariés, contrairement à ce que vous avancez. Je suis prêt à vous le prouver en détaillant les diverses dispositions dont il s’agit.
Par l’articulation de l’ordonnance du 20 août 2014 et de la loi relative à la démocratisation du secteur public, nous répondons à vos préoccupations : nous protégeons mieux l’État en lui permettant de disposer d’un plus grand nombre de représentants. Parallèlement, nous n’ôtons rien à la protection des droits des salariés : en la matière – je le répète –, nous conservons les dispositions de la loi dite « DSP ».
À la faveur de ces explications, je sollicite le retrait de cet amendement. Je précise que je demande également, par anticipation, le retrait de ceux qui suivent. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1146, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 2° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Les dispositions de cet amendement sont en cohérence avec notre position de fond sur la stratégie de gestion des entreprises publiques.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1147, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 3° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
Dans la même logique que précédemment, cet amendement a pour objet la gestion des actifs publics.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1148, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 4° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à M. Michel Billout.
Cet amendement tend à revenir sur ce que nous considérons comme un authentique recul démocratique, remettant notamment en cause la parité au sein des conseils d’administration des entreprises publiques ou à participation publique.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1149, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 5° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à M. Michel Billout.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1150, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 6° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à M. Michel Billout.
Il s’agit également d’un amendement de cohérence, monsieur le président.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1151, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 7° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Les conseils d’administration des entreprises à participation publique sont appelés à tomber dans le droit commun des sociétés. Nous nous étonnons que la révocation ne soit plus possible, dans la pratique, que pour les seuls administrateurs salariés.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1152, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 8° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Par cet amendement, nous nous opposons à des dispositions qui, à nos yeux, marquent un nouveau recul démocratique dans la gestion des entreprises. Toutes nos précédentes interventions s’inscrivent dans cette logique : garantir, au maximum, une participation plus démocratique à la gestion des entreprises.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1153, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 9° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique est abrogé.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Cet amendement tend à supprimer une disposition qui, selon nous, est source de profondes disparités dans la représentation des salariés au sein des organes dirigeants des entreprises à participation publique.
Mes chers collègues, vous le constatez, c’est toujours le même esprit qui nous anime : garantir plus de démocratie et ne pas léser les salariés.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1154, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le b du 11° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Annie David.
C’est un amendement de cohérence.
Monsieur le ministre, parce que nous ne partageons pas votre lecture, nous préférons poursuivre la présentation de nos amendements, qui concernent tous la même ordonnance du 20 août 2014.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1155, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 12° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Annie David.
Par cet amendement, nous nous opposons à une mesure qui nous semble réduire le périmètre des entreprises susceptibles de disposer d’administrateurs salariés.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1156, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 13° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Annie David.
Cet article nous semble programmer la réduction du nombre des entreprises et établissements disposant d’une représentation des salariés. Nous nous y opposons en ce qu’il s’agit, à nos yeux, d’un signe évident de la future privatisation, partielle ou totale, d’entités qui sont aujourd’hui encore dans le giron public.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1157, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 14° de l’article 38 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Annie David.
Il s’agit d’un amendement de cohérence, par lequel nous entendons nous opposer à un dispositif prévoyant la privatisation de la quasi-totalité des grands aéroports de province, après la vente à l’encan des parts de sociétés autoroutières.
Dans chacun de ces amendements, vous traitez un alinéa différent d’un article de coordination qui n’a rien à voir avec les propos que vous tenez par ailleurs, sauf à me le démontrer !
Cet article opère une coordination de l’ordonnance avec les textes précédents, afin de les mettre en conformité. Je me suis expliqué sur les points de fond, nous pourrions également ouvrir les codes et faire un travail de commission !
Bien sûr, monsieur le ministre, vous nous avez déjà donné cette explication. Nous étions déjà défavorables à l’ordonnance d’août 2014, et nous ne souscrivons pas plus à cet article, qui met le droit en cohérence avec elle.
Nous n’avons cependant pas la même lecture de cet article que vous. Sans doute aurions-nous besoin d’en discuter sur le fond, mais ce n’est pas le moment. Un travail de commission ou d’étude plus approfondi aurait été approprié.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 43 quater est adopté.
I. – Le chapitre III du titre III de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est complété par un article 31-1 ainsi rédigé :
« Art. 31 -1. – I. – Après la publication du décret mentionné aux I et II de l’article 22 ou de l’arrêté mentionné au IV du même article 22 et préalablement à la réalisation de l’opération, si la protection des intérêts essentiels du pays en matière d’ordre public, de santé publique, de sécurité publique ou de défense nationale exige qu’une action ordinaire de l’État soit transformée en une action spécifique assortie de tout ou partie des droits définis aux 1° à 3° du présent I, un décret prononce cette transformation et en précise les effets.
« Les droits pouvant être attachés à une action spécifique, définis dans chaque cas de façon à être nécessaires, adéquats et proportionnés aux objectifs poursuivis, sont les suivants :
« 1° La soumission à un agrément préalable du ministre chargé de l’économie du franchissement, par une personne agissant seule ou de concert, d’un ou de plusieurs des seuils prévus au I de l’article L. 233-7 du code de commerce, précisés dans le décret qui institue l’action spécifique. Un seuil particulier peut être fixé pour les participations prises par des personnes étrangères ou sous contrôle étranger, au sens de l’article L. 233-3 du même code, agissant seules ou de concert. Cet agrément ne peut être refusé que si l’opération en cause est de nature à porter atteinte aux intérêts essentiels du pays qui ont justifié la création de l’action spécifique ;
« 2° La nomination au conseil d’administration, au conseil de surveillance ou au sein de l’organe délibérant en tenant lieu, selon le cas, d’un représentant de l’État sans voix délibérative, désigné dans les conditions fixées par le décret qui institue l’action spécifique ;
« 3° Le pouvoir de s’opposer, dans des conditions fixées par voie réglementaire, aux décisions de cession d’actifs ou de certains types d’actifs de la société ou de ses filiales ou d’affectation de ceux-ci à titre de garantie qui seraient de nature à porter atteinte aux intérêts essentiels du pays.
« L’institution d’une action spécifique produit ses effets de plein droit. Hormis les cas où l’indépendance nationale est en cause, l’action spécifique peut à tout moment être définitivement transformée en action ordinaire par décret.
« II. – Lorsque des prises de participation ont été effectuées en méconnaissance du 1° du I, les détenteurs des participations acquises irrégulièrement ne peuvent exercer les droits de vote correspondants tant que la prise de participation n’a pas fait l’objet d’un agrément par le ministre chargé de l’économie.
« Le ministre chargé de l’économie informe de l’irrégularité de ces prises de participation le président du conseil d’administration ou le président du directoire de l’entreprise ou l’organe délibérant en tenant lieu, selon le cas, qui en informe la prochaine assemblée générale des actionnaires.
« En outre, s’agissant des entreprises dont l’activité relève des intérêts essentiels de la défense nationale ou de ceux mentionnés à l’article 346 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, les détenteurs de participations acquises irrégulièrement doivent céder ces titres dans un délai de trois mois à compter de la privation de leurs droits de vote.
« À l’expiration de ce délai, s’il est constaté que les titres acquis irrégulièrement n’ont pas été cédés, le ministre chargé de l’économie fait procéder à la vente forcée de ces titres, selon des modalités prévues par décret en Conseil d’État. Il en informe le président du conseil d’administration, le président du conseil de surveillance ou le président de l’organe délibérant en tenant lieu.
« Le produit net de la vente des titres est tenu à la disposition de leurs anciens détenteurs.
« III. – Les I et II s’appliquent également aux entreprises du secteur public mentionnées au IV de l’article 22 lors du transfert de la majorité de leur capital au secteur privé, si les conditions prévues au I du présent article sont remplies.
« IV. – Lorsqu’une société dans laquelle a été instituée une action spécifique fait l’objet d’une scission ou d’une fusion, un décret procède à la transformation de cette action spécifique en une action ordinaire et, le cas échéant, institue, dans les dix jours suivant la réalisation de la scission ou de la fusion, une nouvelle action spécifique dans la société issue de l’opération qui exerce l’activité ou détient les actifs au titre desquels la protection a été prévue. Les droits attachés à cette action spécifique ne peuvent excéder ceux attachés à celle qu’elle remplace. »
II. – §(Non modifié) Les actions spécifiques instituées en application des dispositions législatives applicables à la date de publication de la présente loi restent en vigueur.
III. – §(Non modifié) À la fin de l’article L. 111-69 du code de l’énergie, la référence : « les dispositions de l’article 10 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations » est remplacée par la référence : « l’article 31-1 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique ».
IV. – Au début de la seconde phrase du cinquième alinéa de l’article 78 de la loi n° 2001-1276 du 28 décembre 2001 de finances rectificative pour 2001, les mots : « Les I à III de l’article 10 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations sont applicables » sont remplacés par les mots : « L’article 31-1 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique est applicable ».
V. – §(Non modifié) L’article 10 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations est abrogé. Toutefois, le II du même article reste applicable aux sociétés dans lesquelles ont été instituées des actions spécifiques en application du I dudit article.
VI. – §(Non modifié) L’article 3 de la loi n° 70-575 du 3 juillet 1970 portant réforme du régime des poudres et substances explosives est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « mentionnée au premier alinéa » sont remplacés par le mot : « SNPE » ;
2° Le deuxième alinéa est supprimé ;
3° Le dernier alinéa est ainsi rédigé :
« L’article 31-1 de la même ordonnance est applicable aux filiales transférées au secteur privé en application du premier alinéa du présent article. » –
Adopté.
Section 2
Simplification du cadre juridique de l’intervention de l’État actionnaire
(Non modifié)
I. – L’article 25 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique est ainsi modifié :
1° Le I est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les mots : « cinq ans » sont remplacés par les mots : « six ans non renouvelables » ;
b) Après la première phrase du second alinéa, est insérée une phrase ainsi rédigée :
« Un mandat exercé depuis moins de deux ans n’est pas pris en compte pour la règle de non-renouvellement fixée au premier alinéa. » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« La commission comporte autant de femmes que d’hommes parmi les membres autres que le président. » ;
2° Il est ajouté un IV ainsi rédigé :
« IV. – Le régime indemnitaire des membres de la commission est fixé par décret. »
II. – Les mandats des membres de la Commission des participations et des transferts nommés en application de l’article 3 de la loi n° 86-912 du 6 août 1986 relative aux modalités des privatisations, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, prennent fin à la date de la nomination des membres de cette même commission en application de l’article 25 de la même ordonnance, et au plus tard six mois à compter de la promulgation de la présente loi.
III. – À l’occasion de la première constitution de la Commission des participations et des transferts en application du présent article, sont désignés par tirage au sort, à l’exception du président, trois membres dont les mandats prendront fin à l’issue d’un délai de trois ans. Les membres de la commission en fonction à la date de cette première constitution peuvent être désignés à nouveau.
L'amendement n° 1716, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Après les mots :
de la même ordonnance
insérer les mots :
, dans sa rédaction résultant de la présente loi
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
L'amendement est adopté.
L'article 45 est adopté.
(Non modifié)
Après l’article 32 de la même ordonnance, il est inséré un article 32-1 ainsi rédigé :
« Art. 32 -1. – Les participations détenues par toute société ayant pour objet principal la détention de titres et dont la totalité du capital appartient à l’État sont assimilées, pour l’application des dispositions législatives prévoyant que la participation de l’État au capital d’une société doit rester supérieure à un seuil, à des participations détenues directement par l’État. »
L'amendement n° 1717, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Remplacer les mots :
doit rester
par le mot :
est
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
L'amendement est adopté.
L'amendement n° 1158, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le I de l’article 39 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
Nous avons bien entendu les propos de M. le ministre, mais nous sommes également cohérents !
Cet amendement et ceux qui suivent sont donc également des amendements de cohérence.
Cet amendement en particulier vise à s’opposer à la privatisation en toute discrétion de sociétés intervenant dans le domaine de la défense nationale. Nous aurons l’occasion d’y revenir très bientôt !
L’avis est défavorable sur cet amendement et sur ceux qui le suivent.
Vous donnez à l’article 39 de l’ordonnance du 20 août 2014 une portée qui n’est pas la sienne. Il modifie divers textes afin de supprimer les références aux lois de privatisation de 1986 et les remplacer par des références à l’ordonnance du 20 août 2014. Tel est son seul objet.
Il s’agit donc exclusivement de coordination à droit constant.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1160, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le III de l’article 39 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1162, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le V de l’article 39 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1163, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le VI de l’article 39 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Cet amendement vise à s’opposer à un dispositif conduisant, dans le cas des organes dirigeants de La Poste, à la réduction progressive de la représentation des salariés au sein du conseil d’administration. Nous en avons déjà parlé au sujet d’autres entreprises publiques.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1164, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le VII de l’article 39 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Par cet amendement, nous nous opposons au principe général de réduction de la présence des salariés au sein des organes dirigeants des entreprises à participation publique.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1165, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le VIII de l’article 39 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Par cet amendement, nous nous opposons, par principe, à un dispositif qui prive certaines sociétés d’économie mixte d’une représentation des intérêts publics.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1166, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… - Le IX de l’article 39 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1168, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – Le XII de l’article 39 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1169, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – Le XIII de l’article 39 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1171, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, MM. Foucaud et Watrin, Mmes David, Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le XV de l’article 39 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1172, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – Le XVI de l’article 39 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est abrogé.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1159, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article 12 de la loi n° 80-3 du 4 janvier 1980 relative à la Compagnie nationale du Rhône est abrogé.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
Il s’agit encore d’un amendement de cohérence avec la position que nous défendons depuis le début de ce débat.
Comme vous le voyez, nous battons des records de vitesse dans la défense de nos amendements !
Sourires.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1161, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article 35-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication est abrogé.
La parole est à Mme Annie David.
Il s’agit d’un amendement de cohérence concernant le secteur de la communication.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1167, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – À la seconde phrase de l’article 1er de la loi n° 2003-478 du 5 juin 2003 portant diverses dispositions relatives à certains personnels de DCN et GIAT Industries, les mots : «, l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique » sont supprimés.
La parole est à Mme Annie David.
Il s’agit d’un amendement de cohérence, concernant les salariés de la DCN et de GIAT Industries.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1170, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le VII de l’article 6 de la loi n° 2008-1061 du 16 octobre 2008 de finances rectificative pour le financement de l’économie est abrogé.
La parole est à Mme Annie David.
Il s’agit d’un amendement de cohérence concernant la loi de finances rectificative pour le financement de l’économie.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 46 est adopté.
Section 3
Autorisation d’opérations sur le capital de sociétés à participation publique
(Non modifié)
I. – Est autorisé le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Groupement industriel des armements terrestres (GIAT) et de ses filiales.
II. – La loi n° 89-924 du 23 décembre 1989 autorisant le transfert à une société nationale des établissements industriels dépendant du Groupement industriel des armements terrestres (GIAT) est ainsi modifiée :
1° L’article 4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À la date du transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société mentionnée à l’article 1er ou de ses filiales, les fonctionnaires et les militaires en fonction sont maintenus, sur leur demande, dans la position statutaire qui était la leur à cette date. » ;
2° L’avant-dernier alinéa de l’article 6 est ainsi modifié :
a) La première phrase est ainsi modifiée :
– les mots : « filiale de la société nationale mentionnée à l’article 1er dont celle-ci détient, directement ou indirectement, la majorité du capital » sont remplacés par les mots : « société dans laquelle la société mentionnée à l’article 1er détient, directement ou indirectement, une participation » ;
– les mots : « cette filiale » sont remplacés par les mots : « cette société » ;
– la référence : « du deuxième alinéa de l’article L. 122-12 » est remplacée par la référence : « de l’article L. 1224-1 » ;
b) À la deuxième phrase, les mots : « la filiale concernée se substitue à la société mère » sont remplacés par les mots : « la société d’accueil se substitue à la société d’origine » ;
3° Au dernier alinéa du même article 6, la référence : « L. 351-4 » est remplacée par la référence : « L. 5422-13 » ;
4° À l’article 7, les mots : « et aux » sont remplacés par les mots : «, dans les conditions prévues à la section 4 du chapitre Ier du titre II de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, ainsi qu’aux » ;
5° L’article 8 est abrogé.
Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collèges, cet article a pour objet d’autoriser la cession par l’État au secteur privé de la majorité du capital du Groupement industriel des armements terrestres, le GIAT, afin de permettre le rapprochement et, à terme, la fusion entre deux industriels de taille moyenne de l’armement terrestre en Europe : Nexter Systems, filiale du GIAT, et l’entreprise familiale allemande KMW.
Cette opération aboutirait à la création d’une structure commune, à égalité avec KMW, dans laquelle l’État français perdrait cependant la majorité de contrôle, puisqu’il n’en détiendrait plus que 50 % des parts.
Il s’agit donc, en premier lieu, d’une opération capitalistique, dont les intentions d’optimisation fiscale au détriment des deux États ne sont pas absentes. En effet, la société holding, NEWCO, chargée, dans un premier temps, de la coordination entre les deux entreprises, sera basée aux Pays-Bas…
Ce rapprochement nous est présenté comme l’unique solution pour constituer un groupe européen d’armement de taille suffisante pour être capable de faire face à la fois au rétrécissement du marché dans ce secteur et à la concurrence accrue entre une dizaine d’acteurs en Europe.
Cette argumentation présente l’apparence du bon sens.
Faut-il pour autant procéder ainsi et opérer une telle fusion, menant à une intégration progressive entre ces deux entreprises ? En considérant les risques importants et les nombreuses incertitudes de cette opération, je n’en suis pas persuadée et je m’interroge sur certains effets négatifs que pourrait avoir cette fusion.
Tout d’abord, avec cette perte du contrôle de l’État sur son industrie d’armement terrestre, il est à craindre que les choix stratégiques, industriels et financiers des dirigeants de NEWCO ne se fassent d’abord en fonction d’une rentabilité rapide des capitaux investis.
Ensuite, je ne suis pas convaincue par l’argument de la réduction des budgets de défense en Europe ni par celui du rétrécissement du marché, qui nécessiterait, pour assurer le développement de cette nouvelle société, de se déployer exclusivement vers l’exportation.
En effet, les industries de défense vivent en très grande partie des investissements effectués par chaque pays pour disposer d’une industrie de souveraineté.
En France, notre conception de ce qu’on appelle les « bases industrielles de défense » repose sur la fourniture au pays des armes nécessaires à la défense de la Nation et à ses intérêts fondamentaux, tout en préservant notre indépendance et notre autonomie stratégique. Il y a là un enjeu de souveraineté.
Or cette nouvelle société viserait moins les commandes nationales que les exportations. De la sorte, les armements produits seraient conçus pour répondre non plus aux besoins spécifiques de nos armées et de notre défense, mais à ceux du marché mondial de l’armement.
L’exportation peut, certes, être un moteur essentiel du développement des entreprises et assurer des emplois, en fonction de la conjoncture.
Cependant, toute médaille a son revers et, en l’occurrence, il peut y avoir des clauses de transfert de technologie mal maîtrisées, qui conduiraient à l’émergence de nouveaux concurrents et feraient disparaître des savoir-faire et des compétences nationales.
Un autre aspect de cette fusion pourrait également affecter nos intérêts nationaux : les milliers de brevets développés et financés par le contribuable français, qui pourraient être mutualisés et cédés au capital privé, avec pour seule justification de trouver de l’argent pour honorer la dette publique.
Par ailleurs, le regroupement des départements recherche et développement au sein de la nouvelle entité permettra le dépôt de brevets franco-allemands. Or, nous le savons, l’Allemagne mène une politique différente de la nôtre en matière d’exportation d’armements.
Dès lors, le risque existe que l’Allemagne ne s’oppose à des exportations de matériels comprenant des composants issus de brevets protégés par le droit allemand. Cela emporterait inévitablement des effets négatifs sur nos choix stratégiques, sur notre politique d’exportation d’armements, voire sur notre politique étrangère.
Enfin, plusieurs activités de Nexter et de KMW entrant en concurrence, cette fusion ne peut que se traduire, à terme, par de nombreuses suppressions d’emplois.
À mon sens, il existe d’autres solutions, comme la constitution d’un pôle public d’armement terrestre autour de Nexter, de Renault Trucks, de Thales et Sagem-Safran. L’État y aurait une part déterminante et ferait jouer pleinement ses moyens d’intervention que ce soit en matière de commandes publiques, d’autorisations d’exportation ou d’autorisation préalable d’opérations sur le capital des sociétés.
Plutôt qu’une fusion d’entreprises, un pôle public de ce type, sous la forme d’un groupement d’intérêt économique, permettrait de coopérer avec d’autres industriels européens, tout en préservant notre indépendance.
Mes chers collègues, souvenons-nous que cela avait remarquablement fonctionné avec Airbus, avant la création d’EADS !
L’article 47 m’inquiète également beaucoup. Le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Groupement industriel des armements terrestres et de ses filiales est une opération qui n’est pas sans risque pour la souveraineté de l’État. Comment peut-on être aussi certain que l’opération consolidera, au niveau national, nos propres entreprises d’armement, et qu’elle ne contribuera pas, au contraire, à nous affaiblir ?
Nous savons tous que le marché de l’armement est extrêmement concurrentiel et que la France y joue un rôle non négligeable. Notre pays possède en effet une industrie importante en ce domaine. Il aurait été classé troisième pays exportateur d’armes en 2014, du moins si nous avions livré le navire Mistral à la Russie.
D’après le rapport de l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, publié le 16 mars dernier, le volume du commerce des armes a augmenté de 16 % ces cinq dernières années. Le secteur est largement dominé par les États-Unis, qui détiennent 31 % du marché, et la Russie, 27 %.
Toutefois, il est indispensable d’intégrer une nouvelle puissance dans ce classement. Entre 2010 et 2014, en effet, les exportations d’armes chinoises ont bondi de 143 % par rapport aux cinq années précédentes ! À elle seule, la Chine assure désormais 5 % des exportations mondiales. Dans la même période, le volume des importations d’armes de Pékin a diminué de 42 %. Ces résultats illustrent le dynamisme et la compétitivité de la Chine sur ce marché.
Cela nous montre que l’exportation s’accompagne, de fait, de transferts de technologie et contribue à l’émergence de nouveaux concurrents. Nous ne pouvons donc fonder la création de cette nouvelle société sur les seules exportations. Celles-ci ne peuvent être envisagées comme une réponse à tous les problèmes, notamment celui de la réduction des marchés européen et français.
De plus, les choses doivent être claires concernant les conditions d’exportation, qui doivent être les mêmes pour la France et l’Allemagne. Il ne faudrait pas que cette union aille à l’encontre de nos objectifs en matière de politique étrangère et qu’elle compromette nos marchés d’armement à l’exportation.
De surcroît, sur ce rapprochement, nous manquons vraiment beaucoup de visibilité. Les intérêts des nations allemande et française ne sont pas forcément identiques. Il en va de même pour les besoins de nos armées respectives.
La maîtrise de notre industrie de défense constitue un outil à part entière de notre arsenal de défense. Dans ce schéma, la Direction générale de l’armement est l’un des architectes majeurs de notre politique. L’industrie de la défense a donc pour vocation de contribuer à garantir notre souveraineté nationale.
Cette industrie n’a d’existence qu’en raison des investissements réalisés par la Nation pour sa défense. Elle s’organise autour des programmes lancés au profit de nos armées et dépend des autorisations politiques pour ses exportations.
Autre point important, nos armées, en particulier l’armée de terre, vont avoir besoin de renouveler leurs équipements très prochainement, car leur matériel est vieillissant. À terme, les véhicules de l’avant blindé, les VAB, doivent être remplacés, au titre du programme SCORPION, par les véhicules blindés multi-rôles, les VBMR. Avec les engins blindés de reconnaissance et de combat, les EBRC, ils échappent au rapprochement. Ce sont deux outils indispensables pour notre armée de terre et nous ne pouvons en faire l’économie.
Certes, il est prévu d’attribuer à l’État français une action spécifique qui lui donnera un droit de veto en cas de divergence de stratégie, mais, sur le long terme, ce type de divergences n’est absolument pas viable pour la nouvelle entité.
Pour le moment, nous ne disposons pas de l’ensemble des éléments pour apprécier réellement le bien-fondé de ce rapprochement. Certains points demeurent trop flous, alors que les conditions doivent être extrêmement rigoureuses dans ce type d’opération. De fait, je ne suis pas sûr que la volonté affichée de bâtir des industries capables d’exister encore dans dix ou vingt ans coïncide avec la nature du rapprochement proposé.
Dans ce domaine, il est indispensable d’avoir une industrie puissante, capable d’encourager la recherche, le développement et l’innovation. Nous savons tous que les dépenses militaires irriguent l’ensemble de la recherche civile. C’est comme cela que les Américains financent, par le Pentagone et la NASA, l’essentiel de leur recherche de pointe. Mais les stratégies et les intérêts de la France et de l’Allemagne dans ce domaine ne convergent pas forcément. Comment, alors, sauvegarder notre indépendance stratégique ?
Il me semble que la coopération entre les États est l’un des principaux moyens de consacrer davantage de moyens à ce secteur. Nous ne pouvons fonder l’avenir de l’industrie française d’armement uniquement sur une hausse hypothétique des exportations grâce à cette privatisation.
Dans la suite des interventions de Brigitte Gonthier-Maurin et Michel Billout, je tiens à intervenir sur cet article 47, qui vise à fusionner l’entreprise nationale d’armement Nexter avec l’entreprise allemande KMW.
L’État et cette entreprise familiale allemande, qui connaît d’ailleurs quelques soucis, seraient ainsi associés et détiendraient à parts égales 50 % d’une nouvelle entreprise appelé NEWCO.
Notre crainte est de voir Nexter abandonner son rôle initial, qui était de répondre aux besoins spécifiques de défense de notre pays, pour s’aligner sur le marché international des exportations d’armes.
Alors que l’État ne sera plus majoritaire, à l’issue de la fusion, comment pourra-t-il exercer pleinement un contrôle sur les exportations d’armes ? Cette privatisation et cette fusion ne précèdent-elles pas l’entrée de nouvelles entreprises dans cette alliance industrielle ? Dans ce cas, si l’État est affaibli, comment pourra-t-il s’assurer que nos armes ne tombent pas dans de mauvaises mains, sous la pression de considérations financières ? Les armes sont tout de même loin d’être des marchandises comme les autres !
Un autre sujet d’inquiétude tient à la similitude entre les gammes de produits de KMW et de Nexter. Les deux gammes peuvent quasiment être calquées l’une sur l’autre. Dans le segment des chars lourds, Nexter a le Leclerc, KMW, le Leopard ; dans le domaine des véhicules d’accompagnement pour l’infanterie, le VBCI de Nexter est en concurrence avec le Boxer de KMW ; dans le domaine des véhicules plus légers et fortement protégés, l’Aravis de Nexter fait face au Dingo de KMW.
Cette opposition frontale entre les matériels phare des deux entreprises met en péril les emplois et les sites.
Il paraît clair qu’il faudra choisir entre ces produits pour éviter de dupliquer les frais liés aux développements complémentaires et aux traitements de l’obsolescence des matériels. Quelles seront alors les conséquences pour les activités des bureaux d’études et de fabrication ? Comment seront partagés les futurs programmes ?
Cette fusion aura également des impacts significatifs pour les fournisseurs et les sous-traitants.
Les fournisseurs français risquent, en effet, plus gros que leurs homologues allemands, car ces derniers sont avantagés en termes de volume : on sait combien les entreprises allemandes soignent leurs entreprises industrielles. Ainsi, KraussMaffei a écoulé plus de 4 000 chars lourds Leopard, à comparer aux 600 Leclerc.
De plus, les fournisseurs pourraient être mis plus systématiquement en concurrence. Typiquement, Renault Trucks Defense et Mercedes sont les deux sources pour les véhicules porteurs du canon Caesar de Nexter Systems. Demain, il n’y en aura peut-être plus qu’un…
C’est donc en raison des menaces claires et dangereuses sur l’emploi et parce que nous sommes opposés à la privatisation de notre industrie de défense, qui fait partie de notre souveraineté, que nous nous opposons à la fusion entre Nexter et KMW.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 51 est présenté par Mmes Assassi, Demessine et Cukierman, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 776 est présenté par MM. Rachline et Ravier.
L'amendement n° 940 est présenté par M. Forissier.
L'amendement n° 966 est présenté par M. Pointereau.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David, pour présenter l'amendement n° 51.
Cet article vise à permettre la création d’un champion européen de l’armement terrestre capable de résister à la concurrence de pays d’autres continents. Pour cela, il serait donc nécessaire de céder au secteur privé la majorité du capital public du GIAT.
Nous estimons pourtant que cette privatisation comporte un certain nombre de risques et qu’elle pourrait avoir des effets négatifs dans plusieurs domaines.
Avec ce premier amendement, j’évoquerai d’abord l’abandon probable d’un élément constitutif de notre politique de défense nationale.
En effet, réduire l’influence de l’État sur la fabrication de nos armements terrestres, c’est courir le risque de ne plus pouvoir exercer notre pleine souveraineté sur ce secteur de pointe, hautement stratégique.
C’est d’autant plus risqué que l’objectif affiché de constituer ce champion européen de l’industrie de défense s’inscrit dans un cadre extrêmement flou.
Il faut se rendre à l’évidence : ce que certains appellent de leurs vœux et nomment « défense européenne », voire « Europe de la défense », n’existe pas. Du fait de la diversité des intérêts nationaux et de l’absence de vision partagée, il n’existe pas encore en Europe de politique commune de sécurité et de défense.
En outre, les conceptions française et allemande en matière de politique de défense et d’exportation d’armement sont profondément différentes.
Dès lors, quels peuvent être les fondements, autres que financiers, d’une telle alliance industrielle ?
Avec cette privatisation, les choses sont donc dangereusement prises à l’envers. Avant même que n’existe cette Europe, on dérégule, c’est-à-dire qu’on livre aux intérêts privés un secteur ultra-sensible, qui dépend heureusement encore étroitement des politiques de défense nationale menées dans chaque pays.
Ici, il ne s’agit pas simplement de libérer l’activité économique, de favoriser la croissance et de trouver de l’argent pour financer la dette publique. Il s’agit de notre politique de défense, c’est-à-dire de la défense des intérêts fondamentaux du pays.
Le sujet est donc trop important, il soulève trop de questions non résolues pour faire l’objet d’un article noyé parmi autant de mesures très diverses. Ces questions mériteraient à elles seules un débat.
C'est la raison pour laquelle nous vous proposons la suppression de l’article 47.
Les amendements n° 776, 940 et 966 ne sont pas soutenus.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 51 ?
La commission a un avis défavorable sur l'amendement n° 51 et sur tous les autres amendements portant sur l’article 47.
Le rapprochement entre les deux sociétés Nexter et KMW paraît plus que bénéfique pour Nexter, dans un contexte de réduction des budgets militaires et de concurrence accrue dans le secteur des armements terrestres.
En outre, ce rapprochement se fera très progressivement et portera d’abord sur la recherche et développement et l’action commerciale. Les deux entreprises apparaissent très complémentaires et l’opération ne devrait pas se faire au détriment de l’une ou de l’autre.
J’ajoute que nous avons entendu les inquiétudes légitimes de certains de nos collègues, notamment Rémy Pointereau, quant à la sauvegarde des emplois, particulièrement d’ingénieur et d’ouvrier qualifié, mais aussi de maintien des sites, notamment dans le département du Cher.
Au nom de la commission spéciale, j’ai auditionné le PDG de Nexter : il voit dans le rapprochement une véritable chance pour l’entreprise et estime qu’il comporte d’importants avantages. Tout sera mis en œuvre pour maintenir les emplois sur nos territoires et, bien évidemment, préserver les sites.
L’avis est donc défavorable, car nous souhaitons que cette opération de rapprochement puisse être réalisée.
J’aimerais expliquer l’objectif de cette opération et répondre aux différents orateurs, ce qui me conduira à donner un avis défavorable sur tous les amendements portant sur cet article.
Le groupe GIAT a deux entités : la Société nationale des poudres et des explosifs, ou SNPE, qui a déjà été privatisée depuis plusieurs années, et Nexter. Nexter a aujourd’hui un sujet de taille critique : plus de 50 % de son chiffre d’affaires est aujourd’hui réalisé à l’export. Les perspectives des commandes publiques françaises ne lui permettent pas d’avoir un plan d’expansion satisfaisant. L’avenir de Nexter, comme d’ailleurs de nombre de ces entreprises, est à l’export. Il faut s’en féliciter.
Le groupe allemand KMW, dont la détention capitalistique est familiale, a une problématique comparable.
Depuis plusieurs années, les deux entreprises souhaitent se rapprocher et ont engagé des discussions, interrompues plusieurs fois, puis reprises. Ce rapprochement a une pertinence industrielle.
Avec cet article, nous souhaitons pouvoir ouvrir le capital de Nexter, non pas pour céder des actions – je veux être très précis, l’État ne gagnera pas de liquidités –, mais pour permettre le rapprochement de ces deux entités à parité. Ces deux groupes sont en effet comparables, avec environ 6 000 salariés et 1, 8 milliard d’euros de chiffre d’affaires.
J’entends les propositions de procéder à un rapprochement avec Renault Trucks ou avec Thalès. Des diligences en ce sens ont été faites par l’entreprise, mais, dans le domaine industriel, autant il est possible de bloquer un mariage, autant on ne peut pas le forcer. Ajoutons qu’il y a très peu de complémentarité entre ces acteurs, qui appartiennent certes au même secteur d’activité, mais qui ne seraient pas plus forts si on les mariait, surtout contre leur volonté. De tels mariages ne seraient pas pertinents. Je vous invite d’ailleurs à interroger les connaisseurs du secteur et les dirigeants de ces entreprises : ils vous diront eux-mêmes qu’il n’y a pas d’attentes à cet égard. Le rapprochement pertinent, c’est celui entre Nexter et KMW.
Nous entendons, par cette opération, assurer la pérennité de l’industrie de l’armement terrestre, de ses emplois, de sa recherche et développement, et en favoriser l’expansion, aujourd’hui difficile.
Quels seront nos droits ? L’État co-contrôlera la société commune et détiendra une action spécifique dans Nexter-Industries, conformément au vote exprimé par la Haute Assemblée il y a quelques instants, et non pas dans la holding de tête.
Comment sera structurée cette entité commune ? Comme l’a dit Mme la rapporteur, Nexter et KMW conserveront leur autonomie industrielle les premières années, les synergies concernant surtout le développement à l’international et celui de nouveaux projets. Ils seront rapprochés au sein d’une entité de tête dans laquelle l’État français détiendra 50 % du capital et la famille Wegmann 50 % également. Telle est l’organisation d’ensemble. Cette entité de tête serait en effet installée aux Pays-Bas, comme l’est, à titre de comparaison, l’entité faîtière de Renault-Nissan.
Exclamations sur les travées du groupe CRC.
ministre. En effet.
Pour autant, les deux entités conserveront leurs activités industrielles et leurs bases fiscales dans chacun des deux pays. Par conséquent, ce montage n’aboutira en aucun cas à un détournement de base fiscale. Je vous invite au demeurant à considérer, à cet égard, l’exemple de l’alliance entre Renault et Nissan, qui n’a pas permis à ces deux entreprises de détourner de la base fiscale.
Il ne s’agit donc ni d’un schéma d’optimisation fiscale ni d’un schéma de fusion accélérée. Il s’agit d’un schéma de rapprochement, que je vous expose en toute transparence et en détail, afin que l’on ne puisse nous soupçonner de mettre en œuvre un plan caché.
Sur le plan industriel, plus de 50 % du chiffre d’affaires de Nexter est réalisé à l’export. KMW est également un acteur important à l’export, mais on se trompe en annonçant une cannibalisation.
Pour reprendre l’exemple du VBCI de Nexter et du Boxer de KMW, les appels d’offres montrent qu’il existe une complémentarité parfaite. Tel est d’ailleurs le constat dressé par les industriels : il est rare que deux entreprises se rapprochent dans le but de se concurrencer l’une l’autre.
Ainsi, KMW n’a pas répondu aux appels d’offres, lancés par les Émirats arabes unis, le Danemark, le Qatar et, précédemment, le Canada, au titre desquels le VBCI a été sélectionné. Il y a une complémentarité entre le Boxer et le VBCI parce que l’usage n’est pas le même. Ces deux matériels militaires, en effet, ne recourent pas aux mêmes modes de traction, ne sont pas utilisés par les mêmes armées ni sur les mêmes terrains d’intervention. L’Allemagne privilégie l’artillerie chenillée, la France l’artillerie à roues. Deux modèles classiques d’intervention ont conduit au développement de ces deux formes d’industrie, qui présentent des synergies à l’échelon des sous-traitants et une véritable complémentarité en termes d’offre industrielle. Cela renforce à nos yeux la pertinence de ce rapprochement.
Les actionnaires ne pourront céder leurs parts qu’après un délai de cinq ans. L’État n’a de toute façon aucunement l’intention de céder les siennes au-delà de cette échéance, comme en témoigne la politique qu’il suit dans ce secteur.
Je conclurai en évoquant l’incidence de ce rapprochement sur l’emploi. L’intégration des deux entreprises sera progressive, deux entités étant maintenues. À moyen terme, des projets communs seront développés, pour déboucher sur de nouveaux produits. Par conséquent, les bases installées ne seront pas réduites, pour la raison très simple qu’il n’y a pas de superposition entre celles qui sont implantées dans chacun des deux pays. Cela étant, pour obtenir des volumes d’activité et préserver ces bases installées, il faudra continuer de gagner des marchés à l’international. Tel est le sens de ce rapprochement.
Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n° 51.
Pour ma part, je voterai cet amendement de suppression, pour une raison simple : à mon sens, la politique d’armement procède de la souveraineté nationale. Je ne suis pas la seule à défendre ce point de vue, qui est partagé par des députés de tous bords, comme l’ont bien montré les débats à l’Assemblée nationale. On ne peut pas commencer à bâtir ainsi l’Europe de la défense alors que les événements récents témoignent que, en la matière, l’unité européenne ne relève pas de l’évidence, hélas : les intérêts, les visions de l’avenir et les priorités ne convergent pas nécessairement.
Par ailleurs, nous le savons bien, non seulement l’industrie de l’armement constitue un élément majeur de notre capacité de défense et d’intervention dans le monde, mais la force d’innovation de ses centres de recherche et développement représente un levier pour toute une série d’autres secteurs industriels. De ce point de vue, le modèle américain est d’ailleurs beaucoup plus avancé que le nôtre. Je le dis tout net : se priver de cet investissement de l’industrie de l’armement en faveur de la recherche qui irrigue d’autres secteurs, le noyer dans une grande entité, fût-elle paritaire dans un premier temps et, prétendument, ouverte à l’intervention de l’État se révélera néfaste dans la durée, car l’argent finira par primer sur la stratégie et le politique ne pourra plus peser sur les choix industriels.
Enfin, monsieur le ministre, vous nous avez dit hier qu’il fallait tout faire pour que les centres de décision des grandes entreprises restent en France. Bravo, mais alors pourquoi implanter aux Pays-Bas l’entité de tête de la nouvelle société ?
M. Jean Desessard rit.
Pour ma part, j’étais déjà hostile à l’installation de l’entité de tête d’EADS aux Pays-Bas ; je suis hostile à ce que l’on incorpore une grande entreprise française dans un grand magma dont les stratégies ne prendront pas réellement en compte les intérêts de notre pays, qui devraient pourtant être prioritaires !
À terme, où seront décidées les nouvelles implantations ? Cette question a beaucoup d’importance au regard de l’emploi et de la définition des nouveaux produits.
Je persiste à considérer que ces industries stratégiques doivent rester majoritairement, massivement françaises. Ma position n’a pas varié d’un iota. Je n’accepte pas la fusion de Nexter, qui doit rester publique, avec une entreprise étrangère.
M. Jean Desessard. J’ai un point de divergence avec Mme Lienemann : il me semble que c’est avant-hier, et non hier, que M. le ministre a affirmé que les centres de décision devaient être maintenus en France…
Sourires.
Quoi qu’il en soit, je confirme que le ministre nous a dit que tout devait être fait pour conserver les instances dirigeantes sur le territoire national.
Alors que nous tenons là une occasion de mettre ce principe en application, sans que cela coûte quoi que ce soit, il est décidé d’installer l’entité de tête de la nouvelle entreprise aux Pays-Bas, comme si la chose allait de soi… Peut-être nous fournira-t-on une explication ? Il serait tout de même intéressant de savoir pourquoi le centre de décision d’une entité résultant d’une fusion entre une entreprise française et une entreprise allemande est installé aux Pays-Bas.
S’agit-il de préparer l’émergence d’une armée européenne, à laquelle je suis favorable ? Ce choix traduirait alors une vision particulièrement optimiste, car la mise en œuvre de ce projet réclamera un peu de temps !
Personnellement, je ne voterai pas en faveur de cet article. Monsieur le ministre, il me semble avoir compris que l’État ne tirerait aucune recette de cette opération : pouvez-vous le confirmer ?
M. le ministre acquiesce.
Protestations sur les travées du groupe CRC et sur certaines travées du groupe socialiste.
Nous devrions nous féliciter de cette opération. Je ne comprends pas ce réflexe de se cramponner à l’idée que cette société doit rester nationale, franco-française. Ce n’est pas réaliste ! Nous sommes au XXIe siècle, on a changé de millénaire ! Regardez-vous !
Cette opération ne conduira pas à une fuite des cadres aux Pays-Bas. Je vous invite à considérer l’exemple d’EADS : le rapprochement franco-allemand a conduit à la relocalisation à Toulouse du siège productif du groupe ! La France y a gagné. En effet, trois des quatre centres productifs du groupe se situent aujourd’hui en France. La production de valeur d’EADS aux Pays-Bas est quasiment nulle !
La vie en commun, c’est parfois difficile. En l’occurrence, il s’agit d’une fusion entre égaux, d’un mariage à parité entre deux entreprises réalisant le même chiffre d’affaires et comptant autant de salariés. L’État, qui détient 100 % du capital de Nexter, recevra donc 50 % du capital de la nouvelle entité. Pour opérer un tel rapprochement, l’intervention de la loi est nécessaire. L’État ne tirera aucune recette de cette opération, monsieur Desessard, parce qu’il ne cède pas les actions de Nexter qu’il possède aujourd’hui.
Qui va diriger la nouvelle entité ? Comment s’organisera-t-on ? Où seront situés les actifs ? Pour l’heure, chacun conservera ses entités productives dans chaque pays. On verra comment cela fonctionne, mais il faut une entité de tête. Celle-ci sera située aux Pays-Bas pour quatre raisons : ce pays ne compte aucun concurrent de la nouvelle entreprise ; il est situé en Europe ; il appartient à l’OTAN ; les règles d’enregistrement et les conditions de gouvernance y sont les plus simples, ce qui explique que les centres de décision de nombreuses entreprises ou joint ventures y soient localisés.
M. Emmanuel Macron, ministre. Madame la sénatrice, les cadres et les dirigeants de Nexter n’iront pas davantage s’installer aux Pays-Bas demain que les dirigeants d’Airbus ne l’ont fait il y a vingt ans ! Considérons au moins cette expérience in vivo !
Mme Marie-Noëlle Lienemann proteste.
Vous avez la conviction chevillée au corps, madame la sénatrice, que les choses vont forcément mal se passer, que nous sommes condamnés à nous faire avoir, que le mal est partout ! Je veux seulement appeler votre attention sur le précédent positif d’EADS, devenu Airbus. L’opération projetée, qui est soutenue par les industriels, a du sens. La France en sortira renforcée, car celles et ceux qui dirigent, produisent et recherchent chez Nexter resteront dans notre pays, où ils pourront embaucher d’autres personnes.
Je crois pouvoir apporter quelques éléments de réflexion supplémentaires.
Le seul avion de transport dont disposent les forces armées françaises, pour les quarante années qui viennent, est un produit d’EADS, donc européen. Je rappelle d’ailleurs à certains de nos collègues qu’ils étaient membres du Gouvernement lorsque la décision de le construire a été prise.
Mme Marie-Noëlle Lienemann proteste.
Dans un domaine qui a tout de même plus d’importance stratégique que celui dont nous débattons aujourd’hui – il s’agit de projeter des forces n’importe où dans le monde, y compris dans les zones les plus tendues –, nous avons choisi un outil qui est le résultat d’une activité de recherche et développement et d’une activité industrielle réparties en Europe. J’indique, pour ceux qui ne sont pas familiers de ces questions, que le pôle principal de réalisation de l’avion de transport européen est situé à Séville, en Espagne.
Par ailleurs, depuis vingt ans, notre seul missile de croisière – l’arme stratégique par excellence, celle qui a la capacité de destruction, projetée à longue distance, la plus forte – est le produit d’une co-entreprise franco-britannique.
Il s’agissait d’un choix des autorités britanniques de l’époque, conservatrices, et françaises, les deux pays étant les seuls, en dehors des États-Unis, à pouvoir construire un missile de croisière. On voit que la volonté d’autonomie à l’égard des Américains peut parfois émaner de puissances dont on ne l’attend pas forcément !
Enfin, s’il est indéniable qu’il y a de la technologie dans les équipements blindés terrestres, la densité d’électronique des systèmes de combat que l’on trouve dans un VBCI n’est tout de même pas tout à fait celle d’un avion de combat. Il faut garder le sens des proportions ; ce n’est pas là que se développera la compétition avec le Pentagone.
M. Jean Bizet applaudit.
L’amendement n’est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° 128 rectifié est présenté par M. Pointereau.
L’amendement n° 1174 rectifié est présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
N’est pas autorisé un transfert du capital de la société Groupement industriel des armements terrestres qui s’inscrirait dans le cadre d’une opération de consolidation industrielle incluant une société sous le coup d’une procédure judiciaire pour des faits de corruption.
L’amendement n° 128 rectifié n’est pas soutenu.
La parole est à M. Michel Billout, pour présenter l’amendement n° 1174 rectifié.
Les différents motifs qui nous font douter du bien-fondé du rapprochement, tel qu’il est envisagé, entre Nexter et KMW ont donné lieu à un débat intéressant.
Je voudrais évoquer un point qui n’a pas encore été abordé, celui des risques éthiques et d’insécurité juridique inhérents à ce projet.
En effet, il est de notoriété publique que KMW fait l’objet d’une procédure judiciaire pour corruption, dans le cadre de la vente à la Grèce de blindés lourds de type Léopard. Cette procédure en cours risque de nuire à la réputation de la future société et, par voie de conséquence, d’avoir un impact négatif sur ses résultats commerciaux.
Dans ce cas de figure, d’un strict point de vue financier, il est à craindre que notre apport de capitaux publics n’en pâtisse et que nos intérêts ne soient affectés.
En outre, cette procédure ne pourrait que ternir l’image internationale de notre pays, dont les efforts diplomatiques pour introduire des règles d’éthique dans les négociations sur la régulation des marchés de l’armement sont largement reconnus.
Telles sont les raisons pour lesquelles nous vous demandons, mes chers collègues, d’adopter cet amendement, qui tend à interdire tout transfert de capitaux dans le cadre d’une opération dont l’une des parties prenantes est une société sous le coup d’une procédure judiciaire pour faits de corruption.
Comme vous, monsieur le sénateur, j’ai lu la presse. Nous nous sommes préoccupés de cette affaire, qui fera d’ailleurs l’objet des vérifications effectuées au titre de la due diligence dans le cadre du rapprochement.
Cette procédure judiciaire qui serait en cours n’implique pas culpabilité. Je vous invite à considérer les conséquences de l’inscription dans la loi de dispositions visant à interdire toute opération de rapprochement impliquant une entreprise faisant l’objet d’une procédure judiciaire. Si l’on veut complètement stériliser le tissu productif français, il faut adopter cet amendement !
Des vérifications exhaustives seront menées, je le répète. Ce rapprochement fait l’objet, en outre, de protections analogues à celles qui ont déjà pu être mises en œuvre en matière d’investissements étrangers en France. Nous aurons la possibilité de bloquer l’opération, pour cette raison ou pour d’autres, en vertu de l’article L. 151-3 du code monétaire et financier.
En tout état de cause, je vous incite vraiment, mesdames, messieurs les sénateurs, à ne pas introduire une telle disposition dans la loi, car elle est excessive à tous égards.
Je demande donc aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer. À défaut, je ne pourrai y être que défavorable.
Le dispositif de cet amendement est peut-être un peu excessif, en effet. En tout cas, je prends note de votre engagement, monsieur le ministre, à faire preuve de la plus grande vigilance. Si la procédure débouchait sur une condamnation, la situation deviendrait extrêmement problématique.
Cela étant dit, je retire l’amendement, monsieur le président.
L’amendement n° 1174 rectifié est retiré.
Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 1173, présenté par Mme Assassi, M. Bocquet, Mme Beaufils, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
N’est pas autorisé le transfert de capital du Groupement industriel des armements terrestres et de ses filiales au profit d’une société tributaire de contraintes nationales pouvant compromettre l’exercice par la France de sa pleine souveraineté en matière de politique étrangère, de mise en œuvre de ses accords de défense ou de coopération en matière de défense, comme de sa politique d’exportation d’équipements de défense.
La parole est à Mme Laurence Cohen.
L’argumentation que vient de développer M. le ministre est tout de même affligeante… Cela signifie que bon nombre de sociétés sont poursuivies pour des raisons diverses et variées.
Cette situation est assez terrible, et devrait nous faire réfléchir sur les pratiques des grandes entreprises.
J’en viens à l’amendement n° 1173.
Nous estimons que les modalités de constitution de la nouvelle société NEWCO ne donnent pas suffisamment de garanties pour préserver au mieux nos intérêts nationaux. Trop d’incertitudes pèsent sur ce transfert de capitaux publics français au sein d’une nouvelle entité, de droit hollandais, et constituée à proportion égale de capitaux privés.
Ces incertitudes sont d’ordre financier, juridique ou encore social, s’agissant de la pérennité des emplois. Sur ce point, Mme la rapporteur affirme que toutes les garanties sont réunies, mais nous connaissons par expérience la fin de ce genre de scénario…
En effet, quels critères prévaudront dans les choix stratégiques, industriels et financiers des futurs dirigeants de la nouvelle société ? Quel type de gouvernance choisiront-ils ? Quelle sera la répartition des fabrications au sein de cette nouvelle entreprise intégrée ?
En outre, nous savons d’expérience qu’une fusion de ce type a souvent des répercussions négatives en matière d’emploi et de savoir-faire des entreprises.
Mais c’est aussi la future stratégie du groupe qui est en question. Elle ne manquera pas d’emporter des conséquences sur notre liberté de choix en matière de politique d’exportation de matériels militaires, d’accords de coopération de défense et, plus généralement, de politique étrangère.
En l’absence de réponses précises à ces questions, nous refusons de signer un chèque en blanc en acceptant la cession de la majorité d’une entreprise à capital public au secteur privé.
Nous doutons que les modalités de rapprochement entre Nexter et KMW, telles qu’actuellement négociées entre les deux entreprises, puissent permettre de préserver intégralement les intérêts de notre pays.
L’amendement n° 1414 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 1173 ?
L’amendement n’est pas adopté.
L’article 47 est adopté.
(Non modifié)
I. – Après le mot : « État », la fin de la seconde phrase du premier alinéa et la fin du troisième alinéa de l’article L. 5124-14 du code de la santé publique est ainsi rédigée : «, par ses établissements publics ou par d’autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public. » ;
II. – Dans les cas mentionnés aux I et II de l’article 22 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique, un décret pris en application de l’article 31-1 de la même ordonnance peut prononcer la transformation d’une action ordinaire en une action spécifique, assortie de tout ou partie des droits définis au même article.
III. – Tout transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société « Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies » doit être autorisé par la loi, selon les modalités prévues au titre III de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée.
L’article 48 ouvre le capital du Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies, le LFB, à Bpifrance. Jusqu’à maintenant, le LFB figure dans le portefeuille de l’Agence des participations de l’État, l’APE.
Je rappelle que la France a décidé d’organiser la collecte et le fractionnement du sang à la suite de l’affaire du sang contaminé. Créés dans ce contexte, l’Établissement français du sang, l’EFS, et le LFB, qui sont bien deux établissements distincts, ont ainsi mis en œuvre des normes et des pratiques sanitaires bien supérieures à celles en vigueur au sein de l’Union européenne. L’idée était de conjuguer éthique du don et sécurité sanitaire, avec comme garantie l’implication de l’État.
Or l’article 48 pourrait ouvrir la porte à une remise en cause du rôle de l’État, et alimente des craintes quant à une éventuelle privatisation du LFB. En effet, si la rédaction actuelle de l’article ne permet pas celle-ci dans l’immédiat, nous considérons que le risque est suffisamment élevé pour que l’on s’oppose à l’adoption d’un tel dispositif.
Par expérience, nous savons que les ouvertures de capital de ce type sont un premier pas vers un désengagement progressif de l’État, puis du secteur public, au bénéfice du secteur privé.
À ce titre, je rappelle que le statut du LFB avait déjà été modifié en 2004 : d’établissement public industriel et commercial, il était devenu société anonyme à capitaux publics majoritaires. Le gouvernement de l’époque avait justifié cette modification par la nécessité, pour le LFB, d’attirer des capitaux extérieurs afin de pouvoir augmenter ses dépenses de recherche et développement.
L’ouverture de capital proposée, quant à elle, a pour objet de permettre au LFB de mener une croissance externe et d’innover. Elle serait destinée à financer l’ouverture d’une usine, assortie de la création de 2 000 postes, dont 500 à l’étranger. Nous ne pouvons évidemment qu’encourager ce type de démarche et saluer la création d’emplois qu’elle engendre. Néanmoins, nous nous posons de nombreuses questions sur le mode de financement choisi pour ce site. Pourquoi ne pas demander à l’APE, aujourd’hui seul financeur du LFB, d’assurer l’investissement de 300 millions d’euros nécessaire à ce projet ? Pourquoi ouvrir le capital à Bpifrance, au lieu de lui demander de consentir un prêt ? Cette ouverture se fera-t-elle d’ailleurs uniquement au bénéfice de Bpifrance ? Quelle sera l’étape suivante ? Pourquoi prendre le risque de voir l’État, à terme, se désengager d’une activité rentable, créatrice d’emplois et innovante ?
Le LFB, en effet, est un laboratoire innovant, dynamique, un fleuron de notre industrie biotechnologique. Il serait dommage de laisser les intérêts privés s’emparer de cette ressource.
Nous nous posons également des questions sur la logique capitaliste affirmée qui sous-tend la stratégie du LFB, alors que celle-ci devrait être principalement guidée par l’éthique.
En effet, la stratégie offensive du LFB consistant à rechercher une expansion à l’international et à conquérir de nouvelles parts de marchés peut être intéressante, mais elle ne doit pas être mise en œuvre en s’affranchissant de certaines normes éthiques et de sécurité sanitaire.
Or, par exemple, lorsqu’il opère à l’étranger, ou pour l’étranger, le LFB utilise du sang collecté en échange d’une rémunération. Au lieu d’exporter notre modèle éthique, nous le remettons en cause pour exporter !
Ces évolutions, qui nous semblent regrettables, justifient d’autant plus le maintien de la maîtrise des activités du LFB par la puissance publique. C’est pourquoi nous défendrons dans quelques instants un amendement visant à supprimer cet article.
Cet article relève du titre II, intitulé « Investir », et de la section 3 « Autorisation d’opérations sur le capital de sociétés à participation publique » du chapitre II… Au travers de son dispositif, vous entendez, monsieur le ministre, appliquer ce programme au domaine transfusionnel. Nous ne pouvons vous suivre.
S’il est composé de trois alinéas seulement, cet article n’en est pas moins primordial et risque de bouleverser le paysage actuel.
En effet, pour l’heure, le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies est détenu à 100 % par l’État. Il a été créé en vue de séparer les activités de collecte, de préparation et de distribution des produits sanguins de la fabrication des médicaments dérivés du sang. C’est une garantie au regard des enjeux de sécurité sanitaire.
La rédaction initiale de l’article et les débats qui ont eu lieu, que ce soit à l’Assemblée nationale ou au sein de la commission spéciale du Sénat, ont porté sur la question suivante : cet article permet-il une privatisation du LFB ? Nous n’avons pas la même interprétation juridique que vous, manifestement, et nous ne sommes pas rassurés par les arguments selon lesquels il s’agit uniquement de permettre à Bpifrance d’investir pour la construction d’une nouvelle usine.
Pour nous, l’alinéa 3 est parfaitement clair : « tout transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies doit être autorisé par la loi, selon les modalités prévues au titre III de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée ».
Au regard des majorités actuelles au sein du Parlement et, surtout, de la politique qui est menée, l’autorisation par la loi ne nous semble guère être un obstacle difficile à franchir pour les tenants de la privatisation à tout crin. Par ailleurs, comment ne pas craindre l’utilisation du 49-3, auquel, hélas ! il est souvent recouru, aujourd'hui comme hier ?
Cet article est tout sauf anodin : un commerce du sang est bel et bien en train de s’organiser, et le dispositif prend encore plus de sens quand on fait le lien avec les débats que nous avons eus lors de l’examen du dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale. Pour rappel, l’article 51 de ce dernier, contre lequel une majorité du Sénat s’était prononcée, légalise et légitime la commercialisation d’un produit sanguin, le plasma SD, devenu « médicament » le 13 juillet dernier par arrêt du Conseil d’État consécutif à une décision de la Cour de justice de l’Union européenne.
En cohérence avec le vote émis ici même lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale sur un amendement de notre groupe, j’appelle la Haute Assemblée à rejeter l’article 48 du présent texte, qui ouvre la voie à la marchandisation du sang, rompant avec les principes éthiques qui permettent de garantir la sécurité des patients et des donneurs de sang.
Je suis saisi de trois amendements identiques.
L'amendement n° 52 est présenté par Mmes Assassi, David et Cohen, M. Foucaud et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 158 rectifié est présenté par Mmes Lienemann et Claireaux, M. Raoul et Mmes Monier et Jourda.
L'amendement n° 462 est présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 52.
L’article 48 a été l’objet de nombreux débats et critiques, notamment à l’Assemblée nationale.
Nous avons lu, pour notre part, avec beaucoup d’attention, monsieur le ministre, les arguments que vous avez développés devant nos collègues députés. Je dois dire qu’ils ne nous ont pas convaincus, d’où le dépôt de cet amendement de suppression.
Avant d’entrer dans le détail, je me permettrai de souligner, comme cela a déjà été fait, que cet article offre une parfaite illustration du caractère tous azimuts de votre loi, puisqu’il se situe entre un article concernant le GIAT, le Groupement industriel des armements terrestres, et un autre relatif aux aéroports !
On me l’a déjà faite ! Vous suivez bien les débats de l’Assemblée nationale !
Je rappellerai tout d’abord que le LFB a été créé en même temps que l’Agence française du sang et l’Établissement français du sang, par la loi du 4 janvier 1993. L’objectif est de garantir une éthique et une sécurité sanitaire des dons et de la fabrication des produits issus du sang.
Le LFB est aujourd’hui détenu à 100 % par l’État. Vous souhaitez, au travers de cet article, permettre à Bpifrance d’entrer au capital du LFB pour, dites-vous, permettre à celui-ci de construire une nouvelle usine plus moderne, nécessitant un investissement d’environ 300 millions d’euros.
Pour cela, vous souhaitez modifier un article du code de la santé publique. Ce qui nous inquiète très fortement, c’est que, en réalité, le droit actuel permet déjà cette participation. En effet, l’article L. 5124 du code de la santé publique dispose que l’État ou des établissements publics doivent être détenteurs majoritaires du capital du LFB, ce qui n’exclut en rien la participation au capital d’autres acteurs publics tels que Bpifrance.
Si le dispositif de l’article n’est pas donc pas à proprement parler utile pour permettre l’intervention de Bpifrance, quel est l’objectif visé ? Nous craignons une privatisation programmée et rampante. Nos inquiétudes sont d’autant plus fondées que nous avons déjà été particulièrement échaudés, Laurence Cohen l’a souligné, par l’article 51 du projet de loi de financement de la sécurité sociale et l’abandon du service public assuré par l’Établissement français du sang. Nous avons parfaitement compris que le système transfusionnel devait être, selon vous, également soumis aux lois du marché. L’article 42 du projet de loi relatif à la santé, actuellement en débat, est de la même veine : tout cela est cohérent et organisé.
Tout comme lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, nous dénonçons cette évolution, qui remet profondément en cause le système actuel, dont l’objet est de préserver le sang des logiques mercantiles et des risques qu’elles comportent.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l'amendement n° 158 rectifié.
Cet amendement a été déposé par mes collègues Karine Claireaux, Daniel Raoul, Marie-Pierre Monier, Gisèle Jourda et moi-même. Nous ne comprenons pas pourquoi il serait nécessaire de modifier le statut du LFB, détenu aujourd'hui à 100 % par l’État.
Je rappelle que l’État ne perçoit actuellement aucun dividende en raison du caractère bénévole du don de plasma, ce qui signifie que le laboratoire réinvestit la totalité de ses bénéfices. Cela maintient la cohérence éthique du système français.
Il est à craindre que l’entrée au capital de Bpifrance n’amène une remise en cause de l’absence de versement de dividendes. La construction d’une nouvelle usine est nécessaire, mais pourquoi ne pas recourir à un financement au travers de l’Agence des participations de l’État ? Ne dites-vous pas vous-même que celle-ci doit avoir une gestion active et fluide de ses crédits ?
Nous ne voyons pas l’intérêt de modifier la composition du capital et le statut du LFB, pour l’heure comme pour l’avenir. Une telle opération nous semble au contraire risquée.
M. Jean Desessard. Si j’osais, je dirais que cet amendement est dans la même veine que les précédents…
Sourires.
L’article 48 vise à permettre l’ouverture du capital du Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies aux établissements ou entreprises publics. La justification de cet article est simple : le LFB a un besoin de financement d’environ 250 millions d’euros, que l’État n’a pas les moyens de satisfaire.
L’activité du LFB est essentiellement tournée vers le fractionnement des protéines plasmatiques issues du plasma sanguin humain. Il dispose de l’exclusivité du fractionnement du plasma issu des dons de sang bénévoles, collectés sur le territoire français par l’Établissement français du sang. Il est également l’un des leaders mondiaux du fractionnement ; c’est à ce titre qu’il a besoin de financement.
Si l’on peut penser que cette volonté de gagner de nouveaux marchés est légitime, nous estimons que la filière du sang doit rester publique. Nous ne voyons pas pourquoi impliquer d’autres acteurs publics alors même que l’État a soutenu la recherche au sein de ce laboratoire et que celui-ci s’apprête à développer une activité très rentable, à partir de sang donné gratuitement par les Français.
Il est incompréhensible de se retirer du capital d’une entreprise publique aussi sensible alors qu’un apport de 250 millions d’euros suffirait. Le Gouvernement pourrait certainement débloquer cette somme par d’autres moyens.
De plus, le III de l’article 48 laisse planer un doute, même si certains estiment qu’il constitue un verrou. Il y est en effet précisé que « tout transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies doit être autorisé par la loi ». Pourquoi inscrire une telle mention dans le texte si ce capital doit rester public ? Ce passage n’est pas de nature à nous rassurer. Voilà pourquoi nous souhaitons conserver un statut public au Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies.
Les privatisations d’entreprises publiques commencent toujours de la même manière. On dit d’abord qu’il n’y a pas d’inconvénient à réduire la part du capital détenue par l’État, du moment qu’elle reste supérieure à 50 %. Puis on dit que l’on peut sans dommage l’abaisser à 30 %, dans la mesure où l’État conserve alors une minorité de blocage. Enfin, puisqu’on ne contrôle plus rien, on décide de tout vendre pour être tranquille… §Nous sentons bien que nous ne sommes pas loin ici de cette logique. C’est comme pour les autoroutes : on estime que la puissance publique ne sera pas capable de rentabiliser l’investissement projeté…
L’avis de la commission est défavorable. Cet article est absolument indispensable pour assurer le financement de la future usine du LFB et contribuer ainsi à son développement, ainsi qu’à son rayonnement au niveau international.
Il ne s’agit en aucun cas d’une privatisation, puisque la majorité du capital doit bien appartenir à des personnes publiques. Il n’y aura aucune possibilité de privatiser sans en passer de nouveau par la loi.
Le Gouvernement est également défavorable à ces trois amendements de suppression.
Il s’agit de corriger une anomalie juridique : la rédaction actuelle de l’article du code de la santé publique relatif au LFB ne couvre pas la personnalité juridique de Bpifrance.
Le rôle de l’APE, qui a une gestion patrimoniale, n’est pas de réinvestir dans les entreprises dont elle détient une partie du capital pour accompagner leur développement : c’est là une autre activité, celle précisément que nous avons confiée à Bpifrance.
Que l’on me permette de lever une ambiguïté : il ne s’agit pas ici, pour Bpifrance, d’accorder un prêt au LFB, mais d’entrer à son capital pour lui permettre de réaliser des investissements, dont le financement passera donc par une augmentation du capital. Celle-ci n’est pas permise, à l’heure actuelle, par le code de la santé publique. L’objet de l’article 48 est de remédier à cette difficulté, afin que le LFB puisse disposer de 250 millions ou 300 millions d’euros pour construire la nouvelle usine dont il a besoin.
Très franchement, quand je vois le nombre d’heures passées sur ce sujet, la violence des débats et des accusations lancées, y compris à mon encontre, je me dis parfois que j’aurais mieux fait de ne pas m’attaquer à ce sujet, que le jeu n’en valait pas la chandelle…
Non, je ne le ferai pas, par principe ! Sinon, cela signifierait que nous ne sommes pas capables d’avoir un débat instruit, informé, démocratique et responsable sur un tel sujet. Je continue à me battre, car je n’admets pas que l’on veuille interdire à une entreprise publique de se développer pour des raisons totalement irrationnelles et non documentées ! Ce combat vaut la peine d’être mené ! Rien dans vos propos n’est fondé.
Non, c’est un fait !
Il s’agit de permettre à Bpifrance, dont les deux coactionnaires sont l’État et la Caisse des dépôts et consignations, qui ne sont en rien des acteurs privés, d’entrer au capital du LFB, afin d’aider celui-ci à se développer.
L’État n’a jamais perçu du LFB le moindre dividende, il a toujours réinvesti. Je le redis, l’État, à l’avenir, ne demandera pas le versement de dividendes. Bpifrance n’aura pas non plus les moyens d’en demander, puisque nous détenons 50 % des droits de vote en son sein.
La seule justification de l’entrée de Bpifrance au capital du LFB est de contribuer au développement de ce laboratoire. Que l’on ne vienne donc pas me dire qu’il y aurait un changement de jurisprudence ou que l’on aurait soudainement décidé de commercialiser ou de privatiser la collecte de sang, comme j’ai pu l’entendre, puisqu’il ne s’agit pas du sang, mais de l’utilisation du plasma sanguin pour la fabrication de médicaments.
C’est d’ailleurs pour cette raison que l’État a toujours décidé, en tant qu’actionnaire public, de ne jamais percevoir de dividendes, préférant réinvestir ; c’est ce que nous continuerons à faire pour permettre le développement du LFB. Il ne s’agit donc en aucun cas d’une privatisation. J’ai même pris l’engagement, que je réitère ici, que nous n’ouvririons pas le capital, fût-ce de façon minoritaire, à des acteurs privés.
Imaginons que je décide de retirer l’article 48.
Demain, je peux décider, par décret, d’ouvrir jusqu’à concurrence de 49 % le capital du LFB à des fonds privés. Tel est l’état actuel du droit français : si vous en êtes contents, alors vous êtes en totale contradiction avec ce que vous me dites depuis tout à l’heure !
Non seulement nous sécurisons le dispositif en prévoyant, à l’alinéa 3 de l’article 48, que toute privatisation devra être autorisée par la loi, mais j’ai également pris l’engagement qu’il n’y aura même pas d’ouverture minoritaire du capital au secteur privé.
Si l’on veut que l’État conduise une véritable politique actionnariale, une véritable politique de santé publique, il faut que nous puissions collectivement avoir un débat responsable. Or, à entendre les propos qui sont tenus depuis tout à l’heure, ce n’est pas le cas.
La sécurisation du LFB est pleine et entière, d’abord parce qu’il reste dans le giron public, ensuite parce que nous avons réitéré, à l’alinéa 3, ce que l’ordonnance elle-même prévoit, à savoir que toute privatisation devra être autorisée par la loi.
Tels sont les arguments qui me conduisent à émettre un avis défavorable sur ces trois amendements identiques. Je trouve que le débat sur cet article, tant à l’Assemblée nationale qu’au Sénat, est parfois emblématique du drôle d’état dans lequel se trouve notre pays…
MM. Jean Bizet, Gérard Longuet et Marc Laménie applaudissent.
Les débats sont toujours passionnés dès lors qu’il s’agit du sang. Je crois que nous avons tous été extrêmement marqués par la crise du sang contaminé, qui a notamment abouti à la création de l’Établissement français du sang. Celui-ci s’occupe de la collecte du sang, de la préparation des globules rouges, des plaquettes et de deux types de plasma aujourd’hui, contre trois auparavant, le plasma SD ayant été reconnu comme un médicament à la suite d’une décision de la Cour de justice de l’Union européenne et d’un arrêt du Conseil d’État.
L’Établissement français du sang fournit le Laboratoire français du fractionnement et des biotechnologies, qui est chargé de fabriquer des médicaments dérivés du plasma, les MDP.
Une troisième structure, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, l’ANSM, est le gendarme de la sécurité sanitaire et de l’application des règles éthiques.
Pour ma part, je soutiens totalement l’article 48. Sans l’apport de capitaux prévu par celui-ci, le LFB, qui est un laboratoire de très haute technologie, occupant le sixième rang dans le monde, serait obligé de vendre ses brevets. On peut tout de même faire preuve d’un peu de patriotisme scientifique quand on a la chance de disposer d’un laboratoire aussi remarquable, qui ne demande qu’à pouvoir se développer. Comme vient de l’expliquer M. le ministre, les capitaux apportés par Bpifrance sont publics, les actionnaires de celle-ci étant la Caisse des dépôts et consignations et l’État.
Par ailleurs, le fait qu’une privatisation éventuelle du LFB devrait être autorisée par la loi est une sécurité supplémentaire : il ne tiendrait qu’au Parlement d’en décider autrement. Pour parler familièrement, c’est ceinture et bretelles pour protéger le caractère public du capital du LFB !
Nous devons être fiers de pouvoir compter sur un laboratoire de cette qualité et sur des donneurs de sang qui incarnent le don éthique, c’est-à-dire gratuit, bénévole et anonyme.
Je n’ai à aucun moment mis en cause le ministre. Maintenir le statut public du LFB est pour moi la question essentielle. Le dispositif qui nous est présenté le permettra-t-il de manière durable ?
J’avais des doutes à cet égard et j’estimais préférable que l’APE accroisse son apport au capital du laboratoire. Le ministre nous dit que cela n’est pas possible : dont acte.
Il nous dit également que, en l’état actuel du droit, il serait possible d’ouvrir à des acteurs privés le capital du LFB par décret, alors que l’article 48 impose que toute privatisation soit autorisée par la loi, ce qui représente une certaine garantie. Il s’engage en outre à ne même pas ouvrir de façon minoritaire le capital au secteur privé.
Monsieur le ministre, ce n’est pas vous que je redoute, ce sont les changements de majorité !
Exclamations.
Rires sur les travées de l'UMP et de l'UDI -UC.
C’est l’expérience qui me fait dire cela !
En tout état de cause, si une nouvelle majorité voulait privatiser le LFB, elle devrait, aux termes de l’article 48, passer par la loi. Je fais le pari de la confiance et je retire mon amendement. Mais ne comptez pas que je fasse de même pour celui qui est relatif aux aéroports, monsieur le ministre !
L’amendement n° 158 rectifié est retiré.
La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
Je vous remercie, monsieur le ministre, de vos explications.
Il est plus facile aujourd’hui, dites-vous, d’ouvrir le capital du LFB au secteur privé qu’à des établissements publics, d’où la nécessité d’adopter l’article 48, qui imposera en outre l’intervention de la loi pour toute privatisation. Il ne sera plus possible de procéder par décret.
Sur ce point, je partage l’analyse de Mme Lienemann : le dispositif est intéressant.
En revanche, je ne comprends pas pourquoi Bpifrance entre au capital au lieu de consentir un prêt. Le prêt peut être remboursé, mais apporter 250 millions d’euros au capital sans pouvoir prétendre à aucun versement de dividendes, c’est idiot ! Un investissement doit bien, à un moment, être rentable.
Ces 250 millions d’euros seront acquis au LFB, qui normalement est rentable, mais seront perdus par Bpifrance, qui ne touchera jamais de dividendes, au dire de M. le ministre. C’est donc un investissement de 250 millions d’euros à fonds perdus !
Mes chers collègues, M. le ministre est certainement le plus à même de répondre aux questions de M. Desessard.
En dépit des explications que M. le ministre nous a déjà données, je n’ai toujours pas compris, pour ma part, pourquoi il ne s’agissait pas d’un prêt.
Des investissements en recherche et développement ne se financent jamais à 100 % par prêt ou endettement bancaire, …
… car, par définition, on n’en connaît pas l’issue. C’est pourquoi il faut des fonds propres.
En effet. Dès lors, nous avons choisi de recourir à du capital public plutôt qu’à du capital privé. Peut-être ce capital sera-t-il perdu : c’est le risque pris, qui s’attache à la nature du capital et qui justifie sa rémunération.
L’objectif est que ce capital se valorise à très long terme, par l’augmentation de la valeur du LFB. Il ne sera pas rémunéré par le truchement du versement de dividendes, car cet investissement en recherche et développement mettra du temps à prospérer.
La fonction de Bpifrance, qui gère même un fonds dédié à ce secteur, est de participer à de telles opérations. Sur le long terme, cet investissement permettra le développement du LFB.
Le sujet est extrêmement sensible. Les explications de Mme la rapporteur et de M. le ministre peuvent être de nature à nous rassurer, même s’il convient de rester prudents.
Pour ma part, je suivrai la position de la commission spéciale. Ceux d’entre nous qui assistent régulièrement à des assemblées générales d’amicales ou d’associations locales de donneurs de sang connaissent bien les inquiétudes de ces bénévoles. La notion de gratuité du don est très importante.
Tout en restant extrêmement prudent, il faut aussi faire confiance, tant à la commission qu’au Gouvernement, qui nous a livré des explications intéressantes.
En dépit des explications qui nous ont été apportées, je persiste à penser que d’autres solutions pouvaient être envisagées. Je ne vois pas pourquoi on ne peut pas mobiliser l’APE. M. le ministre vient de dire qu’il ne s’agissait pas de faire de l’argent. Pour ma part, j’y vois une contradiction.
En outre, il n’y a pas ceux qui défendent ce fleuron qu’est effectivement le LFB et les autres. Tous ici, nous le défendons ! Simplement, nous ne faisons pas la même lecture du dispositif. Dans ce débat passionné et passionnant, je n’ai pas entendu d’attaques contre M. le ministre ou de mises en cause de quiconque.
Comme je l’ai indiqué dans mon propos liminaire, les gouvernements et les ministres passent, et certains peuvent être tentés de recourir à l’article 49-3 de la Constitution : quand on élabore la loi et que l’on défend un point de vue, il faut l’avoir en tête ! Avec un texte comme celui-ci, qui touche finalement à tout, chaque fois qu’il s’agit du bien public, de l’utilité publique, des services publics, j’ai le sentiment qu’on fait du bricolage ! C’est dangereux, parce que l’on s’attaque au service public, à une certaine conception de la politique envisagée comme une réponse aux besoins humains. Ce projet de loi relève d’une autre logique, celle de la recherche de compétitivité et de rentabilité.
Nous restons fondamentalement attachés aux principes que nous avons énoncés et nous maintenons donc notre amendement avec force et conviction !
Ce matin, vous n’étiez pas d’accord pour prendre des mesures visant à favoriser l’investissement de l’épargne salariale dans les entreprises ; vous réclamiez à cor et à cri que l’investissement soit consenti via l’État. Maintenant, vous vous opposez à ce que de l’argent public soit investi dans le LFB. J’ai du mal à vous suivre !
Nous voulons précisément que ce soit l’argent public qui finance le LFB, via l’APE. Si vous ne parvenez pas à comprendre notre logique, monsieur Cadic, il faut que vous soyez plus attentif à nos explications !
Depuis ce matin, nous défendons le service public. Si, comme l’affirme M. le ministre, cette opération n’a pas pour finalité de faire du profit, pourquoi passer par Bpifrance ? Pourquoi ne pas continuer à financer le LFB par le biais de l’APE ?
Monsieur Cadic, si vous ne nous avez pas compris, c’est que vous ne nous avez pas suffisamment écoutés !
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 463, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 1
Remplacer les mots :
d’autres entreprises ou organismes appartenant au secteur public
par les mots :
la Banque publique d’investissement créée par la loi n° 2012-1559 du 31 décembre 2012 relative à la création de la Banque publique d’investissement
La parole est à M. Jean Desessard.
Je retire cet amendement de repli visant à limiter l’ouverture du capital du LFB à Bpifrance.
L'amendement n° 463 est retiré.
Je mets aux voix l'article 48.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 157 :
Le Sénat a adopté.
(Non modifié)
I A. – Par dérogation à l’article 22 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée, les opérations par lesquelles l’État transfère au secteur privé la majorité du capital d’une société exploitant une infrastructure de transport aéroportuaire ou autoroutière dans le cadre d’une concession accordée par l’État doivent être systématiquement autorisées par la loi.
I B. – Lorsque les opérations de cession de capital prévues au I et au 1° du II du même article 22 concernent une société exploitant un aérodrome, sont appliquées les dispositions suivantes :
1° Le décret mentionné aux mêmes I et 1° du II est pris sur le rapport des ministres chargés respectivement de l’économie et de l’aviation civile ;
2° Le cahier des charges de l’appel d’offres portant sur la cession de capital précise les obligations du cessionnaire relatives à la préservation des intérêts essentiels de la Nation en matière de transport aérien et est approuvé par le ministre chargé de l’aviation civile ;
3° Les candidats détaillent dans leurs offres les modalités par lesquelles ils s’engagent à satisfaire aux obligations mentionnées au 2° du présent I B ;
4° Les candidats au rachat des parts de l’État disposent d’une expérience de la gestion aéroportuaire et donnent, dès le stade de l’examen de la recevabilité des offres, des garanties sur leur capacité à exercer les missions prévues au cahier des charges de la concession des aérodromes concernés. Cette capacité est appréciée par l’autorité signataire du contrat de concession aéroportuaire.
I. – Le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Aéroports de la Côte d’Azur est autorisé.
II. – Le transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Aéroports de Lyon est autorisé.
Cet article vise à autoriser l’État à céder au secteur privé la majorité du capital des aéroports de Lyon et de Nice. Le Gouvernement fait donc le choix de céder ses participations dans des infrastructures qui fonctionnent bien, comme en témoignent les résultats de ces deux aéroports.
À Nice, en 2014, le chiffre d’affaires s’est élevé à 228, 3 millions d’euros, pour un trafic de 11, 7 millions de passagers. À Lyon, le chiffre d’affaires a atteint 158 millions d’euros, pour un trafic de 8, 46 millions de passagers. Les excédents bruts sont bons, et les projections de croissance très encourageantes : 3, 2 % pour l’aéroport de Nice et 5 % pour celui de Lyon.
À Nice, en moins de six ans, le nombre de passagers par an a crû de 8, 5 millions à 11, 7 millions et le nombre de destinations desservies dans le monde est passé de 80 à 110.
Vous l’aurez compris, tous les voyants sont au vert sur le plan comptable, contrairement à ce que l’on constate pour d’autres aéroports français, déficitaires, qui sont régulièrement épinglés par la Cour des comptes depuis 2008 pour « déficit chronique », mais qui demeurent ouverts grâce à des subventions publiques.
Les collectivités territoriales ainsi que les chambres consulaires sont actionnaires minoritaires, à hauteur de 40 %, dans les sociétés de gestion des aéroports de Nice et de Lyon, selon le même schéma : les chambres de commerce et d’industrie détiennent 25 % des parts, la région, le département et la métropole 5 % chacun. Elles sont donc concernées au premier chef par la nouvelle configuration d’actionnariat qui nous est imposée.
Compte tenu des montants en jeu, aucun montage public ne saurait permettre de réunir plusieurs centaines de millions d’euros – au moins 600 millions d’euros pour Nice.
Les collectivités territoriales s’inquiètent donc de l’identité du futur actionnaire majoritaire, dont le projet d’investissement, compte tenu de la maigreur des éléments figurant dans l’étude d’impact, constituera un saut dans l’inconnu sur les plans tant économique que social.
Attachées à leurs aéroports, les collectivités ont fait part de leur désapprobation. À Nice, par exemple, les quarante-neuf communes constituant la métropole Nice Côte d’Azur ont toutes voté une motion pour s’y opposer. Les villes voisines, comme celle de Cannes, qui accueille des événements internationaux, s’y sont opposées, ainsi, bien entendu, que le conseil municipal de Nice, à l’unanimité de ses élus, toutes convictions politiques confondues. Les Niçois ont également manifesté leur refus lors de la consultation référendaire du 19 février dernier : ils se sont prononcés à 97, 47 % en faveur du « non ».
Pour éviter que ces privatisations ne fassent l’objet de débats au Parlement pendant dix ou quinze ans après leur vote en raison de leur impréparation, je présenterai dans quelques instants, au nom de la commission spéciale, deux amendements.
Si les objectifs commerciaux et la logique économique doivent être pris en compte, nous ne pouvons nous permettre de laisser une faille dans la législation, au risque de perdre de précieux leviers en matière de développement international.
Eu égard à la rentabilité de ces deux aéroports, la loi doit être très précise.
Enfin, l’étude d’impact de cet article prévoit que la mesure permettra à « l’État de céder ses participations dans ces sociétés aéroportuaires dans des conditions avantageuses ».
Il faudra choisir non pas la meilleure offre financière, mais celle qui garantisse à la fois la meilleure valorisation des parts de l’État et la préservation des intérêts locaux tels qu’ils ont été défendus au cours de ces dernières semaines par nos concitoyens et les élus locaux concernés.
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
J’irai dans le même sens que Mme la rapporteur, ce qui est plutôt rare…
Il y a dix ans, les autoroutes françaises ont été vendues pour 15 milliards d’euros, ce qui entraîné une perte de 1 milliard d’euros par an au titre des dividendes rémunérant les participations de l’État. Sept années après la privatisation, les dividendes versés par les seules sociétés concessionnaires d’autoroutes privatisées se sont élevés, dividendes exceptionnels inclus, à 14, 9 milliards d’euros.
Monsieur le ministre, cet article représente une faute politique grave, et je pèse mes mots. Au travers de l’article 49, vous proposez de servir sur un plateau au secteur privé ces biens publics fondamentaux que les sociétés gestionnaires des aéroports de Nice et de Lyon. Vous envisagez la mise en vente de deux des trois plus grands aéroports que compte notre pays, dans le but de rendre une copie propre à Bruxelles, qui exige de vous des réformes libérales.
Les deux aéroports dont vous proposez la vente sont rentables. Les chiffres sont clairs à cet égard ; Mme la rapporteur vient d’en citer quelques-uns. La lecture des comptes annuels de ces deux sociétés nous apprend qu’elles ont réalisé des résultats nets positifs de l’ordre de 10 millions à 13 millions d’euros annuels.
Ces résultats permettent des investissements supplémentaires, qui créent de l’emploi. Ils permettent le versement de dividendes à la collectivité, qui a pu, ainsi, investir dans l’aéroport. Ils permettent également à la structure de renforcer sa solidité financière, au bénéfice de la collectivité. Enfin, ils permettent un développement concerté de l’aéroport.
Aujourd’hui, vous nous proposez de tirer un trait sur ces bénéfices qui reviennent à la collectivité, à seule fin de réaliser une opération financière de court terme. En effet, ce qui tient lieu d’étude d’impact ne justifie nullement cette privatisation. Quel est l’intérêt pour l’État de privatiser un élément du patrimoine qui génère des recettes ? Rien, dans les éléments qu’apporte le Gouvernement, ne vient à l’appui de votre volonté de privatiser ces deux aéroports. Certes, de l’argent sera récolté, qui permettra d’éponger une dette aussi abyssale qu’illégitime. Mais votre démarche n’est pas inspirée par le souci de l’intérêt général.
M. Claude Raynal proteste.
Un aéroport n’est pas une infrastructure de transport comme une autre. Il s’agit d’un outil central de l’aménagement et de l’attractivité économique, industrielle et touristique d’un territoire. Il est indispensable de lui conserver une maîtrise publique.
Il s’agit d’ailleurs de deux aéroports dans lesquels de lourds investissements publics ont déjà été réalisés ou vont l’être, par le biais de prêts importants, accordés par la Banque européenne d’investissement.
Pourquoi priver aujourd’hui les collectivités et, plus globalement, les acteurs publics, de la gestion de ces aéroports, et donc de retombées économiques positives ? Ce sont encore des sociétés privées qui vont empocher des bénéfices faramineux, au détriment de l’État et des citoyens. D’ailleurs, on peut craindre pour les riverains et l’environnement en cas de développement tous azimuts de ces deux aéroports, déjà très importants.
Mais le pire est peut-être qu’il ne s’agit pas là d’un coup d’essai. Sans revenir sur l’exemple des sociétés concessionnaires d’autoroutes – tout le monde est d’accord pour dire que la privatisation a été une erreur –, on peut citer l’aéroport de Toulouse-Blagnac, qui sera dorénavant géré par un consortium sino-canadien. Tandis que le groupe chinois est massivement implanté dans les paradis fiscaux, le groupe canadien auquel il s’est adossé gère une quinzaine d’aéroports en France, alors qu’il a été radié pour dix ans par la Banque mondiale, pour des faits graves de corruption d’acteurs publics. Mais peut-être la présomption d’innocence doit-elle là aussi jouer…
Pour conclure, je veux, au nom du groupe CRC, en appeler à la raison. Il ne s’agit pas simplement d’une mesure de libéralisation supplémentaire. Ce que prévoit ce texte, c’est la vente organisée de biens communs, qui rapportent, chaque année, des sommes importantes, mais qui permettent aussi et surtout à la puissance publique de conduire sa politique sur tout le territoire, en conservant la maîtrise d’un secteur clé de l’économie.
Comme mon collègue Jean-Pierre Bosino, j’estime que vendre au secteur privé les participations majoritaires de l’État dans les aéroports de Lyon et de Nice serait une erreur. Cela ne favoriserait ni la croissance ni même le développement de ces aéroports, au profit de l’économie régionale.
Notre refus de la privatisation de la gestion de ces deux aéroports pourra paraître relever d’une attitude frileuse et rétrograde à quelques-uns de nos collègues de l’UDI-UC, par exemple… J’estime, au contraire, que nous nous faisons ici les défenseurs scrupuleux des intérêts du pays et des populations des régions concernées.
En effet, les aéroports de Nice et de Lyon sont, tout de suite après ceux de Paris, les infrastructures qui ont la plus grande importance stratégique pour notre pays. En concéder la gestion à des acteurs privés, qui détiendraient la majorité du capital, soulève la question du degré d’influence que doit avoir la puissance publique, laquelle défend l’intérêt général, mais aussi les intérêts vitaux de la nation, dans ce type d’infrastructures, au profit de la collectivité.
En effet, le transport aérien, qui devient accessible à des populations de plus en plus nombreuses, n’est pas un moyen de transport anodin. Il est devenu important pour des millions de personnes dans notre pays. Or les compagnies aériennes commerciales sont largement dépendantes d’investisseurs dont la priorité est la rentabilité de leurs capitaux. Ne mettons pas en plus à la disposition de ceux-ci des infrastructures nécessaires à leur activité, qu’ils géreront selon les mêmes principes !
La privatisation de ces deux aéroports aurait également de fortes incidences en matière d’aménagement du territoire. Compte tenu de leur dimension et de leur importance, il nous paraît essentiel que la puissance publique en garde le contrôle, afin de pouvoir mettre en œuvre un type de développement économique, industriel et touristique cohérent et durable pour les territoires concernés.
Ces aéroports sont aujourd’hui rentables. Ils fonctionnent selon un modèle économique qui permet à la puissance publique de recevoir des dividendes importants, qu’elle utilise ensuite au seul bénéfice de la collectivité. Pourquoi, alors que ce système fonctionne bien, voulez-vous renoncer à restituer aux habitants de ces régions les investissements auxquels ils ont consenti, par l’impôt, pour rendre ces infrastructures attractives ? Au total, à qui la privatisation va-t-elle réellement profiter ? Avons-nous déjà oublié l’épisode de la privatisation des autoroutes ?
Lors de la cession de l’aéroport de Toulouse-Blagnac, il a beaucoup été question d’un géant canadien du génie civil, gestionnaire d’une quinzaine d’aéroports régionaux dans notre pays, aux méthodes commerciales tout à fait contestables. C’est ce même esprit qui a guidé une société chinoise, par ailleurs massivement implantée dans des paradis fiscaux, dans sa volonté de conquérir l’aéroport de Toulouse-Blagnac.
Le Gouvernement voudrait, en définitive, transférer aux géants du privé des gains qui devraient naturellement revenir à la population. Est-ce vraiment souhaitable ?
Enfin, je ferai remarquer que ces deux aéroports font aussi l’objet d’investissements importants, au travers des prêts consentis par la Banque européenne d’investissement pour des travaux d’agrandissement et d’amélioration des conditions d’accueil des passagers.
En fait, dans cette démarche de privatisation de ce type d’infrastructures, je ne vois qu’une volonté de réaliser une opération financière de court terme, en vue de résorber en partie la dette publique, au détriment de l’intérêt général et de l’intérêt à long terme des populations.
C’est, sur le fond, la raison principale de notre opposition à la privatisation de ces deux infrastructures aéroportuaires.
En juin 2013, le gouvernement Ayrault a cédé près de 9, 5 % du capital d’Aéroports de Paris, pour près de 738 millions d’euros. Le Gouvernement avait retenu le groupe Vinci et l’assureur Predica, filiale du groupe Crédit agricole, pour reprendre les parts du capital d’Aéroports de Paris que l’État et le Fonds stratégique d’investissement avaient décidé de mettre en vente.
En décembre 2014, l’État a cédé 49, 9 % du capital de l’aéroport de Toulouse-Blagnac, pour près de 308 millions d’euros, à un consortium sino-canadien. Cette décision montre que la préférence nationale, jusque-là privilégiée par la France, n’a plus cours.
Dans un entretien accordé au quotidien La Dépêche du Midi, vous aviez d’ailleurs reconnu, monsieur le ministre, que le prix avait été « le critère essentiel » dans le choix du consortium chinois. Cette décision continue de susciter de nombreuses inquiétudes, tant au niveau national qu'au niveau local.
La rédaction initiale de l’article 49 du présent projet de loi prévoyait simplement l’autorisation du transfert au secteur privé de la majorité du capital de la société Aéroports de la Côte d’Azur et du capital de la société Aéroports de Lyon.
Plusieurs amendements ont été adoptés à l’Assemblée nationale pour modifier cet article et, ainsi, mieux encadrer ces cessions.
Tout d’abord, nous nous réjouissons du renforcement du rôle du Parlement : les opérations par lesquelles l’État transfère au secteur privé la majorité d’une société exploitant une infrastructure aéroportuaire, dans le cadre de la cession d’une concession accordée par l’État, seront dorénavant soumises à l’approbation du Parlement.
Par ailleurs, l’article 43 du projet de loi modifie l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique. Il abaisse les seuils au-delà desquels un transfert en capital doit être approuvé par le Parlement, ce qui élargit le champ des entreprises concernées.
La cession de la société exploitante de l’aéroport de Toulouse-Blagnac n’aurait pu être réalisée sans l’autorisation du Parlement avec ces nouvelles conditions.
De plus, des conditions plus strictes pour le cahier des charges de l’appel d’offres ont été introduites à l’article 49.
Tout d’abord, la notion de « préservation des intérêts essentiels de la Nation » doit dorénavant figurer dans le cahier des charges, transmis à la Commission des participations et des transferts.
Un autre amendement a introduit la condition que les candidats au rachat des parts de l’État disposent d’une expérience dans la gestion aéroportuaire. Ainsi, seules les entreprises ayant la capacité de gérer des aéroports pourront le faire. Des fonds d’investissement, par exemple, ne pourront pas se porter acquéreurs.
Enfin, le ministre chargé de l’aviation civile devra approuver le cahier des charges, afin de vérifier qu’il remplit ces nouvelles conditions.
Malgré toutes ces avancées, que nous saluons, la rédaction de cet article, telle qu’issue de l’Assemblée nationale, nous paraissait encore perfectible.
Nous avons voulu, à travers deux amendements, associer plus étroitement les territoires sur lesquels sont implantés les aéroports.
Notre premier amendement tend à renforcer le rôle des collectivités dans la stratégie de développement de l’aéroport, le développement économique du territoire de celui-ci ainsi que dans sa gestion en tant qu’outil de développement du territoire.
La cession d’un aéroport régional par l’État ne pourra pas se faire au détriment des territoires qui accueillent cette infrastructure. Il est ainsi proposé que le cahier des charges oblige le candidat retenu à engager un dialogue approfondi avec les collectivités territoriales. Il devra tenir compte des intérêts économiques et touristiques des territoires concernés. En particulier, il devra veiller à ce que la stratégie de développement de l’aéroport soit conçue en cohérence avec les politiques décidées par les collectivités territoriales.
Le second amendement vise à élargir le domaine de compétences dont doivent disposer les candidats au rachat d’une participation majoritaire dans une société gestionnaire d’aéroports cédée par l’État. Cette mesure permettrait ainsi d’ouvrir l’appel d’offres à l’ensemble des acteurs, notamment locaux, disposant d’une expérience d’actionnaire d’une société gestionnaire d’aéroports. Par exemple, il pourra s’agir des collectivités locales ou des chambres de commerce et d'industrie, bien que ni les unes ni les autres ne puissent probablement entrer dans le capital d’une telle société, en raison des coupes claires que le Gouvernement leur a imposées.
Enfin, la décentralisation nous a conduits à penser de nouvelles stratégies pour l’aéroport de Lyon-Saint-Exupéry, mais également à renforcer l’implication des acteurs locaux dans cette activité.
Quatrième aéroport de France métropolitaine, avec près de 8, 5 millions de passagers par an, l’aéroport de Lyon doit affirmer sa vocation internationale : n’oublions pas, en effet, qu’il doit faire face à la concurrence de l’aéroport de Genève, situé à guère plus d’une heure. Pour atteindre cet objectif à l’horizon 2020, il doit accroître sa capacité d’accueil et maintenir un programme d’investissements pour dimensionner les infrastructures nécessaires à cette évolution. C’est, d’ailleurs, une demande forte des milieux économiques, cohérente avec le dynamisme économique de notre grande région Rhône-Alpes.
Cet article mérite d’être examiné de près : l’aéroport de Nice est le deuxième aéroport national pour le trafic de voyageurs, celui de Lyon le quatrième.
Il a été rappelé que les plateformes aéroportuaires touchent aux intérêts essentiels de la nation et présentent une grande importance pour les territoires.
Le développement, par exemple, dans les Alpes-Maritimes de l’aéroport de Nice est intimement lié à l’activité touristique, ainsi qu’au technopôle de Sofia Antipolis pour lequel la présence de cet aéroport a été un outil majeur.
Je ne m’appesantirai pas sur le contexte de l’aéroport de Toulouse. Monsieur le ministre, le moins que l’on puisse dire, c’est que l’opération n’a pas été menée de main de maître. Néanmoins, elle a servi à une chose : montrer combien il est important de bien encadrer ce genre d’opérations.
En ce qui concerne la société Aéroports de la Côte d’Azur, j’ai pu observer un certain nombre de postures et de déclarations enflammées. J’ai d’ailleurs trouvé assez piquant que certains qui avaient œuvré activement à la grande braderie des autoroutes s’insurgent aujourd’hui avec véhémence de l’éventuelle incidence de cette cession de parts, gesticulation référendaire en prime. Pourtant, la privatisation des autoroutes a eu et continue à avoir une tout autre incidence pour les Azuréens usagers de l’autoroute.
Sur le fond, j’ai une appétence très modérée pour le transfert d’une maîtrise publique vers un opérateur privé. Cependant, dès lors que l’État doit intervenir et mener des politiques industrielles – et je ne fais même pas référence à l’ampleur du déficit qui a été rappelé –, nous devons nous poser clairement la question des moyens dont il dispose : n’est-il pas judicieux de pouvoir en réorienter certains ?
Si on fait cette analyse, nous devons trouver les moyens d’encadrer une telle cession. C’est la démarche que j’ai personnellement suivie et que je vous propose, mes chers collègues, à travers trois amendements qui visent à garantir une concertation approfondie avec les élus et les organismes socio-professionnels du territoire, à garantir et à consolider les liens avec les acteurs locaux, et enfin, dans une perspective plus éthique, à empêcher qu’une entité domiciliée dans un paradis fiscal puisse présenter sa candidature.
Avant de passer à l’examen des amendements, je tiens à dire à Mme la rapporteur que son intervention sur l’article 49 m’a paru assez inhabituelle et ambiguë : parlait-elle en tant que rapporteur ou en tant qu’élue des territoires azuréens ?
Je retiens surtout votre proposition de ne pas faire durer ce débat sur dix ou quinze ans. Vous dites que vous avez déposé deux amendements en ce sens. J’en suis particulièrement ravi, puisque la rédaction de l’amendement n° 1738, déposé tardivement, reprend de façon quasi identique les termes de mon amendement n° 356 rectifié. Avec cette volonté de rassemblement qui est la vôtre, au-delà de toute querelle politicienne, vous émettrez très certainement un avis favorable sur ce dernier amendement. J’aurai d’ailleurs l’occasion de soulever deux problèmes relatifs à la rédaction et à la portée de votre amendement n° 1738.
Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 53 est présenté par Mme Assassi, MM. Foucaud et Bocquet, Mmes Beaufils, Cukierman et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 159 rectifié est présenté par Mmes Lienemann et Claireaux, MM. Aubey et Raynal et Mme Jourda.
L'amendement n° 765 est présenté par MM. Ravier et Rachline.
L'amendement n° 943 rectifié est présenté par MM. Collombat et Bertrand et Mme Malherbe.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Brigitte Gonthier-Maurin, pour présenter l’amendement n° 53.
À travers l’article 49, le Gouvernement prévoit de privatiser les sociétés de gestion des aéroports de Lyon et de Nice, sans autre justification que la recherche de nouvelles recettes.
Vous l’aurez compris, cela nous préoccupe particulièrement, car cette perspective de privatisation ne prend nullement en compte les enjeux d’aménagement du territoire liés à ces infrastructures aéroportuaires. Elle se fait de surcroît à l’écart des collectivités territoriales et autres organismes publics, eux-mêmes actionnaires, qui ont pourtant en charge le développement économique de leur territoire. Ainsi, un levier très important de leur capacité de maîtrise de leur développement économique leur échappe. Par là même, l’État perdra toute possibilité d’intervention et de maîtrise en termes de développement économique et d’aménagement du territoire de tout le Grand Sud-Est de notre pays.
En réalité, cette privatisation cache mal son orientation libérale pour répondre aux exigences bruxelloises, comme cela a également été souligné.
Ce faisant, après l’ouverture du capital d’Aéroports de Paris, avec la vente de l’aéroport de Toulouse-Blagnac, ce sont les trois premiers aéroports régionaux qui seront ainsi cédés au secteur privé.
En réalité, la proposition qui nous est faite est assez démonstrative de ce qui se cache systématiquement derrière le changement de statut de certains organismes, passant d’établissement public en société par actions : à chaque fois, ces modifications sont présentées comme de simples mesures pour en améliorer la gestion, mais à chaque fois cela se termine par l’entrée de capitaux privés pouvant aller, comme c’est le cas aujourd’hui, jusqu’à une prise de contrôle majoritaire.
Tout cela continue de se faire contre l’intérêt général. Vous ne serez donc pas étonnés que notre amendement n° 53 vise à la suppression de l’article 49.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l’amendement n° 159 rectifié.
Cet amendement, signé par un certain nombre de mes collègues du groupe socialiste, vise aussi à supprimer l’article 49. Nous pensons que ces aéroports, plus particulièrement ceux de grande dimension, constituent des éléments majeurs d’aménagement du territoire, ainsi que des outils et des atouts de développement économique. Il est important que la puissance publique dans sa diversité, y compris les collectivités locales et autres acteurs, reste maître du jeu pour penser l’avenir et gérer le présent.
Ces aéroports sont-ils mal gérés ? Coûtent-ils cher à l’État et à la puissance publique ? Non ! Ils sont bien gérés, ils se développent et ils réalisent plutôt des bénéfices. D’ailleurs, s’ils étaient déficitaires, personne ne voudrait les acheter !
En l’état actuel, la puissance publique y est majoritaire et elle en retire des bénéfices. Pourquoi déciderait-elle de se priver d’un outil qui marche, qui ne coûte pas cher et qui rapporte ? Quelle est la logique de cette affaire ? Est-ce que cela empêche pour autant de nouer des partenariats avec des compagnies aériennes, avec d’autres acteurs pour développer des activités ? Absolument pas ! Des partenariats existent déjà et se développent.
La seule raison est de nature budgétaire et financière. J’ose espérer qu’elle n’est pas idéologique. Si elle est financière et budgétaire, réfléchissons. Je prendrai l’exemple de la société de gestion de l’aéroport de Toulouse-Blagnac qui a été vendue, me semble-t-il, pour 400 millions d’euros.
Encore mieux ! Une telle somme est inférieure à la somme que l’État verse tous les ans au titre du CICE à deux ou trois grands groupes de la distribution. Chacun sait que cet argent reversé à ces groupes n’a ni amélioré les exportations, ni créé des emplois, ni même favorisé l’investissement.
Oui, il y a des choix publics à faire ! Il était à mon avis plus important de garder la maîtrise publique des grands aéroports plutôt que de verser des sommes au titre du CICE sans contrepartie ni ciblage dans certains secteurs qui n’en ont pas besoin !
Si l’on veut réfléchir au déficit public, réfléchissons-y, mais ne nous privons pas d’un patrimoine, d’un outil de développement, d’un actif qui rapporte, parce que cela reviendrait à vendre les bijoux de famille.
Or, c’est ce que notre Nation fait depuis des années : elle cède son patrimoine public, sans pour autant le développer, ce qui n’améliore pas la situation des finances publiques, tout au contraire : dans bien des cas, nous avons vendu des actifs qui rapportaient et des secteurs industriels.
Contrairement à vous qui êtes beaucoup plus jeune, monsieur le ministre, j’ai vécu la privatisation de Renault. On disait, à l’époque, que l’État n’avait rien à faire dans l’automobile ! Or, aujourd’hui, vous rachetez des actions qu’on aurait bien fait de ne pas vendre, même si je ne dis pas que le capital devait rester à 100 % public.
En conclusion, à mon sens, rien ne légitime qu’on ouvre le capital de ces grands aéroports ; voilà pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
Le Gouvernement émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques. Je répondrai aux différentes interventions tout en explicitant la position du Gouvernement.
Pour la première fois depuis le début de notre discussion sur les participations publiques, nous parlons de privatisations à proprement parler. En effet, juridiquement, dans le cas de Nexter Group, il s’agissait d’autoriser l’ouverture du capital en vue d’un rapprochement, et non pour toucher de l’argent.
Permettez-moi quelques truismes, qui, dans le contexte, me semblent nécessaires : lorsque l’on privatise, c’est pour toucher de l’argent ; et c’est mieux de le faire avec une société qui marche qu’avec une société qui ne marche pas ; à l’inverse, quand on essaie de privatiser une société qui ne marche pas, étonnamment, elle ne rapporte pas d’argent !
Exclamations.
Je voudrais rappeler certains points.
Premier point, nombre d’entre vous ont dit que certaines sociétés avaient de bons résultats. Oui, et c’est précisément pour cette raison qu’on se permet de les privatiser, car c’est plutôt une opération qui, sur le plan financier et même patrimonial, est intelligente pour l’État.
L’exemple de Toulouse est là pour le montrer. Nous reviendrons sur les modalités de cette cession. En tout cas, comme vous l’avez dit, cette opération représente 308 millions d’euros et les dividendes versés 1, 5 million d’euros par an. Quand on compare ces deux montants, on voit que la rentabilité est très bonne.
C’est donc un choix patrimonialement pertinent.
À quoi sert cet argent ? C’est le second point que je souhaitais clarifier pour répondre en particulier aux remarques de Mme la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann.
Le produit des cessions d’actifs ne sert pas à réduire le déficit public et n’est donc pas comparable au CICE. Ne s’agissant pas de revenus récurrents, ce n’est pas maastrichien au sens du déficit. Cela ne peut pas servir à financer des dépenses budgétaires. À quoi peut-il servir ? Soit à se désendetter, soit à réinvestir. D’ailleurs, sur ce point, nos priorités ont été claires.
Les privatisations qui seront conduites par ce gouvernement serviront donc au désendettement – la loi de finances pour 2015 porte 4 milliards d’euros de désendettement par voie de privatisations – et au réinvestissement : c’est ce qui a été fait avec PSA l’année dernière, c’est ce que nous faisons pour l’AFD, avec la réinjection de 800 millions d’euros, c’est ce qui sera fait pour le logement intermédiaire, puisque nous avons budgété près de 1 milliard d’euros, et c’est ce que nous serons sans doute conduits à faire dans le cas de Alstom : ce sont des recapitalisations qui passent par un réinvestissement de l’État et qui supposent par là même que l’État se désengage d’autres participations moins utiles.
Troisième point, pourquoi choisir ces sociétés de gestion aéroportuaires ? Ce n’est en effet pas ainsi que l’État exerce le bon contrôle sur ces infrastructures, et ce à deux égards : d’une part, ce n’est pas le bon moyen de les contrôler, et d’autre part, l’État, historiquement, a plutôt été un mauvais actionnaire.
C’est la grande différence avec les sociétés concessionnaires d’autoroutes et, à cet égard, je souhaiterais dissiper une confusion récurrente : lorsque l’opération sur les autoroutes a été réalisée, il y avait des sociétés privées concessionnaires qui géraient le domaine public ; on a donc décidé d’un transfert pour une durée donnée, en contrepartie d’une valeur, à des sociétés privées concessionnaires du domaine public. Dans ce cas, il y a un transfert de valeur, c’est encadré dans le temps, mais on maîtrise mal – et cela a été toute la difficulté des dix dernières années – la régulation financière de l’opération – péages, travaux, équilibre économique du contrat… Le dispositif dont nous avons discuté voilà quelques jours et qui a été adopté devrait nous permettre de mieux encadrer cet équilibre.
Mais le principe est clair : on transfère pour un temps donné – long – à un opérateur privé non seulement l’infrastructure, mais aussi sa gestion et l’ensemble de son équation économique.
La situation est très différente pour les sociétés de gestion aéroportuaires. On ne transfère en rien l’infrastructure et la propriété solide : les infrastructures et les abords restent dans le domaine public, la régulation économique est assurée par un contrat de régulation économique – généralement pour une durée quinquennale – conclu avec l’État prévoyant l’évolution annuelle des tarifs. Par ailleurs, les éléments les plus structurants de l’activité d’un aéroport et de sa société de gestion, à savoir les ouvertures de ligne, sont décidés par la Direction générale de l’aviation civile, la DGAC.
Les sociétés de gestion aéroportuaires s’occupent des négociations avec les compagnies aériennes et de l’optimisation de l’espace qu’elles ont à gérer – commerces, gestion du trafic… Mais l’infrastructure critique reste publique, et sa régulation se fait par le contrat de régulation économique et la DGAC.
Les préoccupations des élus concernés par les transactions en cours – qu’il s’agisse de Nice ou de Lyon – portent d’ailleurs non pas sur la société de gestion, mais sur la capacité à ouvrir de nouvelles lignes, sur la capacité à créer du nouveau trafic avec d’autres compagnies aériennes – souvent originaires du Golfe – afin de développer ces aéroports.
Le vrai débat du développement de ces aéroports réside dans le paradoxe constant entre la préservation nécessaire de notre compagnie aérienne nationale – Air France – et l’intérêt de ces aéroports régionaux qui ont besoin, pour se développer, de s’affranchir du hub unique Roissy-Charles de Gaulle-Orly.
M. Marc Daunis acquiesce.
Pourquoi la DGAC refuse-t-elle la plupart du temps les ouvertures de lignes à des compagnies tierces, ce qui permettrait pourtant d’assurer un meilleur développement régional ? Parce que cela reviendrait à pénaliser Air France !
Mme Nicole Bricq acquiesce.
Cela ne changera pas, en tout cas par ce biais-là. C’est en effet un autre débat qu’il faudrait avoir. Or, on a souvent confondu ces deux débats. Et c’est pourquoi l’État est un mauvais actionnaire de ces sociétés de gestion : il est en conflit d’intérêts permanent. Contrairement aux sociétés concessionnaires d’autoroutes, l’État est à la fois le régulateur – à travers le contrat de régulation économique et les autorisations d’ouverture de lignes – et l’un des actionnaires de la principale compagnie aérienne nationale.
Et accessoirement de la SNCF… Il a donc en permanence deux intérêts contradictoires à ménager.
L’État n’est pas un bon actionnaire de ces sociétés de gestion, dans lesquelles il n’a jamais réinvesti, pour deux raisons : d’une part, ce n’est pas là qu’est le contrôle critique et stratégique de ces infrastructures ; d’autre part, il se trouve en conflit d’intérêts permanent, et son rôle est avant tout de réguler, et, davantage, d’être présent à travers la DGAC et le contrat de régulation économique.
C’est pourquoi je suis convaincu que libérer du capital en sortant de ces sociétés de gestion, compte tenu de leur valorisation – l’exemple de Toulouse l‘a démontré –, est une opération rationnelle, dans le contexte actuel. Cet argent pourra être utilisé au désendettement, d’une part, et au réinvestissement, d’autre part.
Plusieurs d’entre vous ont évoqué la question des coactionnaires aux côtés de l’État, en particulier des collectivités territoriales et des CCI. Et il a été dit, à juste raison, qu’il faut assurer les coactionnaires du fait que leurs intérêts sont pris en compte. Je salue le pragmatisme dont vous avez fait preuve, madame la rapporteur, dans votre façon de gérer les travaux sur le sujet. Nous y reviendrons, mais je partage vos propos.
Monsieur le sénateur Daunis, l’amendement que vous avez déposé va en ce sens et permet de bien circonscrire la prise en compte de ces intérêts locaux. Ma remarque vaut également pour M. le sénateur Collomb, qui a déposé l’amendement n° 994, et j’imagine que M. le sénateur Raynal voudra également intervenir sur le sujet.
Il est important de prendre en compte la sensibilité des collectivités territoriales coactionnaires. Je pense que le texte mérite d’être amélioré sur ce point. Il me semble que ce serait tout à fait faisable, à la condition d’établir un distinguo : dès lors que les coactionnaires participent à la définition du cahier des charges, ils ne peuvent s’engager dans une opération de reprise. Je dirai qu’il faut en quelque sorte choisir sa place.
Tels sont les principaux points dont je tenais à vous faire part à ce stade du débat afin de préciser le pourquoi et le comment de cette opération.
Pour conclure, je précise que si Aéroports de Paris est traité différemment de Nice, de Lyon ou de Toulouse, c’est que, contrairement à ces derniers, le foncier est dans la main de la société. C'est la raison pour laquelle nous avons toujours tenu à garder une majorité §Tant qu’il n’y aura pas de restructuration de l’organisation d’ADP, cette situation, profondément différente de celles que j’ai pu évoquer, n’évoluera pas.
Monsieur le ministre, je vais être au regret de vous dire ce soir que, sur ce point, je ne partage pas votre position.
Je vous ai bien entendu, mais je n’ai trouvé aucun élément de réponse de nature à me rassurer. Comme vous le savez, j’ai bien suivi le dossier de Toulouse et j’ai beaucoup travaillé à cette question. Je vous le dis très clairement : je maintiendrai mon opposition et ma demande de suppression de cet article.
La question de l’Agence de participation de l’État, l’APE, ne me pose aucune difficulté. La gestion de ces participations doit se faire au mieux des intérêts de l’État. Ce dernier, c’est une évidence, a besoin d’argent pour investir dans le capital d’autres entreprises ; pourquoi, dès lors, ne pas trouver cet argent auprès de ces sociétés concessionnaires ? Moi, je n’ai pas d’états d’âme avec l’idée que vous autorisiez par décret la vente de ce dont vous n’avez pas besoin, à savoir 49, 9 % des actions.
De quoi parle-t-on en fait ? D’un gain d’environ 1, 5 milliard d’euros. Si l’on compte 300 millions d’euros pour Toulouse, je veux bien croire que c’est davantage pour les autres aéroports, qui sont plus importants. Partons de ce chiffre : entre le décret autorisant la vente de 49, 9 % des actions que vous pouvez prendre aujourd’hui et votre projet de céder 60 % du capital de ces sociétés, la différence est de 16 %, soit 200 millions d’euros.
Sur ce dossier – je parle bien des trois aéroports –, nos discussions portent sur 200 millions d’euros seulement. Que vous vendiez pour 1, 3 milliard d’euros de participations ne pose aucun problème. Vous pouvez d’ailleurs encore le faire en cet instant.
Si vous en passez par la loi, c’est que vous voulez céder plus de 50 % du capital de ces sociétés. Pourquoi faut-il que l’État vende 60 % de ces actions alors qu’avec ces 10 % en sus des CCI et des participations des départements, régions et métropoles nous pourrions conserver le contrôle public de la structure ? C’est d’ailleurs tout ce que je demande : que l’État garde ce contrôle à travers 50, 01 % des actions.
Un autre de vos arguments me convient encore moins. Vous avez salué la vente de l’aéroport de Toulouse pour 308 millions d’euros en soulignant qu’il rapportait 1, 5 million d’euros par an, soit 45 millions sur les trente ans de la concession.
Mais dans ces conditions, comment l’acheteur va-t-il rentabiliser son investissement ? Il va devoir modifier sensiblement l’exploitation de l’aéroport, notamment à travers l’ouverture de lignes supplémentaires. Pour un simple retour sur investissement, le concessionnaire va devoir faire passer la rentabilité de l’aéroport de 1, 5 million d’euros par an à quelque 10 millions d’euros par an – une paille ! –, et donc la multiplier par six ou sept, sans parler même des gains à réaliser.
Les aéroports vont donc ouvrir de nouvelles lignes. Nous savons que Etihad Airways et Emirates sont demandeuses depuis longtemps, et que des compagnies chinoises désireuses de se développer sur nos plateformes régionales sont également intéressées. Pourquoi pas ?
Toutefois, cela signifie qu’il va falloir arbitrer entre, d’une part, la défense du pavillon Air France que vous évoquiez à l’instant – c’est-à-dire continuer de privilégier le hub de Roissy – et, d’autre part, le développement de hubs régionaux pour ces compagnies-là.
Vous dites que l’arbitrage sera fait par la DGAC. Mais cette dernière sera-t-elle vraiment en mesure de trancher ? L’État, après avoir vendu si cher – 308 millions d’euros pour l’aéroport de Toulouse –, pourra difficilement s’opposer à l’ouverture de nouvelles lignes.
Pour conclure, monsieur le ministre, je vous redis que j’aurais préféré que l’État garde le contrôle global de l’opération, car il doit mener de front trois objectifs : la défense du pavillon français à travers Air France, la défense des industriels – et notamment d’Airbus – liée à l’exploitation de nouvelles routes en raison de la pression des compagnies aériennes, et le développement des aéroports.
En accueillant des partenaires nouveaux dans chacun de ces aéroports, vous risquez de gripper un mécanisme qui doit rester sous la maîtrise de l’État, seul à même de concilier ces trois intérêts différents.
Je suis quelque peu troublé par cette discussion : vous avez de bons arguments, monsieur le ministre, et je crois que vous avez globalement raison sur le fond.
En revanche, je vous donne tort sur la forme et le choix de la méthode, c’est-à-dire la brutalité de l’action du Gouvernement dans les deux aéroports concernés. J’ai été très sensible à la synthèse des actions locales qu’a exposée Mme la rapporteur, ainsi qu’aux propos de ma collègue Élisabeth Lamure concernant Lyon.
En région d’Île-de-France, nous avons l’habitude de la brutalité de l’État en matière de projets d’infrastructures de transport.
Cette brutalité, nous dit-on, est souvent justifiée par l’intérêt général, l’intérêt de la nation. Peut-être la représentation nationale ne regarde-t-elle pas suffisamment ce qui se passe en Île-de-France.
Voilà quelques jours, nous étions une dizaine de parlementaires à discuter de la liaison vers Roissy-Charles de Gaulle. Le chèque en blanc que nous avons signé au profit du Gouvernement représentera plusieurs dizaines de fois la privatisation de tel ou tel aéroport.
Or vous avez raison : l’État est en général un très mauvais actionnaire. Il faudrait appliquer ce principe à beaucoup d’infrastructures de transport, et notamment aux quatre sociétés d’État. Vous me direz qu’elles ne coûtent pas grand-chose, parce qu’elles rapportent très peu, surtout s’agissant du transport collectif en Île-de-France. Vous pourriez cependant évoquer le même principe qu’à l’article 3.
En réalité, il faudrait une doctrine nationale cohérente. Il faudrait appliquer aux aéroports internationaux de Nice, de Lyon et de Toulouse la même procédure que pour l’opération en cours sur un aéroport international d’Île-de-France, vital pour l’intérêt général.
J’aimerais savoir jusqu’où vous comptez aller dans votre logique. Car vous avez raison, c’est bien ainsi qu’il faut procéder. D’ailleurs, cela n’offusque personne lorsque Aéroports de Paris achète, pour se renforcer, des aéroports en Turquie, au Portugal ou ailleurs dans le monde. Cela correspond en effet à une nécessité, notamment pour nos compagnies aériennes et notre fabricant national, EADS.
Vous l’avez dit, monsieur le ministre, l’autorité de l’État n’est pas en cause, puisqu’une délégation de service public est prévue. Par ailleurs, partout dans le monde, on privatise les aéroports. Malheureusement, dans ce domaine, le Gouvernement manque un peu de pédagogie et, surtout, de contacts et de liens avec les élus locaux, comme en témoignent les deux cas particuliers que nous évoquons. Si les régions, les départements ou les collectivités locales avaient des fonds propres plus importants, elles pourraient investir directement.
Cela me conduit à vous rappeler ce que nous vous proposions pour la région d’Île-de-France. Premièrement, nous souhaitions, monsieur le ministre, que vous preniez en compte les collectivités régionales et départementales, notamment pour mettre en place une structure commune qui regrouperait les quatre sociétés d’État. Deuxièmement, pour ce qui concerne la liaison Roissy–Charles-de-Gaulle, vous feriez bien de mettre en œuvre le principe qui vous anime, puisque cela fait à peu près vingt ans que l’État essaie d’initier cette liaison. Comme il n’y est pas arrivé par la privatisation, il reprend aujourd'hui le manche. On le sait très bien, cet équipement sera financé par une taxe spéciale, ce qui se révélera nettement plus onéreux que la privatisation évoquée aujourd'hui.
Je veux vous répondre sur un point important, monsieur le ministre. Finalement, sommes-nous dans une gestion un peu dynamique de l’État ou dans une autre logique ?
Premièrement, il s’agit d’une logique d’aménagement du territoire et d’investissement public en faveur d’infrastructures publiques, ce qui n’est pas la même chose qu’une participation dans une entreprise industrielle ou de service.
Deuxièmement, vous avez annoncé que l’État allait vendre de 5 à 12 milliards d’euros d’actions publiques. Il s’agit donc non pas de redistribuer les moyens publics, mais bien de réduire la voilure des actions publiques et des interventions publiques de l’État.
Vous me dites que ce n’est pas la même chose que le CICE ! Je sais bien qu’en comptabilité tel n’est pas le cas. Je sais bien également que vous affecterez ces sommes, d’une manière ou d’une autre, au désendettement. Mais si le déficit public avait été moindre, vous auriez alors pu contribuer aussi au désendettement…
Enfin, chacun évoque ici les collectivités locales. Or, dans tous les sondages, les Français se révèlent hostiles aux privatisations des infrastructures telles que les aéroports. §Mais les Français ne sont pas idiots quand ils votent pour nous et intelligents quand ils votent pour vous et que leurs réponses vont dans votre sens ! Quand on fait des référendums locaux, ils répondent systématiquement, tout comme les élus, qu’ils sont hostiles aux privatisations. Après, on vient nous dire depuis l’étranger – je pense notamment à M. Schäuble – que la démocratie, le Parlement, c’est un exercice difficile. Pourtant, notre pays n’a pas l’intention de renoncer à considérer que l’intérêt général est parfois bien porté par de l’action publique, de l’intervention, des capitaux publics.
Monsieur le ministre, vous affirmez à mon avis un peu trop souvent que l’État est mauvais actionnaire. Si tel est le cas, c’est souvent à cause de la haute administration que vous avez sous votre autorité. Puisque vous dites en être responsable, vous êtes donc en partie responsable du fait que l’État n’est pas un bon actionnaire et ne sait pas bien gérer !
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n° 1738, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 1
Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
I A. - L’article 22 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique est complété par un paragraphe ainsi rédigé :
« ... – Les opérations par lesquelles l’État transfère au secteur privé la majorité du capital d’une société exploitant une infrastructure de transport aéroportuaire ou autoroutière dans le cadre d’une concession accordée par l’État sont autorisées par la loi. »
II. – Alinéa 2
Remplacer les mots :
au I et au 1° du II
par les mots :
au VI
III. – Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Le présent amendement vise à procéder à différentes corrections de nature juridique.
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les deux premiers sont identiques.
L'amendement n° 1739 est présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission.
L'amendement n° 763 rectifié est présenté par Mmes Lamure et Estrosi Sassone et MM. Nègre et Savin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
2° Le cahier des charges de l’appel d’offres portant sur la cession de capital est approuvé par le ministre chargé de l’aviation civile. Il précise les obligations du cessionnaire relatives à la préservation des intérêts essentiels de la Nation en matière de transport aérien, ainsi que ceux du territoire concerné en matière d’attractivité et de développement économique et touristique. Il précise également les obligations du cessionnaire afin de garantir le développement de l’aérodrome en concertation avec les collectivités territoriales sur le territoire desquelles il est installé ;
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur, pour présenter l’amendement n° 1739.
Le présent amendement vise à garantir que la cession d'un aéroport régional par l’État ne se fera pas au détriment des territoires qui accueillent cette infrastructure.
Il est ainsi proposé que le cahier des charges oblige le candidat retenu à engager un dialogue approfondi avec les collectivités territoriales. Celui-ci devra tenir compte des intérêts économiques et touristiques des territoires concernés. En particulier, il devra veiller à ce que la stratégie du développement de l'aéroport soit conçue en cohérence avec les politiques décidées par les collectivités territoriales.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour présenter l’amendement n° 763 rectifié.
L’amendement n° 994 n’est pas soutenu.
L'amendement n° 356 rectifié, présenté par MM. Daunis et Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Richard, Sueur et Vaugrenard, Mme M. André, MM. Antiste, Anziani, Assouline, Aubey et D. Bailly, Mme Bataille, MM. Bérit-Débat et Berson, Mmes Blondin et Bonnefoy, MM. Botrel, Boulard, M. Bourquin, Boutant, Caffet et Camani, Mme Campion, MM. Carcenac et Carrère, Mme Cartron, MM. Carvounas, Cazeau et Chiron, Mmes Claireaux et Conway-Mouret, MM. Cornano, Daudigny, Delebarre, Desplan, Durain et Duran, Mme Durrieu, M. Eblé, Mme Espagnac, M. Frécon, Mmes Ghali et D. Gillot, M. J. Gillot, Mme E. Giraud, MM. Godefroy et Gorce, Mme Guillemot, M. Haut, Mme Herviaux, M. Jeansannetas, Mme Jourda, MM. Kaltenbach et Karam, Mme Khiari, MM. Labazée, Lalande, S. Larcher et Leconte, Mme Lepage, M. J.C. Leroy, Mme Lienemann, MM. Lorgeoux, Lozach, Madec, Madrelle, Magner, Manable, F. Marc et Mazuir, Mmes Meunier et D. Michel, MM. Miquel et Mohamed Soilihi, Mme Monier, MM. Montaugé, Néri, Patient, Patriat et Percheron, Mme Perol-Dumont, MM. Poher, Raoul, Raynal et Reiner, Mmes Riocreux et S. Robert, MM. Roger, Rome et Roux, Mme Schillinger, M. Sutour, Mmes Tasca et Tocqueville, MM. Tourenne, Vandierendonck, Vergoz et Vincent, Mme Yonnet et M. Yung, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après les mots :
en matière de transport aérien et
insérer les mots et le membre de phrase :
de ceux du territoire concerné. Il
La parole est à M. Marc Daunis.
Je ne comprends pas très bien la situation. Cet amendement tend à ajouter, après les mots « en matière de transport aérien et » les mots « de ceux du territoire concerné. Il ». Par cette rédaction simple, il s’agit de préserver les intérêts essentiels de la nation.
Or j’observe que l’amendement n° 1739 présenté par Mme la rapporteur reprend exactement les mêmes termes, positionnés de façon un peu différente. La distinction principale tient à l’ajout de la précision suivante : « en matière d’attractivité et de développement économique et touristique ».
Par ailleurs, cet amendement de la commission évoque une « concertation avec les collectivités territoriales sur le territoire desquelles il [l’aéroport] est installé ».
Je le précise pour la bonne compréhension de mes collègues, il s’agit des deux seules différences entre mon amendement et les deux amendements identiques n° 1739 et 763 rectifié, qui viennent d’être présentés.
La différence la plus notable entre ces amendements tient à la présence dans les deux amendements identiques des mots : « en concertation avec les collectivités territoriales sur le territoire desquelles il est installé ». Ainsi, si je prends l’exemple de l’aéroport de Lyon, la métropole de Lyon n’aura plus son mot à dire, l’aéroport étant implanté en dehors du périmètre de la métropole. Le département comptera donc parmi les collectivités territoriales concernées, mais tel ne sera pas le cas de la métropole de Lyon.
C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, je pense que vous prendriez juridiquement un risque extrêmement important en adoptant les amendements identiques n° 1739 et 763 rectifié. Mon amendement, en revanche, permet justement de prévoir que l’encadrement des cessions de parts de l’aéroport de Lyon ne peut exclure la métropole de Lyon. De la même façon, d’ailleurs, dans les Alpes-Maritimes, la rédaction retenue par ces amendements identiques aurait pour conséquence d’exclure les intercommunalités autres que la métropole de Nice : je pense notamment à la technopôle de Sophia Antipolis et à l’aéroport de Cannes, qui est implanté sur le territoire de Mandelieu.
C’est la raison pour laquelle mon amendement n° 356 rectifié me paraît préférable.
Le sous-amendement n° 1795, présenté par MM. Collomb et Courteau, est ainsi libellé :
Amendement n°356 rectifié, alinéa 5
Après les mots :
de ceux du territoire concerné
insérer les mots :
ainsi que ceux des collectivités territoriales actionnaires
La parole est à M. Roland Courteau.
Ce sous-amendement déposé par Gérard Collomb et moi-même à l’amendement n° 356 rectifié ô combien pertinent de notre collègue Marc Daunis prévoit que les collectivités territoriales actionnaires des aérodromes peuvent être associées à la concertation relative à la stratégie de développement de l’aéroport, dans le cadre des obligations du candidat retenu, telles qu’elles sont prévues au cahier des charges.
En effet, certains aérodromes ne se trouvent pas nécessairement sur le territoire des collectivités qui en sont actionnaires.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 356 rectifié et le sous-amendement n° 1795 ?
La commission demande le retrait de cet amendement et de ce sous-amendement, qui sont satisfaits par l’amendement n° 1739, lequel a été rédigé en lien avec le cabinet de M. le ministre – le cabinet m’a d’ailleurs indiqué par écrit qu’un avis favorable serait émis. Volontairement, lorsque la commission spéciale s’est réunie, je n’avais pas voulu intervenir, car je savais que des négociations étaient en cours entre le cabinet du ministre et celui du président de la métropole. J’attendais que ces négociations se soient déroulées convenablement.
Pour autant, j’entends tout à fait la préoccupation exprimée dans le sous-amendement n° 1795 et je suis prête à rectifier l’amendement n° 1739 pour l’intégrer. Je peux en effet concevoir que l’on soit particulièrement sensible à cette question, ne serait-ce que pour ce qui concerne l’aéroport de Lyon, lequel n’est pas situé sur le territoire de la métropole. On peut donc prévoir une concertation avec « les collectivités territoriales actionnaires », plutôt qu’avec « les collectivités territoriales sur le territoire desquelles il [l’aéroport] est installé ».
En conséquence, je demande le retrait de l’amendement n° 356 rectifié et du sous-amendement n° 1795, qui sont satisfaits.
Ce sujet a fait l’objet d’un travail collectif, puisque, à la suite du débat parlementaire, j’ai reçu M. le député Christian Estrosi, comme je m’y étais engagé lors du débat à l’Assemblée nationale. Un travail a ensuite été mené avec Mme la rapporteur. Tout cela s’est fait en architecture ouverte, pour le bien collectif.
Tout cela est transparent.
La finalité de tous ces amendements, auxquels je suis favorable sur le fond, est la même : il s’agit de prendre en compte les intérêts locaux.
Néanmoins, il convient de compléter les matières visées aux amendements identiques n° 1739 et 763 rectifié. Sinon, d’un point de vue rédactionnel, on risque de laisser de côté des éléments ne relevant ni de l’économique ni du touristique. Ainsi, l’objet plus large de l’amendement n° 356 rectifié, qui permet de couvrir tous les aspects des territoires et donc de sécuriser davantage la situation, me conduit à suggérer le retrait des deux amendements identiques. Mais peut-être pourrait-on imaginer une sorte de « motion jointe » qui permettrait de sortir de cette affaire par le haut ?
En définitive, je suggère à Mme la corapporteur et à Mme Lamure de retirer leurs amendements identiques au profit de l’amendement n° 356 rectifié, que j’invite le Sénat à adopter après avoir voté le sous-amendement n° 1795.
Je remercie M. le ministre pour sa position, qui me paraît particulièrement pertinente du point de vue de la qualité de nos travaux, puisque, si nous préférions l’amendement de Mme la corapporteur, nous serions obligés d’y apporter deux modifications.
À vrai dire, nous devrions même apporter aux deux amendements identiques de Mme la corapporteur et de Mme Lamure une correction supplémentaire, puisque, dans leur rédaction actuelle, ils disposent : « Il [le cahier des charges de l’appel d’offres] précise les obligations du cessionnaire relatives à la préservation des intérêts essentiels de la Nation en matière de transport aérien, ainsi que ceux du territoire concerné en matière d’attractivité et de développement économique et touristique ». Or, dans mon propre amendement, je me suis bien gardé de préciser la nature des intérêts essentiels du territoire concerné, qui ne sauraient être réduits à l’attractivité et au développement économique et touristique.
Ainsi, si nous préférions à mon amendement ces deux amendements identiques, dont la formulation ne comporte même pas l’adverbe « notamment », le cahier des charges pourrait ne pas intégrer, par exemple, la dimension environnementale ou celle du développement social.
Adopter mon amendement permettrait donc de prévenir une insécurité juridique lors de l’établissement du cahier des charges associé à une cession de capital.
De plus, le sous-amendement n° 1795, dont l’adoption présenterait l’avantage de prendre en compte à la fois les intérêts du territoire concerné et ceux des collectivités territoriales actionnaires, porte sur l’amendement n° 356 rectifié et non sur ceux de Mme la corapporteur et de Mme Lamure.
Il y a donc au moins deux raisons de préférer mon amendement n° 356 rectifié, ce qui nous éviterait d’avoir à imaginer un « montage Shadok ». Madame la corapporteur, vous nous avez appelés à nous réunir sur l’intérêt général du territoire. Réunissons-nous donc sur mon amendement, qui satisfait tout le monde !
Il est particulièrement désagréable de devoir répéter sans cesse les mêmes choses. Monsieur Daunis, j’ai déjà expliqué qu’il n’y a pas lieu de sous-amender votre amendement dans la mesure où j’ai accepté que celui que j’ai présenté en ma qualité de corapporteur soit rectifié pour prendre en compte la situation spécifique de l’aéroport de Lyon.
Monsieur le président, cette rectification consiste à remplacer, à la troisième phrase de mon amendement, les mots : « les collectivités territoriales sur le territoire desquelles il est installé » pas les mots : « les collectivités territoriales actionnaires ».
Je dois dire aussi que je suis un peu surprise par votre position, monsieur le ministre, étant donné que la commission spéciale a travaillé en collaboration étroite avec votre cabinet et que, jusqu’à présent, le Gouvernement n’avait pas soulevé d’objections à une rédaction qui est le fruit d’allers-retours entre votre propre cabinet, celui du président de la métropole de Lyon et mon collaborateur à Paris. Les choses me paraissent claires et je ne vois pas pourquoi tout serait remis en question cette nuit !
Je suis donc saisi d’un amendement n° 1739 rectifié, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, et ainsi libellé :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
2° Le cahier des charges de l’appel d’offres portant sur la cession de capital est approuvé par le ministre chargé de l’aviation civile. Il précise les obligations du cessionnaire relatives à la préservation des intérêts essentiels de la Nation en matière de transport aérien, ainsi que ceux du territoire concerné en matière d’attractivité et de développement économique et touristique. Il précise également les obligations du cessionnaire afin de garantir le développement de l’aérodrome en concertation avec les collectivités territoriales actionnaires ;
La parole est à M. Claude Raynal, pour explication de vote.
Les différents amendements qui sont en concurrence visent tous à protéger les intérêts économiques et touristiques des territoires concernés. Je me permets de faire observer que le maintien d’une participation publique d’au moins 50, 01 % aurait été beaucoup plus simple et nous aurait dispensés de ces débats !
À cet égard, je remercie M. le ministre, qui, répondant à une demande de l’ensemble des élus du territoire toulousain, a pris l’engagement que la cession de capital de l’aéroport de Toulouse-Blagnac se limiterait à 49, 9 %. Ainsi, nous n’aurons pas à traiter ces problèmes ubuesques !
Je voudrais simplement être certain que l’adoption de l’amendement n° 1739 rectifié n’empêchera pas les collectivités territoriales concernées de participer à l’appel d’offres. Si la référence à une concertation devait les priver de la possibilité de participer à un tour de table en vue de répondre à l’appel d’offres, il faudrait apporter à l’amendement de Mme la corapporteur une légère modification supplémentaire.
Permettez-moi de revenir sur la modification que Mme la corapporteur a apportée à son amendement, qui était identique au mien. De mon point de vue, il n’est pas acceptable que des collectivités territoriales sur le territoire desquelles un aéroport est installé, mais qui n’en sont pas actionnaires – une situation qui peut se présenter à Lyon, où l’aéroport est à cheval sur deux communes et deux départements –, ne soient pas incluses dans la concertation.
Je veux bien que l’on fasse mention des collectivités territoriales actionnaires, et je conçois tout à fait que la métropole de Lyon doive être actionnaire de l’aéroport de Lyon ; mais il faut que toutes les collectivités territoriales sur le territoire desquelles l’aéroport est installé soient associées à la concertation.
Il me semble que nous pourrions tous nous accorder sur la rédaction suivante, pour la fin de la troisième phrase de mon amendement et de celui de Mme la corapporteur : « en concertation avec les collectivités territoriales sur le territoire desquelles l’aéroport est installé ainsi qu’avec les collectivités territoriales actionnaires ».
Je suis favorable à la rédaction proposée par Mme Lamure et rectifie l’amendement de la commission spéciale en ce sens.
Je suis donc saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 1739 rectifié bis est présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission.
L'amendement n° 763 rectifié bis est présenté par Mmes Lamure et Estrosi Sassone et MM. Nègre et Savin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 4
Rédiger ainsi cet alinéa :
2° Le cahier des charges de l’appel d’offres portant sur la cession de capital est approuvé par le ministre chargé de l’aviation civile. Il précise les obligations du cessionnaire relatives à la préservation des intérêts essentiels de la Nation en matière de transport aérien, ainsi que ceux du territoire concerné en matière d’attractivité et de développement économique et touristique. Il précise également les obligations du cessionnaire afin de garantir le développement de l’aérodrome en concertation avec les collectivités territoriales sur le territoire desquelles il est installé ainsi qu'avec les collectivités territoriales actionnaires ;
Je les mets aux voix.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant de la commission spéciale.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 158 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, l’amendement n° 356 rectifié et le sous-amendement n° 1795 n’ont plus d’objet.
L'amendement n° 355 rectifié, présenté par MM. Daunis et Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le cahier des charges inclut parmi les critères de sélection de l’acquéreur sa capacité à mobiliser un élan territorial en s’appuyant sur les acteurs locaux et associatifs ;
La parole est à M. Marc Daunis.
M. Marc Daunis. Je voudrais d'abord remercier Mme la corapporteur de l’esprit d’ouverture qu’elle a manifesté et de son souci de la qualité du travail législatif. En effet, l’architecture était plus qu’ouverte : elle était presque à ciel ouvert, à défaut d'être à cœur ouvert !
Sourires.
L’amendement n° 355 rectifié tend à introduire certaines précisions dans le cahier des charges : ce dernier inclurait, parmi les critères de sélection de l’acquéreur, sa capacité à mobiliser un élan territorial en s’appuyant sur les acteurs locaux et associatifs.
Si j’avais su ce qu’il allait advenir, j’aurais ajouté le développement social et environnemental : ce critère aurait alors pu être inclus dans l'amendement de Mme la corapporteur.
Je demande le retrait de cet amendement, à défaut de quoi l’avis sera défavorable.
Je crois que la volonté que traduit cet amendement est partagée par tous.
Cependant, il m'apparaît que l’association des acteurs locaux à l’élaboration du cahier des charges permettra déjà de prendre en compte les attentes locales et de susciter la dynamique souhaitée.
Par ailleurs, je crains que la rédaction de cet amendement ne nous fasse courir trop de risques – j’ai émis tout à l'heure une réserve du même ordre concernant un autre amendement. Sur le plan juridique, la référence à un « élan territorial » me paraît trop floue et trop subjective pour en faire un critère de choix dans une procédure d’appel d’offres.
Monsieur Daunis, nous pouvons travailler à une rédaction qui, tout en étant plus sûre, permettrait de prendre en compte votre préoccupation, mais, à ce stade, je suis enclin à vous inviter au retrait de l’amendement.
L’épisode précédent, l’heure avancée et un certain nombre d’autres facteurs ne peuvent que me rendre attentif à votre demande de retrait, monsieur le ministre. Néanmoins, pour y accéder avec encore plus d’allégresse, il faudrait que vous puissiez nous rassurer sur quelques points.
Premièrement, la loi ne saurait garantir que les fonds issus de cette cession seront réinvestis, au moins en partie, au profit du territoire concerné – cette question a été évoquée plusieurs fois –, mais pouvez-vous au moins vous engager à y veiller ?
Deuxièmement, en cas de cession par une chambre de commerce et d’industrie, le Gouvernement peut-il s'engager à ce qu’elle puisse investir le produit de cette cession sur le territoire, sans que l’État le récupère sous une forme ou sous une autre, et l’on sait qu’il peut se montrer à cet égard extrêmement créatif ?
Sourires.
Je sais que ces questions sont sensibles, mais je mentirais si je vous disais que l’État peut prendre de tels engagements. Bien que ces demandes aient été maintes fois réitérées, je crains que l’on ne puisse aller au-delà d’un encadrement.
Dans les débats sur les contrats de projet État-région, il est évident que cet élément peut être politiquement valorisé. En revanche, d’un point de vue budgétaire, je ne puis honnêtement vous promettre que le Gouvernement transférera la part affectée au budget général : elle sera vraisemblablement réinvestie dans l’aide publique au développement ou dans le logement intermédiaire.
De la même manière, je ne puis vous apporter les garanties que vous souhaitez concernant les chambres de commerce et d’industrie, sachant qu’elles agissent pour le compte de l’État et que la chronique budgétaire de l’année passée a montré qu’elles participaient à l’effort budgétaire global.
En bref, les collectivités pourront faire valoir votre approche dans les débats en cours avec le Gouvernement, mais je ne peux m'engager sur ces sujets.
L’amendement n° 355 rectifié est retiré.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1369, présenté par Mme Assassi, M. Bosino, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Éliane Assassi.
Vu que nous sommes opposés aux opérations de transfert par l’État au secteur privé de la majorité du capital d’une société exploitant une infrastructure de transport aéroportuaire, nous ne pouvons que souhaiter la suppression de l’alinéa qui a trait aux candidats au rachat.
Les deux amendements suivants sont identiques.
L'amendement n° 1740 est présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission.
L'amendement n° 764 rectifié est présenté par Mmes Lamure et Estrosi Sassone et MM. Nègre et Savin.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 6, première phrase
Remplacer les mots :
de la gestion aéroportuaire
par les mots :
en tant que gestionnaire d’aéroport ou actionnaire d’une société gestionnaire d’aéroport
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur, pour présenter l’amendement n° 1740 et pour donner l’avis de la commission spéciale sur l’amendement n° 1369.
Le présent amendement vise à élargir l’éventail des candidats au rachat d’une participation majoritaire cédée par l’État dans une société gestionnaire d’aéroport.
Son adoption permettrait ainsi d’ouvrir l’appel d’offres à l’ensemble des acteurs, notamment locaux – collectivités locales, chambres de commerce et de l’industrie… – qui disposent d’une expérience d’actionnaire de société gestionnaire d’aéroport.
J’ajoute que, cet amendement étant incompatible avec l’amendement n° 1369, la commission émet un avis défavorable sur ce dernier.
La parole est à Mme Élisabeth Lamure, pour présenter l’amendement n° 764 rectifié.
Je suis défavorable à l’amendement n° 1369 et favorable aux amendements identiques n° 1740 et 764 rectifié.
L'amendement n'est pas adopté.
Les amendements sont adoptés.
L'amendement n° 357, présenté par MM. Daunis et Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 6
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Ne peuvent acquérir une participation majoritaire au capital d’une société concessionnaire d’aéroport les entités domiciliées dans l’un des États ou territoires figurant sur la liste des États non coopératifs mentionnée au second alinéa du 1 de l'article 238-0 A du code général des impôts ou qui sont contrôlées directement ou indirectement par une telle entité. Les candidats à l’acquisition d’une participation majoritaire au capital d’une société concessionnaire d’aéroport certifient sur l’honneur être à jour de leurs obligations en matière fiscale et sociale.
La parole est à M. Marc Daunis.
Après la cession de parts de l’aéroport de Toulouse-Blagnac, d’aucuns s'étaient émus de la constitution capitalistique des repreneurs ; il y a été fait allusion voilà quelques minutes.
C’est cette considération qui a conduit au dépôt de cet amendement, lequel a pour objet d’éviter de retrouver dans le tour de table des sociétés domiciliées dans des paradis fiscaux, même s'il est compliqué d’en faire la caractérisation juridique.
J’ajoute que la dernière phrase, aux termes de laquelle les candidats à l’acquisition d’une participation majoritaire au capital d’une société concessionnaire d’aéroport doivent certifier sur l’honneur être à jour de leurs obligations en matière fiscale et sociale, coule sans doute de source d’un point de vue moral, mais que cette précision n’est probablement pas inutile d’un point de vue juridique.
Le sous-amendement n° 1793, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Amendement n° 357
I. – Avant l’alinéa 1
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après l’alinéa 4
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le cahier des charges de l’appel d’offres précise les obligations mises à la charge des candidats relatives à la lutte contre l’évasion fiscale ;
II. – Alinéa 3, première phrase
Supprimer cette phrase.
La parole est à M. le ministre.
Je partage la préoccupation qui sous-tend l’amendement n° 357, mais celui-ci soulève des difficultés juridiques, auxquelles ce sous-amendement vient remédier.
L’éviction pure et simple d’une offre au motif qu’elle émanerait d’une entreprise domiciliée dans un territoire non coopératif pourrait être considérée comme disproportionnée et présenterait donc un risque d’inconstitutionnalité.
En revanche, il me semble possible de prendre en compte ce critère dans le cahier des charges de l’opération. L’objectif de lutte contre l’évasion fiscale se matérialiserait alors par la demande faite au candidat à l’appel d’offres de se conformer à certaines obligations y figurant.
Le sous-amendement vise ainsi à préciser le contenu du cahier des charges dans un sens qui, je le crois, satisfait la volonté que traduit votre amendement, monsieur Daunis, tout en apportant une sécurisation juridique.
Sous la réserve de l’adoption de ce sous-amendement, le Gouvernement sera favorable à l’amendement n° 357.
Si l'amendement n° 357 semble avoir une portée trop réduite pour être opérant, le sous-amendement n° 1793, déposé pour remédier à ce défaut, présente à l’inverse, selon moi, une rédaction très large et pour le moins imprécise.
Par ailleurs, l'amendement n° 357 prévoit une certification sur l’honneur d’être à jour de ses obligations fiscales et sociales ; compte tenu des intérêts et des sommes en jeu, je ne suis pas certaine qu’une déclaration sur l’honneur constitue un gage suffisant…
Je demande donc le retrait de l’amendement n° 357 et du sous-amendement n° 1793.
La parole est à M. Marc Daunis, pour explication de vote sur le sous-amendement n° 1793.
Le sous-amendement du Gouvernement me paraît bienvenu. À l’évidence, l’essentiel est de traiter le problème que j’ai soulevé, et le sous-amendement confère à cette démarche la sécurité juridique nécessaire.
En revanche l’avis émis par Mme la corapporteur m’étonne, car il revient à considérer que, plutôt que d’adopter une rédaction trop large, il faut ne rien écrire du tout et, ainsi, renoncer à toute exigence ! J’ai du mal à suivre…
Peut-être les mailles du filet qu’il est question de mettre en place sont-elles trop larges, mais au moins on pose un filet, ce qui signifie qu’on prend un minimum de précautions, même s’il s’agit d’un dossier où faudrait en prendre beaucoup. Alors, autant adopter cette démarche en votant et le sous-amendement et l’amendement. Ne pas le faire voudrait dire que nous refusons de poser la moindre borne concernant des repreneurs qui ne donneraient pas de garanties minimales. En d’autres termes, au motif que les mailles sont trop larges, on ne poserait aucun filet !
Je ne comprends pas l’amendement de M. Daunis ni le sous-amendement du Gouvernement. Faut-il instaurer un régime particulier de lutte contre l’évasion fiscale ? Cette lutte étant générale, pourquoi construire un régime spécifique pour deux aéroports ?
Du reste, si nous décidons ici de fixer ici des obligations, gardons à l’esprit que les règles générales de la lutte contre l’évasion fiscale, qui forment un ensemble cohérent, continueront à s'appliquer.
Par ailleurs, alors que la législation sur l’évasion fiscale peut toujours évoluer, elle resterait figée sur ce sujet précis !
En réalité, vous portez préjudice à la cause que vous prétendez défendre, monsieur Daunis : vous faites le contraire de ce que vous voulez !
J’estime que l'amendement, même sous-amendé, porte la marque de notre action contre l’évasion fiscale. Comme c'est une préoccupation forte du Sénat, je ne comprends pas la réticence de Mme la corapporteur et de M. le président de la commission spéciale.
Le groupe communiste soutiendra donc cet amendement et ce sous-amendement.
Il n’est évidemment pas question de créer un nouveau régime fiscal. Il s’agit juste de donner une finalité au cahier des charges et de s’assurer par ce truchement que le repreneur est localisé en France et y paye des impôts.
S’agissant du site toulousain, le cahier des charges ne comportait pas une telle obligation ab initio. La condition que l’on a imposée in fine, avant de signer, c’est que la société gestionnaire de l’aéroport de Toulouse soit localisée en France et y paye des impôts. Il existe des critères de localisation de l’activité en France et donc de fiscalisation de cette activité.
Cela me donne l’occasion de répondre à M. Raynal sur le consortium Symbiose, ce que j’avais omis de faire tout à l’heure et je le prie de m’en excuser.
Je peux vous rassurer pleinement, monsieur le sénateur : dans la projection financière établie par le repreneur chinois, aucune évolution du trafic n’a été formalisée, et ce sont les hypothèses de trafic existantes et connues qui ont conduit à ce plan de développement. Simplement, le repreneur a considéré que, en réalisant des investissements et en administrant différemment ou, selon lui, mieux la société de gestion, il arriverait à rentrer dans ses frais et à dégager une rentabilité à plus long terme ou moins importante que celle d’autres acteurs, ce qui a justifié son prix d’achat.
Quoi qu’il en soit, je tenais à préciser qu’il n’y avait pas d’hypothèses de trafic différentes de celles que nous avions projetées.
Monsieur le ministre, je suis désolé de vous contredire, mais il est écrit dans votre sous-amendement : « Le cahier des charges de l’appel d’offres précise les obligations mises à la charge des candidats relatives à la lutte contre l’évasion fiscale. » Or ce n’est pas ce que vous venez de nous dire à l’instant : vous avez parlé de localisation de la société en France, ce qui est beaucoup plus large.
Une observation me vient à l’esprit à la suite des propos de M. le ministre : si le texte du sous-amendement précisait que ne peuvent se porter candidats que des organismes, sociétés, intervenants qui paient leurs impôts en France, cela poserait un problème conventionnel, car on porterait ainsi atteinte à la libre concurrence garantie par les traités européens.
Si le cahier des charges indiquait que l’acquéreur doit payer ses impôts en France, je suis d’accord avec vous, monsieur Pillet, il y aurait un problème conventionnel. Mais le cahier des charges doit répondre à une finalité : lutter contre les pratiques d’évasion fiscale. Par conséquent, si l’acheteur est français, on doit pouvoir faire les diligences et, s’il est étranger, on peut lui demander de respecter cette exigence par un véhicule localisé en France, ce qui n’est nullement contraire aux conventions.
En tout cas, je tiens à lever cette ambiguïté : la rédaction du sous-amendement est suffisamment large pour ne pas pouvoir être interprétée comme imposant le paiement des impôts en France à titre de condition d’éligibilité à l’appel d’offres.
Le sous-amendement n'est pas adopté.
Je mets aux voix l'amendement n° 357.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe UMP.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 159 :
Le Sénat n'a pas adopté.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 464, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéas 7 et 8
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Jean Desessard.
Les sociétés Aéroports de la Côte d’Azur et Aéroports de Lyon sont deux sociétés dont le capital est uniquement détenu par des actionnaires publics : 60 % par l’État, 25 % par les chambres de commerce et d’industrie, 5 % par les régions, 5 % par les départements et 5 % par les communautés d’agglomération.
Elles exploitent ces infrastructures aéroportuaires respectivement jusqu’en 2044 et 2047. Ces deux sociétés dégagent des résultats nets positifs : 10 millions d’euros pour la première et 13 millions d’euros pour la seconde.
Dès lors, pourquoi privatiser ? Pourquoi abandonner des infrastructures de transport fondamentales au regard de l’aménagement du territoire ? Nous nous retrouvons face au même problème que pour les autoroutes. Sous prétexte de vouloir dégager des marges budgétaires de court terme, le Gouvernement est prêt à céder des infrastructures rentables et dans lesquelles l’État a beaucoup investi.
L’étude d’impact du projet de loi justifie ces privatisations en ces termes : « développer l’outil industriel et les perspectives d’emploi que ces sociétés représentent à l’échelle régionale ».
Cette phrase traduit un renoncement supplémentaire à l’État stratège, qui est pourtant un élément central de notre modèle de société depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. C’est un abandon pur et simple de toute volonté de structurer le territoire grâce à l’investissement public, avec des transports de qualité placés sous contrôle public. C’est la reconnaissance de la victoire totale du privé face à l’État dans notre politique de transport.
Les écologistes ne soutiennent pas cette vision purement budgétaire de court terme et souhaitent que l’État retrouve son rôle structurant dans le domaine des transports.
Voilà pourquoi nous demandons la suppression de ces deux alinéas.
L'amendement n° 1402, présenté par Mme Assassi, M. Bosino, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Jean-Pierre Bosino.
Nous avons fait part de notre opposition à la cession au privé des infrastructures aéroportuaires ; c’est pourquoi nous souhaitons la suppression de cet alinéa, qui concerne la société Aéroports de la Côte d'Azur.
L'amendement n° 536 n'est pas soutenu.
L'amendement n° 1401, présenté par Mme Assassi, M. Bosino, Mme Didier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Annie David.
Comme cela a été dit par Jean-Pierre Bosino, nous sommes opposés à la privatisation des infrastructures aéroportuaires. Cet amendement-ci vise la société des Aéroports de Lyon.
Ces trois amendements ont une portée identique à ceux qui visaient à supprimer l’article puisqu’ils tendent à supprimer les alinéas autorisant le transfert au secteur privé de la majorité du capital de deux sociétés aéroportuaires.
L’avis est donc défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 537 n'est pas soutenu.
Je mets aux voix l'article 49, modifié.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe CRC.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 160 :
Le Sénat a adopté.
L'amendement n° 962, présenté par M. Bizet, Mme Lamure, MM. Allizard et Vaspart, Mme Des Esgaulx, MM. Delattre, Calvet, Charon et Commeinhes, Mme Deromedi, MM. Doligé, Grand et Gournac, Mme Gruny, M. Houel, Mmes Hummel, Imbert et Keller, MM. Laménie, Laufoaulu, Lefèvre, Leleux et Mandelli, Mme Mélot et MM. Milon, Morisset, Pierre et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 49
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le I de l’article 1609 quatervicies du code général des impôts, il est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Le produit de la taxe d’aéroport, qui est affecté aux personnes publiques ou privées exploitant des aérodromes ou des groupements d’aérodromes mentionnées au I, est plafonné annuellement conformément à un montant inscrit en loi de finances pour chaque classe d’aérodromes ou groupements d’aérodromes. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Jean Bizet.
Monsieur le président, avec votre permission, je défendrai également les amendements n° 963 et 961.
Je vais donc appeler ces amendements dès à présent en discussion.
L'amendement n° 963, présenté par M. Bizet, Mme Lamure, MM. Allizard et Vaspart, Mme Des Esgaulx, MM. Delattre, Calvet, Charon et Commeinhes, Mme Deromedi, MM. Doligé, Grand et Gournac, Mme Gruny, M. Houel, Mmes Hummel, Imbert et Keller, MM. Laménie, Laufoaulu, Lefèvre, Leleux et Mandelli, Mme Mélot et MM. Milon, Pierre et Morisset, est ainsi libellé :
Après l’article 49
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 1609 quatervicies du code général des impôts est ainsi modifié :
1° Au dernier alinéa du IV, les mots : « et sa majoration prévue au IV bis, » sont supprimés ;
2° Le IV bis est abrogé ;
3° Au premier alinéa du V, les mots : « et la majoration de celle-ci prévue au IV bis sont recouvrées et contrôlées » sont remplacés par les mots : « est recouvrée et contrôlée » ;
4° Le VII est abrogé.
L'amendement n° 961, présenté par M. Bizet, Mme Lamure, MM. Allizard et Vaspart, Mme Des Esgaulx, MM. Calvet, Charon et Commeinhes, Mme Deromedi, MM. Doligé, Grand et Gournac, Mme Gruny, M. Houel, Mmes Hummel, Imbert et Keller, MM. Laménie, Laufoaulu, Lefèvre, Leleux et Mandelli, Mme Mélot, MM. Milon, Morisset et Pierre, Mme Primas et MM. Mouiller, Saugey et B. Fournier, est ainsi libellé :
Après l’article 49
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Pour les aérodromes de l’État concédés, les activités commerciales et de services, y compris celles relatives au stationnement public d’automobiles, font partie du périmètre d’activité défini à l’article R. 224-3-1 du code de l’aviation civile.
II. – Pour l’exploitation des aérodromes de Paris-Charles-de-Gaulle et Paris-Orly, Aéroports de Paris reçoit une juste rémunération des capitaux investis, qui doit prendre en compte au moins cinquante pour cent des profits relatifs aux activités commerciales et de services.
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
Par ces amendements, je souhaite attirer l’attention du Gouvernement sur l’importance stratégique de nos infrastructures aéroportuaires, mais aussi et surtout sur la nécessité de ne pas les dissocier de la question des compagnies aériennes françaises.
En effet, une des caractéristiques fondamentales du transport aérien, c’est que son ouverture à la concurrence dans l’espace européen est sans commune mesure avec celle qu’on peut observer pour n’importe quel autre mode de transport.
La concurrence parmi les transporteurs aériens est absolument singulière. Qui plus est, les nouveaux venus dans les airs de l’Union européenne contournent à plaisir les contraintes fiscales et sociales que les opérateurs historiques persistent à respecter.
Pour obtenir des conditions loyales de concurrence, l’idéal serait bien sûr de parvenir à un accord au sein de l’Organisation de l’aviation civile internationale ; on en est encore loin aujourd’hui. Toute action dans ce domaine doit être engagée et conduite à l’échelle de l’Union européenne
C’est la raison pour laquelle nous avons créé, au sein de la commission des affaires européennes du Sénat, un groupe de travail ayant pour mission de nous éclairer le plus possible sur ce sujet. Nous commencerons les auditions très prochainement.
Malheureusement, c’est la concurrence déloyale qui prévaut dans les airs. Sur les grandes lignes internationales, cette concurrence est imputable à des opérateurs très généreusement subventionnés par leurs pays d’origine : les fameuses compagnies du Golfe. Sur les liaisons internes à l’Union européenne et sur certaines liaisons internationales de moyen-courrier, les désormais célèbres compagnies low cost peuvent être incriminées à juste titre.
Mon propos aujourd’hui a pour but d’engager avec vous tous une réflexion en vue de perfectionner la gouvernance du secteur aérien au sein de l’Union européenne et au départ de celle-ci.
À la suite du débat sur la transparence dans le transport aérien, organisé au Sénat le 5 février sur l’initiative de mon groupe, j’ai souhaité déposer, avec certains de mes collègues, une série d’amendements après l’article 49. Il reste en effet plusieurs sujets de préoccupation concernant la privatisation des aéroports et les dérives qu’elle pourrait engendrer au regard des redevances pour nos compagnies aériennes.
L’amendement n° 962 vise à geler la taxe d’aéroport acquittée par les compagnies aériennes et assise sur le nombre de passagers, ainsi que sur la masse de fret et de courrier embarqués.
L’amendement n° 963 tend à supprimer la majoration de 1, 25 euro appliquée sur le tarif passager de la taxe d’aéroport, dont le produit est affecté aux exploitants des aérodromes ou des groupements d’aérodromes de classe 3 présentant des comptes en déséquilibre, et à la remplacer par un financement ad hoc, afin de redonner de la compétitivité aux compagnies aériennes françaises.
Enfin, l’amendement n° 961 a pour objet de pérenniser la « caisse unique » à l’occasion d’une privatisation. Le régime de gestion pratiqué aujourd’hui par les aéroports régionaux français est basé sur le principe de la caisse unique. Celui-ci permet, au bénéfice des compagnies et des passagers, de contenir le tarif des redevances par une prise en compte dans l’économie de l’aéroport des recettes apportées par toutes les activités commerciales.
Un État n’exerce pas d’influence mondiale sans une grande compagnie aérienne, et je veux croire tout le monde ici partage sans doute ce point de vue. Je tiens à saluer le fait que la France ait su, au fil du temps, faire de son aviation un champion mondial, qui représente au total plus de 1 million d’emplois et près de 3 % du PIB, s’appuyant à la fois sur des constructeurs, sur des aéroports et sur des compagnies aériennes.
Air France est le premier employeur privé d’Île-de-France, mais la concurrence est forte et fragilise le pavillon national. Je rappelle que le premier transporteur aérien en Europe est irlandais ; il transporte à lui seul plus de passagers qu’Air France, dont les lignes sont pourtant mondiales.
J’ai donc déposé ces amendements pour que le Sénat et le Gouvernement puissent débattre de cette question à l’occasion de l’examen des dispositions de ce projet de loi qui traitent des aéroports et donc, indirectement, du transport aérien.
M. Yves Pozzo di Borgo applaudit.
Monsieur Bizet, il s’agit là d’un vrai sujet et l’on comprend fort bien quelle a été votre intention en présentant ces amendements.
L’amendement n° 962 vise à réduire les taxes pesant sur le secteur du transport aérien. Son adoption aurait pour conséquence de diminuer le produit disponible pour assurer la sécurité des aéroports puisque cette taxe est affectée au financement des missions de sécurité.
Sur le fond, le simple renvoi à une loi de finances ne permet pas de garantir l’effectivité de votre dispositif puisque vous ne définissez pas le plafond.
Par conséquent, je vous invite à retirer cet amendement
Il en va de même s’agissant de l’amendement n° 963. La majoration de la taxe d’aéroport est affectée aux aérodromes régionaux les plus fragiles. En supprimant celle-ci sans indiquer la ressource qui pourrait leur être affectée en contrepartie, vous risquez de perturber l’équilibre financier, déjà précaire, de ces aérodromes.
En outre, je souligne que la loi de finances rectificative pour 2014 a déjà sensiblement réduit la taxe de l’aviation civile afin de desserrer la contrainte fiscale pesant sur le secteur du transport aérien.
Enfin, je sollicite également de l’amendement n° 961, dont l’adoption aurait pour conséquence de perturber de manière importante le modèle économique d’ADP, Aéroports de Paris, mais aussi d’importants aéroports régionaux.
Quel est l’enjeu sous-jacent à cet amendement ? C’est le niveau des redevances aériennes payées à un exploitant d’aéroport par les compagnies aériennes. Chaque aéroport est soumis à un contrat de régulation économique défini et surveillé par l’État. Ce contrat fixe à la fois l’évolution des redevances, mais aussi le niveau des investissements devant être réalisés par l’exploitant de l’aéroport. Pour ADP, le contrat de régulation économique 3, qui doit couvrir la période 2016-2020, est en cours de négociation. Il ne paraît donc pas opportun de modifier les règles du jeu alors même que l’État et les parties prenantes sont en train de négocier le prochain contrat de régulation économique.
J’ajoute que le dispositif de la caisse unique que vous proposez dans votre amendement n’est plus appliqué par ADP depuis l’entrée en vigueur du contrat de régulation économique de 2006.
Mme la rapporteur a exposé les éléments essentiels.
S’agissant de l’amendement n° 962, je rappelle que la taxe d’aéroport permet de financer l’intégralité des mesures de sûreté aéroportuaire demandées par l’État. La Direction générale de l’aviation civile a pour mission d’en garantir l’exactitude. La plafonner dans le contexte actuel ne nous apparaît pas pleinement opportun.
L’évolution de la réglementation, notamment européenne, en matière de sûreté va sans doute conduire les aéroports à remplacer la plupart de leurs équipements de sûreté, notamment les appareils d’examen des bagages en soute, particulièrement coûteux. À ce jour, on ignore comment cette taxe devra évoluer, même si, et vous avez raison de le rappeler, monsieur Bizet, la santé financière des compagnies aériennes, en particulier la nôtre, doit être prise en compte.
Il faut trouver un juste équilibre entre l’évolution raisonnée de cette réglementation, d’une part, et la maîtrise des dépenses et la préservation de la santé financière de la compagnie, d’autre part.
S’il s’agit d’un amendement d’appel, il a rempli son office. Nous exerçons toute notre vigilance à l’égard du contrat de régulation économique entre ADP et l’État comme des relations économiques et commerciales entre ADP et Air France. À cet égard, je réitère l’engagement pris récemment par mon collègue Alain Vidalies.
S’agissant de l’amendement n° 961, la double caisse est une pratique largement répandue qui consiste donc avoir une caisse pour le « régulé » et une autre pour le « non régulé ». Elle n’est pas nouvelle. La caisse unique, dont l’idée a été plusieurs fois avancée, pourrait avoir un effet pervers, y compris pour ADP, puisque l’effort doit porter essentiellement sur la partie régulée. La double caisse n’est pas un moyen, pour ADP, de répondre à un surcroît d’efforts financiers et à une exigence de meilleure organisation ; elle permet de mieux surveiller l’activité régulée, afin de faire porter sur celle-ci les efforts éventuels.
J’ajoute enfin que la caisse unique peut avoir un impact patrimonial sur l’entreprise ; il n’est donc pas souhaitable de la mettre en place dans le contexte actuel.
Je vous invite, par conséquent, à retirer ces amendements. La santé financière d’Air France et ses intérêts doivent être pris en compte dans les décisions qui sont prises au sein de l’« écosystème », en particulier celles qui ont trait aux relations entre ADP et Air France.
Monsieur Bizet, les amendements n° 962, 963 et 961 sont-ils maintenus ?
J’ai bien entendu la demande exprimée tans par Mme la corapporteur que par M. le ministre de retirer ces trois amendements, dont vous aurez deviné qu’il s’agissait d’amendements d’appel. Je veux bien accéder à cette demande.
Cela étant, j’aimerais que le Gouvernement prenne davantage conscience des distorsions de concurrence qui fragilisent aujourd’hui le pavillon national. J’ai plusieurs fois alerté les instances communautaires, notamment celles qui sont en charge de la concurrence. Sans vouloir préjuger des résultats du groupe de travail mis en place par la commission des affaires européennes, qui rendra ses conclusions dans deux ou trois mois, j’aimerais trouver un appui auprès de votre administration, monsieur le ministre, pour faire en sorte que soient corrigées ces distorsions concurrentielles, essentiellement fiscales et sociales, qui nuisent au pavillon national et qui sont le fait d’une compagnie dont nous avons tous le nom à l’esprit, celle qui est devenue la première compagnie européenne.
Les amendements n° 962, 963 et 961 sont retirés.
L'amendement n° 409 rectifié bis, présenté par M. P. Dominati, Mme Garriaud-Maylam, MM. Calvet, Chaize, Gilles, Allizard, G. Bailly et Charon, Mme Deromedi et MM. Duvernois et Gremillet, est ainsi libellé :
Après l’article 49
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code de l’aviation civile est complété par un livre VIII ainsi rédigé :
« Livre VIII
« Société civile de Sécurité de la navigation aérienne française
« Art. L. ... - Au 1er janvier 2017, la loi n° 89-1007 du 31 décembre 1989 relative au corps des ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne est abrogée.
« Art. L. ... - Il est créé une société civile de sécurité de la navigation aérienne française, société de droit privé.
« Art. L. ... - Les ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne deviennent des salariés liés par un contrat à durée indéterminée de droit privé à la société civile de sécurité de la navigation aérienne française.
« Art. L. ... - Les conditions de travail du personnel sont déterminées par accord collectif.
« Art. L. ... - Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du livre VIII du code de l’aviation civile. »
La parole est à M. Philippe Dominati.
Nous manifestons tous le souci d’améliorer la compétitivité de nos aéroports et de nos compagnies aériennes, ainsi que la bonne marche du trafic aérien.
Toutefois, pour que ce trafic fonctionne, il faut des contrôleurs aériens. Or, en cette matière, la France connaît une situation d’exception : elle est, à ma connaissance, l’un des deux seuls pays en Europe où les contrôleurs aériens ont un statut de fonctionnaires d’État. Il s’agirait même, selon un rapport de la Cour des comptes, d’une catégorie de fonctionnaires particulièrement choyée.
L’harmonisation du ciel européen sera mise en place en 2016. Or, à cette date, la nouvelle législation deviendra plus contraignante, notamment en matière de compétences, de sécurité, de temps de travail, et cela suscite dans notre pays un certain nombre de perturbations.
Voilà une dizaine de jours, le trafic aérien national a une nouvelle fois été bloqué, aux deux tiers. Il en a été de même pour une partie des vols internationaux. De telles perturbations ne sont pas, si je puis dire, l’apanage de ce gouvernement puisque de tels mouvements sont observés régulièrement depuis des décennies. La prochaine grève est d’ores et déjà prévue pour le 29 avril, date de la rentrée des vacances de la zone centrale.
Par conséquent, monsieur le ministre, quels que soient les efforts que vous déploierez pour améliorer nos aéroports et notre compagnie aérienne, si vous ne vous attaquez pas à cette profession réglementée – je sais que vous vous intéressez à ce sujet –, vos efforts seront vains, comme l’ont été ceux des gouvernements précédents.
Nous avons déjà subi, dans le domaine du trafic portuaire, des décennies de retard. Il en résulte que nos grands ports se retrouvent à la traîne par rapport à leurs concurrents européens.
Au-delà des actions en faveur du secteur du transport aérien et du domaine aéroportuaire, il est essentiel que vous traitiez cette question.
Cet amendement, cosigné par une dizaine de collègues, vous invite à réfléchir à un statut de droit privé octroyé à une société civile française, afin d’entamer, dans les meilleures conditions possible, le dialogue avec les professions concernées. Ainsi, nous serons à l’heure concernant le respect de la nouvelle réglementation européenne qui entrera en vigueur l’an prochain.
La commission spéciale a entendu le légitime appel des auteurs de cet amendement pour que le service de la navigation aérienne soit assuré dans de meilleures conditions en France.
Force est de constater que la récente grève des contrôleurs aériens, qui aurait pu se renouveler ce week-end puisqu’un préavis de grève avait été déposé avant d’être finalement levé, celles qui l’ont précédée et celles qui risquent d’être déclenchées à l’avenir perturbent fortement le secteur du transport aérien, sans que les motifs censés justifier ces mouvements nous paraissent toujours évidents.
Pour autant, monsieur Dominati, il nous semble difficile d’accepter la solution radicale que vous préconisez au travers de votre amendement. C’est la raison pour laquelle je vous suggère de le retirer.
J’ai pu dire tout à l’heure, s’agissant de la gestion des sociétés aéroportuaires, que l’État n’était pas forcément un bon actionnaire et que nous disposions des voies et moyens pour assurer différemment sa régulation.
Pour autant, il est incontestable que le contrôle de la navigation aérienne et de sa sécurité ainsi que la responsabilité y afférente, constituent des prérogatives incombant à l’État. Par conséquent, s’engager sur la voie de la privatisation au motif que l’on n’arrive pas à garantir le fonctionnement du service ne me semble pas approprié. D’ailleurs, quand on compare notre situation avec celle des autres pays européens, il apparaît que, à l’exception du Royaume-Uni, l’ensemble des États ont décidé de faire ce choix de la responsabilité de l’État et de le maintenir.
J’entends votre préoccupation, monsieur le sénateur, car la situation devient effectivement problématique quand les grèves se multiplient.
L’exercice du droit de grève des contrôleurs aériens est régi par la loi du 31 décembre 1984, déclinée par un décret du 17 décembre 1985 modifié, qui prévoit toutefois – c’était l’apport de ces premiers textes – des astreintes nominatives de contrôleurs aériens pour assurer au minimum 50 % des survols de l’espace aérien, garantir l’ouverture de dix-sept aéroports métropolitains ainsi que la continuité territoriale avec la Corse et les départements et collectivités d’outre-mer.
Des conditions minimales existent donc concernant le fonctionnement du transport aérien. Tout en faisant preuve de rigueur quant au respect de celles-ci, sans doute peut-on encore y apporter des améliorations. C’est sur ce point que l’accent doit être mis. Nous pouvons agir avec efficacité en imposant, y compris lors des grèves, une continuité du service, comme nous l’avons fait dans d’autres secteurs.
Monsieur le sénateur, je ne saurais vous suivre dans la privatisation du statut de ces professionnels et de la nature de cette mission, qui relèvent véritablement de la responsabilité de l’État.
Pour toutes ces raisons, je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Je vais retirer cet amendement, mais vous me permettrez de penser que, selon moi, monsieur le ministre, vous commettez une erreur : à ma connaissance, dans tous les autres pays européens, à l’exception d’un seul, les contrôleurs aériens sont des salariés de droit privé et ne relèvent pas de la fonction publique d’État.
À partir du moment où vous reconnaissez vous-même que l’État est un mauvais gestionnaire, après avoir été un mauvais actionnaire, dans d’autres domaines, faites en sorte de négocier avec les catégories concernées en vue de modifier leur statut. Aucune raison particulière ne justifie que, en France, les contrôleurs aériens soient des fonctionnaires.
Je ne préconise pas de privatiser l’activité des contrôleurs aériens, je suggère seulement de modifier le statut de ces personnels.
L'amendement n° 409 rectifié bis est retiré.
L’amendement n° 1426 n’est pas soutenu.
Section 4
Dispositions diverses
(Supprimé)
Je rappelle que l’article 50 A a été réservé jusqu’au mercredi 6 mai, à quatorze heures trente.
Le chapitre III du titre III de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014 précitée est complété par un article 31-2 ainsi rédigé :
« Art. 31-2. – En cas de cession d’une participation de l’État, réalisée selon les procédures des marchés financiers, entraînant le transfert d’une partie du capital au secteur privé, une fraction des titres cédés par l’État, qui ne peut être supérieure à 10 %, est proposée aux salariés de l’entreprise, à ceux des filiales dans lesquelles elle détient, directement ou indirectement, la majorité du capital, ainsi qu’aux anciens salariés s’ils justifient d’un contrat ou d’une activité rémunérée d’une durée accomplie d’au moins cinq ans avec l’entreprise ou ses filiales, qui sont adhérents d’un plan d’épargne d’entreprise.
« Ces titres peuvent également être cédés à l’entreprise avec l’accord de celle-ci, à charge pour elle de les rétrocéder dans un délai d’un an aux mêmes personnes. Durant ce délai, ces titres ne sont pas pris en compte pour déterminer le plafond de 10 % prévu à l’article L. 225-210 du code de commerce et les droits de vote ainsi détenus par la société sont suspendus. À l’issue de ce délai, les titres non souscrits sont vendus sur le marché.
« Un arrêté du ministre chargé de l’économie précise la fraction des titres proposée aux salariés ou aux anciens salariés, la durée de l’offre, l’identité du cessionnaire, le plafond individuel de souscription et les modalités d’ajustement de l’offre si la demande est supérieure à l’offre.
« L’entreprise peut prendre à sa charge une part du prix de cession, dans la limite de 20 %, ou des délais de paiement, qui ne peuvent excéder trois ans. Si un tel rabais a été consenti, les titres acquis ne peuvent être cédés avant deux ans, ni avant paiement intégral. Les avantages ainsi consentis sont fixés par le conseil d’administration, le directoire ou l’organe délibérant en tenant lieu. » –
Adopté.
Monsieur le président, je demande que l’amendement n° 115, tendant à insérer un article additionnel après l’article 54, soit examiné dès à présent, par priorité.
Je suis donc saisi par la commission spéciale d’une demande d’examen par priorité de l’amendement n° 115.
Aux termes de l’article 44, alinéa 6, du règlement, la priorité est de droit quand elle est demandée par la commission saisie au fond, sauf opposition du Gouvernement.
Quel est donc l’avis du Gouvernement sur cette demande de priorité ?
L'amendement n° 115, présenté par MM. Longuet et Adnot, est ainsi libellé :
Après l’article 54
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au 2° de l’article 3 de la loi n° 2006-739 du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs, la date : « 2015 » est remplacée par la date : « 2017 ».
II. – L’article L. 542-10-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :
1° Après le premier alinéa, sont insérés trois alinéas ainsi rédigés :
« La réversibilité est la capacité, pour les générations successives, à revenir sur des décisions prises lors de la mise en œuvre progressive d’un système de stockage. La réversibilité permet de garantir la possibilité de récupérer des colis de déchets déjà stockés pendant une période donnée et d’adapter l’installation initialement conçue en fonction de choix futurs.
« Le caractère réversible d’un stockage en couche géologique profonde est assuré dans le respect de la protection des intérêts mentionnés à l’article L. 593-1. Des revues de la mise en œuvre du principe de réversibilité dans un stockage en couche géologique profonde sont organisées au moins tous les dix ans.
« L’exploitation du centre débute par une phase industrielle pilote permettant de conforter le caractère réversible et la démonstration de sûreté de l’installation, notamment par un programme d’essais in situ. Tous les colis de déchets doivent rester aisément récupérables durant cette phase. La phase industrielle pilote comprend des essais de récupération de colis de déchets. » ;
2° Après le troisième alinéa, sont insérés deux alinéas ainsi rédigés :
« - l’article L. 593-17 ne s’applique pas à la demande d’autorisation de création du centre. La mise en service ne peut être autorisée que si l’exploitant est propriétaire des terrains servant d’assiette aux installations de surface, et des tréfonds contenant les ouvrages souterrains, ou s’il a obtenu l’engagement du propriétaire des terrains de respecter les obligations qui lui incombent en application de l’article L. 596-22 ;
« – pour l’application des dispositions du titre IX du présent livre, les tréfonds contenant les ouvrages souterrains peuvent tenir lieu de terrain servant d’assiette pour ces ouvrages. » ;
3° Le quatrième alinéa est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Le délai de cinq ans mentionné à l’article L. 121-12 est porté à dix ans. Le présent alinéa ne s’applique pas aux nouvelles autorisations mentionnées à l’article L. 593-14 relatives au centre ; »
4° Après le sixième alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Lors de l’examen de la demande d’autorisation de création, la sûreté du centre est appréciée au regard des différentes étapes de sa gestion, y compris sa fermeture définitive. Seule une loi peut autoriser celle-ci. L’autorisation fixe la durée minimale pendant laquelle, à titre de précaution, la réversibilité du stockage doit être assurée. Cette durée ne peut être inférieure à cent ans. L’autorisation de création du centre est délivrée par décret en Conseil d’État, pris selon les modalités définies à l’article L. 593-8, sous réserve que le projet respecte les conditions fixées au présent article ;
« – l’autorisation de mise en service mentionnée à l’article L. 593-11 est limitée à la phase industrielle pilote.
« Les résultats de la phase industrielle pilote font l’objet d’un rapport de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, d’un avis de la commission mentionnée à l’article L. 542-3, d’un avis de l’Autorité de sûreté nucléaire et du recueil de l’avis des collectivités territoriales situées en tout ou partie dans une zone de consultation définie par décret.
« Le rapport de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, accompagné de l’avis de la commission nationale mentionnée à l’article L. 542-3 et de l’avis de l’Autorité de sûreté nucléaire est transmis à l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, qui l’évalue et rend compte de ses travaux aux commissions compétentes de l’Assemblée nationale et du Sénat. » ;
5° Le septième alinéa est ainsi modifié :
a) À la première phrase, les mots : « de réversibilité » sont remplacés par les mots : « d’exercice de la réversibilité du stockage pour la suite de son exploitation » ;
b) La seconde phrase est ainsi rédigée :
« L’autorité de sûreté nucléaire se prononce sur l’autorisation de mise en service complète de l’installation. » ;
6° Au huitième alinéa, les mots : « de création » sont remplacés par les mots : « de mise en service complète » ;
7° Le neuvième alinéa est supprimé.
La parole est à M. Gérard Longuet.
M. Gérard Longuet. Monsieur le président, ma satisfaction n’a d’égale que ma honte de passer devant d’autres collègues à cette heure avancée de la nuit !
Sourires.
Un amendement d’appel permet de connaître, sur la sollicitation d’un parlementaire, une intention du Gouvernement et d’en laisser une trace dans le compte rendu de nos débats, publié au Journal officiel de la République française.
Tel est précisément l’objet de cet amendement n° 115, qui a toute sa place pour satisfaire votre volonté de relancer l’économie française, monsieur le ministre, tant il est vrai que, sur le terrain difficile de la gestion des déchets nucléaires à haute activité et à vie longue, qui commande l’avenir de l’ensemble de la filière, le débat se trouve aujourd’hui paralysé par l’absence de dépôt de projet de loi traitant de la réversibilité du stockage souterrain desdits déchets.
La loi du 28 juin 2006 de programme relative à la gestion durable des matières et déchets radioactifs avait fixé une date limite pour autoriser la création d’un centre de gestion durable des déchets nucléaires de haute activité et à vie longue, projet aujourd’hui connu sous l’acronyme Cigéo. L’échéance a été fixée à 2015 ; nous y sommes, et le Gouvernement n’est pas à même de prendre aujourd’hui le décret prévoyant le stockage des déchets nucléaires, car cette mesure doit être précédée, à juste titre et en vertu de la loi précitée, de l’adoption d’un texte législatif – ce qui suppose évidemment un débat parlementaire – définissant la réversibilité.
Nous avons eu en 2013, sur ce sujet difficile, un débat public dont la Commission nationale du débat public a estimé qu’il s’était révélé utile. Ce débat a d’ailleurs modifié en partie le programme initial. Aujourd’hui, nous devons inscrire dans la loi ce que le législateur considère comme étant une exigence absolue en matière de réversibilité.
Ce texte est déjà connu, dans la mesure où il a été rédigé et déposé à l’Assemblée nationale par MM. Le Déaut et Bataille. Il est maintenant prêt à être débattu et aurait pu trouver sa place dans le projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte ou dans votre texte, monsieur le ministre.
C’était d’ailleurs le sens de mon amendement, car, derrière ce projet, il y a un chantier immédiat occupant plus de 2 500 salariés, ainsi qu’un secteur économique qui emploie plusieurs dizaines de milliers de salariés et qui doit se trouver consolidé par ce maillon ultime de la chaîne de l’électronucléaire que constitue la gestion des déchets à haute activité et à vie longue.
Ce débat n’est pas ouvert et je n’ai pas l’intention à cet instant, à l’occasion de l’examen nocturne un amendement technique qui mériterait plus de temps pour que mes collègues se prononcent, de trahir la qualité de nos discussions.
Toutefois, monsieur le ministre, vous qui être chargé de l’industrie, pouvez-vous prendre l’engagement de présenter ce projet de loi au cours de l’année 2015 ? Grâce à ce délai raisonnable, nous pourrons éviter de maintenir dans l’attente et l’inquiétude l’ensemble des acteurs concernés, industriels certes, mais surtout populations locales ayant accepté ce projet d’enfouissement et manifestant le besoin de connaître la volonté effective du Gouvernement.
La commission spéciale sollicite l’avis du Gouvernement sur cet amendement, afin d’obtenir des réponses sur l’état du projet et sur les raisons qui ont poussé le Gouvernement à ne pas inscrire, comme vous l’avez rappelé à l’instant, mon cher collègue, ces dispositions dans le cadre du présent texte.
Monsieur le sénateur, vous avez bien rappelé le cadre juridique dans lequel se situe ce projet. Il faut aussi tenir compte des territoires – ils nous sont familiers – qui ont pris leurs responsabilités au regard de ce projet.
Ayant eu le même débat à l’Assemblée nationale avec le député de la Meuse, j’ai conscience que certains élus sur le terrain, à côté des populations locales, ont eu le courage de prendre leurs responsabilités en soulevant cette question de l’enfouissement et de l’avenir industriel et minier de notre pays.
La volonté du Gouvernement consiste précisément à répondre à l’appel. Je l’ai dit très clairement, en tant que ministre, je m’engagerai sur ce sujet. Une loi a été adoptée en 2010, suivie d’un débat public en 2013. Il faut aller de l’avant, nous le devons à nos concitoyens qui sont pleinement concernés. On ne peut pas dire que l’on met en œuvre une politique responsable sur l’ensemble de la filière si l’on ne pose pas cette question, tout en considérant que cette solution n’est peut-être pas la seule en termes de retraitement : il faut poursuivre la recherche par ailleurs.
S’agissant de l’enfouissement, en raison de la multiplicité des sensibilités, le débat a été décalé et finalement reporté. Je peux d’ores et déjà vous assurer que nous voulons être au rendez-vous sur la question de Cigéo. Par conséquent, je n’avais même pas considéré votre proposition, monsieur Longuet, comme un amendement d’appel, et je m’apprêtais à émettre un avis de sagesse.
Oui, je le maintiens, monsieur le président, compte tenu des explications que M. le ministre vient d’apporter, et même si j’estime que ce sujet aurait mérité d’être débattu à une heure permettant de plus amples discussions.
Cette situation appelle deux remarques de ma part.
Premièrement – vous l’avez dit vous-même, monsieur Longuet –, il aurait été préférable que cet amendement soit examiné dans d’autres conditions…
Le Sénat est amené à se prononcer à cinq heures du matin sur la question de l’enfouissement des déchets radioactifs à vie longue. On peut franchement se demander si ce n’est pas fait exprès ! D’autant que cet amendement a même été appelé par priorité : certains auraient-ils jugé préférable que cet amendement soit abordé dans ces conditions ?
Peut-être l’issue du vote serait-elle la même dans d’autres conditions, mais il n’est pas normal qu’un sujet de cette nature, introduit par voie d’amendement, soit étudié de cette façon. Le procédé est donc un peu « limite ».
Deuxièmement, sans reprendre les divers arguments qu’il serait possible d’invoquer, je rappelle que l’enfouissement des déchets n’est pas encore au point et que, pour leur part, les écologistes proposent d’autres solutions.
Je le répète, cette question aurait mérité un véritable débat, préparé et argumenté. Il est cinq heures, et nous devons nous contenter d’une discussion totalement improvisée ! C’est très fâcheux – pour ne pas dire plus !
Monsieur Longuet, vous demandez au Sénat de se prononcer par scrutin public sur cet amendement au motif que le Gouvernement n’a pas pris un décret, contrairement à ses engagements. Cela revient à prendre le Parlement en otage !
Peut-être faut-il mettre ce malentendu sur le compte de l’heure avancée, et même matinale…
L’enjeu est bien connu : il s’agit de la réversibilité. Ce dossier est très sensible, très politique…
Technique ? Cher collègue, il est à l’étude depuis 2006 !
Quoi qu’il en soit, je refuse d’être prise en otage sur un tel sujet, …
… alors même qu’il faudrait s’arrêter de travailler et renoncer à examiner, pour l’heure, d’autres amendements portant sur d’autres sujets !
Madame Bricq, à cet instant, je n’ai été saisi d’aucune demande de scrutin public sur l’amendement n° 115.
Murmures.
Ce n’était peut-être pas une bonne idée de demander la priorité…
Alors, que faisons-nous, monsieur le président de la commission spéciale ?
Monsieur le président, je vois que M. Longuet souhaite avoir à nouveau la parole. Même si la lettre du règlement l’interdit, serait-il possible de la lui donner une nouvelle fois ? Peut-être son intervention serait-elle à même de nous éclairer…
M. le président. Je vais faire une exception, surtout si cela permet de nous tirer de ce mauvais pas !
Sourires.
Je vous remercie, monsieur le président, ainsi que M. le président de la commission spéciale.
Madame Bricq, je comprends les remarques que vous formulez, mais je tiens à vous rassurer : il ne s’agit pas de contraindre le Gouvernement à prendre un décret, mais simplement de rappeler que la loi de 2006 a prévu la rédaction d’un projet de loi. Or les projets de loi relèvent du Gouvernement. Un tel texte ne pouvait être examiné qu’après l’organisation d’un débat public, lequel s’est tenu en 2013. Hélas, le Gouvernement ne l’a toujours pas présenté.
De leur côté, nos collègues députés Christian Bataille et Jean-Yves Le Déaut ont présenté une proposition de loi, que je soumets à mon tour au Sénat par le biais de cet amendement.
Monsieur Desessard, je suis sensible à vos arguments. Vous savez, je suis cette affaire depuis vingt ans. §Je peux donc bien attendre vingt minutes, vingt heures ou vingt jours de plus, cela ne me pose aucun problème !
Si, nonobstant l’ouverture qu’il suggère, M. le président de la commission spéciale accepte que nous reprenions ce débat après l’interruption des travaux parlementaires, je l’accepte volontiers.
M. Gérard Longuet. Je suis heureux d’avoir pu participer, depuis le début, à l’examen du présent texte, et tout particulièrement d’avoir pu défendre l’amendement n° 115. Toutefois, j’admets volontiers que ce sujet, compte tenu de son importance, ne doit pas être traité à l’heure où, on l’imagine, la lassitude gagne notre hémicycle…
Mmes Pascale Gruny et Sophie Primas applaudissent.
Mes chers collègues, je vous rappelle que, à la demande de la commission spéciale, l’amendement portant article additionnel après l’article 54 a été appelé par priorité – cela signifie tout de même quelque chose, la priorité ! –, que le Gouvernement a donné son accord, que cet amendement a été présenté et débattu. Il ne me semble pas possible de reporter l’issue de cette discussion de quinze jours.
Monsieur Longuet, si vous confirmez le maintien de cet amendement, nous allons procéder au scrutin public.
J’ai demandé la priorité au nom de la commission spéciale, et je ne me dédis pas.
Je mets donc aux voix l'amendement n° 115.
J'ai été saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe écologiste.
Je rappelle que la commission spéciale a sollicité l’avis du Gouvernement et que le Gouvernement s’en remet à la sagesse du Sénat.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l'article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à procéder au dépouillement du scrutin.
Il est procédé au dépouillement du scrutin.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 161 :
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 54.
La parole est à M. le président de la commission spéciale.
Monsieur le président, depuis la reprise de la séance à vingt et une heures trente, nous avons examiné environ 110 amendements. En tout, depuis ce matin, nous en avons étudié à peu près le double. Nous éprouvons tous, me semble-t-il, le besoin de prendre un peu de repos.
Chère collègue, je vous en prie, ne me contredisez pas avant même d’avoir entendu la fin de ma phrase !
En conférence des présidents – madame Bricq, dois-je vous rappeler que vous n’étiez pas présente à cette réunion ? –, les représentants des différents groupes se sont entendus pour pousser cette séance le plus loin possible, en fixant la limite à six heures du matin. Tel est l’accord auquel nous avons abouti, je le dis et je le répète.
Mme Éliane Assassi acquiesce.
Il est presque cinq heures quinze. Je tiens à vous remercier, monsieur le président, d’avoir remarquablement conduit cette séance de nuit, et à saluer tous les sénateurs présents. À mon sens, compte tenu de l’état de fatigue général, il ne serait pas raisonnable de pousser nos discussions plus avant.
Marques d’approbation.
Mes chers collègues, je vous le confirme, en conférence des présidents, nous avons pris l’engagement de poursuivre nos travaux le plus loin possible et au plus tard jusqu’à six heures.
Monsieur le ministre, voyez-vous un inconvénient à ce que je lève la séance, sachant que les quarante-cinq minutes qui nous séparent de cette heure limite nous permettraient peut-être d’examiner une dizaine d’amendements ?
Fidèle à ses engagements, le Gouvernement est prêt à poursuivre les débats jusqu’à six heures. Cela étant, je m’en remets à la sagesse de la Haute Assemblée.
M. le président. Compte tenu de la demande exprimée par M. le président de la commission spéciale et de l’approbation qu’elle paraît susciter, il me semble plus sage de lever la séance.
Nouvelles marques d’approbation.
Mes chers collègues, je vous signale que nous avons examiné 221 amendements au cours de la journée et de la nuit.
Il nous en reste 593 à examiner.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 4 mai 2015, à dix heures, à quatorze heures trente, le soir et la nuit :
Suite du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (n° 300, 2014-2015) : examen par priorité des articles 71 à 82 bis, relatifs aux exceptions au repos dominical et en soirée ;
Rapport de Mmes Catherine Deroche, Dominique Estrosi Sassone et M. François Pillet, fait au nom de la commission spéciale (n° 370, tomes I, II et III, 2014-2015) ;
Texte de la commission (n° 371, 2014-2015).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le samedi 18 avril 2015, à cinq heures quinze.