Cet article aborde une autre institution forte et marquante du monde du travail, à savoir l’inspection du travail.
Bien sûr, la commission spéciale a largement modifié la rédaction de cet article proposée par le Gouvernement, ce dont nous nous réjouissons. Nous remercions d'ailleurs Mme la corapporteur Catherine Deroche d’avoir proposé la suppression de la première habilitation visant à réformer par ordonnance l’inspection du travail. Désormais, il est seulement question d’ouvrir un concours spécifique aux contrôleurs du travail qui souhaitent accéder au corps des inspecteurs du travail, la réforme prévue par ordonnance étant supprimée.
Toutefois, monsieur le ministre, un rappel s’impose. En mars 2014, malgré la contestation du Sénat et le rejet de quatre syndicats sur six en comité technique paritaire, votre collègue Michel Sapin signait un décret sur la réorganisation de l’inspection du travail, parce que, ici même, nous avions repoussé la réforme qu’il portait. Cette réorganisation, adoptée en force, sans aucun consensus, a pour conséquence de remettre en cause l’indépendance des inspecteurs, notamment avec la création d’unités de contrôle locales regroupant huit à douze inspecteurs du travail placés sous la direction d’un responsable.
Le projet de loi prévoit d’aller plus loin dans cette réforme, qui plus est par voie d’ordonnance, alors que le Parlement a été informé depuis plus d’un an des intentions du Gouvernement en la matière.
En outre, une proposition de loi relative aux pouvoirs de l’inspection du travail a été déposée, mais elle n’a pas dépassé le stade de l’examen de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale il y a tout juste un an. Pourtant, elle aurait pu servir de base à un débat public au Parlement : le Sénat aurait pu en discuter et l’amender en vue d’aboutir à un texte acceptable pour les salariés et les fonctionnaires de l’inspection du travail. Néanmoins, de cela vous ne voulez pas !
Aujourd'hui, au lieu d’engager le débat, vous nous proposez de légiférer par ordonnance. C’est pourquoi nous continuons à demander la suppression de cet article, qui prévoit dorénavant d’autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures relatives à l’accès, par concours, des contrôleurs du travail au corps des inspecteurs du travail.
Sur la forme, tout d’abord, nous rejetons le recours à l’ordonnance sur un sujet si important, une réforme qui, je le répète, était dans les tiroirs du Gouvernement depuis de nombreux mois.
Sur le fond, ensuite, la présente disposition consiste en un transfert du corps des contrôleurs vers celui des inspecteurs. Or la principale difficulté rencontrée par l’inspection du travail dans l’exercice de ses prérogatives est liée au manque de moyens, notamment humains. Cette mesure ne répond pas à ce problème, parce qu’elle n’augmente pas l’effectif global – il s’agit simplement d’un transfert – et parce qu’elle diminue les effectifs à même de réaliser des contrôles sur le terrain.
La baisse du nombre de contrôleurs est d’autant plus préoccupante que ces derniers interviennent principalement dans les entreprises de moins de cinquante salariés, là où la présence syndicale est moins marquée et où les entraves aux droits des salariés peuvent, de ce fait, être nombreuses. J’en veux pour preuve le fait que l’essentiel des litiges portés devant les prud’hommes est le fait de salariés issus de petites et moyennes entreprises.