Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 12 mai 2015 à 14h30
Risques inhérents à l'exploitation de l'huître triploïde — Discussion d'une question orale avec débat

Alain Vidalies :

Jusqu’à présent, la production d’huîtres triploïdes et la production d’huîtres diploïdes ont été complémentaires. On l’observe à plusieurs égards.

Tout d’abord, une part importante de producteurs élève à la fois des huîtres triploïdes et des huîtres diploïdes.

Ensuite, le développement de la production d’huîtres triploïdes, après leur mise au point par l’IFREMER dans les années quatre-vingt-dix, a répondu à une demande des producteurs, désireux d’atténuer les effets de la saisonnalité de la vente des d’huîtres.

En effet, compte tenu de leurs caractéristiques physiologiques, comprenant, notamment, l’absence de laitance, les huîtres triploïdes permettent d’assurer une vente tout au long de l’année, et notamment pendant la période touristique estivale, qui apporte un supplément de revenu aux ostréiculteurs. En outre, divers orateurs l’ont déjà indiqué, ces huîtres bénéficient d’une croissance plus rapide.

De surcroît, le maintien de différents modes de production permet de diversifier les approvisionnements et peut contribuer à la capacité de résilience du secteur en cas de crise. Ainsi, lorsque, en 2008 et au cours des années suivantes, on a observé un phénomène de surmortalité ostréicole, la production de naissains diploïdes et triploïdes des écloseries a permis aux producteurs, en complément des naissains naturels, d’assurer un niveau viable de production – Mme Herviaux l’a rappelé au cours de cette discussion.

La production d’huîtres d’écloserie a été à la base des plans de sauvegarde soutenus financièrement par l’État qui ont consisté à fournir aux producteurs des huîtres issues de sélection et présentant une résistance améliorée aux surmortalités.

La production d’huîtres triploïdes fait également l’objet d’évaluations scientifiques indépendantes et est soumise à un suivi régulier.

Madame Blandin, vous avez fait référence à l’avis rendu en 2004 par le comité d’éthique et de précaution pour les applications et la recherche, instance commune à l’Institut national de la recherche agronomique, l’INRA, et à l’IFREMER.

Cet avis portait sur l’utilisation des biotechnologies dans l’ostréiculture. Il insistait sur la nécessité de « la mise en œuvre d’un suivi technique, de manière qu’un contrôle efficace et rigoureux puisse être réalisé à chaque rouage de la filière qui mène des chercheurs aux professionnels ». Ces recommandations ont été suivies, notamment via des mesures de précautions figurant dans les conventions conclues entre l’IFREMER et les écloseries produisant des huîtres triploïdes.

Parallèlement, l’analyse des conséquences environnementales de la production d’huîtres tétraploïdes s’est appuyée sur deux missions d’expertise scientifique, menées, l’une, en 1998 et, l’autre, en 2008.

Mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs d’entre vous ont fait référence au rapport de la mission conduite, en 2008, par M. Chevassus-au-Louis. Cette mission a réuni plusieurs experts, dont l’actuel président du Muséum national d’histoire naturelle, M. Gilles Boeuf.

Ces études ont conclu à un risque environnemental faible, même en adoptant comme hypothèse de travail un scénario défavorable. Toutefois, conformément aux recommandations formulées par leur biais, un réseau de biovigilance a été mis en place pour surveiller le milieu naturel et détecter d’éventuelles variations anormales. Les recherches effectuées dans plusieurs bassins de production ont toujours montré l’absence de signes de colonisation de l’huître triploïde par reproduction dans le milieu naturel.

Afin d’apporter toute la transparence nécessaire sur cette question, je trouverais intéressant que les parlementaires s’en saisissent, eux aussi.

Sans empiéter sur les prérogatives du Parlement, je ne verrais que des avantages à ce que le bureau du Sénat, ou la commission chargée du développement durable, saisisse l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques, ou OPECST. L’indépendance de l’expertise de cette délégation des deux assemblées, garantie par son statut, nous permettrait de disposer d’une analyse complète de cette question, sur la base des travaux les plus récents, et d’apporter dans la transparence et la rigueur scientifique les réponses attendues par l’ensemble des parties intéressées, notamment les professionnels de la conchyliculture et les consommateurs.

Je crois savoir que l’OPECST va entreprendre une étude sur les enjeux économiques et environnementaux des biotechnologies, la question des huîtres triploïdes pourrait, me semble-t-il, être utilement examinée dans ce cadre.

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