Madame la sénatrice, la solution que vous proposez consiste à intégrer dans le contrat de travail des dispositions dérogatoires – une charte, en l’espèce – en vigueur depuis plus de cinq ans. Le problème, c’est que cela créerait un biais, un élément de complexité non nul. En outre, une question se pose : si de nouvelles structures commerciales s’installent dans le même ressort, devront-elles intégrer les mêmes dispositions dans leur contrat de travail ? Enfin, l’existant serait gelé, et cela pourrait avoir un effet déstabilisant en cas de développement ; ce serait particulièrement regrettable, et je crois que ce n’est pas votre objectif.
Vous souhaitez que ce qui fonctionne aujourd'hui ne soit pas déstabilisé. Je vous apporterai deux réponses. La première, c’est que la charte comprend des éléments d’organisation qui valent pour un territoire économique. C'est pourquoi nous avons prévu la possibilité de conclure non seulement des accords de branche ou d’entreprise, mais aussi des accords de territoire. Il me semble que, dans l’exemple que vous avez cité, il devrait être possible de conclure un accord de territoire sur la base de la charte, qui est tout à fait généreuse, puisqu’elle reprend les standards les plus élevés. Nul doute qu’un accord sera conclu.
Ce qu’il faut éviter, c’est de décomposer en accords d’entreprise les accords existants. En effet, si toutes les entreprises ne parvenaient pas à conclure un accord sur la base de la charte, il y aurait des déséquilibres, des hétérogénéités intenables d’une échoppe à l’autre. Le projet de loi prévoit la possibilité de conclure un accord de territoire sur la base de la charte. À mon sens, c’est la bonne réponse au problème que vous soulevez.
Le second point, c’est le délai d’adaptation. L’Assemblée nationale l’avait fixé à deux ans ; la commission spéciale du Sénat a rétabli le délai de trois ans que proposait initialement le Gouvernement.
Je pense que la possibilité de conclure un accord de territoire et le délai d’adaptation de trois ans sont de nature à répondre à votre préoccupation. J’ajoute que des évaluations régulières du dispositif seront réalisées pour éviter les blocages. Enfin, l’amendement n° 615 ayant été rejeté, il existe une dernière voie en cas de blocage ultime : l’employeur pourra prendre une décision, qui devra être approuvée par référendum organisé auprès des personnels concernés.
À la lumière de ces éléments, je vous invite à retirer votre amendement. Comme l’a souligné Jacques Mézard, les accords conclus dans les grandes zones touristiques ou commerciales de province ne sauraient être déstabilisés par le projet de loi. Je m’engage à ce que des évaluations régulières soient réalisées, afin que tous les blocages soient levés.