La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à vingt et une heures vingt, sous la présidence de M. Claude Bérit-Débat.
La séance est reprise.
Nous poursuivons la discussion du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen des amendements déposés à l’article 83.
Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1257, présenté par Mmes Assassi, David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 76 à 93
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Patrick Abate.
Les alinéas dont nous demandons ici la suppression sont, à nos yeux, générateurs d’une rupture d’égalité entre les justiciables.
Nous sommes bien entendu favorables à la disposition prévoyant l’obligation, pour les parties, de comparaître devant le bureau de conciliation et d’orientation. Notre désaccord porte sur la possibilité, pour ledit bureau, de renvoyer l’affaire devant la formation restreinte du bureau de jugement, laquelle aura l’obligation de rendre sa décision dans un délai de trois mois.
Il y aurait donc des affaires traitées en trois mois et d’autres en treize mois. Le risque, à notre sens, est de se retrouver devant le choix entre une justice de qualité, qui prend le temps, et une justice beaucoup plus rapide et potentiellement de moindre qualité.
Surtout, ce qui nous gêne, c’est que le choix de la formation, qui se fait en accord avec les parties ou à leur demande, revient en fait à choisir son juge, ce qui nous semble constituer une rupture du principe d’égalité que j’évoquais.
L'amendement n° 901 rectifié, présenté par MM. Cadic, Canevet et Guerriau, Mme Billon et MM. Cigolotti, Delahaye et Longeot, est ainsi libellé :
Alinéas 82 à 87
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 1454-1-1. – En cas d’échec de la conciliation, l’affaire est renvoyée devant le bureau de jugement mentionné à l’article L. 1423-12.
La parole est à M. Olivier Cadic.
L’article 83, après plusieurs retouches successives, prévoit la possibilité, pour le bureau de conciliation et d’orientation, de renvoyer les parties, avec leur accord, devant une formation de jugement restreinte à deux juges, qui doit statuer dans un délai de trois mois, lorsque le litige porte sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire. Ce texte fait donc coexister deux procédures qui obéissent à des règles distinctes pour les mêmes litiges, ce qui nous paraît contraire à l’égalité des justiciables devant la justice.
Le présent amendement tend donc à revenir sur ce point.
L'amendement n° 902 rectifié bis, présenté par MM. Cadic, Canevet et Guerriau, Mme Billon et MM. Cigolotti, Delahaye, Longeot et Pozzo di Borgo, est ainsi libellé :
Alinéas 82 à 87
Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :
« Art. L. 1454-1-1. – À défaut de conciliation, le bureau de jugement ne peut être saisi que par le dépôt d’une demande comportant l’énoncé de son objet ainsi qu’un exposé des moyens de fait et de droit et l’indication des pièces sur lesquels elle est fondée.
La parole est à M. Olivier Cadic
Cet amendement a pour objet de modifier les modalités de saisine du bureau de jugement.
En effet, la phase de conciliation doit être clairement séparée de l’instance judiciaire et être une phase non contentieuse, ce qui nécessite certaines modifications réglementaires.
Cependant, la loi peut déjà en prévoir le principe et en tirer la conséquence en cas d’échec de la conciliation, situation dans laquelle le demandeur ne pourrait saisir la formation de jugement qu’en déposant un dossier complet comportant l’énoncé de sa demande, un exposé des moyens de fait et de droit ainsi que l’indication des pièces sur lesquelles elle est fondée, à l’instar de ce qui est prévu pour les assignations dans le code de procédure civile.
Cette disposition, qui exige du demandeur qu’il dépose son dossier pour saisir la formation de jugement, supprimerait l’un des motifs les plus fréquents de retard pris par la procédure dès son départ et constituerait un facteur puissant pour atteindre l’objectif du projet de loi d’accélérer le traitement des contentieux du travail.
L'amendement n° 482 rectifié, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 83, première phrase
Supprimer les mots :
si le litige porte sur un licenciement ou une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail,
et les mots :
, avec leur accord,
II. – Alinéa 84
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Joël Labbé.
L’article 83 vise, conformément à l’objectif qui sous-tend l’ensemble du projet de loi, à simplifier, alléger, accélérer les procédures concernant une institution jugée poussiéreuse. En l’occurrence, c’est la justice prud’homale qui est visée, et le bureau de conciliation et d’orientation est l’un des outils de cette accélération des procédures.
Ce bureau de conciliation existe déjà aujourd’hui. Composé d’un conseiller prud’homal salarié et d’un conseiller prud’homal employeur, il permet de régler à l’amiable, en amont du bureau de jugement, un conflit entre un employeur et un salarié. Le projet de loi a pour objet de confier de nouveaux pouvoirs à ce bureau en lui permettant de proposer un circuit accéléré aux justiciables.
Il est en effet prévu que le bureau de conciliation et d’orientation peut, à défaut de conciliation, renvoyer les parties soit devant le bureau de jugement, dans sa formation plénière ou restreinte, soit directement devant le bureau de départage.
Le renvoi direct vers le bureau de départage pose problème. En effet, d’une part, les jugements issus de ce bureau font l’objet de 6 % d’appels de plus que les bureaux de jugement classiques. D’autre part, cette procédure emporte une remise en cause de notre modèle paritaire employeur-salarié : ce bureau est en effet composé de deux conseillers, un salarié et un employeur, ainsi que d’un juge professionnel, qui, bien souvent, impose ses conclusions aux deux autres conseillers.
De plus, il est prévu que le renvoi vers la formation de départage peut être décidé « si [les parties] le demandent ou si la nature du litige le justifie ». Concernant la première partie de la phrase, on ne comprend pas bien pourquoi le bureau de conciliation et d’orientation devrait se voir imposer la volonté des parties. Concernant la seconde partie de la phrase, on ne voit pas ce qu’est un litige qui justifierait un circuit court.
Ce qui nous est proposé ici, c’est de généraliser l’échevinage, …
… c’est-à-dire de donner davantage de place au juge professionnel et de réduire la portée des décisions paritaires.
Ce n’est pas en court-circuitant les conseillers prud’homaux que l’on redonnera confiance en cette institution.
Voilà pourquoi nous proposons une rédaction telle que le bureau de conciliation suive une procédure normale, selon son appréciation.
Il ne suffit pas de réclamer d’aller plus vite et de réduire drastiquement les procédures. La réforme passe avant tout par le respect de l’esprit paritaire et par davantage de moyens alloués à la justice prud’homale.
L'amendement n° 1258, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 88 à 91
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Les alinéas 88 à 91 ont été introduits par M le corapporteur pour instaurer dans la justice prud’homale une clôture de la mise en état.
Actuellement, cette procédure n’existe ni devant le tribunal d’instance ni devant les juridictions spécialisées, telles que le conseil de prud’hommes et le tribunal des affaires de sécurité sociale, devant lesquelles la procédure est orale.
Cette procédure de mise en état remet en cause l’oralité des débats au profit de l’écrit, donc du formalisme, et ce au détriment des défenseurs syndicaux.
L’article R. 1454 du code du travail prévoit déjà que les conseillers rapporteurs peuvent mettre les affaires en état d’être jugées. Cependant, il n’existe pas de clôture de la mise en état, et donc pas de délais fermés pour les échanges, puisque, en raison de la nature des affaires et des difficultés à apporter des preuves pour les salariés, les documents sont souvent déposés au dernier moment.
Avec la clôture de la mise en état, il faut bien comprendre que les droits des demandeurs ont davantage à perdre que l’efficacité et la rapidité de la justice n’ont à gagner.
De surcroît, cette procédure se mettant en place sans moyens supplémentaires pour le recrutement de greffiers, la tenue de telles audiences et la réception des pièces des parties vont forcément augmenter le temps de travail des conseillers, alors que les audiences de mise en état ne sont pas indemnisables aujourd’hui.
Monsieur le ministre, comment comptez-vous indemniser cette charge supplémentaire des conseillers ?
L'amendement n° 1259, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéas 92 et 93
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Évelyne Didier.
L’une des principales causes des retards imputables à la justice prud’homale réside dans l’absence des parties lors de la première phase d’audition. Une manœuvre dilatoire assez fréquemment utilisée par la partie mise en cause consiste à ne pas se présenter à la réunion du bureau de conciliation.
Les deux alinéas de l’article 83, que nous proposons de supprimer, ne constituent en rien une avancée au regard de ce qui existe. Ils présentent en effet le défaut essentiel de matérialiser la réduction de l’effectif des conseillers prud’homaux retenu pour composer le bureau de conciliation, ajustant ainsi l’activité de ce bureau aux insuffisances de moyens de la justice du travail.
De plus, ils ne permettent aucune avancée réelle en matière de règlement des litiges, puisque la réunion du bureau de conciliation demeure facultative et que l’absence des parties n’est compensée que par la réunion d’une sorte de conseil prud’homal amoindri.
Le risque est donc de voir s’établir une justice prud’homale à géométrie variable et à petite vitesse, dans laquelle les intérêts de la partie lésée ne pourront être correctement et valablement défendus. L’examen des situations pourrait alors devenir plus sommaire encore qu’il ne l’est aujourd’hui, tandis que les autres possibilités de résolution proposées par le texte de l’article 83 resteront ouvertes et seront éventuellement sollicitées.
Mes chers collègues, c’est sous le bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter cet amendement.
L'amendement n° 1767, présenté par M. Pillet, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 92
Remplacer les mots:
En cas de non-comparution d'une partie ou de son représentant
par les mots:
Si une partie ne comparaît pas et qu'elle n'est pas représentée
La parole est à M. François Pillet, corapporteur, pour présenter cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur les autres amendements en discussion.
L'amendement n° 1767 est un amendement rédactionnel.
J’en viens à l’amendement n° 1257. La possibilité d’orienter certaines affaires vers une autre formation, en l’espèce, ne nuit ni au justiciable ni à la procédure. Les justiciables sont associés à la division, qui ne peut se faire sans eux. Celle-ci est laissée à la libre appréciation du bureau de conciliation et d’orientation, qui va juger et apprécier. Enfin, les formations vers lesquelles sont orientées les affaires présentent toutes les garanties d’impartialité et de compétence requises. L’avis de la commission spéciale est donc défavorable.
Les amendements n° 901 rectifié et 902 rectifié bis visent à supprimer tout le dispositif d’orientation précoce des affaires vers la formation restreinte de jugement, c'est-à-dire la formation de départage. Les raisons avancées pour cette suppression ne paraissent pas fondées, comme je l’ai déjà indiqué. L’avis de la commission spéciale est donc défavorable sur les deux amendements.
L’amendement n° 482 rectifié vise, comme les précédents, à supprimer, en l’espèce presque totalement, le rôle d’orientation du bureau de conciliation. Chers collègues, il faudrait savoir ce que vous voulez : pas d’échevinage, pas de ceci, pas de cela…
Pour améliorer la procédure prud’homale, à l’image d’autres procédures, il faut la rendre plus rapide. Nous devons donc choisir des techniques qui n’affectent ni la qualité du débat contradictoire, ni la possibilité pour les parties d’être parfaitement représentées, ni, enfin, l’impartialité de la juridiction. L’innovation proposée dans ce texte nous apparaît pertinente et elle est assortie de garanties suffisantes. L’avis de la commission spéciale est donc défavorable sur ces deux amendements.
L’amendement n° 1258 vise à supprimer les avancées permises par le texte en matière de mise en état des affaires. Au contraire, nous avons voulu développer cette technique, qui a été exposée devant la commission spéciale et qui recueille les faveurs de tous les magistrats que nous avons consultés. Elle est très attendue, et je regrette même que nous n’ayons pu aller encore plus loin dans son développement. L’avis de la commission spéciale est donc défavorable sur cet amendement.
Enfin, contrairement à ce qu’affirment les auteurs de l’amendement n° 1259, celui-ci tend non pas à renforcer l’obligation de comparution personnelle en supprimant les alinéas 92 et 93, mais, bien au contraire, à la supprimer. L’équilibre auquel est parvenue la commission spéciale paraît raisonnable. La comparution est obligatoire, mais les parties peuvent se faire représenter. L’amendement rédactionnel n° 1767 que je vous ai soumis clarifie d’ailleurs encore cet équilibre. L’avis de la commission spéciale est donc défavorable sur cet amendement.
Comme la commission spéciale, le Gouvernement émet un avis défavorable sur les amendements n° 1257, 901 rectifié, 902 rectifié bis, 482 rectifié, 1258 et 1259.
En revanche, il est favorable à l’amendement n° 1767.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement est adopté.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 626 est présenté par Mme Bricq, M. Guillaume, Mmes Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés.
L'amendement n° 1260 est présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 99 et 100
Supprimer ces alinéas.
La parole est à Mme Anne Emery-Dumas, pour présenter l’amendement n° 626.
Dans son rapport, notre collègue Catherine Deroche affirme qu’un certain nombre d’éléments contribuent aux dysfonctionnements des conseils de prud’hommes, parmi lesquels la procédure orale et l’unicité de l’instance s’agissant d’un même contrat de travail.
Nous sommes pourtant attachés à ces particularités, en particulier à la procédure orale, qui permet aux parties, aux salariés notamment, de faire valoir personnellement leurs arguments.
La procédure prud’homale ne rend pas obligatoire la présence d’un avocat, que les salariés n’ont pas toujours les moyens de rémunérer. Il faut le rappeler, quelque 10 % des salariés ne peuvent aujourd’hui être accompagnés en appel. La création du défenseur syndical répond d’ailleurs à cette situation, puisque les salariés n’auront pas à le rémunérer. Le projet de loi reconnaît, sur ce point, la différence considérable de moyens qui existe, le plus souvent, entre l’employeur et le salarié en conflit.
Supprimer la procédure orale en appel implique de revenir sur cette capacité des parties à intervenir directement. À nos yeux, cela risque de créer une distorsion dans les capacités des parties, le plus souvent au détriment des salariés.
La parole est à M. Michel Le Scouarnec, pour présenter l'amendement n° 1260.
Par cet amendement, le groupe CRC demande la suppression des alinéas 99 et 100 de cet article, qui introduisent la procédure écrite en appel devant la juridiction prud’homale.
Si nous entendons la volonté du gouvernement de réduire les délais de jugement dans les cours prud’homales, nous nous opposons à sa manière de faire, qui ne saurait en aucun cas être efficace. La vraie raison de la lenteur de la justice prud’homale tient à son manque criant de moyens.
Instaurer la procédure écrite en appel ne conduira qu’à apporter plus de complexité et à allonger encore les délais. Les juges, débordés, pourront-ils suivre efficacement l’affaire ? J’en doute fortement ! Combien de temps durera l’échange des documents entre les parties ? Il est tellement plus simple et plus rapide, pour les salariés, de s’adresser directement à la juridiction pour avancer leurs arguments !
Par ailleurs, cette évolution pose question : le formalisme de ce type de dispositif est strict, alors que plus de 10 % des salariés se présentent en appel sans être accompagnés d’un avocat. Comment feront-ils demain, alors qu’ils ne disposent pas des compétences nécessaires pour maîtriser la méthodologie de la procédure écrite ? Une telle mesure nous semble donc constituer une entorse grave au principe d’accès universel des salariés à la justice.
L’objectif d’une bonne réforme des prud’hommes devrait être d’assurer une justice de qualité, dans ces jugements comme dans ses délais. Vous ne nous proposez que de pallier le manque de moyens.
En vertu de l’ensemble de ces principes, nous demandons la suppression des alinéas 99 et 100 de cet article.
Ces amendements tendent à revenir sur la décision de la commission spéciale de préciser que, en appel, la procédure est essentiellement écrite. Or cette évolution est une nécessité pour améliorer les délais de traitement. Je rappelle à cet égard que, dans plus de 90 % des cas, le justiciable est représenté en appel et sera donc aidé dans la conduite de la procédure.
S’agissant des 10 % de justiciables restants, je souhaite rappeler qu’il existe dans notre droit une procédure essentiellement écrite, qui n’exige pas forcément la présence d’un avocat ou d’un conseil et qui est souvent présentée comme un modèle d’accessibilité : la procédure devant le tribunal administratif, qui ne soulève pas de difficultés particulières. Mon sentiment personnel est qu’elle constitue un modèle en la matière.
Je rappelle en outre que nous n’avons prévu cette procédure écrite qu’en appel, alors que les principaux moyens de droit auront été échangés en première instance et qu’il convient d’arriver rapidement à une solution du litige.
Rien n’interdit, d’ailleurs, comme dans la procédure administrative, dont on dit qu’elle est essentiellement écrite, que les justiciables soient entendus à l’oral. C’est expressément prévu !
La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L'amendement n° 170 rectifié est présenté par Mmes Lienemann et Claireaux.
L'amendement n° 953 rectifié est présenté par MM. Collombat, Arnell, Castelli, Collin, Fortassin et Hue, Mmes Laborde et Malherbe et MM. Mézard et Requier.
L'amendement n° 1261 est présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
Alinéas 129 à 132
Supprimer ces alinéas.
L’amendement n° 170 n’est pas soutenu.
La parole est à M. Jacques Mézard, pour présenter l’amendement n° 953 rectifié.
Il s'agit ici d’une question importante. L’article 2064 du code civil est ainsi rédigé : « Toute personne, assistée de son avocat, peut conclure une convention de procédure participative sur les droits dont elle a la libre disposition, sous réserve des dispositions de l’article 2067.
Toutefois, aucune convention ne peut être conclue à l’effet de résoudre les différends qui s’élèvent à l’occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du code du travail entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu’ils emploient. »
Qu’est-ce que la convention de procédure participative ? Je dois le rappeler à la fois à M. le ministre et à nos collègues du groupe socialiste : ce dispositif est né dans la loi du 22 décembre 2010, contre laquelle vous aviez tous fermement voté. Il s’agissait en réalité d’une véritable arnaque, fruit d’une négociation du gouvernement Fillon.
Protestations sur les travées de l'UMP.
M. le ministre sourit.
Votre projet va à l’encontre de toute la jurisprudence de la Cour de cassation, qui a toujours exigé les garanties les plus strictes dans les protocoles d’accord en matière de droit social. Vous considérez pourtant aujourd’hui que ces conventions de procédure participative peuvent être mises en œuvre, dans des conditions qui ne respectent pas les droits des salariés.
Il m’arrive de prendre des positions dans l’intérêt des employeurs, quand cela me semble juste. Par cette disposition, monsieur le ministre, vous faites quelque chose que vos prédécesseurs de droite n’avaient pas osé faire !
Cet amendement étant identique à celui qui vient d’être présenté, je vais essayer de convaincre M. le ministre, si toutefois c’est possible, par des arguments différents de ceux de M. Mézard. Cette défense à deux voix sera peut-être efficace !
Je partage les positions exprimées par M. Mézard, sauf le rappel que, parfois, il défend les employeurs ! §Non, je dis cela pour rire : moi aussi, parfois, je défends les employeurs.
En attendant, nous vous demandons de supprimer ces alinéas. En effet, cette exception a été introduite dans le code civil parce que le CSP, le Conseil supérieur de la prud'homie, avait émis à la quasi-unanimité – organisations syndicales, salariales et patronales – un avis défavorable à l’extension de cette procédure aux conflits du travail. En effet, celle-ci est payante, alors que la conciliation prud’homale est gratuite, sans avocat obligatoire et avec un préliminaire de conciliation.
En ce qui nous concerne, nous combattons la logique qui entend traiter les différends entre employeurs et salariés ailleurs que devant le conseil de prud’hommes ; je rejoins en cela M. Mézard.
Nous nous opposons par conséquent à la volonté du Gouvernement de résoudre les litiges entre employeurs et salariés par d’autres voies que les prud’hommes. Nous sommes en effet conscients que les liens entre un employeur et un salarié n’unissent pas des personnes à égalité et sont bien des liens de subordination. De ce fait, les différends doivent se régler devant la justice prud’homale.
L'amendement n° 483, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 130
Supprimer cet alinéa.
La parole est à M. Joël Labbé.
Le deuxième alinéa de l’article 2064 du code civil prévoit qu’« aucune convention ne peut être conclue à l'effet de résoudre les différends qui s'élèvent à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du code du travail entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu'ils emploient. »
Cet alinéa reconnaît la spécificité du droit du travail, qui, à la différence du droit civil, régit des relations non pas entre deux parties égales, mais entre deux personnes ayant un lien de subordination, à savoir l’employeur et son salarié.
En reconnaissant la possibilité d’établir une convention pour régir les rapports entre ces deux personnes, afin de favoriser les procédures participatives, cet alinéa du projet de loi remet en cause deux cents ans d’élaboration de notre droit du travail. Un tel bouleversement mériterait une véritable réforme, assortie d’un débat parlementaire dédié.
C’est pourquoi nous proposons la suppression de cet alinéa.
M. François Pillet, corapporteur. La commission spéciale n’a pas modifié ce texte, car elle a considéré après réflexion qu’elle devait en rester à la version du Gouvernement. Elle émet donc nécessairement un avis défavorable aux différents amendements, et je suis certain que M. le ministre va encore conforter sa position !
Sourires.
Vous avez raison, monsieur le corapporteur, l’esprit de cohérence m’oblige à défendre ce texte, mais je le fais également par conviction.
Ces alinéas visent à permettre des modes alternatifs de règlement des conflits. Il me faut avant tout dire à M. Mézard que l’on ne réalise pas des réformes de ce type en faisant des trocs ! Monsieur le sénateur, vous avez donné le sentiment que, lors de la réforme de 2010, on avait créé l’acte d’avocat en contrepartie de la création d’un mode alternatif de règlement des conflits. Je n’ai pas à m’exprimer au nom de la majorité précédente, qui compte suffisamment de représentants dans la Haute Assemblée pour le faire, …
Sourires sur les travées de l'UMP.
… mais, pour notre part, nous ne concevons pas cette réforme comme un troc. Que cherchons-nous à faire ? Quelle est la démarche d’ensemble ? Nous voulons trouver les voies et moyens d’une justice plus rapide et plus efficace.
Voilà pourquoi nous rendons possibles ces modes alternatifs de règlement des conflits et nous les rendons accessibles dans le domaine du droit du travail. Cependant, cela ne se fera pas en l’absence de toute règle, puisque nous soumettons le résultat de cette procédure à l’homologation du conseil des prud’hommes.
Par ailleurs, le consentement des deux parties demeure nécessaire. Je suis d’accord avec vous sur le caractère asymétrique de la relation de travail, que je n’ai jamais nié. Vous avez tout à fait raison de dire qu’il existe. Toutefois, lorsque les deux parties sont d’accord et que le consentement n’est pas biaisé, on peut entrer dans une procédure de médiation. Pourquoi voulez-vous interdire à deux parties qui y consentent de trouver une solution possible ?
La même logique sera à l’œuvre lors du bureau de conciliation et même lors du bureau de jugement, à travers le référentiel.
Par ailleurs, cette possibilité est offerte, mais elle n’est pas la seule voie. Sur ce point, votre raisonnement me gêne. Si ce mode alternatif de règlement des conflits constituait la seule voie, je pourrais à la rigueur comprendre votre argument malgré mes réserves. Mais tout de même, le droit commun existe ! Cette voie n’est ouverte que si les deux parties le souhaitent.
Passez-moi l’expression, mais je vous trouve sur ce point, monsieur Mézard, plus royaliste que le roi.
Sourires.
C’était une provocation gratuite de ma part ! Enfin, une fois ce mode alternatif de règlement des conflits choisi et accepté par les deux parties, les accords qui en sont issus sont soumis à une homologation par le conseil des prud’hommes, ce qui n’est pas possible aujourd’hui.
Pour résumer, les parties ont tout à fait la possibilité de ne pas entrer dans cette procédure amiable. Elles n’y sont pas liées. Enfin, une fois qu’elles s’y sont engagées, il suffit qu’elles l’acceptent, et le processus d’homologation couronne le tout.
Cela raccourcit la procédure si c’est un choix ! Laissez la liberté aux acteurs.
Non ! C’est une liberté encadrée. Le pire des risques, pour aller dans votre sens, c’est que cela ne serve à rien. Si ce dispositif ne sert à rien, ce ne sera pas si grave. Toutefois, s’il peut être utile dans de nombreux cas, ce sera plus efficace, ce qui s’inscrit exactement dans l’esprit du texte que nous examinons depuis tout à l’heure. Par ailleurs, il est juste, puisqu’il y a l’homologation.
Ce dispositif ne mérite pas le faux procès qui lui a été intenté. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur tous ces amendements.
J’avais déposé un amendement identique, qui n’a pas été soutenu.
Monsieur le ministre, pour la première fois peut-être depuis la création du droit du travail, on suit ici une logique de création de conventions de droit civil, sans se soucier de sanctuariser le droit du travail comme étant à part des conventions ou du droit civil classique.
Pour les raisons qu’ont très bien exprimées mes collègues, en particulier l’asymétrie entre les positions de l’employeur et du salarié, on peut se demander pourquoi l’État entend soudain modifier ce qui existe depuis des lustres. Ce n’est pas parce que la procédure serait ainsi plus rapide, car, s’il faut que l’accord soit homologué par les prud’hommes, le gain de temps sera maigre.
En réalité, de plus en plus d’entreprises, telle la société de taxis Uber, conçoivent des contrats de travail sous forme de conventions de droit civil et de droit des affaires et tentent ainsi s’exonérer des règles du salariat et du droit du travail. Ce phénomène existe dans tous les pays anglo-saxons. On prend donc à mes yeux ici un risque majeur, parce qu’il s’agit d’un bouleversement philosophique de notre rapport au droit.
Je soutiendrai par conséquent les amendements défendus par mes collègues.
Monsieur le ministre, je me permets d’insister. De quoi est-il question ? Il s’agit ici bien du code civil, et non du code du travail ou du code de procédure civile. Ce point avait été abordé très clairement, en 2010, et le gouvernement Fillon n’avait alors pas voulu s’engager dans la voie qui est aujourd’hui la vôtre, et ce à juste titre.
La convention de procédure participative permet en effet de court-circuiter la procédure de droit commun et de placer le plus faible dans une situation encore inférieure. Voilà pourquoi, en ce qui concerne les transactions et les protocoles transactionnels en droit du travail, la chambre sociale de la Cour de cassation a toujours voulu faire en sorte qu’il y ait des règles extrêmement strictes. Ainsi, elle a toujours exigé que la procédure de licenciement soit engagée et qu’il ne puisse y avoir de protocole transactionnel qu’ensuite. Par conséquent, vous bouleversez aujourd’hui ces principes généraux de notre jurisprudence en matière de droit social !
Par ailleurs – ce n’est pas honteux –, il y avait bien eu à l’époque un échange : les avocats avaient accepté l’entrée du chiffre, c’est-à-dire des experts comptables, dans le droit et ils avaient reçu en échange la convention de procédure participative, ainsi que l’acte d’avocat. Alors que ni l’un, ni l’autre n’ont jamais fonctionné, vous utilisez à présent cette procédure.
On pourrait donc vous dire, monsieur le ministre : « Courbe la tête, fier Sicambre ! Adore ce que tu as brûlé et brûle ce que tu as adoré ! »
Sourires.
Je voudrais à mon tour insister sur ce point.
Nous avons déposé ces amendements parce que, même après tout ce que nous avons pu entendre précédemment, ces deux alinéas sont ceux qui portent le plus atteinte à la justice prud’homale.
Monsieur le ministre, vous nous avez dit tout à l’heure vouloir professionnaliser cette justice prud’homale, en faire une justice presque comme une autre. Or on est là dans le droit du travail, dans des relations qui lient des personnes par un lien de subordination et qui mettent face à face des parties qui ne sont pas sur un pied d’égalité.
Pourtant, au travers de cette procédure que vous essayez d’instaurer, vous mettez en péril l’institution même de la juridiction prud’homale, qui fait tellement peur au grand patronat…
… et aux employeurs !
On entend dire depuis le début de l’examen de ce texte que les étrangers, notamment les Américains, ne veulent pas venir en France, parce qu’ils ont peur des prud’hommes et, bien évidemment, de l’ensemble du code du travail.
Le Gouvernement de M. Valls, dont M. Macron est un membre éminent, porte aujourd’hui de graves atteintes à la justice prud’homale et à des acquis sociaux qui ont permis, qu’on le veuille ou non, à un grand nombre de salariés de faire valoir leurs droits, bafoués dans les entreprises et réhabilités grâce à la justice prud’homale.
Monsieur le ministre, je trouve donc dommage et dommageable ce que vous faites au travers de cet article en général et de ces alinéas en particulier.
Je voudrais simplement apporter deux précisions.
Premièrement, tout l’argumentaire de Mme Lienemann tombe, parce qu’il ne s’agit en rien ici du code du travail.
Il s’agit ici du code civil. Si votre totem est le code du travail, vous êtes donc hors sujet. M. Mézard a bien dit qu’il était question ici du code civil. J’accepte la dynamique dans laquelle il se situe et je la respecte, mais il faut être juridiquement cohérent.
Deuxièmement, j’ai un dissensus avec vous, parce que, selon moi, que les parties soient libres d’entrer, ou non, dans cette procédure…
M. Emmanuel Macron, ministre. … constitue une différence fondamentale. Rien n’oblige le salarié à entrer dans cette procédure de convention collective, rien !
M. Jacques Mézard proteste.
Vous avez mis en place un référentiel transparent, pour tous, au niveau du bureau de jugement. Par ailleurs, monsieur Mézard, si un intérêt pécuniaire existe chez l’une des parties, il se voit matérialisé au niveau du bureau de jugement par le référentiel, qui donne à voir ce que l’on peut espérer.
Aucun salarié ayant un référentiel plus généreux d’après le bureau de jugement n’acceptera une transaction extrajudiciaire moins généreuse ! Cela n’existe pas, et vous le savez, sauf à considérer qu’il existe une irrationalité collective, mais c’est une hypothèse à laquelle je ne souscris pas.
Par ailleurs, il ne s’agit en aucun cas d’une voie unique et imposée. Cette procédure est choisie par les deux parties et fait l’objet d’une procédure d’homologation.
Enfin, madame la sénatrice, cette réforme concerne le quotidien de nos concitoyens et de nos entreprises, contrairement à la question du délit d’entrave, sur laquelle nous reviendrons ultérieurement et pour laquelle nous avons véritablement la volonté d’engager une réforme en termes d’attractivité. Nous ne faisons pas là une réforme d’affichage !
M. Emmanuel Macron, ministre. Sinon, nous n’entrerions pas dans ce luxe de détails. Cette réforme, qui a du sens, vise à être efficace. Moi, ce qui m’intéresse, c’est de prendre non pas des mesures d’affichage, mais des mesures qui changent concrètement les choses. Et c’est bien de cela que nous débattons !
Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.
Les amendements ne sont pas adoptés.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 83 est adopté.
I. – Les 1° à 7° du I et les II, III, IV et V de l’article 83 de la présente loi sont applicables à compter de la publication de la même loi.
II. – Les 7° bis, 8° et 19° du I du même article sont applicables aux instances introduites devant les conseils de prud’hommes à compter de la publication de la présente loi.
III. –
Non modifié
IV. –
Non modifié
V. – Les 17° et 18° du même I et le I bis entrent en vigueur au plus tard le premier jour du douzième mois suivant la publication de la présente loi.
VI. –
Non modifié
VII. –
Non modifié
L'amendement n° 76, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
Par cohérence avec notre amendement de suppression de l’article 83, nous demandons la suppression de l’article 84.
En effet, l’article 84 prévoit l’entrée en vigueur de la réforme des prud’hommes dès la promulgation de la loi s’agissant de la majorité des dispositions prévues à l’article 83, à l’exception des dispositions concernant le défenseur syndical, dont l’instauration est reportée d’un an.
Monsieur le ministre, j’aimerais savoir pour quelles raisons ces dispositions ne sont pas applicables à la même date.
Ma chère collègue, par coordination, vous avez défendu un amendement de suppression. Et par coordination également, l’avis de la commission spéciale est défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1759, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... – Au II de l’article 16 de l’ordonnance n° 2011-337 du 29 mars 2011 modifiant l'organisation judiciaire dans le département de Mayotte, l’année : « 2015 » est remplacée par l’année : « 2017 ».
La parole est à M. le ministre.
Cet amendement vise à proroger de 2015 à 2017 la date limite de création d’un conseil des prud’hommes à Mayotte.
L'amendement est adopté.
L'article 84 est adopté.
(Non modifié)
Par dérogation au premier alinéa de l’article L. 492-4 du code rural et de la pêche maritime, le prochain renouvellement des membres assesseurs des tribunaux paritaires des baux ruraux a lieu en janvier 2018.
Le mandat des membres assesseurs des tribunaux paritaires des baux ruraux en fonction à la date de promulgation de la présente loi prend fin à la date d’installation des membres assesseurs nouvellement élus. –
Adopté.
Section 2
Dispositif de contrôle de l’application du droit du travail
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi et relatives à l’accès au corps de l’inspection du travail par voie d’un concours réservé aux agents relevant du corps des contrôleurs du travail et remplissant des conditions d’ancienneté.
Cet article aborde une autre institution forte et marquante du monde du travail, à savoir l’inspection du travail.
Bien sûr, la commission spéciale a largement modifié la rédaction de cet article proposée par le Gouvernement, ce dont nous nous réjouissons. Nous remercions d'ailleurs Mme la corapporteur Catherine Deroche d’avoir proposé la suppression de la première habilitation visant à réformer par ordonnance l’inspection du travail. Désormais, il est seulement question d’ouvrir un concours spécifique aux contrôleurs du travail qui souhaitent accéder au corps des inspecteurs du travail, la réforme prévue par ordonnance étant supprimée.
Toutefois, monsieur le ministre, un rappel s’impose. En mars 2014, malgré la contestation du Sénat et le rejet de quatre syndicats sur six en comité technique paritaire, votre collègue Michel Sapin signait un décret sur la réorganisation de l’inspection du travail, parce que, ici même, nous avions repoussé la réforme qu’il portait. Cette réorganisation, adoptée en force, sans aucun consensus, a pour conséquence de remettre en cause l’indépendance des inspecteurs, notamment avec la création d’unités de contrôle locales regroupant huit à douze inspecteurs du travail placés sous la direction d’un responsable.
Le projet de loi prévoit d’aller plus loin dans cette réforme, qui plus est par voie d’ordonnance, alors que le Parlement a été informé depuis plus d’un an des intentions du Gouvernement en la matière.
En outre, une proposition de loi relative aux pouvoirs de l’inspection du travail a été déposée, mais elle n’a pas dépassé le stade de l’examen de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale il y a tout juste un an. Pourtant, elle aurait pu servir de base à un débat public au Parlement : le Sénat aurait pu en discuter et l’amender en vue d’aboutir à un texte acceptable pour les salariés et les fonctionnaires de l’inspection du travail. Néanmoins, de cela vous ne voulez pas !
Aujourd'hui, au lieu d’engager le débat, vous nous proposez de légiférer par ordonnance. C’est pourquoi nous continuons à demander la suppression de cet article, qui prévoit dorénavant d’autoriser le Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures relatives à l’accès, par concours, des contrôleurs du travail au corps des inspecteurs du travail.
Sur la forme, tout d’abord, nous rejetons le recours à l’ordonnance sur un sujet si important, une réforme qui, je le répète, était dans les tiroirs du Gouvernement depuis de nombreux mois.
Sur le fond, ensuite, la présente disposition consiste en un transfert du corps des contrôleurs vers celui des inspecteurs. Or la principale difficulté rencontrée par l’inspection du travail dans l’exercice de ses prérogatives est liée au manque de moyens, notamment humains. Cette mesure ne répond pas à ce problème, parce qu’elle n’augmente pas l’effectif global – il s’agit simplement d’un transfert – et parce qu’elle diminue les effectifs à même de réaliser des contrôles sur le terrain.
La baisse du nombre de contrôleurs est d’autant plus préoccupante que ces derniers interviennent principalement dans les entreprises de moins de cinquante salariés, là où la présence syndicale est moins marquée et où les entraves aux droits des salariés peuvent, de ce fait, être nombreuses. J’en veux pour preuve le fait que l’essentiel des litiges portés devant les prud’hommes est le fait de salariés issus de petites et moyennes entreprises.
L'amendement n° 77, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Annie David.
L’inspection du travail a de plus en plus de mal à fonctionner efficacement depuis la mise en place du plan dit « Sapin » présenté dans le cadre du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, qui prétendait renforcer ses pouvoirs. Si nous ne pouvons qu’être en accord avec cette philosophie, nous sommes perplexes quant aux mesures proposées.
En effet, comment renforcer une institution en diminuant de 10 % ses effectifs ? Avant cette réforme, on comptabilisait un peu plus de 2 000 agents d’inspection pour 18 millions de salariés. Autant dire que le pays ne connaissait pas un sureffectif d’inspecteurs...
Par ailleurs, en réformant l’organisation du travail, en supprimant les permanences pour les salariés et en s’attaquant à la liberté d’organisation du travail des inspecteurs, le Gouvernement a fait le choix d’empêcher ces derniers de mener à bien leur mission.
Pourtant, au regard de ses missions et de son organisation, l’inspection du travail constitue une vraie protection pour les salariés. Chargée de faire appliquer le code du travail, elle peut, sans préavis, de jour comme de nuit, venir dans les entreprises.
Monsieur le ministre, en imposant des conditions d’exercice de plus en plus difficiles et des effectifs réduits, vous maltraitez encore un peu plus cette institution.
Alors que la commission spéciale a largement réduit la portée de cet article, nous ne pouvons accepter les dispositions prévues. Il est, à nos yeux, indispensable que la réforme de l’inspection du travail se fasse de manière globale. On ne saurait la saucissonner. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement de suppression.
Nous souhaitons conserver la seconde demande d’habilitation relative à l’ouverture d’un concours spécifique aux contrôleurs du travail qui souhaitent devenir inspecteurs du travail, afin de répondre à un besoin urgent. En revanche, nous avons supprimé la première demande d’habilitation concernant les pouvoirs de l’inspection du travail.
La commission spéciale a émis un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1613, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
Au début de cet article
Insérer un paragraphe ainsi rédigé :
I. – Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi et modifiant le code de procédure pénale, le code rural et de la pêche maritime, le code des transports et le code du travail, afin de :
1° Renforcer le rôle de surveillance et les prérogatives du système d’inspection du travail, étendre et coordonner les différents modes de sanction et, en matière de santé et de sécurité au travail, réviser l’échelle des peines ;
2° Abroger les dispositions devenues sans objet et assurer la cohérence rédactionnelle dans le code du travail et entre le code du travail et les autres codes.
La parole est à M. le ministre.
La commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement visant à revenir au texte initial.
J’ai largement développé devant la commission spéciale les raisons pour lesquelles nous avions souhaité ne pas légiférer par ordonnance concernant la première demande d’habilitation relative à la réforme des pouvoirs de l’inspection du travail, à la fois pour des raisons de forme – on nous demande de légiférer par ordonnance – et de fond, lesquelles ont été largement évoquées lors de l’examen de l’article 20 du projet de loi relatif à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale.
Par cohérence, la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1272, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Après le premier alinéa de l’article L. 1155-2 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Sont passibles des mêmes peines les contraventions aux articles L. 1152-2 et L. 1153-3. »
La parole est à Mme Évelyne Didier.
La répression du harcèlement tant sexuel que moral prévu par le code du travail a été réduite par l‘article L. 1155-2 de ce dernier. En l’état de la rédaction du code du travail, le fait pour un employeur de sanctionner un salarié pour s’être plaint ou pour avoir témoigné de faits de harcèlement moral ou sexuel n’est plus pénalement répréhensible.
Il s’agit là d’une des nombreuses erreurs liées à une recodification des dispositions. Celle-ci a été pour partie mal faite, étant entendu qu’elle devait être réalisée à droit constant. Au demeurant, cette erreur a été reconnue par l’administration chargée du pilotage de la recodification.
Si les erreurs – nombreuses – de la recodification de la partie réglementaire ont été corrigées par un décret, au demeurant tardif, les erreurs – moins nombreuses, il est vrai – de la partie législative n’ont jamais été corrigées, notamment celle-ci, et ce malgré l’engagement de l’administration centrale.
De fait, depuis lors, les inspecteurs du travail ont été témoins de nombreuses sanctions faisant suite soit à des plaintes, soit, plus souvent encore, à des témoignages. Cette situation rend d’autant plus difficiles les enquêtes qu’ils sont amenés à diligenter, la protection de fait de la confidentialité absolue des témoignages étant rarement possible.
Ma chère collègue, dans l’exposé des motifs de l’amendement, vous ne mentionnez pas la version à jour de l’article L. 1155-2 du code du travail, qui a été modifié par la loi du 6 août 2012. Le premier alinéa dispose que « sont punis d’un an d’emprisonnement et d’une amende de 3 750 € les faits de discriminations commis à la suite d’un harcèlement moral ou sexuel définis aux articles L. 1152-2, L. 1153-2 et L. 1153-3 du présent code ».
Or l’article L. 1152-2 du code précité évoque les personnes ayant témoigné ou relaté des agissements répétés de harcèlement moral. De plus, l’article L. 1153-3 va dans le même sens : « Aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné de faits de harcèlement sexuel ou pour les avoir relatés. »
Dans ces conditions, votre amendement est satisfait, ma chère collègue. C’est pourquoi je vous demande de bien vouloir le retirer.
L'amendement n° 1272 est retiré.
L'amendement n° 1273, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – L’article L. 3121-46 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Les conclusions de cet entretien sont transcrites dans un document signé par les deux parties et conservés pendant trois ans par l’employeur. »
La parole est à Mme Annie David.
Actuellement, le code du travail dispose : « Un entretien annuel individuel est organisé par l’employeur, avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l’année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié. »
Cet entretien est d’autant plus important qu’il s’adresse à des cadres au forfait, pour lesquels le contrôle des heures travaillées est difficile et les recours devant les prud’hommes rares, tant la peur de voir sa carrière arrêtée est réelle.
Or, tant qu’il n’existe pas de documents écrits prouvant qu’il y a eu, ou non, entretien individuel, l’article, ainsi que la sanction associée en cas de non-respect, restent de pure apparence. Ainsi, les entreprises peuvent facilement négliger cette obligation d’entretien annuel individuel. Dans l’état actuel du droit, il appartient à l’inspecteur du travail verbalisateur d’apporter la preuve de la non-tenue de cet entretien, ce qui est impossible.
Cet amendement a donc pour objet d’introduire un alinéa prévoyant qu’un document écrit est réalisé à la suite de l’entretien, qui sera conservé par l’entreprise pendant trois ans, et tenu à disposition des inspecteurs et contrôleurs du travail, en vertu de l’article L. 8113-4 du code du travail.
L’entretien, tel qu’il est défini dans cet amendement, n’est pas une simple formalité administrative. Il s’agit d’une occasion de dialoguer avec le salarié, notamment sur ses conditions de travail et sur l’impact du forfait en jours sur sa vie familiale. Si les employeurs ont intérêt à réaliser un tel entretien, on peut néanmoins s’interroger sur l’opportunité de réaliser obligatoirement une synthèse écrite.
Avec un tel dispositif, nous ne nous trouvons pas dans le cas de figure de l’entretien professionnel biennal institué par la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l'emploi et à la démocratie sociale, qui porte sur les perspectives d’évolution professionnelle du salarié.
Dans ce cadre-là, un bilan des formations réalisées est effectué tous les six ans. Si la personne concernée n’a pas progressé professionnellement ou si ses entretiens n’ont pas eu lieu, l’employeur doit abonder son compte personnel de formation ; dès lors, il est indispensable qu’une trace écrite de chaque entretien soit conservée. Toutefois, la situation du forfait en jours n’est pas comparable.
Par conséquent, la commission spéciale émet un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 85 est adopté.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1274, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 85
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 8112-1 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 8112 -1. – Les inspecteurs du travail et les contrôleurs du travail sont chargés de veiller à l’application des dispositions du présent code, des lois et règlements non codifiés relatifs au régime du travail ainsi que des conventions et accords collectifs de travail, étendus ou non, répondant aux conditions fixées au livre II de la deuxième partie du présent code.
« Ils sont également chargés, concurremment avec les officiers et agents de police judiciaire, de constater les infractions à ces dispositions.
« Si, en application de l’article 3 de la convention internationale n° 81 concernant l’inspection du travail dans l’industrie et le commerce du 11 juillet 1947 de l’Organisation internationale du travail, d’autres fonctions sont confiées aux inspecteurs et contrôleurs du travail, celles-ci ne doivent faire obstacle ni à l’exercice de leurs fonctions principales, ni porter préjudice d’une manière quelconque à l’autorité ou à l’impartialité nécessaires aux inspecteurs dans leurs relations avec les employeurs et les travailleurs. »
La parole est à Mme Évelyne Didier.
Compte tenu du faible respect du droit du travail par les employeurs et de la dégradation importante des conditions d’exercice des missions des inspecteurs et contrôleurs du travail, cet amendement vise à consolider et à accroître leurs attributions et leur indépendance par la modification et l’adjonction d’articles du code du travail.
L’amendement vise à introduire la catégorie des contrôleurs du travail dans l’article L. 8112-1 et l’article L. 8112-2 du code du travail, relatifs aux attributions et pouvoirs des inspecteurs du travail.
Il tend à rétablir la rédaction de l’article L. 8112-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la recodification intervenue, prétendument à droit constant, en 2008 : « Les inspecteurs du travail et les contrôleurs du travail sont chargés de veiller à l’application des dispositions » du code du travail. Ils n’ont donc pas seulement à veiller à l’application des dispositions légales, comme le laissent penser les articles du code dans leur version postérieure à 2008. Par ailleurs, il a pour objet d’élargir leurs attributions et pouvoirs aux conventions et accords collectifs non étendus.
L’amendement vise également à introduire dans la loi, d’une part, certaines dispositions de l’article 3 de la convention n° 81 de l’Organisation internationale du travail, l’OIT, signée par la France, relatif aux fonctions des agents de l’inspection du travail, et, d'autre part, conformément à la Constitution, des dispositions de la convention n° 81 de l’OIT relatives à l’indépendance des agents de l’inspection du travail dans l’exercice de leurs fonctions, ainsi que les principales conditions de service qui en découlent, notamment l’organisation du service en sections territoriales et généralistes.
Enfin, il a pour objet de substituer, en application de ce principe d’indépendance, des mots « le directeur départemental du travail et de l’emploi » ou « l’inspecteur du travail » aux mots « le DIRECCTE » dans toutes les dispositions du code du travail relatives à l’application de la législation du travail, selon des modalités définies par un décret en Conseil d’État.
L'amendement n° 1412, présenté par Mmes Assassi, David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 85
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Au premier alinéa de l’article L. 8112-1 du code du travail, après les mots : « inspecteurs du travail », sont insérés les mots : « et contrôleurs du travail ».
II. – L’article L. 8112-5 est abrogé.
La parole est à Mme Annie David.
Au travers de cet amendement, nous souhaitons démontrer qu’il n’existe plus de lien hiérarchique entre les contrôleurs et les inspecteurs du travail, puisque la disparition du corps des contrôleurs du travail s’accompagne, en toute logique, de la suppression du lien hiérarchique entre ces deux professions.
La réforme lancée par Michel Sapin nous a posé problème par le passé, tant sur la question des solutions apportées au manque de moyens de l’inspection du travail que sur les méthodes adoptées par le ministère du travail.
Cette réforme, associée à la modernisation de l’action publique, est en train d’asséner le coup de grâce à l’inspection du travail, après que la révision générale des politiques publiques lancée par Nicolas Sarkozy en 2007 l’a déjà mise en grande difficulté : fusion des services, réduction des corps et des moyens humains, reprise en main de la hiérarchie territoriale. L’ensemble de l’inspection du travail est attaqué, son indépendance et son activité sont aujourd’hui menacées !
Certes, nous avons bien compris que 540 des 3 500 contrôleurs du travail présents sur le territoire seront promus inspecteurs, ce qui provoque de fait la disparition du lien hiérarchique qui existait auparavant entre inspecteurs et contrôleurs. Toutefois, ce sont désormais les directeurs territoriaux qui encadrent ces personnels et le contrôle d’opportunité devient un contrôle planifié. L’indépendance de l’inspection du travail disparaît ainsi peu à peu.
Il nous semblait pourtant, monsieur le ministre, que nous étions d’accord sur le constat : d’une part, l’existence d’une inspection du travail indépendante est nécessaire ; d’autre part, l’exercice de ses missions appelle des moyens budgétaires.
En réalité, le coup porté aux possibilités d’action de cette institution sera la seule chose qu’il restera de la réforme que vous proposez. C’est la raison pour laquelle nous vous demandons de placer les contrôleurs et les inspecteurs du travail sur un pied d’égalité dans le cadre du code du travail.
L'amendement n° 1277, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 85
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après le premier alinéa de l’article L. 8112-1 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Ils agissent dans l’intérêt exclusif des salariés. Leur indépendance est garantie dans l’exercice de leurs missions. »
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
L’amendement vise à réaffirmer que les inspecteurs du travail ne doivent pas être des agents de police, notamment en matière de politique d’immigration.
Leur mission est pourtant claire : ils sont chargés de contrôler les conditions de travail des salariés, non d’exercer d’une mission de contrôle des étrangers qui est fondamentalement contraire à leur mission de protection des salariés. Contrairement à la protection des ouvriers, cette dérive a été dénoncée par l’OIT après la saisine du Syndicat national unifié du travail et de l’emploi.
Nous devons saisir l’occasion d’inscrire enfin dans la loi que les agents de l’inspection du travail ne sont pas chargés de la politique de l’immigration et nous mettre ainsi en conformité avec la convention n° 81 de l’OIT, qui définit les rôles de l’inspection du travail dans l’industrie et le commerce et à laquelle la France ne peut déroger.
Ce principe d’indépendance, consacré par le Conseil d’État, doit être introduit dans la loi, comme il l’a été dans cette convention internationale. Il s’agit d’un principe de droit que l’on ne peut pas accepter d’enfreindre.
L’amendement n° 1274 nous semble inutile, et cela pour deux raisons.
D’une part, la jurisprudence a reconnu de manière constante que les droits et missions confiés aux inspecteurs du travail par cet article du code du travail s’appliquaient aussi aux contrôleurs du travail.
D’autre part, les conventions que la France a ratifiées, comme celle de l’OIT, ont une valeur supérieure à la loi. Il n’est donc pas nécessaire que la loi s’y réfère.
La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur l'amendement n° 1274.
L’amendement n° 1412 a pour objet d’aligner les pouvoirs des contrôleurs du travail sur ceux des inspecteurs. Or ses dispositions méconnaissent la logique même du plan de transformation des contrôleurs en inspecteurs du travail. Tous les contrôleurs en section ont vocation à devenir inspecteurs grâce à un concours spécifique ouvert pendant sept ans, ce qui implique que les contrôleurs en section doivent cohabiter avec les inspecteurs du travail pendant encore trois ou quatre ans.
En définitive, il a semblé à la commission spéciale qu’il était trop tôt pour aligner en totalité les pouvoirs des contrôleurs du travail sur ceux des inspecteurs, car ces derniers ont encore des pouvoirs propres, comme la délivrance d’autorisations de licenciement de salariés protégés.
La commission spéciale a donc émis un avis défavorable sur l'amendement n° 1272.
J’en viens à l’amendement n° 1277. Sa première partie vise à obliger les inspecteurs du travail à agir exclusivement dans l’intérêt des salariés. Or l’obligation des agents de contrôle est de faire respecter les normes en matière de droit de travail, qui sont, par construction, protectrices des salariés, ce qui n’est pas tout à fait la même chose.
Par ailleurs, l’agent de contrôle doit être neutre. Comme le rappelle régulièrement le ministre du travail, il a également une mission de conseil aux entreprises.
Dans l’objet de cet amendement, il est, en outre, fait allusion à la lutte contre le travail illégal. Disons les choses clairement : la lutte contre ce fléau doit être l’une des priorités des agents de contrôle, car il mine les fondements mêmes de notre modèle social et économique ! Les travailleurs sans-papiers sont les premières victimes du travail dissimulé, et le code du travail leur reconnaît des droits qui, il est vrai, ne sont pas toujours défendus.
La seconde partie de l’amendement tend à rappeler l’indépendance des inspecteurs. Elle est cependant inutile, car la convention n° 81 de l’OIT, qui reconnaît ce principe, s’applique directement, en l’absence de tout texte.
La commission spéciale demande donc le retrait de cet amendement.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1278, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 85
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La section 2 du chapitre II du titre Ier du livre Ier de la huitième partie du code du travail est complétée par un article L. 8112-… ainsi rédigé :
« Art. L. 8112 -… L’inspecteur du travail ou le contrôleur du travail peut exiger communication des différents éléments objectifs qui concourent à la détermination des rémunérations dans l’entreprise, notamment des normes, catégories, critères et bases de calcul mentionnés à l’article L. 3221-6.
« Il peut procéder à une enquête contradictoire au cours de laquelle l’employeur et les salariés intéressés peuvent se faire assister d’une personne de leur choix. »
La parole est à M. Michel Le Scouarnec.
Nous souhaitons insérer un article additionnel conférant de nouvelles possibilités et de nouveaux moyens aux inspecteurs du travail.
Notre amendement tend ainsi à créer dans le code du travail une disposition relative au droit d’information des inspecteurs du travail. En cas de contrôle, l’inspecteur doit en effet pouvoir disposer de toutes les informations relatives à a politique de rémunération de l’entreprise, notamment les normes, catégories, critères et bases de calcul mentionnés à l’article L. 3221-6 du code du travail.
Nous prévoyons, en outre, que l’inspecteur puisse mener une enquête contradictoire s’il pense que des irrégularités ont cours. Lors de cette enquête, employeur et employé peuvent être assistés par une personne de leur choix. Cette disposition assure le bon exercice des missions de l’inspection du travail, tout en reconnaissant et en fixant le droit des parties en présence d’une assistance juridique.
Cet amendement est satisfait par le droit en vigueur. En effet, l’article L. 8113-4 du code du travail prévoit déjà qu’au cours de leurs visites, les inspecteurs et contrôleurs du travail puissent se faire présenter l’ensemble des livres, registres et documents rendus obligatoires par le même code ou par une disposition légale relative au régime du travail.
La commission spéciale demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
L'amendement n° 1278 est retiré.
L'amendement n° 1275, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 85
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au début du chapitre Ier du titre II du livre Ier de la huitième partie du code du travail, sont insérés des articles L. 8121-1 et L. 8121-2 ainsi rédigés :
« Art. L. 8121 -1. – En application de l’article 34 de la Constitution et des articles 6, 10 et 11 de la convention internationale n° 81 concernant l’inspection du travail dans l’industrie et le commerce du 11 juillet 1947 de l’Organisation internationale du travail, l’indépendance de l’inspection du travail est un des principes fondamentaux du droit du travail.
« À cet effet, le personnel de l’inspection est composé de fonctionnaires publics dont le statut et les conditions de service leur assurent la stabilité dans leur emploi et les rendent indépendants de tout changement de Gouvernement et de toute influence extérieure indue.
« Art. L. 8121 -2. – Les conditions de service mentionnées à l’article L. 8121-1 comprennent notamment :
« – l’organisation du service en sections d’inspections territoriales et généralistes ;
« – un nombre suffisant d’agents de contrôle, des bureaux appropriés aux besoins du service et accessibles à tous intéressés, les facilités de transport nécessaires à l’exercice de leurs fonctions. »
La parole est à Mme Christine Prunaud.
Cet amendement est satisfait et peu normatif. Sa première partie est inutile, car – je le répète – les principes définis par la Convention n° 81 de l’OIT, comme l’indépendance des inspecteurs du travail, ont une valeur supralégale. Aucune loi ne peut en effet déroger à un traité. La seconde partie de l’amendement est, quant à elle, peu normative.
La commission spéciale demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 1271, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
Le Gouvernement remet au Parlement dans les six mois une évaluation des dispositifs de contrôle de l’application du droit du travail.
La parole est à M. Patrick Abate.
L’inspection du travail est soumise à de nombreuses évolutions et fortement affectée par vos projets, si l’on en juge par le transfert de certaines prérogatives aux autorités administratives et aux juges. La DIRECCTE aurait aussi un certain nombre de pouvoirs, en particulier en matière de sanction.
Qu’on le veuille ou non, le Gouvernement a remis en cause le code du travail. Désormais, on peut craindre également une remise en cause du pouvoir d’en contrôler l’application.
En tout état de cause, notre préoccupation nous semble assez légitime. C’est pourquoi, dans ce contexte et compte tenu du fait que vous procédez par voie d’ordonnance, il nous apparaît important que les parlementaires soient informés.
Un rapport comme celui que nous demandons au travers de cet amendement permettrait d’avoir une vision claire des dispositifs en place en matière de contrôle de l’application du droit du travail, mais aussi des besoins qui restent à couvrir. En la matière, il nous semble que les besoins sont principalement humains et matériels. Je souhaite à cet égard rappeler que permettre aux contrôleurs de devenir inspecteurs du travail n’augmente pas le nombre de personnes capables d’agir sur le terrain pour faire valoir les droits des salariés.
La commission spéciale ayant décidé de s’opposer à toutes les demandes de rapport, quel que soit leur intérêt, elle sollicite le retrait de cet amendement et appellera le Sénat à le rejeter s’il est maintenu.
Il s’agit, mes chers collègues, d’une position de principe : nous refuserons tous les rapports, sur quelques travées qu’on les réclame. Loin de moi l’idée de brider les débats, mais à bon entendeur salut…
L'amendement n'est pas adopté.
Le code du travail est ainsi modifié :
1° L’article L. 2316-1 est ainsi modifié :
a) Les mots : « ou à l’exercice régulier de leurs fonctions » sont supprimés ;
a bis (nouveau)) Les mots : « d’un emprisonnement d’un an et » sont supprimés ;
b) À la fin, le montant : « 3 750 euros » est remplacé par le montant : « 15 000 € » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le fait de porter ou de tenter de porter atteinte à l’exercice régulier de leurs fonctions est puni d’une amende de 7 500 €. » ;
2° Les articles L. 2328-1, L. 2346-1, L. 2355-1, L. 2365-1 et L. 2375-1 sont ainsi modifiés :
a) Les mots : «, soit à leur fonctionnement régulier » sont supprimés ;
a bis (nouveau)) Les mots : « d’un emprisonnement d’un an et » sont supprimés ;
b) À la fin, le montant : « 3 750 euros » est remplacé par le montant : « 15 000 € » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le fait d’apporter une entrave à leur fonctionnement régulier est puni d’une amende de 7 500 €. » ;
3° À l’article L. 2328-2, les mots : « d’un emprisonnement d’un an et » sont supprimés et, à la fin, le montant : « 3 750 euros » est remplacé par le montant : « 7 500 € » ;
4° L’article L. 2335-1 est ainsi modifié :
a) La première occurrence du mot : « soit » est supprimée ;
b) Les mots : «, soit au fonctionnement régulier de ce comité, » sont supprimés ;
b bis (nouveau)) Les mots : « d’un emprisonnement d’un an et » sont supprimés ;
c) À la fin, le montant : « 3 750 euros » est remplacé par le montant : « 15 000 € » ;
d) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le fait d’apporter une entrave au fonctionnement régulier de ce comité est puni d’une amende de 7 500 €. » ;
5° L’article L. 4742-1 est ainsi modifié :
a) Les mots : «, soit au fonctionnement régulier » sont supprimés ;
a bis (nouveau)) Les mots : « d’un emprisonnement d’un an et » sont supprimés ;
b) À la fin, le montant : « 3 750 euros » est remplacé par le montant : « 15 000 € » ;
c) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le fait de porter atteinte au fonctionnement régulier du comité est puni d’une amende de 7 500 €. »
Cet article, que le Gouvernement a introduit à l’Assemblée nationale par voie d’amendement et que la commission spéciale du Sénat a modifié, supprime la peine d’emprisonnement encourue par toute personne qui porte ou tente de porter atteinte à l’exercice par les instances représentatives du personnel de leurs prérogatives. Ainsi, en s’acquittant d’amendes allant de 7 500 euros à 15 000 euros, selon le type d’entrave, les employeurs pourront désormais en toute liberté empêcher les représentants du personnel d’exercer leurs prérogatives.
Le Syndicat national des pilotes de ligne, l’une des nombreuses organisations syndicales qui redoutent cette mesure, estime que, serait-elle adoptée, « les tentations de réforme sans consultation des institutions représentatives du personnel seraient fortes, pour ne pas dire privilégiées, au détriment du dialogue social entre partenaires sociaux. »
Sans doute le délit d’entrave est-il peu utilisé, mais il possède une valeur dissuasive non négligeable, qui constitue un garde-fou réel contre les abus de certains dirigeants. D’ailleurs, en mai 2010, deux dirigeants de l’usine Molex ont été condamnés sur ce fondement par le tribunal correctionnel de Toulouse ; six mois de prison avec sursis ont été prononcés à leur encontre, pour défaut d’information des représentants du personnel avant l’annonce de la fermeture de l’usine.
Une telle condamnation, coûteuse en termes d’image, est en quelque sorte une épée de Damoclès, qui pèse sur les dirigeants de manière beaucoup plus sensible qu’une simple amende financière. Du reste, c’est précisément parce que les peines encourues sont suffisamment dissuasives que le délit d’entrave est peu sanctionné. Nul doute que celui-ci deviendra beaucoup plus fréquent si les employeurs n’encourent plus qu’une amende. Nous savons bien que certaines entreprises préfèrent parfois payer plutôt que de se conformer à leurs obligations légales : l’exemple de l’obligation d’emploi de travailleurs handicapés est éloquent en la matière.
De plus, la disposition proposée s’inscrit dans le cadre de la réforme du dialogue social entreprise par le Gouvernement, qui a transmis un avant-projet de loi aux partenaires sociaux le 3 avril dernier.
Comment envisager cette réforme dans de bonnes conditions quand on commence par affaiblir les représentants des salariés dans le rapport de force qui les oppose aux représentants des employeurs par la dépénalisation du délit d’entrave ? Cette mesure revient, selon nous, à prendre d’ores et déjà le parti des seconds au détriment des premiers et à prendre de court les partenaires sociaux ; c’est, d’une certaine manière, mépriser le dialogue social avant de le réformer !
Ma conviction que cet article doit être supprimé a été confirmée par une personnalité qui fait autorité dans le domaine du droit du travail : Pierre Joxe, ancien membre du Conseil constitutionnel, qui a récemment beaucoup travaillé sur ces questions. En effet, M. Joxe s’est publiquement alarmé de la mise en cause du délit d’entrave, qui certes est peu utilisé, mais qui joue le rôle d’une épée de Damoclès, ainsi que Mme Assassi l’a expliqué.
Je vous rappelle que la gauche s’est toujours opposée au discours de M. Sarkozy sur la dépénalisation des peines encourues par les patrons, accusées de faire peur aux patrons étrangers ; nous considérions qu’elle fragiliserait notre modèle social et serait source de grandes injustices pour tous les patrons qui respectent la loi et le code du travail.
Mes chers collègues, il n’y a aucune raison que les peines encourues n’aient pas la même gravité, « selon que vous serez puissant ou misérable » !
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 78 est présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 954 rectifié est présenté par MM. Collombat et Bertrand et Mme Malherbe.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 78.
Je ne répéterai pas les arguments que j’ai présentés il y a quelques instants ni ceux que vient d’exposer Mme Marie-Noëlle Lienemann et auxquels je souscris tout à fait.
Je me contenterai de poser une question : est-il si choquant qu’un patron qui fait entrave aux lois d’ordre public social en matière d’instauration et de fonctionnement des institutions représentatives du personnel soit punissable d’une peine de prison ?
Mes chers collègues, je vous rappelle que le caractère fondamental de ces institutions est consacré sur le plan constitutionnel. Ainsi, l’alinéa 8 du préambule de la Constitution de 1946, auquel la Constitution de 1958 se réfère, énonce que « tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail, ainsi qu’à la gestion des entreprises ».
Si les juges, en pratique, n’ont jamais prononcé de peine de prison ferme pour délit d’entrave, il est utile que la menace demeure inscrite dans le code du travail. J’ai parlé des deux cadres d’un groupe américain qui dirigeaient l’usine Molex et qui, en mai 2010, ont été condamnés à six mois de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Toulouse.
L’idée que le délit d’entrave serait un frein pour les investisseurs étrangers est, selon nous, un argument fallacieux, qui cache mal la volonté d’en finir avec le droit pour les travailleurs de s’organiser et de se défendre !
L’amendement n° 954 rectifié n’est pas soutenu.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement n° 78 ?
L’article 85 bis, introduit dans de projet de loi par l’Assemblée nationale sur l’initiative du Gouvernement et modifié par la commission spéciale, modifie la définition du délit d’entrave relatif aux institutions représentatives du personnel. Dans sa rédaction actuelle, il prévoit que toute personne qui porte ou tente de porter atteinte à l’exercice régulier de ses fonctions par l’une de ces institutions s’exposera à une amende doublée, mais n’encourra plus une peine d’emprisonnement d’un an.
Je vous signale que, lors du deuxième conseil stratégique de l’attractivité, organisé le 19 octobre 2014, le Président de la République a déclaré que « les peines pénales associées au délit d’entrave, qui parfois même pouvaient être des peines de prison, qui n’étaient bien sûr jamais prononcées, mais qui néanmoins pouvaient inquiéter, seront remplacées par des sanctions financières, afin de donner davantage confiance aux investisseurs étrangers ». Ce n’est pas moi qui le dis, mais le chef de l’État !
La commission spéciale a souhaité aller plus loin que l’Assemblée nationale : nous avons maintenu la qualification de délit, mais supprimé la peine d’emprisonnement d’un an dont était passible le délit d’entrave à la constitution d’une institution représentative du personnel ; en contrepartie, nous avons porté de 7 500 euros à 15 000 euros l’amende correspondant à ce délit, qui est de 3 750 euros en vertu du droit actuel.
La commission spéciale maintient sa position et invite le Sénat à rejeter l’amendement n° 78.
L'amendement n'est pas adopté.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1614, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 4, 10, 18 et 24
Supprimer ces alinéas.
II. – Alinéas 5, 11, 19 et 25
Remplacer le montant :
par le montant :
La parole est à M. le ministre.
L'amendement n° 484, présenté par M. Desessard et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :
I. – Alinéas 4 et 10
Supprimer ces alinéas.
II. - Alinéa 14
Supprimer les mots :
les mots : « d’un emprisonnement d’un an et » sont supprimés et, à la fin,
III. - Alinéas 18 et 24
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Joël Labbé.
L’article 85 bis, introduit dans le projet de loi à l’Assemblée nationale, dépénalise le délit d’entrave au fonctionnement des institutions représentatives du personnel.
En transformant un délit en simple contravention, on adresse un très mauvais signal: ne pas respecter les convocations, mal informer les salariés, empêcher le bon fonctionnement des comités d’entreprise, tout cela, au fond, ne serait pas si grave, puisque l’on ne risque qu’une amende, fût-elle doublée par le présent texte. Aussi bien, empêcher la constitution d’un comité d’hygiène et de sécurité ou d’un comité d’entreprise ou s’opposer à la désignation d’un délégué syndical deviendrait possible au prix de 7 500 euros à 15 000 euros.
Mes chers collègues, soyons clairs : même si l’amende avait été portée à 100 000 euros, nous n’aurions pas voté cet article. Nous croyons en la dissuasion de la sanction pénale, que notre amendement tend à rétablir.
Monsieur Labbé, nous n’avons pas modifié la qualification de délit avec inscription au casier judiciaire. Nous avons simplement répondu de façon très claire au souhait du Président de la République en supprimant les peines d’emprisonnement.
Je le répète, la commission spéciale maintient sa position. Elle est donc défavorable aux deux amendements.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n'est pas adopté.
L'amendement n° 628, présenté par MM. Vaugrenard et Guillaume, Mmes Bricq, Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Alinéas 5, 11, 19 et 25
Après le montant :
insérer les mots :
et d’une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci pendant une durée de cinq ans
La parole est à M. Yannick Vaugrenard.
Il est extrêmement rare qu’une peine d’emprisonnement soit prononcée pour délit d’entrave ; à vrai dire, cela ne se produit pratiquement jamais.
De fait, cette peine paraît inadaptée et disproportionnée par rapport à l’acte commis, même s’il est grave. De plus, quand bien même l’employeur qui s’oppose à la constitution d’une institution représentative du personnel agirait de manière incontestablement intentionnelle, son emprisonnement risquerait d’avoir des effets négatifs parfois plus graves encore sur le fonctionnement de l’entreprise : outre que cette dernière pâtirait de l’absence durable de son dirigeant, son image ne manquerait pas de souffrir de l’inévitable bruit médiatique. De là l’inapplication de la peine d’emprisonnement.
Il n’en reste pas moins inacceptable que les institutions représentatives du personnel ne puissent pas être mises en place partout, non seulement parce que la loi serait bafouée, mais surtout parce que les salariés en subiraient les conséquences ; ainsi, l’absence de comité d’hygiène et de sécurité entraîne une appréciation défaillante des conditions de travail et des risques que courent les salariés, donc l’entreprise tout entière.
Or je pense qu’une sanction pécuniaire modeste risque d’être sans effet sur certains employeurs particulièrement hostiles au dialogue social. Par ailleurs, la réforme du dialogue social qui sera bientôt présentée opérera une simplification qui devrait retirer nombre d’arguments à ceux qui invoquent le nombre de réunions et la perte de temps ; refuser les institutions représentatives relèvera alors de la pure hostilité de principe.
Il nous faut trouver une sanction adaptée et suffisamment dissuasive pour éviter qu’un employeur ne fasse entrave à la constitution des institutions représentatives du personnel, sans pour autant nuire au fonctionnement de l’entreprise.
Je propose que, en plus de devoir s’acquitter d’une amende de 15 000 euros, ainsi que l’a prévu la commission spéciale, l’employeur s’expose à l’interdiction de diriger, de gérer, d’administrer ou de contrôler directement ou indirectement une entreprise pendant cinq ans. Un employeur frappé par cette interdiction serait remplacé à la tête de l’entreprise qu’il dirigeait, qui conserverait donc sa viabilité. Cette peine d’interdiction me paraît comporter une portée dissuasive que l’amende seule ne possède pas suffisamment.
La commission spéciale a débattu de la proposition défendue par M. Vaugrenard et par nos autres collègues du groupe socialiste de mettre en place des peines complémentaires de la peine d’amende, compte tenu de la suppression de la peine d’emprisonnement.
Le présent amendement tend à réprimer le délit d’entrave à la constitution d’une institution représentative du personnel non seulement d’une amende de 15 000 euros, mais également de l’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler une entreprise pendant cinq ans. Sa rédaction soulève plusieurs problèmes : elle ne prévoit pas explicitement que cette nouvelle peine est complémentaire de l’amende et son objet est très large, puisque l’amendement vise non seulement les récidives, pour lesquelles la commission spéciale considère qu’un renforcement des sanctions pourrait éventuellement être envisagé, mais également les premières condamnations.
Pour toutes ces raisons, la commission spéciale a émis un avis défavorable sur cet amendement.
Il me paraît nécessaire de rappeler quelques distinctions sur ce sujet.
M. Vaugrenard propose que les employeurs reconnus coupables de délit d’entrave soient condamnés, non seulement à une amende, mais aussi à une peine complémentaire importante.
Tout d'abord – vous noterez que c’était l’objet de l’amendement précédent –, le Gouvernement souhaite rétablir le texte initial de l’article, qui prévoit de supprimer la peine d’emprisonnement d’un an uniquement pour l’entrave au fonctionnement des institutions représentatives du personnel et d’étendre le doublement de l’amende à 7 500 euros – il ne s’agit donc pas de reprendre la totalité du spectre des sanctions.
L’objectif du Gouvernement est de revenir sur une sanction quasiment inappliquée, afin de donner davantage confiance aux investisseurs étrangers. Cette mesure n’est pas une lubie ! Elle a été évaluée et elle résulte d’un travail, qui a été mené en particulier au sein du Conseil stratégique de l’attractivité et qui a débouché sur l’annonce du Président de la République.
Pour autant, il ne me semble pas souhaitable, dans l’intérêt même des salariés de l’entreprise, que soit prononcée une peine complémentaire d’interdiction d’exercice de cinq ans pour l’employeur, car cela risquerait de conduire à la liquidation de l’entreprise.
La réforme du délit d’entrave aux institutions représentatives du personnel obéit à une logique qui prend en compte la dimension intentionnelle du délit. En effet, le Gouvernement a souhaité, et cela correspond à l’objectif même de la réforme, conserver la distinction entre ce qui est intentionnel et ce qui ne l’est pas. Ainsi, la peine relative au délit d’entrave n’est maintenue que si l’acte est intentionnel et la peine d’emprisonnement n’a été supprimée que dans les cas d’actes non intentionnels. La commission spéciale, à l’inverse, n’a pas maintenu cette distinction.
Par conséquent, rétablir l’interdiction, même limitée à cinq ans d’exercice, dans le cas d’un acte non intentionnel, poserait un problème et fragiliserait l’entreprise.
À l’inverse, la peine d’emprisonnement d’un an pour l’entrave à la constitution d’une IRP, qui suppose un comportement intentionnel, est maintenue dans le projet de loi initial du Gouvernement que nous souhaitons justement rétablir. La peine d’emprisonnement n’est donc supprimée que lorsque l’entrave au fonctionnement résulte d’un oubli ou d’un simple défaut d’appréciation.
Je considère que cette distinction est extrêmement importante, et elle vient tempérer les éléments critiques, qui ont été énoncés, en particulier par Mme Lienemann. Ses arguments seraient compréhensibles si nous avions supprimé tout ce qui concerne le délit d’entrave. Néanmoins, ce n’est pas l’intention du Gouvernement et ce n’est pas ce que nous avons retenu.
En revanche, la suppression totale d’emprisonnement d’un an, assortie du quadruplement du montant de l’amende, qui passerait ainsi de 3 750 euros à 15 000 euros, pour les cas d’entrave à la constitution des IRP, me paraît contraire à la logique du texte proposé. Là encore, nous devrons apporter quelques éléments de correction.
Je souhaitais rappeler ces éléments de distinction, qui sont importants pour le Gouvernement. À la lumière de mes explications, et compte tenu du fait que je m’engage, y compris dans les discussions que nous aurons sans doute avec la commission spéciale ou à l’Assemblée nationale, à essayer de réintroduire cette distinction, je sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
En effet, cet amendement vise à restaurer une peine d’emprisonnement qui ne peut être maintenue que dans le cas d’un acte intentionnel ; dans le cas contraire, il est préférable de s’en tenir à une simple amende.
Je reste circonspect. En effet, les raisons qui poussent aujourd'hui les juges à ne pas prononcer cette peine subsisteront demain.
Je suis persuadé que les juges sont plus disposés à prononcer une peine d’interdiction d’exercice qu’une peine d’emprisonnement pour un dirigeant d’entreprise. Par ailleurs, je ne vois pas de quelle manière il est possible de savoir si un tel acte est intentionnel ou non ; cela me paraît extrêmement difficile et complexe. Il me semble, au contraire, plus efficace d’afficher de manière claire et transparente les risques encourus.
Par conséquent, je maintiens mon amendement, monsieur le président.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 85 bis est adopté.
L'amendement n° 1276, présenté par M. Vergès, Mme Assassi, M. Bosino et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Après l’article 85 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le troisième alinéa de l’article L. 2222-1 du code de travail est supprimé.
La parole est à Mme Annie David.
Cet amendement ayant été déposé par de notre collègue Paul Vergès, je tenais absolument à le défendre. Il vise à réparer, autant que faire se peut, l’une des injustices dont l’outre-mer est victime. En l’occurrence, il s'agit des droits des salariés ultramarins, et cette injustice existe depuis 1994.
À la Réunion, par exemple, on constate une détérioration du climat social. De manière unanime, depuis plus d’un an, les syndicats réunionnais dénoncent ces grandes entreprises qui ont réalisé d’importants bénéfices en se gardant bien de réinvestir une partie de ces profits dans l’économie de l’île. C’est le cas, par exemple, dans le secteur automobile.
Depuis 2013, les organisations syndicales ont noté l’accélération des licenciements de travailleurs. Ces licenciements s’opèrent par groupes de neuf salariés par mois. Pourquoi par groupes de neuf ? Tout simplement parce que les entreprises ne sont pas tenues alors de respecter des procédures de licenciement et, surtout, n’ont pas l’obligation de présenter un plan de sauvegarde de l’emploi.
En outre, il convient d’ajouter les conséquences de la loi du 25 juillet 1994, dite « loi Perben ». Je ferai un bref rappel historique : en 1994, les SMIC des outre-mer étaient inférieurs au SMIC métropolitain. Un premier rapprochement s’opère en 1994. En 1995, c’est la deuxième phase. L’alignement complet du SMIC des départements d’outre-mer sur le niveau métropolitain ne sera effectif qu’au 1er janvier 1996, c’est-à-dire cinquante ans après la loi de 1946, dite « de départementalisation ». Rappelons aussi que les compléments coloniaux, quant à eux, ont été appliqués dès 1947. La décision relevait, là aussi, de l’État.
Cependant, revenons à l’article 16 de la loi Perben, aux termes duquel : « Les conventions et accords collectifs de travail, dont le champ d’application est national, précisent si celui-ci comprend les travailleurs d’outre-mer ».
Depuis cette date, les outre-mer sont donc exclus du champ d’application, sauf spécification. L’article 16 de la loi Perben a été codifié dans le code du travail, à l’article L. 2222-1, notamment à l’alinéa 3. En effet, celui-ci indique que « les conventions ou accords, dont le champ d’application est national, précisent si celui-ci comprend les départements d’outre-mer, Saint-Barthélemy, Saint-Martin ou Saint-Pierre-et-Miquelon ».
L’absence d’application de ces conventions collectives nationales dans les outre-mer a des conséquences sur les conditions d’emploi, sur l’accès à la formation professionnelle, sur les garanties sociales, notamment en ce qui concerne les salaires minimums des branches professionnelles.
En clair, les outre-mer sont discriminés. Le maintien de l’alinéa 3 de l’article L. 2222-1 du code du travail est donc une réelle atteinte à l’égalité de traitement des travailleurs ultramarins par rapport à leurs homologues de France métropolitaine. C’est la raison pour laquelle, mes chers collègues, nous vous demandons de le supprimer.
Les dispositions posent de cet amendement des difficultés juridiques importantes.
Tout d’abord, s’il était adopté, on ne sait pas clairement quels principes s’appliqueraient, celui de l’application automatique à ces territoires ultramarins des conventions et accords collectifs de travail ou celui de la spécialisation. Il aurait été nécessaire de préciser ce point essentiel dans la rédaction de l’amendement, même si l’on devine l’intention de ses auteurs.
En outre, cet amendement s’applique également aux collectivités d’outre-mer mentionnées à l’article 74 de la Constitution, comme Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Saint-Pierre-et-Miquelon, qui sont régies par un statut particulier défini par une loi organique. Je ne suis pas certaine que l’on puisse traiter de la même manière ces collectivités et les DOM.
Enfin, il aurait fallu une étude d’impact pour mesurer les enjeux d’un tel amendement, dans la mesure où ses dispositions risquent d’être une source de complexité pour les collectivités ultramarines, puisqu’elles bouleverseraient des règles établies depuis plus de vingt ans.
La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Madame David, je comprends le problème que vous soulevez et vous avez raison d’insister sur ce point.
En effet, la loi prévoit la mention expresse de l’application des conventions collectives nationales pour les départements d’outre-mer, Saint-Barthélemy, Saint-Martin ou Saint-Pierre-et-Miquelon. Celles-ci peuvent comporter des dispositions qui ne sont pas toujours applicables en l’état aux territoires ultramarins, compte tenu de leur spécificité.
Loin de constituer une discrimination, cette disposition permet de garantir que seuls les textes qui ont été négociés en tenant compte des spécificités de ces territoires seront applicables. Par conséquent, les mêmes règles ne s’appliquent pas partout, et il est nécessaire de tenir compte du contexte.
La couverture conventionnelle de l’outre-mer est un enjeu fort, dont le Gouvernement est pleinement conscient. Mon collègue François Rebsamen, en particulier, s’est engagé à mettre à disposition des partenaires sociaux, notamment ultramarins, une information en temps réel sur l’application des conventions étendues dans les départements d’outre-mer. Je renouvelle l’engagement du Gouvernement sur ce point.
L’application automatique visée par cet amendement reviendrait à appliquer des conventions qui n’ont pas pris en compte, dans le cadre de la négociation, les intérêts des territoires ultramarins. Néanmoins, je réaffirme qu’il s’agit bien d’une préoccupation du Gouvernement, et je pense que cela correspond à l’objet de cet amendement et au souhait de M. Vergès. Mes collègues George Pau-Langevin et François Rebsamen, en particulier, ont en tête cette problématique et travaillent en ce sens.
Le Gouvernement demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi il émettrait un avis défavorable.
Monsieur le ministre, cet amendement visait effectivement à rappeler au Gouvernement les engagements pris déjà en 2012 par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault. Lors de la restitution nationale des conférences économiques et sociales des outre-mer, celui-ci avait déclaré devant les élus des outre-mer que « les conditions dans lesquelles une convention collective nationale est applicable dans les départements d’outre-mer doivent être précisées, de façon à éviter les situations où des branches n’ont aucun cadre conventionnel ».
Il avait alors été question d’une mission conjointe du ministère du travail et du ministère des outre-mer. Les élus des outre-mer attendent toujours les conclusions de cette mission et se demandent même si elle a réellement été constituée et si elle a pu commencer à travailler sur ce que le Premier ministre de l’époque avait proposé.
Monsieur le ministre, j’entends votre engagement et je comprends aussi les difficultés juridiques que cette mesure pourrait poser, notamment pour Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon et d’autres territoires concernés également par cet alinéa. Par conséquent, au nom de mon collègue Paul Vergès, je peux retirer cet amendement.
Néanmoins, monsieur le ministre, sachez que les élus d’outre-mer restent attentifs et attendent que des mesures soient prises pour lutter contre ce qu’ils ressentent comme des discriminations. Même si, comme vous l’avez souligné, cet alinéa a été mis en place de façon à prendre en compte les spécificités de ces territoires, en attendant ceux-ci ont plutôt l’impression d’être discriminés. Il serait donc judicieux de voir avec eux comment il vous serait possible d’apporter une réponse à leurs interrogations.
Je retire donc cet amendement, monsieur le président.
Par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande le retrait de l’ordre du jour de demain, jeudi 7 mai, du projet de loi relatif à la réforme de l’asile. Acte est donné de cette communication.
Par ailleurs, mes chers collègues, je voudrais vous donner quelques informations : un peu plus de deux cents amendements restent à examiner sur le projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Nous allons siéger jusqu’à minuit et demi, car nous devons reprendre nos travaux demain à neuf heures trente, pour l’examen du projet de loi sur l’accord d’association Union européenne-Ukraine et du projet de loi relatif à l’octroi de mer, sur lequel trente-cinq amendements ont été déposés. Nous siégerions jusqu’à treize heures trente et si nous n’avions pas terminé l’examen de ce texte, nous le reprendrions après les questions cribles thématiques sur la forêt française.
Nous reprendrions donc vers seize heures trente ou dix-sept heures le projet de loi relatif à la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, jusqu’à minuit.
À titre exceptionnel, les auteurs d’amendements pourront demander que l’exposé des motifs de leurs amendements soit publié au Journal officiel, sans qu’ils aient à le lire in extenso en séance.
Il n’y a pas d’observation ?...
Il en est ainsi décidé.
En conséquence, l’ordre du jour du jeudi 7 mai s’établit comme suit :
Jeudi 7 mai
À 9 heures 30 :
- Deux conventions internationales en forme simplifiée ;
- Projet de loi autorisant la ratification de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et l’Ukraine, d’autre part ;
- Projet de loi modifiant la loi du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer ;
- Suite du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
De 15 heures à 15 heures 45 :
- Questions cribles thématiques sur la forêt française.
À 15 heures 45 et le soir :
- Suite de l’ordre du jour du matin.
À titre d’hypothèse souhaitée, et sous réserve de la lettre de M. Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement, notre ordre du jour du lundi 11 mai pourrait s’établir comme suit :
À 10 heures :
- Suite du projet de loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
À 14 heures 30, le soir et la nuit :
- Suite de l’ordre du jour du matin ;
- Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, relatif à la réforme de l’asile.
Nous reprenons la discussion du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques.
Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 86.
(Non modifié)
I. – Avant le dernier alinéa du 1 du I de l’article 155 B du code général des impôts, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Le bénéfice du régime d’exonération est conservé en cas de changement de fonctions, pendant la durée définie au sixième alinéa du présent 1, au sein de l’entreprise établie en France mentionnée au premier alinéa ou au sein d’une autre entreprise établie en France appartenant au même groupe. Pour l’application de ces dispositions, le groupe s’entend de l’ensemble formé par une entreprise établie en France ou hors de France et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-3 du code de commerce. »
II. – Le I s’applique aux changements de fonctions intervenus à compter de la publication de la présente loi.
Avec l’article 86, nous abordons la question des nouveaux privilèges fiscaux accordés aux impatriés.
Dans le contexte professionnel, l’impatriation consiste pour une entreprise à faire venir des collaborateurs étrangers en France pour répondre à un besoin de compétence et de main-d’œuvre et souvent à une recherche de maîtrise des coûts.
L’État français a souhaité depuis plusieurs années rendre attractive l’impatriation des cadres dirigeants. L’article 121 de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie modifie et étend le régime fiscal de faveur des impatriés, auxquels sont éligibles certains salariés et mandataires sociaux s’ils n’étaient pas résidents français pendant les cinq années précédant celle de leur prise de fonctions.
S’il y a une certaine légitimité aux suppléments de salaires versés aux ingénieurs, cadres et techniciens expatriés, vu les coûts et sujétions particulières liés auxdites expatriations – famille, conjoint suivant ou ne suivant pas, d’où voyages et sujétions multiples –, les rémunérations exorbitantes de cadres dirigeants de multinationales ont une tout autre fonction.
On peut citer les rémunérations hallucinantes versées aux cadres dirigeants de Sanofi. Voici, à titre d’exemple, quelques « détails » de la future rémunération de M. Olivier Brandicourt : une rémunération fixe annuelle brute de 1, 2 million d’euros, une rémunération variable « cible » de 150 % de la rémunération annuelle fixe et susceptible d’atteindre 250 % de celle-ci, ainsi qu’une rémunération en actions qui consistera en une attribution annuelle de 220 000 options de souscription d’actions et de 45 000 actions de performance.
Il bénéficie également d’une indemnité forfaitaire brute de 2 millions d’euros payable à sa prise de fonction, renouvelable s’il reste dans l’entreprise en 2016, à laquelle s’ajoutera l’attribution de 66 000 actions sous condition de performance.
La multiplication des privilèges et des exemptions fiscales accrédite aussi l’idée que certains sont au-dessus des contraintes nationales, notamment fiscales, pesant sur les gens ordinaires. Si l’on y ajoute les facilités qu’ils ont à placer au moins une partie de leur fortune dans des paradis fiscaux, le tableau est complet.
Lors de l’examen de la loi de modernisation de l’économie de 2008, nous avions refusé, avec les sénateurs du groupe socialiste, l’extension du régime des impatriés. Je voudrais rappeler ici même les propos tenus sur le sujet par notre excellente collègue Nicole Bricq : « Tout d’abord, nos finances publiques ne sont pas très florissantes, c’est le moins qu’on puisse dire. »
Elles ne le sont guère plus aujourd’hui !
« Or, poursuivait notre collègue, le coût des exonérations déjà très favorables accordées aux impatriés est estimé à 40 millions d’euros. Quant à l’effet des nouvelles mesures proposées dans l’article 31, nous ne le connaissons pas, mais il sera forcément supérieur au coût actuel. »
Notre collègue déclarait plus loin : « Par ailleurs, cette mesure, censée être propice à un renforcement de l’attractivité, vise en fait exclusivement à faire droit aux revendications de la place financière de Paris, au moment où sa concurrente, Londres, licencie, compte tenu de la crise financière, crise qui atteint toutes les places mondiales, surtout américaines et européennes, la nôtre y compris. […]. Peut-être le Gouvernement envisage-t-il la création – on y arrivera forcément, au rythme où vont les choses depuis que la droite est au pouvoir – d’un paradis fiscal du type de celui des îles anglo-normandes, où sont domiciliées 130 000 personnes ? »
Je crois que ces propos sont un excellent résumé de la critique que nous formulons à l’encontre de cet article, qui tend une nouvelle fois à étendre le régime des impatriés.
Mes chers collègues, compte tenu de ce que je viens de dire, vous comprendrez que nous nous inscrivions en opposition à cet article, qui aggraverait encore ce phénomène.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 79 est présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.
L'amendement n° 171 rectifié est présenté par Mmes Lienemann et Claireaux et MM. Raoul et Leconte.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Michel Billout, pour présenter l’amendement n° 79.
L’extension du régime des impatriés, qui fait l’objet de cet article, est une niche fiscale de plus.
En effet, il s’agit de prévoir que ce régime puisse également s’appliquer lorsque la personne bénéficiaire change d’emploi à l’intérieur d’une même entreprise ou d’un même groupe, à condition que son poste reste établi en France.
Ce régime a été institué par la précédente majorité, et il faut bien constater que, en raison de sa nature, ce dispositif ne peut concerner que des salariés aisés des entreprises, soit essentiellement des collaborateurs et des cadres dirigeants étrangers, très qualifiés. C’est ainsi que, en 2013, seuls 11 070 contribuables en ont bénéficié, pour un gain moyen par bénéficiaire de 12 195 euros.
Ce régime est très favorable aux impatriés, puisque durant cinq ans, les cadres et dirigeants étrangers embauchés dans une entreprise française voient leur prime d’impatriation, c’est-à-dire le surcroît de rémunérations lié à l’impatriation, ainsi que la part de leur revenu correspondant à leur activité liée à l’étranger exonérée d’impôt sur le revenu.
Certaines valeurs mobilières et cessions de plus-values le sont également. De même que leur sont accordées des dispositions favorables concernant l’impôt de solidarité sur la fortune. Il apparaît clairement que ce régime fiscal est déjà l’un des plus favorables en Europe. Dans de telles conditions, nous estimons que son extension ne se justifie pas pour rendre notre pays plus attractif.
Telle est la principale raison pour laquelle nous vous proposons, avec cet amendement, de supprimer cet article 86.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann, pour présenter l'amendement n° 171 rectifié.
Franchement, accroître encore les avantages fiscaux accordés aux impatriés ne me paraît ni opportun ni indispensable pour l’économie nationale et encore moins au regard de l’état des finances publiques !
Je rappelle que, à sa création en 2008, cette mesure avait été largement contestée sur toutes les travées de la gauche de cet hémicycle.
Je ne reprendrai pas les chiffres cités par notre collègue. Néanmoins, permettez-moi de souligner que, en 2013, cet avantage a bénéficié à 11 070 contribuables, pour un gain moyen par bénéficiaire de 12 195 euros – ce n’est pas une petite somme – et pour un coût global pour le budget de l’État de 135 millions d’euros. Pourtant, il nous est proposé d’élargir encore le champ de cet avantage, en prévoyant qu’il s’applique également lorsque la personne bénéficiaire change d’emploi à l’intérieur de la même entreprise ou du même groupe.
À titre de comparaison, l’Allemagne n’accorde aucun régime favorable à ses impatriés. Le Luxembourg, quant à lui, n’exonère que les dépenses – frais de déménagement, frais scolaires, etc. – liées à l’impatriation. Le régime français est ainsi l’un des plus favorables en Europe, et il n’y a aucune raison de l’améliorer encore.
Je précise également que cet amendement a été cosigné par mes collègues Karine Claireaux, Daniel Raoul et Jean-Yves Leconte. J’appelle résolument votre attention, mes chers collègues, sur ce genre de dispositif ; à cet égard, nous avons déjà eu un débat sur les actions gratuites.
A contrario, je serais curieuse de connaître une mesure fiscale favorable au pouvoir d’achat des salariés présente dans ce projet de loi ; je n’en ai trouvé aucune, si ce n’est un certain nombre de mesures destinées aux cadres à revenus très élevés, singulièrement ceux qui travaillent dans les firmes multinationales. Toutefois, il n'y a rien pour aider les doctorants, les chercheurs ou les cadres de PME !
En conclusion, je trouve cette mesure disproportionnée et inutile. En outre, elle est un mauvais signe adressé à nos concitoyens.
Pour la commission spéciale, le régime des impatriés constitue un atout en matière d’attractivité de la France. L’article 86, que la commission spéciale a adopté sans modification, le corrige afin de lui donner son plein effet dans le cas d’un changement de poste au sein de l’entreprise ou du groupe.
La commission spéciale émet donc un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.
L’article 86 prévoit non pas d’accroître l’avantage fiscal accordé au titre de l’impatriation, mais de le simplifier, dans le cas d’un changement de poste au sein de l’entreprise ou du groupe.
Ce dispositif fonctionne. C’est un élément d’attractivité, qui avait été évoqué dès 2001 dans le rapport de Michel Charzat sur l’attractivité du territoire.
Par ailleurs, madame la sénatrice, je vous invite à regarder les dispositions votées en matière d’épargne salariale pour trouver des options favorables au pouvoir d’achat de l’ensemble des salariés.
Mme Marie-Noëlle Lienemann et Évelyne Didier s’exclament.
Les amendements ne sont pas adoptés.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 1279, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :
« Le bénéfice du régime d’exonération est supprimé pour l’ensemble des entreprises établies en France mentionnée au premier alinéa ou au sein d’une autre entreprise établie en France appartenant au même groupe. Pour l’application de cette disposition, le groupe s’entend de l’ensemble formé par une entreprise établie en France ou hors de France et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-3 du code de commerce. »
La parole est à M. Michel Billout.
Sourires.
Alors que, actuellement, les cadres et dirigeants étrangers embauchés dans une entreprise française et dits « impatriés » bénéficient durant cinq ans d’une exonération d’impôt sur leurs revenus, sur certaines valeurs mobilières et cessions de plus-values, ainsi que de dispositions favorables concernant l’impôt de solidarité sur la fortune, nous estimons qu’il s’agit d’une mesure de justice sociale que de rétablir la mise à contribution de ces impatriés aux hauts revenus qui bénéficient comme les autres des services de l’État et des collectivités territoriales.
D’autres que nous partagent l’objectif que nous visons au travers de cet amendement ; j’en veux pour preuve que Ségolène Royal elle-même, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, avait jugé que la prime de bienvenue de 4 millions d’euros accordée par Sanofi à M. Olivier Brandicourt au titre du régime des impatriés n’était « pas normale du tout ».
L'amendement n° 1768, présenté par Mme Deroche, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Alinéa 2, première phrase
Après les mots :
mentionnée au premier alinéa
insérer les mots :
du présent 1
La parole est à Mme Catherine Deroche, corapporteur, pour défendre cet amendement et pour donner l’avis de la commission sur l’amendement n° 1279.
L’amendement n° 1279 va encore plus loin que les deux amendements précédents : ces derniers tendaient à supprimer l’article 86, qui corrige le régime des impatriés ; l’amendement n° 1279 ne vise rien de moins qu’à supprimer le régime lui-même. La commission spéciale émet donc un avis défavorable.
S’agissant de l’amendement n° 1768, je le retire, monsieur le président.
L'amendement n° 1768 est retiré.
Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 1279 ?
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l’amendement n° 1279.
Je veux rappeler à notre collègue Michel Billout que, lors de l’examen de l’article 64 bis, le groupe socialiste avait défendu un amendement visant les retraites chapeaux, les parachutes dorés, les golden hellos, etc., et visant précisément à empêcher ce qu’il a évoqué au sujet de ce grand groupe français. Malheureusement, nos collègues de la majorité sénatoriale n’ont pas donné suite à notre proposition.
En tout cas, sachez que, à la suite des propos forts justes tenus par Mme la ministre de l’écologie, nous étions passés de la parole aux actes.
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 86 est adopté.
L'amendement n° 751, présenté par MM. Karoutchi, Allizard, G. Bailly, Bas, Bignon, Bonhomme, Bouchet, Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Chasseing, Commeinhes, Cornu et Dassault, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deromedi et di Folco, M. Doligé, Mme Duchêne, M. Dufaut, Mme Duranton, MM. Duvernois, Emorine, Forissier, B. Fournier, Frassa, Genest et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Houel et Houpert, Mmes Hummel et Imbert, MM. Joyandet, Kennel et Laménie, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Lenoir, P. Leroy et Longuet, Mme Lopez, MM. Magras, Malhuret, Mandelli, A. Marc et Mayet, Mmes Mélot et Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Nougein, Pellevat, Perrin, Pierre, Pointereau et Portelli, Mmes Primas et Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Reichardt, Revet, Sido et Trillard, Mme Troendlé et MM. Vaspart, Courtois, Darnaud, P. Dominati, Savin et Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 86
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Hormis les cas de congé de longue maladie, de congé de longue durée ou si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, les agents publics civils et militaires en congé de maladie, ainsi que les salariés dont l'indemnisation du congé de maladie n'est pas assurée par un régime obligatoire de sécurité sociale, ne perçoivent pas leur rémunération au titre des trois premiers jours de ce congé.
La parole est à M. Roger Karoutchi.
En moins de trois minutes, je n’ambitionne pas de faire la démonstration de la nécessité de faire converger les règles applicables dans le secteur privé et le secteur public en matière de jours de carence.
La précédente majorité – le gouvernement Fillon –, afin de tendre vers cette convergence, avait mis en place un délai de carence d’une journée pour les agents publics, pour les rapprocher du système en vigueur depuis longtemps dans l’ensemble secteur privé. En effet, l’ensemble des salariés du secteur privé, en fonction des situations, se voit imposer un délai de carence de trois jours en cas d’arrêt maladie. Dans la loi de finances pour 2014, le Gouvernement a décidé de supprimer ce délai de carence.
Une journée de carence permettait d’économiser 60 millions d’euros, soit pratiquement 200 millions d’euros pour trois jours. En outre, selon la Cour des comptes, qui a été très claire à ce sujet, au-delà du gel du point d’indice dans la fonction publique, il faudrait trouver environ 700 millions d’euros chaque année pour arriver à peu près à l’équilibre pour l’ensemble des agents publics.
Monsieur le ministre, vous qui voulez une loi de croissance, de justice et d’équilibre – vous le clamez sans cesse pour tous les secteurs depuis le début de cet interminable débat –, qu’il s’agisse des professions réglementées, de l’investissement ou de la vie des entreprises, entre autres, comment pouvez-vous permettre une telle différence de traitement entre les salariés du privé et les agents du public ?
Il ne s’agit aucunement de stigmatiser les agents du secteur public, dont je suis moi-même issu. Toutefois, je ne comprends toujours pas, année après année, pourquoi les salariés du privé devraient subir trois jours de carence, tandis que ceux du secteur public en seraient exonérés. Leur style de vie et le nombre de leurs arrêts de travail ne sont pourtant pas si différents.
Pourquoi ne pas décider que tous les salariés de France, qu’ils travaillent dans la fonction publique ou dans le secteur privé, sont soumis au même régime, quitte à leur accorder ultérieurement, en fonction des systèmes et des réseaux, des réassurances internes ? Ou alors, il faudrait supprimer le délai de carence dans le privé, simplement pour en constater les effets. Néanmoins, puisque cette mesure n’est pas d’actualité, nous vous proposons, par cet amendement, d’établir un délai de carence dans le secteur public.
Le sous-amendement n° 1673, présenté par M. Grand, est ainsi libellé :
Amendement n° 751, alinéa 3
Remplacer les mots :
des trois premiers jours
par les mots :
du premier jour
La parole est à M. Jean-Pierre Grand.
L’esprit qui sous-tend ce sous-amendement est un peu différent. Dans le secteur privé, tous les salariés ne restent pas sans rémunération pendant les jours de carence, puisque des conventions collectives, des accords de branche ou d’entreprise ou le contrat de travail peuvent prévoir le maintien du salaire par l’employeur pendant l’arrêt de travail pour maladie. En Alsace-Moselle, tous les employeurs sont tenus de maintenir intégralement le salaire pendant le délai de carence.
Mon sous-amendement vise donc à limiter à une seule journée le délai de carence dans la fonction publique hospitalière, territoriale et d’État.
Comme vient de le dire Jean-Pierre Grand, dans le privé, l’effet du jour de carence peut être annulé par un accord collectif. Ce n’est toutefois pas une règle absolue.
Par conséquent, la commission spéciale émet un avis défavorable sur le sous-amendement n° 1673. En revanche, elle est favorable à l’amendement n° 751, puisque le Sénat avait adopté cette mesure dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015.
Bravo ! sur les travées de l'UMP.
Adopter un régime identique au moins en théorie entre les secteurs public et privé doit être une règle de base. Cette mesure nous semble importante. Ensuite, comme l’ont dit MM. Karoutchi et Jean-Pierre Grand, on pourrait admettre certaines divergences.
Sans jeter l’anathème sur qui que ce soit, je tiens à vous signaler que, du point de vue de l’absentéisme, les effets de la suppression par le gouvernement actuel du jour de carence qui avait été institué par le gouvernement précédent sont incontestables, puisque les chiffres parlent d’eux-mêmes.
Ah ! sur les travées de l'UMP.
Je soulignerai deux points.
Tout d’abord, si l’on examine de près la situation des salariés du privé, on s’aperçoit que les deux tiers d’entre eux sont couverts par des conventions collectives qui prennent en charge les jours de carence. Donc, « en vrai », comme disent les enfants, la situation n’est pas aussi injuste que celle que vous décrivez.
M. Emmanuel Macron, ministre. Vous vous occupez du tiers, moi je m’occupe des deux tiers.
Sourires.
Certes, les chiffres de l’absentéisme ne sont pas bons, et nous devons régler ce problème sans nous voiler la face. Toutefois, ce n’est pas la bonne mesure. De plus, l’argument selon lequel on crée une injustice au détriment du secteur privé n’est pas tout à fait pertinent, en raison des couvertures résultant des conventions collectives dont bénéficient les deux tiers des salariés du privé. C’est pourquoi je ne vous suivrai pas dans cette direction.
Cela étant, un vrai travail de réflexion doit être engagé sur ce sujet de l’absentéisme et du bon fonctionnement de la fonction publique de manière très concrète, peut-être plus en détail.
Je prends votre amendement comme un amendement d’appel.
À cet égard, des initiatives sont conduites en ce moment par des dirigeants publics courageux, notamment à l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, ou AP-HP, pour faire face à des problèmes très concrets.
À mes yeux, c’est plutôt par ce biais que l’on peut traiter des inégalités perçues ou réelles qui peuvent exister entre le secteur public et le secteur privé, plutôt que par des mesures transversales. J’encourage les dirigeants publics à prendre leurs responsabilités, comme le fait Martin Hirsch, afin d’être soutenus par les pouvoirs publics ; pour ma part, je soutiens pleinement ce dernier.
Néanmoins, je ne vous suivrai pas dans cette voie, monsieur Karoutchi, compte tenu de la réalité que j’évoquais voilà un instant. Par conséquent, j’émettrai un avis défavorable sur le sous-amendement n° 1673 et sur l'amendement n° 751.
Vous m’avez offert mon intervention sur un plateau, monsieur le ministre, car je ne voulais pas donner le sentiment d’utiliser un droit de tirage.
J’ai lu récemment beaucoup de choses négatives à ce sujet. Des gens importants qui se présentent à toutes les élections ont parlé de la fonction publique avec peu d’égard.
M. Roger Karoutchi rit.
Je souhaitais que nous mettions un peu d’ordre dans ce domaine, mais il va falloir approfondir la réflexion, et je rejoins en cela les propos de Mme la corapporteur, ainsi que l’exposé brillant, comme toujours, de M. Karoutchi.
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. Il ne faut pas trop le lui dire !
Sourires.
Le problème est posé, mais je retire mon sous-amendement, monsieur le président.
Le sous-amendement n° 1673 est retiré.
Qu’en est-il de votre amendement, monsieur Karoutchi ?
M. Roger Karoutchi. Je ne sais pas si c’est un amendement d’appel, mais il faut reconnaître que vous êtes brillant, monsieur le ministre. C’est une qualité que l’on ne peut pas vous enlever. Vous dites rarement « oui » et, plus souvent, vous dites « non » en recevant l’appel
Rires et applaudissements sur les travées de l’UMP. – M. le ministre rit également.
, autrement dit vous demandez le retrait de l’amendement, sous prétexte que son auteur devrait déjà être satisfait que son amendement soit considéré comme un amendement d’appel…
Sourires.
De temps en temps, il serait bon que quelques amendements de la droite soient adoptés. Je dis cela au hasard, mais vous n’êtes pas obligé de considérer que c’est vrai !
Applaudissements sur les travées de l'UMP.
Ils sont tous adoptés ; j’aimerais bien qu’il en soit ainsi pour les miens !
Je sais bien, monsieur le ministre, que ce texte fera l’objet de la commission mixte paritaire, puis sera rattrapé par la réalité politique. Mais tout de même : quand vous dites que les deux tiers des salariés du privé sont couverts par des conventions, je ne suis pas tout à fait d’accord avec vous. Si j’en crois les statistiques publiées par les ministères visés, cette proportion serait plutôt de 55 % ou 56 %, ce qui veut dire qu’entre 30 % et 40 % des salariés n’ont aucune couverture et subissent le délai de carence.
Ces chiffres ne vous paraissent-ils pas un peu élevés ? Je suis d’ailleurs très étonné que quelqu’un comme vous, un homme de justice et d’équilibre, en vienne à admettre que ce n’est pas si injuste.
Comme vous ne nous proposez pas, parce que vous n’êtes pas suffisamment riche pour le faire, la suppression du délai de carence dans le privé, je vous propose d’assurer l’équilibre pour tous les salariés, avant de prendre éventuellement en considération, pour le secteur public, des éléments de convention collective.
Bravo ! et applaudissements sur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 86.
L'amendement n° 714 rectifié, présenté par MM. Karoutchi, Calvet, Morisset, Magras, Pierre, Cambon, Sido, Kennel et Doligé, Mmes Deseyne et Mélot, M. Lefèvre, Mme Kammermann et MM. Cantegrit, del Picchia et Duvernois, est ainsi libellé :
Après l’article 86
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard au 31 juillet 2015, un rapport sur la protection sociale des Français établis hors de France. Ce rapport peut notamment aborder :
1° L’activité de la Caisse des Français de l’étranger ;
2° La réglementation relative à la délivrance des certificats de vie pour les retraités ;
3° La mise en œuvre de la procédure du dossier « pli collecte » qui permet l’attribution de la carte vitale aux Français retraités établis hors de France ;
4° L’extension du bénéfice de la carte vitale aux retraités des autres régimes de retraites que le régime général ;
5° Les modalités de rattachement ou d’affiliation en qualité d’ayants droit au régime général des expatriés revenant de manière définitive sur le territoire national ;
6° Les modalités de rattachement ou d’affiliation en qualité d’ayants droit au régime général, pour la durée de leur séjour sur le territoire national, des expatriés revenant de manière temporaire et prolongée sur le territoire national ;
7° Les modalités de coordination entre la protection sociale assurée par la Caisse des Français de l’étranger et les régimes de protection sociale des pays d’accueil.
La parole est à M. Roger Karoutchi.
M. Roger Karoutchi. Mesdames, messieurs les corapporteurs, je connais la consigne : « Pas de rapports ! »
Sourires.
Toutefois, je vais tout de même en demander un, comme un certain nombre de mes collègues, car il s’agit ici d’un sujet bien précis, à savoir la protection sociale des Français établis à l’étranger.
Tous les ans, sont soumis des sujets aussi variés que le versement des retraites, l’attribution de certificats, les conséquences juridiques de certains décès ou encore l’assurance maladie de l’ensemble des Français expatriés. Or l’ensemble de ces questions est traité au fur et à mesure, pour ne pas dire au coup par coup, sans aucun suivi réel.
Monsieur le ministre, nous ne vous demandons pas de tout régler d’un coup, comme vous le souhaiteriez sans doute, mais nous appelons de nos vœux que vous fassiez preuve de bonne foi. Ce sujet clef qu’est la protection sociale des Français établis hors de France mériterait un rapport comprenant une mise à plat de l’ensemble du système et des propositions concrètes pour trouver des solutions, quitte à établir un calendrier.
Voilà vingt ans que les problèmes s’accumulent : mauvais fonctionnement de l’assurance maladie, retards dans le paiement des retraites, non-respect des délais d’un mois, certificats qui n’arrivent jamais. À un moment, il faut s’interroger sur l’utilité, pour le Gouvernement, d’établir un rapport contenant des solutions globales et d’autres plus ciblées.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Au risque de déplaire à notre collègue Roger Karoutchi, ce qui me ferait la plus grande peine
Sourires.
La commission spéciale demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi elle émettrait un avis défavorable.
Avec Marisol Touraine, j’ai diligenté une mission, confiée à l’Inspection générale des finances et à l’Inspection générale des affaires sociales, qui rendra ses résultats avant l’été en vue de trouver des réponses.
Monsieur Karoutchi, vous voyez comme je suis sensible à vos argumentations. Ce rapport sera prêt à l’été et sera remis à qui de droit.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis de sagesse sur cet amendement.
M. Roger Karoutchi. Monsieur le ministre, j’apprécie beaucoup votre réponse sur ce rapport remis à « qui de droit ». Mais qui est « M. qui de droit » ?
Sourires.
Quand je vous demande que ce rapport soit remis au Parlement, vous me dites qu’il le sera à qui de droit ! Je suis très attaché à la démocratie, et j’aime beaucoup le Parlement. Remettez votre rapport au Parlement ou prévoyez que les conclusions de l’IGAS lui soient transmises. Je n’en ferai pas un drame. Toutefois, s’il s’agit d’un rapport remis « à qui de droit » et dont on n’a jamais connaissance, sauf par des fuites dans la presse, c’est non !
Par conséquent, j’accepterai de retirer mon amendement si vous me dites qui est « qui de droit ».
Nouveaux sourires.
« Qui de droit », ce sont les ministres qui l’ont commandité, c’est-à-dire le ministre des affaires sociales, le ministre de l’économie et le ministre des finances. Simplement, l’ayant à disposition, ils ne verront sans doute aucune objection à ce qu’il soit remis au Parlement.
Telle est la raison pour laquelle j’ai émis un avis de sagesse sur cet amendement.
L'amendement n° 714 rectifié est retiré.
L'amendement n° 965 rectifié bis, présenté par Mme Deromedi, M. Frassa, Mme Garriaud-Maylam, MM. Charon, Commeinhes, Magras et Milon, Mme Kammermann, MM. Duvernois, Cadic, Vasselle et Calvet et Mme Mélot, est ainsi libellé :
Après l'article 86
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le II de l'article 155 B du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« ...) Produit des plans d'épargne retraites par capitalisation souscrit à l'étranger lors de l'exercice d'une activité salariée dont le paiement est effectué par une personne établie hors de France dans un État ou un territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale qui contient une clause d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude ou l'évasion fiscale. »
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. François Commeinhes.
Dans le cadre de leurs activités professionnelles salariées à l’étranger, et eu égard au faible montant des retraites par répartition dans leur pays d’accueil, de nombreux Français expatriés souscrivent des plans de retraite par capitalisation pour constituer une épargne en vue de leur retraite.
Je songe, par exemple, au plan de retraite 401 (k), en vigueur aux États-Unis. Ce plan d’épargne retraite est financé par des cotisations des employés et à l’aide de contributions de contrepartie versées par l’employeur. En droit fiscal américain, les produits de ce type ont deux atouts majeurs : ils sont tirés de salaires avant impôt et les fonds de croissance bénéficient d’une franchise d’impôt jusqu’à leur retrait.
Le présent amendement tend à inclure les sommes perçues au titre de ces plans au sein du régime de l’impatriation, fixé par l’article 115 B du code général des impôts.
Monsieur Commeinhes, ce dispositif ne résoudra pas le problème que vous soulevez dans l’exposé des motifs. En effet, vous suggérez de modifier le régime des impatriés, alors que vous cherchez à lever un obstacle auquel se heurtent les expatriés.
Au bénéfice de ces observations et des engagements pris par le Gouvernement – peut-être M. le ministre va-t-il les renouveler devant la Haute Assemblée –, notre collègue député Frédéric Lefebvre a retiré un amendement identique. Aussi, je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement.
Monsieur Commeinhes, l’amendement n° 965 rectifié bis est-il maintenu ?
L’amendement n° 965 rectifié bis est retiré.
L'amendement n° 1800, présenté par Mme Estrosi Sassone, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l'article 86
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 1019 du code général des impôts est ainsi modifié :
1° À la première phrase du premier alinéa, les mots : « de 5 %, » sont supprimés ;
2° Après le deuxième alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :
« Le taux de la taxe est fixé à :
« - 20 % si l’agrément intervient dans les cinq premières années suivant la délivrance de la première autorisation ;
« - 10 % si l’agrément intervient entre la cinquième et la dixième année suivant la délivrance de la première autorisation ;
« - 5 % si l’agrément intervient après la dixième année suivant la délivrance de la première autorisation. »
La parole est à Mme Dominique Estrosi Sassone, corapporteur.
Mes chers collègues, j’ai déposé cet amendement aujourd’hui même au nom de la commission spéciale, qui l’a examiné au début de l’après-midi.
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel, le CSA, attribue gratuitement l’usage de fréquences à des éditeurs de radiodiffusion ou de télévision. Cette attribution est soumise au respect de certaines obligations, notamment en termes d’investissement dans la création et de quotas de diffusion.
La loi de finances rectificative pour 2013 a instauré une taxe sur la revente des fréquences hertziennes destinée à prévenir la spéculation dans ce domaine.
Malheureusement, cette imposition ne semble pas avoir eu l’effet dissuasif escompté : au moins un projet de cession de chaîne de la télévision numérique terrestre, la TNT, est sur le point d’aboutir, deux ans et demi à peine après la création de celle-ci, soit au terme de la durée minimale de détention.
En conséquence, cet amendement tend à quadrupler le taux de la taxe spécifique sur la revente de fréquences, pour le porter de 5 % à 20 %. Afin de ne pas pénaliser des cessions s’inscrivant dans une véritable logique industrielle, ce taux serait réduit de moitié cinq ans après la date de délivrance de la première autorisation par le CSA. Il serait de nouveau divisé par deux au bout de dix ans.
Madame la rapporteur, à travers cet amendement, dont je note qu’il a été tardivement déposé, …
… vous soulevez un problème éminemment complexe.
Cet amendement vise à augmenter la taxe sur la revente des fréquences de la TNT. Il s’agit, plus précisément, de porter son taux de 5 % à 20 %, tout en assurant son caractère dégressif.
Cette mesure appelle, de ma part, deux remarques liminaires.
Tout d’abord, – je parle sous votre contrôle, madame la rapporteur – votre majorité était hostile à une taxe de ce type quand d’autres acteurs de cette industrie ont procédé à des ventes comparables.
On l’a bien compris, cette disposition fait écho à un cas récent, qui a pu contrarier certains acteurs de poids. Toutefois, je le répète, par le passé, d’autres entreprises d’importance ont pu procéder à des ventes similaires et il me semble bien que vous vous étiez alors opposés à leur taxation.
Ensuite, le véritable débat est me semble le suivant : faut-il octroyer gratuitement ces fréquences, tout en permettant leur revente ?
Les pouvoirs publics n’ont pas soudainement accordé leur autorisation au début de l’année 2012 pour voir ces fréquences revendues après si peu de temps.
À travers ce dispositif, vous cherchez une fois encore à corriger, par la fiscalité, une situation qui, à mon avis, contrarie certains acteurs de l’écosystème audiovisuel et que vous avez vous-mêmes créée lorsque vous étiez aux affaires, en autorisant la création de ces chaînes sur la TNT. Pardonnez-moi de le souligner, mais cette question est quelque peu « shadokienne »…
Sourires sur les travées du groupe socialiste.
Ce n’est pas le gouvernement de l’époque qui a autorisé la création de ces nouvelles chaînes, …
C’est en effet le CSA, qui, comme vous le savez, monsieur le président Retailleau, a agi à la demande de l’exécutif.
Certes, mais à la suite d’une décision politique, prise par la précédente majorité.
Je suis tout à fait prêt à débattre de cette question pour l’avenir. Il est possible d’imposer, dans les futurs contrats, une clause de non-revente ou de non-plus-value. Voilà une véritable perspective ! Mais mieux vaut procéder en amont qu’en aval, via la fiscalité… Je pense que l’instrument fiscal n’est pas le meilleur instrument.
C’est un débat que nous avons eu il y a quelques jours : on octroie la possibilité d’exploiter des fréquences, mais on n’accepte pas que des opérateurs puissent faire, à travers elles, de larges plus-values en un très court laps de temps.
Dans ce domaine, le jeu des acteurs est très compliqué.
Je n’entrerai pas dans le détail de ce système à cette heure tardive. Sans doute certains professionnels du secteur sont-ils plus sensibles que d’autres à telle ou telle cession…
Sur le fond, j’approuve totalement cette position de principe : on ne peut pas laisser dégager, dans de très brefs délais, d’importantes plus-values grâce à l’exploitation des fréquences. Je souscris à cette philosophie. Toutefois, je le répète, la bonne méthode reviendrait à « cadenasser » l’octroi de ces fréquences. J’aurais cru que la commission attaquerait plutôt sur ce front. À mes yeux, c’est dans ce sens que nous devons travailler.
Madame Estrosi-Sassone, ces deux remarques liminaires vous expliquent la gêne que j’éprouve face à cet amendement.
Au reste, les dispositions proposées se heurtent à deux difficultés techniques.
En effet, une telle réforme de la taxe spécifique sur la revente des fréquences s’expose à un risque d’inconstitutionnalité. L’assiette de cette taxe porte non sur la plus-value, mais sur le prix de cession. En théorie, le prélèvement pourrait donc excéder la plus-value. Or, si, à l’origine, une chaîne a été attribuée à titre gratuit – c’est bien le cas en l’espèce –, l’on risque manifestement de porter atteinte à un principe constitutionnel. Telle est en tout cas l’analyse développée par mes services.
S’y ajoute une seconde faiblesse juridique, à savoir un risque conventionnel élevé. Je songe, plus précisément, à la Convention européenne des droits de l’homme : le présent amendement tend à modifier une règle fiscale applicable à une opération annoncée ou en cours. Une telle décision porte atteinte à l’espérance légitime de l’investisseur, telle que définie conventionnellement.
Ces deux réserves techniques m’invitent à demander le retrait de cet amendement.
Je suis sensible à la volonté exprimée par la commission : à l’évidence, l’exploitation de certaines fréquences donne lieu à un enrichissement illégitime. §Néanmoins, compte tenu des risques juridiques que je viens de mentionner, la méthode ici proposée ne me semble pas la bonne.
Mieux vaut explorer une autre voie. Si cette possibilité nous est encore offerte, nous pourrions par exemple envisager d’interdire, concernant les fréquences octroyées, les plus-values au cours d’une période donnée, pour les chaînes attribuées à titre gratuit. Ce système serait, ce me semble, plus solide qu’une dégressivité fiscale. Mes services sont bien sûr à votre disposition pour étudier cette piste. Je le répète, je souhaite, comme vous, réguler l’enrichissement dégagé dans de telles conditions.
Monsieur le ministre, je serai très brève, dans la mesure où plusieurs de mes collègues attendent sans doute de pouvoir s’exprimer sur ce sujet.
Si j’ai déposé cet amendement, c’est bel et bien parce qu’il y a urgence. Gardons-le à l’esprit ! Le Parlement doit légiférer rapidement, avant que la cession de la chaîne, actuellement en cours, soit définitive.
En outre, le présent amendement ne tend en aucun cas à modifier l’assiette de la taxe spécifique sur la revente de fréquences. Il s’agit simplement de rehausser le taux voté au titre de la loi de finances rectificative pour 2013.
Mes chers collègues, je ne mets nullement en doute le travail accompli par la commission. Néanmoins, une fois n’est pas coutume, je souscris globalement aux propos de M. le ministre.
Je connais assez bien ce domaine, et je peux vous assurer que les différents acteurs qui s’y côtoient ne sont absolument pas tous sur la même ligne. Dans le secteur de l’audiovisuel, c’est en quelque sorte un sport de se faire attribuer des fréquences à titre gratuit, pour y opérer des investissements : si l’entreprise a fait les bons choix, elle continue d’exploiter les fréquences qui lui sont confiées. Dans le cas contraire, la revente devient vite nécessaire.
Si nous votons cet amendement, que nous venons de découvrir en séance, je crains que nous n’engagions un processus faisant, au total, autant de satisfaits que de mécontents : selon leur situation, les différents acteurs souhaitent, ou non, que les choses bougent.
Monsieur le ministre, le précédent gouvernement a bel et bien accepté d’ouvrir diverses fréquences. Encore faut-il préciser qu’il a agi sous de fortes pressions exercées par la profession ! Ceux qui disposaient déjà de fréquences ne voulaient pas que l’on en accroisse le nombre ; quant à ceux qui n’en bénéficiaient pas, ils voulaient bien entendu en recevoir… Le jeu des acteurs est donc particulièrement délicat.
Madame Estrosi-Sassone, je vous le dis en toute sincérité et en toute amitié, je ne suis pas tout à fait serein à l’idée de voter cet amendement. Je crains que nous ne nous heurtions à l’incompréhension et au mécontentement d’un grand nombre de professionnels. La réalité n’est pas toujours telle qu’on se la représente. Certaines entreprises peuvent être contraintes de vendre des fréquences pour avoir commis des erreurs au titre des études de marché. Les exemples de ce type sont nombreux, notamment dans le domaine radiophonique.
De surcroît, M. le ministre le souligne avec raison, si la taxe porte sur le prix de cession, elle pourra bel et bien se révéler plus élevée que la plus-value.
Bien sûr, je suivrai, en bon soldat, l’avis de la commission.
M. Yannick Vaugrenard sourit.
Je ne tenais pas moins à émettre ces réserves. En votant une disposition de cette nature, dans une certaine précipitation, nous risquons de recevoir, tel un boomerang, la réaction d’une partie de la profession. Sans doute devrions-nous, pour agir efficacement, attendre de disposer d’une vision plus claire, plus détaillée.
Je me suis permis d’apporter cet éclairage, dans la mesure où ce secteur d’activité ne m’est pas étranger.
La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour explication de vote.
Personne ne s’en étonnera, je voterai cet amendement déposé au nom de la commission, …
… par Mme Estrosi-Sassone, que je remercie de son initiative.
Monsieur le ministre, cet amendement est peut-être tardif, mais le sujet dont il s’agit n’est pas nouveau. Il a déjà été évoqué dans cet hémicycle le 9 avril dernier, lors des questions d’actualité au Gouvernement. Nous nous sommes alors unanimement émus de l’annonce de la revente de la chaîne Numéro 23 à un nouveau groupe audiovisuel, tout juste au terme de la durée minimale permettant la cession, et ce avec une plus-value dénotant une très forte spéculation.
Cette précision étant apportée, je voudrais revenir sur quelques enjeux plus précis.
Tout d’abord, permettez-moi de m’étonner du manque de travail d’équipe et de transversalité qui se fait jour au sein du Gouvernement : ce même 9 avril, Fleur Pellerin nous avait répondu favorablement.
M. le ministre acquiesce.
La semaine dernière, nous avons évoqué la bande 700 mégahertz. La France va vendre diverses fréquences pour boucler le budget de la défense. Que, dans le même temps, la ressource publique octroyée gratuitement soit ainsi employée, cela ne me semble pas anodin !
En outre, je tiens à formuler ce rappel. Depuis 2012, six nouvelles chaînes de la TNT ont été autorisées par le CSA. Ce dossier m’est familier, et pour cause : à l’époque, j’avais alerté les pouvoirs publics quant à cette décision. J’estimais que l’équilibre du marché de l’audiovisuel était déjà relativement fragile, et qu’il valait mieux surseoir.
Quoi qu’il en soit, à l’époque, ces chaînes ont été créées dans le but d’accroître la diversité de l’offre audiovisuelle. Tel était l’état d’esprit. M. Joyandet ne me contredira pas : les règles d’attribution ont délibérément favorisé les nouveaux entrants, lesquels ont été sélectionnés sur la base d’engagements et de projets comprenant, bien entendu, des études de marché. Le CSA s’y est montré attentif.
À l’évidence, la chaîne dont il s’agit n’a pas respecté ses engagements : elle s’est clairement livrée à de la spéculation. Dans le contexte actuel, le Parlement peut-il accepter que des ressources publiques, attribuées gratuitement, fassent l’objet, en deux ans et demi, d’un tel usage ? Le vendeur s’apprête à dégager une plus-value de l’ordre de 90 millions d’euros !
À ce titre, l’amendement présenté par Mme la rapporteur tend à assurer une correction bienvenue. Il sera ainsi possible de moraliser un certain nombre de pratiques.
Je le dis et je le répète : le marché de l’audiovisuel doit être encadré par un certain nombre de valeurs et de principes.
Enfin, je signale que les dispositions proposées par la commission n’ont aucun caractère rétroactif. Elles ne s’appliqueront qu’aux cessions faisant l’objet d’un agrément postérieur à la date de publication de la loi. Aussi, le risque d’inconstitutionnalité me semble écarté.
Nous savons, monsieur le ministre, que tout cela relève d’un jeu d’acteurs. Pour avoir participé dans cette assemblée aux débats sur la loi relative au droit d’auteur et aux droits voisins dans la société de l’information, dite DADVSI, et la loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet, dite HADOPI, je me souviens que certains amendements, dans les couloirs, étaient rebaptisés : amendement Canal+, amendement TF1, amendement Hollande, amendement Apple. On sait donc très bien dans quelle mosaïque on joue.
J’ai également entendu l’intervention de M. Joyandet nous alertant sur le risque pris par l’entrepreneur, ce dernier ayant parfois besoin de revendre quand sa stratégie ne fonctionne pas. Cependant, nous parlons ici d’un domaine particulier : il ne s’agit pas d’investissements réalisés dans un service ou un produit, mais d’un bien commun distribué par un organisme indépendant qui s’appelle le CSA, à savoir des fréquences hertziennes attribuées en rondelles pour le plus grand bien du téléspectateur. J’observe d’ailleurs que les dernières attributions ont été faites pour le plus grand bien de la télécommande, manipulée par des téléspectateurs qui zappent désespérément à la recherche d’une trace de création !
M. Assouline, il y a quelques années, a jugé pertinent de créer une taxe qui pénalise les reventes spéculatives. Les auteurs du présent amendement, constatant que cette taxe était trop faible pour être efficace, proposent de relever son taux pour pénaliser la spéculation réalisée sur le bien commun. Les écologistes soutiendront donc cet amendement.
Applaudissements sur les travées du groupe écologiste et de l’UDI-UC. – Mme Marie-Noëlle Lienemann applaudit également.
Je souhaite apporter une précision à Mme Morin-Desailly. On ne peut pas reprocher un manque de transversalité ou de cohérence à l’action gouvernementale, puisque tout ce que je vous ai dit est parfaitement conforme aux déclarations que Mme la ministre de la culture a pu faire…
Ne jouons pas à cela entre nous ! Nous sommes en train de nous parler en direct et ma collègue a dit la même chose que moi : nous voulons créer des règles qui garantissent la transparence et corriger la situation. Elle veut comme moi encadrer ces plus-values.
Vous choisissez de recourir à la fiscalité. Ma demande de retrait de cet amendement se fonde sur deux arguments techniques relatifs aux modalités fiscales que vous proposez. Sur le fond, je partage l’ambition et la volonté des auteurs de l’amendement. Je regrette simplement que cette ambition n’ait pas inspiré celles et ceux qui ont pris les décisions à l’origine de cette situation, que l’on ne saurait imputer au gouvernement actuel !
L’amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 86.
(Non modifié)
I. – Après le deuxième alinéa de l’article L. 312-1 du code monétaire et financier, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Lorsque la Banque de France a connaissance d’un refus d’ouverture de compte par un établissement de crédit désigné en application de la procédure décrite au deuxième alinéa du présent article, elle en informe sans délai le secrétaire général de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution. L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution apprécie les suites appropriées qui peuvent être données, sans préjudice de l’application de son pouvoir disciplinaire mentionné à la section 7 du chapitre II du titre Ier du livre VI, et prend, le cas échéant, les mesures adéquates pour que l’établissement respecte ses obligations. »
II. – À la seconde phrase du premier alinéa de l’article L. 312-1-3 du même code, le mot : « cinquième » est remplacé par le mot : « sixième ». –
Adopté.
(Supprimé)
L’amendement n° 759 rectifié, présenté par MM. Forissier, Allizard, G. Bailly, Baroin, Bas, Béchu, Bignon, Bouchet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Commeinhes, Cornu, Danesi et Dassault, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et di Folco, MM. Doligé et Dufaut, Mme Duranton, MM. Duvernois, Emorine, Falco, Fouché, B. Fournier, Frassa et Genest, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet, Grosdidier, Houel et Houpert, Mmes Hummel et Imbert, MM. Joyandet et Karoutchi, Mme Keller, MM. Kennel et Laménie, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, Lefèvre, Legendre, Leleux, de Legge, Lenoir, P. Leroy et Longuet, Mme Lopez, MM. Magras, Malhuret, Mandelli, A. Marc et Mayet, Mmes Mélot et Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, de Nicolaÿ, Paul, Pellevat, Perrin, Pierre, Pointereau, Poniatowski, Portelli, de Raincourt, Raison, Reichardt, Retailleau, Revet, Savary, Sido et Trillard, Mme Troendlé et MM. Vaspart, Courtois, Darnaud, P. Dominati, Savin et Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 86 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 3243–2 du code du travail est complété par trois alinéas ainsi rédigés :
« Toutefois, les éléments concernant les cotisations patronales, les cotisations salariales, les cotisations liées aux accidents de travail et maladies professionnelles et les cotisations d’assurance vieillesse ne doivent pas dépasser quatre lignes.
« Le salarié peut, sur demande expresse auprès de l’organisme centralisateur, se faire communiquer, chaque semestre, un détail des cotisations liées à son salaire.
« Les modalités d’application des deux précédents alinéas sont fixées par un décret en Conseil d’État. »
La parole est à M. Gérard Bailly.
Cet amendement a été cosigné par de nombreux sénateurs et j’ose espérer que nos collègues seront aussi très nombreux à le voter. Il a pour objet de simplifier le bulletin de paie qui, souvent, est illisible. Il limite ainsi le nombre de lignes de cotisations sociales et patronales. Le salarié peut se faire communiquer chaque semestre un détail de ses cotisations. En France, nous l’avons tous constaté, les bulletins de salaire comptent entre 18 lignes et 45 lignes, alors qu’en Grande-Bretagne ils ne comportent que 5 à 8 lignes.
Les auteurs de l’amendement proposent donc de limiter à quatre les lignes relatives aux cotisations sociales figurant sur les bulletins de paie : une ligne pour les cotisations patronales, une ligne pour les cotisations salariales, une ligne pour les cotisations liées aux accidents du travail et maladies professionnelles et une ligne pour les cotisations de retraite. Une telle limitation rendra le bulletin de paie lisible et réduira le poids des formalités administratives, car nous souhaitons tous procéder à des simplifications.
Le Gouvernement précisera par décret en Conseil d’État les modalités d’application de cette mesure. Il désignera ainsi l’organisme centralisateur et la méthode pour se faire communiquer le détail des cotisations.
Cet amendement est de nature réglementaire, d’une part, et il sera très prochainement satisfait grâce aux recommandations du Conseil de la simplification pour les entreprises, d’autre part. En effet, la généralisation du bulletin de paie simplifié à toutes les entreprises devrait intervenir le 1er janvier 2016, soit à la même date que la mise en œuvre de la déclaration sociale nominative.
Je demande donc aux auteurs de cet amendement de bien vouloir le retirer.
Les signataires de cet amendement sont très nombreux, et beaucoup seront déçus ; je retire néanmoins cet amendement, compte tenu des assurances que nous a données Mme la corapporteur. Je suis heureux que cette simplification très attendue intervienne enfin.
L’amendement n° 759 rectifié est retiré.
L’amendement n° 757 rectifié, présenté par MM. Forissier, Allizard, G. Bailly, Baroin, Bas, Béchu, Bignon, Bizet, Bouchet, Buffet et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Commeinhes, Cornu, Danesi et Dassault, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et di Folco, MM. Doligé et Dufaut, Mme Duranton, MM. Duvernois, Emorine, Falco, Fouché, B. Fournier et Frassa, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet, Grosdidier, Houel et Houpert, Mme Imbert, M. Karoutchi, Mme Keller, MM. Kennel, Laménie, Laufoaulu, D. Laurent, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux et P. Leroy, Mme Lopez, MM. Magras, Malhuret, Mandelli et Mayet, Mmes Mélot et Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Nougein, Paul, Pellevat, Perrin, Pierre et Pointereau, Mme Procaccia, MM. de Raincourt, Reichardt, Revet, Sido et Trillard, Mme Troendlé et MM. Vaspart, Vasselle, Courtois, Darnaud, Savin et Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 86 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport comportant des mesures opérationnelles ainsi qu’un calendrier de mise en œuvre en vue de simplifier le code du travail.
La parole est à M. Pascal Allizard.
En application de la jurisprudence relative aux rapports, je retire cet amendement, monsieur le président.
L’amendement n° 757 rectifié est retiré.
L’amendement n° 758 rectifié, présenté par MM. Forissier, Allizard, G. Bailly, Baroin, Bas, Béchu, Bignon, Bizet, Bouchet, Buffet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chaize, Charon, Chasseing, Commeinhes, Cornu, Danesi et Dassault, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et di Folco, M. Doligé, Mmes Duchêne et Duranton, MM. Duvernois, Falco, Fouché, B. Fournier, J.P. Fournier, Frassa et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Houel et Houpert, Mmes Hummel et Imbert, M. Karoutchi, Mme Keller, MM. Kennel et Laménie, Mme Lamure, MM. Laufoaulu, D. Laurent, Lefèvre, Legendre, Leleux, de Legge, Lenoir, P. Leroy et Longuet, Mme Lopez, MM. Magras, Malhuret, Mandelli, A. Marc et Mayet, Mmes Mélot et Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Paul, Pellevat, Perrin, Pierre, Pointereau et Portelli, Mme Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Reichardt, Revet, Savary et Sido, Mme Troendlé et MM. Vaspart, Vasselle, Courtois, Darnaud, Savin et Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 86 ter
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Il est institué, auprès du ministre chargé du travail, une commission chargée de la réforme et de la simplification du code du travail. Elle a pour mission de proposer dans un délai d’un an un nouveau code du travail simplifié en poursuivant les objectifs suivants :
– accroître les possibilités de dérogations aux dispositions du code du travail par un accord collectif ;
– simplifier les règles applicables à l’exécution et à la rupture du contrat de travail, en rendant en particulier certains droits progressifs ;
– instaurer le principe selon lequel, sauf exceptions, les dispositions d’un accord collectif sont applicables nonobstant les dispositions contraires d’un contrat de travail.
II. – La commission comprend vingt-cinq membres nommés par arrêté du Premier ministre, répartis comme suit :
1° Deux députés ;
2° Deux sénateurs ;
3° Cinq personnalités qualifiées représentant de salariés ;
4° Cinq personnalités qualifiées représentant des entreprises privées industrielles, commerciales et de services ;
5° Cinq personnalités qualifiées choisies en raison de leur expérience dans le domaine du droit du travail ;
6° Quatre représentants de l’État ;
7° Un membre du Conseil d’État, en activité ou honoraire ;
8° Un membre de la Cour de cassation, en activité ou honoraire.
III. – Les modalités d’organisation de la commission sont fixées par décret en Conseil d’État.
La parole est à Mme Pascale Gruny.
Nous proposons la mise en place d’une commission chargée de simplifier le code du travail. Je n’en dirai pas plus, mais je souhaite que l’exposé des motifs de cet amendement figure au Journal officiel.
[Objet de l’amendement n° 758 rectifié :
Afin de simplifier le code du travail, cet amendement prévoit la mise en place d’une commission dédiée à cet effet et qui aurait pour objectif de :
– accroître les possibilités de dérogations aux dispositions du code du travail par un accord collectif ;
– simplifier les règles applicables à l’exécution et à la rupture du contrat de travail, en rendant en particulier certains droits progressifs ;
– instaurer le principe selon lequel, sauf exceptions, les dispositions d’un accord collectif sont applicables nonobstant les dispositions contraires d’un contrat de travail.
Cette commission sera notamment composée de chefs d’entreprise.
Comme l’expliquait le Premier ministre dans une interview, la simplification du code du travail doit avoir pour objectif « de rendre le fonctionnement de l’économie plus souple, plus efficace ».]
La commission spéciale tenait au retrait des amendements tendant à obtenir le dépôt d’un rapport. En revanche, elle est favorable à la création d’une commission chargée de la simplification et de la réforme du code du travail. Tout le monde est conscient de la complexité de ce code, et la création d’une telle commission serait donc bienvenue.
La commission spéciale émet donc un avis favorable sur cet amendement.
L’amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 86 ter.
Section 3
Le dialogue social au sein de l’entreprise
Le code du travail est ainsi modifié :
1° Aux articles L. 2312-1 et L. 2312-2, au premier alinéa de l’article L. 2312-3, à l’article L. 2312-4 et au premier alinéa de l’article L. 2312-5, le mot : « onze » est remplacé par les mots: « vingt et un » ;
2° Le deuxième alinéa de l’article L. 2322-2 est supprimé ;
3° Le livre III de la deuxième partie est complété par un titre IX ainsi rédigé :
« TITRE IX
« DISPOSITIONS COMMUNES AUX INSTITUTIONS REPRÉSENTATIVES DU PERSONNEL
« CHAPITRE UNIQUE
« Art. L. 2391–1. – Les employeurs qui, en raison de l’accroissement de leur effectif, atteignent ou dépassent, selon les modalités prévues aux articles L. 2143-3, L. 2312-2, L. 2322-2 et L. 4611-1, l’effectif de vingt et un ou de cinquante salariés restent soumis, pour cette année et les deux années suivantes, aux obligations fixées aux entreprises n’ayant pas franchi ce seuil par le titre IV du livre premier de la deuxième partie, par le présent livre ou par le titre premier du livre VI de la quatrième partie. »
L’amendement n° 629, présenté par Mme Bricq, M. Guillaume, Mmes Emery-Dumas et Génisson, MM. Bigot, Cabanel, Filleul, Marie, Masseret, Raynal, Richard, Sueur, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et apparentés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
La majorité sénatoriale est très pressée et, dans sa hâte, elle anticipe la discussion qui devrait commencer le 22 juin, si j’en crois l’ordre du jour de nos travaux, sur le projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi.
La majorité sénatoriale a décidé de proposer au vote du Sénat le texte adopté par la commission spéciale relevant de 11 salariés à 21 salariés le seuil à partir duquel les entreprises doivent avoir des délégués du personnel.
Sur le fond, vous connaissez la méthode que nous privilégions : elle consiste à favoriser la négociation sociale. Je ne pense pas que la commission spéciale ait consulté beaucoup de partenaires sociaux, en particulier des organisations représentatives de salariés, avant d’introduire cette disposition dans ses travaux.
Ensuite, elle propose d’instaurer un délai de trois ans avant l’application des obligations de représentation et de consultation des salariés, à la fois pour les entreprises qui atteignent l’effectif de 21 salariés et pour celles qui atteignent l’effectif de 50 salariés. Cette disposition s’inscrit à l’encontre de la volonté constante du Gouvernement, depuis 2012, de développer le dialogue social.
On peut s’interroger sur les conséquences qu’aurait l’adoption d’un tel article au regard du texte que nous examinerons en juin. Ce projet de loi, qui a été présenté au conseil des ministres, met en place, avec l’assentiment des employeurs de moins de onze salariés, des commissions régionales paritaires composées d’employeurs et de salariés. Les organisations représentatives de salariés pourront présenter des listes nominatives et non des listes de sigles, comme aujourd’hui, ce qui constituera un progrès important en termes de représentativité et de démocratie sociale.
L’application conjointe de cet article 87 A et de cette disposition de progrès du projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi serait à l’origine d’un hiatus au détriment des salariés travaillant dans les entreprises employant entre 11 salariés et 21 salariés, qui pourraient se voir privés de délégués du personnel et ne seraient pas représentés dans les commissions régionales. En effet, les entreprises de 11 salariés à 21 salariés, même si elles ne représentent que 40 % des entreprises, disposent aujourd’hui de délégués du personnel. Si cet article était adopté, elles constitueraient donc une exception.
Je comprends la hâte de nos collègues, mais il ne me paraît pas raisonnable d’insérer une telle disposition dans le présent projet de loi, alors qu’un débat approfondi aura lieu prochainement sur ce sujet. Le texte du Gouvernement permettra à la fois une simplification du droit en vigueur, tout en garantissant la représentation du personnel dans les petites entreprises.
L’avis de la commission spéciale est défavorable.
J’ai bien entendu ce que Mme Bricq vient de nous dire au sujet du projet de loi sur le dialogue social. Lorsque nous avions auditionné M. Rebsamen, il n’avait pas été très précis sur le contenu de son projet de loi…
Oui, mais lorsque la commission a adopté cet article, il ne l’était pas !
J’ajoute que nous avons été un peu échaudés par l’annonce de textes qui paraissent favorables aux entreprises, mais qui, au fil de leur examen par l’Assemblée nationale, sont en grande partie vidés de leur substance.
Chat échaudé craint l’eau froide. Nous maintenons donc notre article, qui répond à une demande forte des entreprises et tente de remédier à l’échec de la négociation qui avait été engagée. Nous souhaitons effectivement relever le seuil à partir duquel des délégués du personnel doivent être élus. En outre, le délai d’application de trois ans introduit une souplesse pour les entreprises qui se trouvent à proximité de ces seuils qui constituent parfois des freins à l’embauche. Nous verrons bien ce qui restera du texte sur le dialogue social lorsqu’il aura été examiné par l’Assemblée nationale.
L’avis du Gouvernement est favorable.
Comme l’a dit Mme Bricq, il faut supprimer cet article par souci de cohérence avec le projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi, mais aussi avec la démarche d’ensemble du Gouvernement. En effet, ce sujet fera encore l’objet d’échanges avec les partenaires sociaux dans les semaines à venir. Modifier les textes existants par voie d’amendements adoptés en commission spéciale semble donc inopportun.
Le Gouvernement est pleinement conscient de l’importance des seuils sociaux, sinon il n’aurait pas présenté le projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi. Il me paraît cependant que la bonne méthode, conforme à la loi dite « Larcher », suppose de passer d’abord par une négociation avec les partenaires sociaux et d’appréhender ensuite les mesures à prendre dans un texte unique et cohérent. Ce sujet doit donc être traité dans le cadre du projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi.
Je suis un peu surpris par l’intervention de Mme Bricq, qui s’éloigne du débat en nous reprochant de vouloir accélérer les choses. Vous me permettrez de vous rappeler, chère collègue, que ce n’est pas le Sénat qui a décidé de recourir à la procédure du 49–3.
Restons donc dans le débat et discutons les amendements. Il est important de ne pas sortir du contexte et cet article 87 A me paraît devoir être pris en compte.
L’amendement n’est pas adopté.
L’amendement n° 1286, présenté par Mmes Assassi et David, M. Watrin, Mme Cohen et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – Avant le chapitre Ier du titre III du livre II de la troisième partie du code du travail, il est inséré un chapitre préliminaire ainsi rédigé :
« Chapitre préliminaire
« Encadrement des écarts de rémunération au sein d’une même entreprise
« Art. L. 3230–1. – Les dispositions du présent chapitre sont applicables aux personnels et aux dirigeants, qu’ils soient ou non régis par le présent code, des sociétés, groupements ou personnes morales, quel que soit leur statut juridique, et des établissements publics à caractère industriel et commercial.
« Art. L. 3230–2. – Le montant annuel du salaire minimal appliqué dans une entreprise mentionnée à l’article L. 3230–1 ne peut être inférieur à la vingtième partie du montant annuel, calculé en intégrant tous les éléments fixes, variables ou exceptionnels de toute nature qui la composent, de la rémunération individuelle la plus élevée attribuée dans l’entreprise.
« Art. L. 3230–3. – Toute convention ou décision ayant pour effet de porter le montant annuel de la rémunération la plus élevée définie à l’article L. 3230–2 à un niveau supérieur à vingt fois celui du salaire minimal appliqué dans la même entreprise est nulle de plein droit si ce salaire n’est pas simultanément relevé à un niveau assurant le respect des dispositions du même article.
« Art. L. 3230–4. – Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’information et de consultation du personnel sur les écarts de rémunération pratiqués dans les entreprises mentionnées à l’article L. 3230–1. »
II. – Les entreprises mentionnées à l’article L. 3230–1 du code du travail dans lesquelles l’écart des rémunérations est supérieur à celui prévu à l’article L. 3230–2 du même code disposent d’un délai de douze mois, à compter de la date de promulgation de la présente loi, pour se conformer aux dispositions du même article L. 3230–2.
La parole est à M. Patrick Abate.
Il s’agit ici d’améliorer le dialogue social au sein de l’entreprise par une meilleure répartition de la valeur ajoutée et, au sein de celle-ci, par une meilleure répartition des rémunérations.
Le chapitre préliminaire que le présent amendement tend à introduire dans le code du travail prévoit que, dans toutes les entreprises, le salaire annuel le plus bas ne peut être inférieur plus de vingt fois aux rémunérations les plus hautes versées dans la même entreprise.
Ce mécanisme ne concerne pas exclusivement les dirigeants, mais s’applique en référence aux rémunérations les plus hautes. Il ne constitue pas non plus un plafonnement des salaires.
L’adoption de cet amendement permettrait, dans un premier temps, aux salariés les moins bien lotis d’augmenter leur pouvoir d’achat par une meilleure répartition des richesses produites dans l’entreprise, sans forcément augmenter la masse salariale globale, mais en resserrant les liens entre les parties prenantes par un plus juste partage, ce qui est indiscutablement facilitateur en termes de dialogue social, d’implication des salariés.
Première remarque, cette mesure n’affectera en rien la compétitivité, la qualité, l’innovation, la capacité de s’adapter ou les prix, bien au contraire.
Deuxième remarque, nous nous inspirons ici d’une proposition de loi présentée en 2008 par Mme Bricq qui, évoquant la crise comme le révélateur de difficultés particulièrement insupportables, disait qu’il fallait « réparer de toute urgence les dégâts provoqués par l’écart croissant entre les salariés et les classes les plus privilégiées ».
Troisième et dernière remarque, monsieur le ministre, cette mesure donnerait du sens à l’intitulé de votre projet de loi « pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques », dont vous me permettrez de reprendre les termes.
« Croissance » : les salaires et la consommation sont, en effet, un moteur de croissance.
« Activité » : ce sont principalement les salariés, qui seraient plus impliqués, plus responsabilisés et mieux en mesure de prendre en compte l’intérêt de leur entreprise, si tant est qu’ils ne le prennent pas suffisamment en compte aujourd’hui.
« Égalité des chances » : il y aurait un partage des richesses et une égalité de traitement entre ceux qui participent à la création de celles-ci.
Le chapitre préliminaire que nous vous proposons d’introduire dans le code du travail s’inscrit pleinement dans le cadre des ambitions affichées dans ce projet de loi, et nous recentre sur le fond du débat.
Cet amendement vise à encadrer les écarts de rémunération dans l’entreprise. Or il n’appartient pas à la loi de fixer le montant des salaires : le principe de libre fixation des salaires, dans le respect du SMIC et des conventions collectives, prévaut depuis la loi du 11 février 1950, et relève du pouvoir de direction de l’employeur. Il n’est donc pas souhaitable, sur ce point, de brider l’initiative privée ou d’empêcher une entreprise de recruter un dirigeant particulièrement talentueux et compétent.
L’avis est défavorable.
Il faut tout de même rétablir quelques vérités historiques !
Il revient bien à la loi de fixer un certain nombre de règles en la matière, y compris en « bridant », pour reprendre votre expression, madame le rapporteur, des rémunérations excessives. La loi instituant un salaire minimum en est un parfait exemple.
Il faut tout de même reconnaître que des progrès ont été accomplis dans le domaine des rémunérations, et notamment des parts variables, depuis 2008. Plusieurs règlements européens ont ainsi été publiés à cet égard, et la Commission s’est saisie du problème.
Par ailleurs, des dispositifs ont été mis en place dès 2012 afin de plafonner la rémunération annuelle des dirigeants des entreprises publiques. Il y a donc une prise de conscience, y compris dans les assemblées générales d’actionnaires.
On voit bien que, lors de ces assemblées, certaines résolutions fixant la rémunération des dirigeants sont de moins en moins bien acceptées par les actionnaires et sont votées à une courte majorité.
Michel Billout évoquait une grande entreprise française, laquelle vient d’accueillir dans des conditions très favorables son nouveau dirigeant. Or, lundi dernier, l’assemblée générale des actionnaires de cette société a beaucoup « toussé » à l’annonce du montant de la rémunération dudit dirigeant, lequel fut adopté à une courte majorité. Et la même situation s’est reproduite dans deux autres entreprises françaises.
Cette prise de conscience existe donc bien, même si elle n’est pas suffisamment large. Nous en avons déjà parlé à propos des retraites chapeau et des golden hello. Même s’ils ne sont pas assez nombreux, des progrès ont été accomplis depuis 2008 §; il serait bon de le reconnaître !
L'amendement n'est pas adopté.
L'article 87 A est adopté.
Je suis saisi de deux amendements, présentés par MM. Joyandet et Raison, faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° 349 rectifié est ainsi libellé :
Après l’article 87 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre unique du titre Ier du livre Ier de la première partie du code du travail est complété par un article L. 1111–... ainsi rédigé :
« Art. L. 1111–... - Pour la mise en œuvre des dispositions du présent code, les seuils d’effectifs indiqués sont intégralement majorés de 100 %. »
L'amendement n° 348 rectifié est ainsi libellé :
Après l’article 87 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le chapitre unique du titre Ier du livre Ier de la première partie du code du travail est complété par un article L. 1111–... ainsi rédigé :
« Art. L. 1111–... Pour la mise en œuvre des dispositions du présent code, les seuils d’effectifs indiqués sont intégralement majorés de 50 %. »
La parole est à M. Alain Joyandet, pour présenter ces deux amendements.
Monsieur le président, afin de gagner du temps, je présenterai en même temps les amendements n° 349 rectifié, 348 rectifié et 347 rectifié bis.
J’appelle donc également en discussion l’amendement n° 347 rectifié bis, présenté par MM. Joyandet et Raison, et ainsi libellé :
Après l’article 87 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° Aux premier et troisième alinéas de l’article L. 2143–3, au premier alinéa de l’article L. 2143–6, aux articles L. 2313–7 et L. 2313–7–1, au premier alinéa de l’article L. 2313–8, aux premier et second alinéa de l’article L. 2313–16, à l’article L. 2322–1, au premier alinéa de l’article L. 2322–2, aux articles L. 2322–3 et L. 2322–4, aux premier et second alinéas de l’article L. 4611–1, à la première phrase des articles L. 4611–2 et L. 4611–3, au premier alinéa de l’article L. 4611–4, à la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 4611–5 et à l’article L. 4611–6, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « soixante-quinze » ;
2° Le premier alinéa de l’article L. 2313–13 est ainsi rédigé :
« Dans les entreprises de soixante-quinze salariés et plus et dans les entreprises dépourvues de comité d’entreprise par suite d’une carence constatée aux élections, les attributions économiques de celui-ci, mentionnées à la section 1 du chapitre III du titre II du présent livre, sont exercées par les délégués du personnel. »
Veuillez poursuivre, mon cher collègue.
Le débat sur les seuils nous occupe depuis des dizaines années. Il y a aujourd’hui vingt-cinq fois plus d’entreprises qui disposent d’un effectif de 49 salariés que d’entreprises de 50 salariés.
M. Charles Revet opine.
S’agissant de l’opportunité de ce débat dans le cadre du présent projet de loi, dans la mesure où celui-ci s’intitule « pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques », on ne saurait contester, monsieur le ministre, que ce sujet des seuils est au cœur de la problématique ici posée.
Je souhaite attendre la présentation des amendements suivants, qui sont de même nature, avant de développer la présentation des miens, lesquels visent à proposer plusieurs solutions : l’augmentation de 50 % des seuils, leur doublement, ou bien l’adoption d’une solution intermédiaire.
Quoi qu’il en soit, nous devons agir pour relever les seuils, car ceux-ci compliquent terriblement la vie des entreprises. Modifier ne serait-ce que le seuil de 9 salariés représenterait une libération pour les petites et moyennes entreprises et entraînerait mécaniquement un très grand nombre de créations d’emploi. Il faut tout de même sortir de cette situation !
J’aimerais mieux, pour ma part, que ce sujet ne soit pas évoqué au Sénat, mais que la discussion avance entre les partenaires sociaux, ...
Nous l’avons vu encore récemment, une discussion sur le sujet s’est engagée, mais elle n’a pas abouti.
Pour faire quelque chose, le ministre a fusionné le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, le CHSCT, et le comité d’établissement. Très bien ! Mais, une fois de plus, les millions de petites entreprises ne sont pas concernées par cette réforme.
Encore une fois, nous devons en sortir et mettre le dossier sur la table puisque, hélas, la négociation n’aboutit à rien, contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays. Au Danemark, par exemple, où je me suis rendu, il existe une véritable négociation entre les partenaires sociaux. On a l’impression qu’en France la situation est bloquée.
Les entreprises ont besoin d’un peu de liberté, de souplesse et, surtout, de simplification pour se développer et créer des emplois. Peu importe le système et les seuils que l’on retiendra, pourvu que l’on y parvienne !
J’attends les interventions suivantes pour décider du sort que je vais réserver à mes trois amendements.
Concernant les exposés des motifs de ces trois amendements, je ne les développerai pas, mais je souhaite qu’ils figurent au Journal officiel.
[Objet de l’amendement n° 349 rectifié :
L’objectif de cet amendement est d’augmenter de 100 % les différents seuils sociaux fixés dans de nombreuses dispositions du code du travail. À l’heure actuelle, le franchissement d’un seuil social engendre pour une entreprise de nombreuses obligations supplémentaires différentes. Le franchissement d’un seuil d’effectifs par une entreprise est synonyme de charges, de contributions, de subventions et de cotisations supplémentaires. Par ailleurs, selon les seuils franchis, des contraintes institutionnelles ou procédurales peuvent également s’appliquer aux entreprises (comité d'entreprise, comité d'hygiène et de sécurité, organisation d'élections professionnelles, crédits d’heures, délégués du personnel, etc.).]
[Objet de l 'amendement n° 348 rectifié :
L’objectif de cet amendement est d’augmenter de 50 % les différents seuils sociaux fixés dans de nombreuses dispositions du code du travail. À l’heure actuelle, le franchissement d’un seuil social engendre pour une entreprise de nombreuses obligations supplémentaires différentes. Le franchissement d’un seuil d’effectif par une entreprise est synonyme de charges, de contributions, de subventions et de cotisations supplémentaires. Par ailleurs, selon les seuils franchis, des contraintes institutionnelles ou procédurales peuvent également s’appliquer aux entreprises (comité d'entreprise, comité d'hygiène et de sécurité, organisation d'élections professionnelles, crédits d’heures, délégués du personnel, etc.).
Il en résulte un frein mécanique au développement des entreprises, préjudiciable à l’emploi. À titre d’exemple, il existe ainsi 25 fois plus d’entreprises disposant d’un effectif de 49 salariés que d’entreprises disposant d’un effectif de 50 salariés.
Cet amendement a donc pour but de reporter les principales obligations attachées au franchissement des différents seuils d’effectifs prévus par le code du travail, en les majorant de 50 %.]
[Objet de l'amendement n° 347 rectifié bis :
L’objectif de cet amendement est d’augmenter de 50 % le seuil social fixé actuellement à 50 salariés dans de nombreuses dispositions du code du travail. À l’heure actuelle, le franchissement du seuil de 50 salariés engendre pour une entreprise environ 35 obligations supplémentaires différentes.
Les obligations les plus importantes concernent la création d’institutions représentatives du personnel (IRP), tels que le comité d’entreprise (CE) ou le CHSCT, ainsi que la présence de délégués syndicaux, qui se voient attribuer un crédit d'heures en fonction de l'effectif de l'entreprise (10 heures lorsque l'effectif est compris entre 50 et 150 salariés par exemple). Des obligations de négociation sont également imposées à l’entreprise par le code du travail du fait de la présence de délégués syndicaux.
Il en résulte un frein mécanique au développement des entreprises, préjudiciable à l’emploi. Il existe ainsi 25 fois plus d’entreprises disposant d’un effectif de 49 salariés que d’entreprises disposant d’un effectif de 50 salariés.
Cet amendement a donc pour but de reporter les principales obligations attachées au franchissement du seuil de 50 salariés (création du CE et du CHSCT, désignation de délégués syndicaux et obligations de négocier afférentes) au dépassement du seuil de 75 salariés.]
M. Joyandet a bien expliqué quelle était la philosophie de ses trois amendements, lesquels visent à proposer différents scénarios pour débloquer cette notion de seuil qui pénalise lourdement nos entreprises.
Dans la mesure où elle émettra un avis favorable sur l’amendement n° 762 rectifié que présentera dans quelques instants notre collègue Élisabeth Lamure, la commission souhaite le retrait de ces amendements.
Monsieur Joyandet, les amendements n° 349 rectifié, 348 rectifié et 347 rectifié bis sont-ils maintenus ?
Il est un peu compliqué de retirer des amendements au profit d’un autre amendement qui n’a pas encore été présenté. Je préfère entendre l’intervention suivante avant de décider de les retirer ou non.
J’appelle donc en discussion l’amendement n° 762 rectifié, présenté par Mme Lamure, MM. Allizard, G. Bailly, Baroin, Bas, Béchu, Bignon, Bizet, Bouchet, Calvet et Cambon, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. César, Chasseing, Commeinhes, Cornu, Danesi et Dassault, Mme Debré, MM. Delattre et Dériot, Mmes Deromedi, Des Esgaulx, Deseyne et di Folco, M. Doligé, Mmes Duchêne et Duranton, MM. Duvernois, Emorine, Forissier, Fouché, B. Fournier, Frassa, Genest et Gilles, Mme Giudicelli, MM. Grand, Gremillet et Grosdidier, Mme Gruny, MM. Houel et Houpert, Mmes Hummel et Imbert, MM. Joyandet et Karoutchi, Mme Keller, MM. Kennel, Laménie, Lefèvre, Legendre, de Legge, Leleux, Lenoir, P. Leroy et Longuet, Mme Lopez, MM. Magras, Malhuret, Mandelli, A. Marc et Mayet, Mmes Mélot et Micouleau, M. Milon, Mme Morhet-Richaud, MM. Morisset, Mouiller, Paul, Pellevat, Perrin, Pierre, Pointereau et Poniatowski, Mmes Primas et Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Reichardt, Retailleau, Revet, Savary, Sido et Trillard, Mme Troendlé et MM. Vaspart, Vasselle, Courtois, Darnaud, P. Dominati, Savin et Vogel, et ainsi libellé :
Après l’article 87 A
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le code du travail est ainsi modifié :
1° Aux premier et troisième alinéas de l’article L. 2143–3, au premier alinéa de l’article L. 2143–6, aux articles L. 2313–7 et L. 2313–7–1, au premier alinéa de l’article L. 2313–8, aux premier et second alinéa de l’article L. 2313–16, à l’article L. 2322–1, au premier alinéa de l’article L. 2322–2, aux articles L. 2322–3 et L. 2322–4, aux premier et second alinéas de l’article L. 4611–1, à la première phrase des articles L. 4611–2 et L. 4611–3, au premier alinéa de l’article L. 4611–4, à la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 4611–5 et à l’article L. 4611–6, le mot : « cinquante » est remplacé par le mot : « cent » ;
2° Le premier alinéa de l’article L. 2313–13 est ainsi rédigé :
« Dans les entreprises de cinquante salariés et plus et dans les entreprises dépourvues de comité d’entreprise par suite d’une carence constatée aux élections, les attributions économiques de celui-ci, mentionnées à la section 1 du chapitre III du titre II du présent livre, sont exercées par les délégués du personnel. »
La parole est à Mme Élisabeth Lamure.
En l’état actuel des textes, le franchissement du seuil de 50 salariés engendre pour une entreprise pas moins de 35 obligations supplémentaires différentes. Il en résulte un véritable frein au développement des entreprises, préjudiciable à l’emploi, puisque beaucoup d’entreprises font le choix de ne pas dépasser ce seuil.
À l’occasion de ses déplacements, au cours desquels elle rencontre les entrepreneurs, la délégation sénatoriale aux entreprises a ainsi observé que le sujet des seuils sociaux ressortait très clairement comme l’un des freins majeurs du développement des entreprises. Un entrepreneur nous a même avoué avoir créé quatre entreprises comptant 49 salariés chacune. §Et ce n’est pas une caricature !
C’est pourquoi le présent amendement prévoit de reporter les obligations pesant sur les entreprises de plus de 50 salariés sur les entreprises de plus de 100 salariés. Ainsi, nous lèverons un vrai frein à l’embauche.
Cet amendement va plus loin que l’article 87 A introduit par la commission spéciale, lequel prévoit le passage de 10 à 20 salariés et laisse aux entreprises trois ans pour remplir leurs nouvelles obligations en cas de franchissement du seuil de 50 salariés.
Cet amendement porte de 50 à 100 salariés le seuil d’effectif à partir duquel sont obligatoires la désignation de délégués syndicaux ainsi que la création d’un comité d’entreprise et d’un CHSCT. Il tend aussi à confier aux délégués du personnel les attributions économiques du comité d’entreprise dans les entreprises dont l’effectif est compris entre 50 et 100 salariés.
Pour ces raisons, la commission a émis un avis favorable.
Monsieur Joyandet, qu’advient-il des amendements n° 349 rectifié, 348 rectifié et 347 rectifié bis ?
Sans vouloir prolonger le débat, je souhaite que les choses soient bien claires.
L’amendement n° 762 rectifié de Mme Lamure concerne les entreprises de 50 salariés. Que fait-on pour les entreprises qui en comptent 9 ?
Dans ces conditions, je retire mes trois amendements, monsieur le président.
Les amendements n° 349 rectifié, 348 rectifié et 347 rectifié bis sont retirés.
La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l’amendement n° 762 rectifié.
L’appel en priorité de cet amendement de Mme Lamure ne change pas le problème !
Un texte nous sera présenté, dans quelques semaines, dont l’objet est de faire ce que les partenaires ont échoué à accomplir.
Protestations sur les travées de l'UMP.
Je vous fais remarquer, monsieur Joyandet, que si la négociation entre les partenaires sociaux relative au dialogue social a échoué, c’est à cause d’un différend qui a opposé deux organisations patronales, la CGPME et le MEDEF, lesquelles se sont livrées à une surenchère qui a complètement bloqué l’issue de la discussion. Il ne faut donc pas incomber la faute à d’autres !
Le Gouvernement a alors pris ses responsabilités et a présenté en conseil des ministres un projet de loi que nous examinerons prochainement.
Ce n’est donc pas le bon timing.
C’est pourtant vrai ! Je vous l’ai déjà fait remarquer. Assumez-les, au moins !
Dans ces conditions, nous ne pouvons pas être d’accord avec vous.
Exclamations sur les travées de l'UMP.
Aussi, nous voterons contre cet amendement. Vous vous faites plaisir, …
Il ne reste plus qu’un quart d’heure : restez calmes !
La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Bien évidemment, nous ne voterons pas cet amendement qui est à nos yeux la marque d’un recul social important et une preuve d’hypocrisie.
Demain, vous avancerez certainement des exemples similaires à celui que vous nous avez livré il y a un instant. Vous nous direz sans doute que vous avez rencontré une personne qui a préféré créer quatre entreprises de 99 salariés pour éviter de franchir le seuil des 100 salariés.
Oui, il y a des seuils, des obligations. Oui, les chefs d’entreprise, comme tout un chacun, ont des droits et des devoirs. Oui, à partir de 50 salariés, les chefs d’entreprise ont des contraintes, mais ils ont aussi des avantages. D’ailleurs, de nombreux chefs d’entreprise se félicitent de franchir ce seuil, qui signifie que leur entreprise prospère.
Il ne faut pas se tromper de combat. Les seuils ne sont pas à l’origine des problèmes économiques de notre pays et ce n’est pas en les modifiant que vous résoudrez la question du chômage. §Ce n’est pas en portant le seuil de 50 salariés à 100 salariés que ceux qui n’embauchent pas aujourd’hui le feront demain. De la même façon, ce ne sont pas les seuils qui poussent certains à embaucher actuellement.
Il ne faut pas tout mélanger et faire croire, par le biais de cet amendement, que vous réglerez ainsi la situation des petites et moyennes entreprises dans notre pays ni même celle des milliers de chômeurs qui n’aspirent qu’à trouver un emploi.
On nous oppose que l’on va trop vite et qu’un texte arrivera bientôt.
Lors de l’examen de la proposition de loi de Catherine Procaccia sur le contrôle des comptes des comités d’entreprises, on nous a aussi opposé que ce n’était pas le bon moment : Michel sapin nous disait qu’on allait voir ce que l’on allait voir, que, dans quelques mois, un texte serait présenté au Parlement. Pour autant, le Sénat a adopté à la quasi-unanimité cette proposition de loi
M. Philippe Mouiller opine.
, qui a été ensuite reprise dans le texte du Gouvernement. Tant mieux !
Oui ! sur les travées de l'UDI-UC.
Il est normal qu’à un moment donné, même si un texte est annoncé, le Sénat puisse dire : voilà ce qu’on souhaite. D’ailleurs, je le répète, il y a souvent loin entre ce que souhaite le Gouvernement et les textes issus des travaux de l’Assemblée nationale. Nous l’avons vu avec certains textes, notamment avec le projet de loi que nous examinons en ce moment, le Premier ministre ayant été obligé de recourir à la procédure du 49–3.
Applaudissementssur les travées de l'UMP et de l'UDI-UC.
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Comment cela, ce n’est pas à la hauteur du débat ? Vous ne voulez pas voir la vérité en face et ce qui se passe à l’Assemblée nationale avec votre majorité !
Applaudissementssur les travées de l’UMP.
Pour abonder dans le sens de Mme le rapporteur, j’ai en main le projet de loi dit « Rebsamen », qui a été déposé à l’Assemblée nationale. Vous pourrez le consulter. Les éléments que nous proposons d’insérer dans le présent texte n’y figurent pas.
Il est par conséquent inutile de nous opposer qu’il faut attendre le projet de loi Rebsamen.
Par ailleurs, le dialogue social a eu lieu et la négociation entre partenaires sociaux a échoué. Là non plus, rien ne sert de nous opposer la loi Larcher : la négociation a bien eu lieu.
En outre, il s’agit bien d’un élément de déblocage de l’économie. La commission spéciale a été dans son rôle en proposant une telle démarche et il est tout à fait légitime que nos collègues suggèrent de l’enrichir.
Enfin, nous sentons bien que ces sujets sont latents, tout le monde reconnaît qu’il faut avancer sur la question des seuils, …
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. … comme sur d’autres éléments – nous y viendrons – du droit du travail.
Mme Marie-Noëlle Lienemann s’exclame.
M. Vincent Capo-Canellas, président de la commission spéciale. Ma collègue a raison. Les textes que nous examinons servent à apporter des changements. Il est utile que nous agissions ainsi dans le cadre d’un projet de loi sur la croissance et l’activité.
Applaudissementssur les travées de l'UDI-UC et de l'UMP.
Rires. – M. le ministre sourit.
M. Daniel Raoul. Le projet de loi Rebsamen – il faut laisser son nom à une loi ; ce sera le cas pour la vôtre, monsieur le ministre !
Sourires.
– figure à l’agenda de la commission des affaires sociales, à la date du 22 juin prochain. Par conséquent, qu’est-ce qui vous empêche de déposer des amendements de ce type au moment de l’examen du texte qui traite spécifiquement des relations sociales dans l’entreprise ?
M. Michel Canevet s’exclame.
Madame Lamure – nous nous connaissons très bien puisque nous avons été membres de la commission des affaires économiques en même temps –, 4 × 49 équivaut à 2 × 98. Autrement dit, votre raisonnement concernant 4 × 49, vous pourrez le tenir la prochaine fois sur 2 × 98.
Ce n’est pas un exemple. J’ignore qui vous a téléguidée pour déposer cet amendement. Est-ce la CGPME ou le MEDEF ?
En fait, l’échec de la négociation résulte de ce conflit.
Au regard du projet de loi Rebsamen, qui a été présenté en conseil des ministres, dont vous avez le texte, monsieur le président de la commission spéciale, et qui est inscrit à l’agenda de la commission des affaires sociales, il me semble prématuré de régler ces questions ce soir. Reparlons-en à ce moment-là ! Cela me paraîtrait plus sain.
Avec cet amendement, non seulement vous anticipez largement sur le projet de loi Rebsamen, mais, surtout, vous empêchez toute discussion et toute possibilité pour le comité d’entreprise de s’exprimer.
En effet, l’article L. 2323–7–1, dont une nouvelle rédaction est proposée, résulte de l’accord national interprofessionnel voté ici même en 2013 : il énumère les possibilités accordées au comité d’entreprise, notamment « proposer des orientations alternatives » à celles qui sont formulées par l’entreprise et « se faire assister de l’expert-comptable de son choix ». Il est même prévu – je me souviens que cela avait donné lieu à un débat important dans cet hémicycle, car nous n’étions pas d’accord avec cette précision – que l’entreprise puisse participer au financement de cette expertise ; à défaut, cette charge incombe en totalité au comité d’entreprise.
À travers cet amendement, c’est tout sauf du dialogue social que vous proposez ! Vous le reniez et le supprimez. Évidemment, c’est cela que vous souhaitez.
Avec cet amendement, vous avez donc entière satisfaction, puisque, pour vous, le dialogue social se réduit à cet axiome : l’entreprise décide et les salariés subissent. §C’est en tout cas ce que vous faites avec cet amendement, monsieur Joyandet. Je vous invite à relire l’article L. 2323–7–1. Vous constaterez que vous empêchez les comités d’entreprise de prendre toute initiative, de se faire accompagner d’un expert-comptable, de formuler des propositions alternatives.
Nous n’aurons certainement pas le temps d’examiner ce soir les autres amendements que vous avez déposés. Lorsque ce sera le cas, nous constaterons qu’il s’agit d’une atteinte profonde au dialogue social tel qu’il a été mis en œuvre.
Exactement ! Ma collègue vient de résumer très justement la situation.
Telle est votre conception du dialogue social. Ce n’est pas la nôtre. Par conséquent, nous ne voterons pas cet amendement, pas plus que les suivants.
Étant donné l’heure tardive, je réserve mes arguments pour le projet de loi sur le dialogue social. Puisque vos amendements déposés dans le cadre du présent texte ne seront finalement pas retenus par l’Assemblée nationale, vous les présenterez de nouveau à ce moment-là. Nous aurons donc l’occasion d’en reparler.
Je précise seulement que je ne voterai pas cet amendement, pour les raisons qui ont été exposées par les membres du groupe socialiste, du groupe CRC… et d’autres.
L'amendement est adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 87 A.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons examiné 105 amendements au cours de la journée ; il en reste 187.
La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.
Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée à aujourd’hui, jeudi 7 mai 2015 :
À neuf heures trente :
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de l’arrangement concernant les services postaux de paiement (n° 327, 2014-2015) ;
Rapport de M. Robert del Picchia, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 411, 2014-2015) ;
Texte de la commission (n° 412, 2014-2015).
Projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale, autorisant l’approbation de la Convention postale universelle (n° 328, 2014-2015) ;
Rapport de M. Robert del Picchia, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 411, 2014-2015) ;
Texte de la commission (n° 413, 2014-2015).
Projet de loi autorisant la ratification de l’accord d’association entre l’Union européenne et la Communauté européenne de l’énergie atomique et leurs États membres, d’une part, et l’Ukraine, d’autre part (Procédure accélérée) (n° 365, 2014-2015) ;
Rapport de M. Daniel Reiner, fait au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (n° 400, 2014-2015) ;
Texte de la commission (n° 401, 2014-2015).
Projet de loi modifiant la loi n° 2004-639 du 2 juillet 2004 relative à l’octroi de mer (Procédure accélérée) (n° 366, 2014-2015) ;
Rapport de M. Éric Doligé, fait au nom de la commission des finances (n° 407, 2014-2015) ;
Texte de la commission (n° 408, 2014-2015).
Suite du projet de loi, considéré comme adopté par l’Assemblée nationale en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution après engagement de la procédure accélérée, pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (n° 300, 2014-2015) ;
Rapport de Mmes Catherine Deroche, Dominique Estrosi Sassone et M. François Pillet, fait au nom de la commission spéciale (n° 370, tomes I, II et III, 2014-2015) ;
Texte de la commission (n° 371, 2014-2015).
De quinze heures à quinze heures quarante-cinq : questions cribles thématiques sur la forêt française.
À quinze heures quarante-cinq et le soir : suite de l’ordre du jour du matin.
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
La séance est levée le jeudi 7 mai 2015, à zéro heure vingt-cinq.