Plusieurs raisons me paraissent justifier l’article 100 du projet de loi.
Aujourd’hui, lorsque se produit un conflit social comparable aux deux exemples bien connus mentionnés par Mme Gonthier-Maurin les propositions de reclassement à l’étranger sont vécues par les salariés comme une humiliation, et par les employeurs, qui ont l’obligation de les présenter, comme un formalisme absurde.
D’une part, en effet, les propositions de reclassement international n’ont plus de sens et sont parfois perçues comme humiliantes. Quand des salariés licenciés à Amiens ou à Compiègne se voient offrir un reclassement en Pologne ou en Roumanie à des salaires de dix fois inférieurs aux leurs, ils ne peuvent pas l’accepter et d’ailleurs ne l’acceptent pas.
D’autre part, l’approche formelle actuelle fait courir à l’entreprise un risque juridique disproportionné en raison de la lourdeur du processus : il suffit parfois qu’une case n’ait pas été cochée pour que tout le plan de sauvegarde de l’emploi soit frappé de nullité. Au demeurant, ce formalisme est exploité par certains avocats, très souvent pyromanes, pour faire annuler des plans de sauvegarde de l’emploi. Toutefois, la belle affaire qu’un PSE invalidé : pendant des années et des années, le plan étant en suspens, les salariés ne se projettent pas ailleurs et les indemnités ne sont pas versées !
À cet égard, la situation des salariés de Goodyear, à laquelle Mme Gonthier-Maurin a fait allusion, est une honte collective, qui démontre que le système actuel ne marche pas, certes parce que des patrons ne jouent pas le jeu – en l’occurrence, l’entreprise n’a pas joué le jeu –, mais aussi parce que des avocats, utilisant la crédulité de certains salariés, s’insinuent dans tous les interstices du droit pour soulever l’ensemble des arguties possibles. Résultat, pendant sept ans, un collectif a été empêché de se projeter ailleurs.
Pour ma part, je suis fermement opposé au dispositif actuel, car il n’est pas possible de considérer les reclassements étrangers comme une solution crédible pour tous les salariés. Dans ces conditions, il est absurde de maintenir un formalisme que nombre d’employeurs jugent excessif et qui conduit à des propositions que les salariés reçoivent souvent comme une brimade, voire une humiliation.
L’article 100 prévoit qu’un reclassement international n’aura plus à être systématiquement proposé, mais que, si le salarié demande à être reclassé à l’étranger, le groupe aura l’obligation de lui répondre. Il me semble que ce mécanisme de bon sens est beaucoup plus équilibré et adapté aux réalités que le dispositif actuel : aucun salarié qui n’est pas volontaire n’acceptera d’être reclassé en Pologne ou en Roumanie ; en revanche, si un salarié demande à bénéficier d’un reclassement à l’étranger, le groupe sera tenu de lui répondre.