C’est donc un choix patrimonialement pertinent.
À quoi sert cet argent ? C’est le second point que je souhaitais clarifier pour répondre en particulier aux remarques de Mme la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann.
Le produit des cessions d’actifs ne sert pas à réduire le déficit public et n’est donc pas comparable au CICE. Ne s’agissant pas de revenus récurrents, ce n’est pas maastrichien au sens du déficit. Cela ne peut pas servir à financer des dépenses budgétaires. À quoi peut-il servir ? Soit à se désendetter, soit à réinvestir. D’ailleurs, sur ce point, nos priorités ont été claires.
Les privatisations qui seront conduites par ce gouvernement serviront donc au désendettement – la loi de finances pour 2015 porte 4 milliards d’euros de désendettement par voie de privatisations – et au réinvestissement : c’est ce qui a été fait avec PSA l’année dernière, c’est ce que nous faisons pour l’AFD, avec la réinjection de 800 millions d’euros, c’est ce qui sera fait pour le logement intermédiaire, puisque nous avons budgété près de 1 milliard d’euros, et c’est ce que nous serons sans doute conduits à faire dans le cas de Alstom : ce sont des recapitalisations qui passent par un réinvestissement de l’État et qui supposent par là même que l’État se désengage d’autres participations moins utiles.
Troisième point, pourquoi choisir ces sociétés de gestion aéroportuaires ? Ce n’est en effet pas ainsi que l’État exerce le bon contrôle sur ces infrastructures, et ce à deux égards : d’une part, ce n’est pas le bon moyen de les contrôler, et d’autre part, l’État, historiquement, a plutôt été un mauvais actionnaire.
C’est la grande différence avec les sociétés concessionnaires d’autoroutes et, à cet égard, je souhaiterais dissiper une confusion récurrente : lorsque l’opération sur les autoroutes a été réalisée, il y avait des sociétés privées concessionnaires qui géraient le domaine public ; on a donc décidé d’un transfert pour une durée donnée, en contrepartie d’une valeur, à des sociétés privées concessionnaires du domaine public. Dans ce cas, il y a un transfert de valeur, c’est encadré dans le temps, mais on maîtrise mal – et cela a été toute la difficulté des dix dernières années – la régulation financière de l’opération – péages, travaux, équilibre économique du contrat… Le dispositif dont nous avons discuté voilà quelques jours et qui a été adopté devrait nous permettre de mieux encadrer cet équilibre.
Mais le principe est clair : on transfère pour un temps donné – long – à un opérateur privé non seulement l’infrastructure, mais aussi sa gestion et l’ensemble de son équation économique.
La situation est très différente pour les sociétés de gestion aéroportuaires. On ne transfère en rien l’infrastructure et la propriété solide : les infrastructures et les abords restent dans le domaine public, la régulation économique est assurée par un contrat de régulation économique – généralement pour une durée quinquennale – conclu avec l’État prévoyant l’évolution annuelle des tarifs. Par ailleurs, les éléments les plus structurants de l’activité d’un aéroport et de sa société de gestion, à savoir les ouvertures de ligne, sont décidés par la Direction générale de l’aviation civile, la DGAC.
Les sociétés de gestion aéroportuaires s’occupent des négociations avec les compagnies aériennes et de l’optimisation de l’espace qu’elles ont à gérer – commerces, gestion du trafic… Mais l’infrastructure critique reste publique, et sa régulation se fait par le contrat de régulation économique et la DGAC.
Les préoccupations des élus concernés par les transactions en cours – qu’il s’agisse de Nice ou de Lyon – portent d’ailleurs non pas sur la société de gestion, mais sur la capacité à ouvrir de nouvelles lignes, sur la capacité à créer du nouveau trafic avec d’autres compagnies aériennes – souvent originaires du Golfe – afin de développer ces aéroports.
Le vrai débat du développement de ces aéroports réside dans le paradoxe constant entre la préservation nécessaire de notre compagnie aérienne nationale – Air France – et l’intérêt de ces aéroports régionaux qui ont besoin, pour se développer, de s’affranchir du hub unique Roissy-Charles de Gaulle-Orly.