Merci, mon cher collègue.
Voilà effectivement l’une des rares industries où notre pays est un acteur de rang mondial. Et ce rang mondial, obtenu par l’aéronautique, est le fruit de politiques publiques menées, avec constance, depuis un demi-siècle.
Il n’est peut-être pas inutile de rappeler qu’au cours des trente prochaines années, l’aviation civile comme le secteur spatial seront confrontés à des défis technologiques de grande ampleur. Des mutations importantes auront lieu, c’est certain, et il faut s’attendre à de fortes ruptures technologiques en matière d’architecture des avions et de motorisation.
N’oublions pas non plus qu’un programme industriel aéronautique ou spatial pour les vingt ou trente prochaines années doit se concevoir dès aujourd'hui !
Comme chacun le sait, l’aviation civile est une activité industrielle essentielle pour notre pays, en elle-même d’abord, mais également du fait du pouvoir de diffusion d’innovations à l’ensemble du tissu industriel que recèle l’aéronautique. Les investissements d’aujourd’hui conditionnent, dans ce secteur notamment, la préservation de l’avance de la France et de l’Europe. C’est pourquoi il faut maintenir à long terme les soutiens publics à la recherche aéronautique.
À cet égard, je rappellerai une fois de plus l’importance du maintien dans la durée du niveau des crédits alloués à l’Office national d’études et de recherches aérospatiales, l’ONERA. L’activité de cet organisme est essentielle, car elle porte, en matière aéronautique, sur les briques technologiques qui devront générer des applications à long terme.
Face à une concurrence qui n’en finit pas de s’accroître, il est essentiel de soutenir la filière, pour préparer l’avenir. Or les soutiens institutionnels sont en diminution depuis 2010, alors que, dans le même temps, les États-Unis et la Chine déploient des programmes importants de financements publics. Quant à notre partenaire dans Airbus, l’Allemagne, ses crédits de soutien doublent depuis 2012. Dès lors, celle-ci ne finira-t-elle pas par revendiquer de nouveaux arbitrages dans la répartition de la chaîne de valeur des Airbus ?
En décembre 2013, j’avais été alerté sur la situation préoccupante de l’ONERA. Aujourd’hui, sa reconstruction institutionnelle s’accompagne certes de l’élaboration d’un plan stratégique scientifique, mais sa situation financière est toujours alarmante et met en péril son devenir. Nous comptons donc sur vous, monsieur le secrétaire d’État, pour que des mesures d’urgence soient prises.
De même, le financement des projets du Conseil pour la recherche aéronautique civile, le CORAC, reste d’une brulante actualité, du fait de ses programmes sur l’usine aéronautique du futur, les systèmes embarqués, les nouvelles fonctionnalités avancées ou encore les nouvelles configurations d’aéronefs.
Est-il nécessaire d’insister sur le fait que ces programmes ont pour but, tout à la fois, de donner des objectifs à la recherche aéronautique sur les thématiques essentielles et de préparer la continuité innovante pour les ruptures technologiques de l’aviation de 2040 ? Y a-t-il meilleur chemin pour préserver l’avance de la France et de l’Europe en ce domaine ?
Faute de temps, je ne m’étendrai pas sur deux des points que j’avais également traités dans mon rapport rédigé au nom de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques. Je veux parler de la double nécessité d’anticiper le développement du marché des drones et de suivre les progrès des filières de biokérosène.
Je dirai un dernier mot concernant la formation. Cela a déjà été dit, elle est d’importance dans une activité industrielle soumise en permanence à la poussée des innovations.
Trois domaines sont essentiels : les besoins en formations spécifiques au secteur de la construction aéronautique, avec l’adéquation des formations à la demande industrielle, mais aussi la nécessité d’anticiper le choc de l’introduction de la numérisation dans le système de navigation aérienne tout en tirant les conséquences de la numérisation de l’économie, car l’aéronautique aura de plus en plus besoin de spécialistes des logiciels embarqués.
Compte tenu du temps qui m’est imparti, je n’évoquerai pas l’importance de l’établissement des normes pour la rénovation de la navigation aérienne, avec le programme SESAR – en anglais Single European Sky ATM Research – pour l’Europe, et NextGen – The Next Generation Air Transportation System – pour les États-Unis. C’est dommage, mais c’est un autre problème.
Pour conclure, oui, la France et l’Europe ont l’impérieux devoir de préserver leur avance, à vue de plus d’une génération, dans le champ industriel directeur de ce secteur d’activité, sachant que l’avenir de l’un des secteurs de pointe de notre industrie se décide aujourd’hui.
Enfin, monsieur le secrétaire d’État, je vous poserai une question qui nous vient de notre collègue Georges Labazée : quelles sont les perspectives pour une collaboration possible autour du futur avion électrique, entre Hydro-Québec qui va s’installer sur le complexe de Lacq pour la production de piles et Airbus qui va s’implanter près de l’aéroport de Pau ?
Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie par avance des précisions que vous voudrez bien nous apporter.