Or ce n’est pas une bonne chose. Comme l’a rappelé notre collègue Henri Tandonnet, qui sait bien ce que c’est, pour avoir passé sa vie dans une cour d’appel, nous disposons déjà de juridictions spécialisées dans d’autres domaines. Ce n’est pas la panacée. Souvent, l’existence de ces juridictions pose beaucoup plus de problèmes qu’elle n’en règle. J’ai rappelé ce matin à quel point l’expérience des pôles d’instruction, voulus du côté droit de cet hémicycle, se révèle être un échec, dont plus aucun gouvernement ne sait sortir.
Par ailleurs, de quoi s’occuperaient ces juridictions spécialisées ? De procédures collectives ? Comme Henri Tandonnet l’a également souligné, à juste titre, le véritable problème, s’agissant de ces procédures collectives, est de disposer de mandataires compétents – il y en a, mais tous ne le sont pas !
Aucune difficulté n’est constatée au niveau des juges consulaires, mais, madame la secrétaire d’État, quand vous venez expliquer à ceux d’entre eux qui ne siègent pas dans des tribunaux de commerce de grande métropole qu’ils n’ont pas donné satisfaction, qu’ils ne sont pas compétents et que, dès lors, vous entendez laisser à leur charge les seuls injonctions de payer et recouvrements, vous espérez qu’ils en soient heureux. ? Eh bien, non !
Qui, sur nos territoires, connaît le mieux la situation de ces entreprises de quelques centaines de salariés – 100, 250, 300, 350 ? Ce sont les juges consulaires !
En plus, vous voulez les priver de leurs responsabilités en matière de conciliation. Alors même que celle-ci doit être menée au plus près de l’entreprise, par des juges connaissant le terrain, vous prévoyez l’inverse !
Quel résultat allons-nous obtenir ainsi ? Ne nous berçons pas d’illusions ! Voilà quelques semaines, la Cour des comptes a rendu un rapport expliquant que l’avenir de la carte judiciaire reposerait sur l’existence d’une cour d’appel par grande région. Est-cela, la, la proximité ? Est-ce cela, se rapprocher des citoyens ?
Ce n’est pas si grave, m’objecte-t-on. Après tout, s’il ne s’agit que de plaider une ou deux fois dans sa vie, on peut bien faire 400 kilomètres ! C’est là une vision bien technocratique, je n’hésite pas à le dire ! D’ailleurs, le terme n’est pas péjoratif en soi. Une telle position peut présenter des avantages et des inconvénients. Mais reconnaissons au moins que cette vision est typiquement celle de Bercy. Eh bien, mes chers collègues, nous n’en voulons pas dans nos territoires ! Nous voulons conserver des compétences et des liens de proximité !
En outre, il n’est pas très raisonnable de considérer qu’une instance compétente pour régler un problème de procédure collective concernant une entreprise de 130 salariés ne le serait plus dès lors que l’effectif de l’entreprise atteindrait 151 salariés.
Je maintiens donc ma position, tout en signalant à M. le corapporteur, qui, comme toujours, parce qu’il est un homme de dialogue et de conciliation, a fait beaucoup d’efforts, que, si une partie n’aspire pas au dialogue et à la conciliation, il faut aussi savoir en tenir compte !