Chose relativement rare dans le cadre de la discussion de ce projet de loi, nos critiques s’adresseront non pas au Gouvernement, mais à la majorité sénatoriale, puisque cet article a été ajouté par la commission spéciale sur l’initiative de la corapporteur.
La droite saisit ici l’occasion de revenir sur le compte personnel de prévention de la pénibilité. Chacun se souvient des débats passionnés auxquels a donné lieu l’instauration de ce dispositif, pourtant outil de justice permettant à celles et ceux qui ont exercé un métier dit « pénible », de partir plus tôt à la retraite. La droite s’était en effet, à l’époque, fortement mobilisée contre cette mesure.
Il est intéressant de remarquer que les dispositifs se voient reprocher d’être des « usines à gaz », d’être trop difficiles à appliquer quand il s’agit de l’intérêt des salariés et que la question ne se pose pas pour des dispositifs destinés, par exemple, à exonérer les entreprises de cotisations sociales.
Bref, cet article tend à supprimer la fiche individuelle retraçant l’exposition de chaque salarié aux facteurs de pénibilité, au motif que les entreprises ne disposeraient pas des moyens humains pour la remplir et la maintenir à jour.
Cependant, chers collègues, comment envisager le compte pénibilité sans cette fiche individuelle permettant de faire réellement le point sur la situation de chaque salarié ? Sous prétexte de complexité, en supprimant cette disposition, vous affaiblissez évidemment l’ensemble du compte pénibilité.
Vous souhaitez également, par cet article, limiter considérablement la portée du compte en ne retenant que trois facteurs de pénibilité, là encore en arguant que les autres ne seraient pas suffisamment faciles à mesurer.
Je l’ai dit au début de mon propos, nos critiques s’adressent avant tout à la majorité sénatoriale ; du reste, un amendement allant dans le même sens que le nôtre a été déposé par nos collègues socialistes. Néanmoins, des déclarations récentes du ministre du travail et du ministre de l’agriculture nous font éprouver quelques craintes. En effet, le jeudi 9 avril, François Rebsamen, devant les adhérents de la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment, a tenu des propos laissant entendre qu’il envisageait un abandon partiel du compte pénibilité et, plus précisément, la suppression de la fiche individuelle. On nous a affirmé que c’était un malentendu, mais Stéphane Le Foll a confirmé, quelques jours plus tard, les propos de son collègue.
Nous voudrions donc obtenir quelques précisions, monsieur le ministre, pour connaître la position réelle du Gouvernement. Considère-t-il qu’il faut effectivement supprimer ces fiches individuelles ?
Notre position, quant à elle, est claire et cohérente : nous sommes favorables à ces fiches.