Une forme d’échevinage aurait pu être instaurée si nous avions prévu la saisine du juge départiteur sur l’initiative de l’une des deux parties. Cette disposition figurait d’ailleurs dans la rédaction initiale du projet de loi, mais l’Assemblée nationale ne l’a pas conservée. Le paritarisme de la justice prud’homale est donc parfaitement préservé.
Afin de faciliter la conclusion de compromis, il faut qu’un travail plus poussé soit mené à l’échelon du bureau de conciliation, qui est une instance paritaire. C’est pourquoi nous avons prévu que ce dernier devrait obligatoirement procéder à la mise en état du dossier. Ce point est fondamental : trop souvent, en effet, le dossier n’est pas prêt lors de la phase de conciliation, ce qui amène son renvoi immédiat au bureau de jugement. Désormais, les parties devront constituer leur dossier, et donc établir les faits, dès cette phase, qui s’en trouvera indéniablement facilitée, comme tous les professionnels en conviennent.
Le bureau de jugement, lui aussi paritaire, pourra ensuite passer à l’étape suivante de manière accélérée si cela apparaît nécessaire.
Surtout, il est proposé de mettre en place un référentiel indicatif au niveau du bureau de jugement restreint. Cela me paraît être l’un des apports les plus fondamentaux de ce projet de loi en termes de procédure, car ce référentiel aidera les parties à se mettre d’accord. Aujourd’hui, on fait trop souvent croire aux uns ou aux autres qu’ils pourront obtenir beaucoup plus en passant à l’étape suivante. La pratique montre pourtant que l’on finit par converger sur des peines en fonction de l’ancienneté du salarié et de la nature du litige.
Le bureau de jugement restreint disposera d’un délai de trois mois pour statuer et de la possibilité de recourir plus rapidement à la formation de départage. Le référentiel indicatif permettra de déterminer, en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, le montant des sommes susceptibles d'être allouées, en fonction notamment de l'ancienneté, de l'âge et de la situation du demandeur par rapport à l'emploi, sans préjudice des indemnités légales, conventionnelles ou contractuelles.
L’un des apports principaux de ce projet de loi réside donc dans cette visibilité offerte au niveau du bureau de jugement, qui permettra, nous en sommes convaincus, de favoriser un fonctionnement meilleur et plus rapide de la justice prud’homale.
Le référentiel indicatif sera établi, après avis du Conseil supérieur de la prud'homie, à partir de l’analyse de la jurisprudence, des procès-verbaux de conciliation et des transactions dont l’homologation est sollicitée. Il vise donc à une harmonisation progressive de la jurisprudence. Le juge sera tenu de l’appliquer lorsque les deux parties le demanderont.
Des dispositions réglementaires viendront préciser cette mesure, qui constitue une innovation particulièrement importante.
Le texte prévoit aussi la création d’un statut du défenseur syndical. Les défenseurs syndicaux seront inscrits sur une liste nationale sur proposition des organisations représentatives d’employeurs et de salariés, seront tenus à une obligation de discrétion à l’égard des informations reçues des parties et auront le statut de salariés protégés. Ce dispositif permettra de combler un vide, car aujourd’hui de nombreux salariés ne font pas appel à un avocat.
Enfin, nous proposons de professionnaliser la fonction de conseiller prud’homal, en renforçant les obligations déontologiques, en mettant en place un cadre disciplinaire applicable aux personnes participant à l’exercice de la justice prud’homale et en instaurant une obligation de formation initiale. Nous reconnaissons ainsi pleinement le rôle des conseillers prud’homaux. On ne peut donc pas nous accuser de ne pas leur faire confiance et de vouloir recourir à l’échevinage.