Intervention de Alain Vidalies

Réunion du 12 mai 2015 à 14h30
Risques inhérents à l'exploitation de l'huître triploïde — Discussion d'une question orale avec débat

Alain Vidalies, secrétaire d'État :

Par ailleurs et d’une façon générale, l’État continue de soutenir l’effort de recherche dans le domaine ostréicole, notamment au travers de la convention annuelle entre mon ministère et l’IFREMER.

Les travaux d’innovation et de recherche dans le secteur ostréicole sont essentiels, dans le contexte des mortalités d’huîtres. À cet égard, le programme ambitieux de recherche SCORE témoigne de l’engagement de l’État, aux côtés des collectivités et de la profession, pour améliorer la résistance des huîtres au phénomène des mortalités. Plus globalement, le ministère finance une convention aquacole spécifique avec l’IFREMER, dont une large partie est consacrée aux mortalités ostréicoles.

Beaucoup d’entre vous ont évoqué les questions sanitaires liées aux mortalités. C’est un sujet important que nous devons aborder conjointement avec le ministère de l’agriculture, compétent en la matière, à la suite de la diffusion d’un rapport commandé par la direction générale de l’alimentation sur l’amélioration de la situation zoosanitaire dans la conchyliculture, le rapport Vannier.

Nous devons faire face aujourd’hui à l’échéance des brevets de l’IFREMER. La production d’huîtres tétraploïdes est aujourd’hui, en France, exclusivement réalisée par l’IFREMER.

Toutefois, un brevet qui n’est plus utilisé depuis des années est tombé dans le domaine public cette année et le contrat d’objectifs de l’établissement prévoit le transfert complet de la technologie à la profession à l’horizon 2017.

Soyons clairs : il existe deux brevets, dont l’un est tombé dans le domaine public depuis quelques années, mais n’est pas utilisé dans la réalité. La question concerne le second brevet, qui est encore aujourd’hui détenu par l’IFREMER. Nous devons nous en saisir.

Je souhaite que nous puissions l’aborder avec calme et sérénité. La prudence s’impose face à certaines accusations vis-à-vis de l’IFREMER, qui est un établissement public mondialement reconnu. J’ai eu l’occasion récemment d’en discuter avec son P-DG, François Jacq.

Le contrat d’objectifs État-IFREMER pour 2014–2017 prévoit le transfert de l’activité de production des tétraploïdes. Ce transfert doit être préparé et accompagné, il n’est pas question de laisser cette technologie sans un encadrement adapté.

En effet, la production d’huîtres tétraploïdes par des opérateurs privés en vue de la commercialisation de naissains d’huîtres triploïdes justifie un encadrement réglementaire rigoureux. Cet encadrement est en cours d’élaboration, c’est une priorité forte de mon ministère. Nous y travaillons pour parvenir à une mise en œuvre effective au début de l’année 2016.

Cet encadrement réglementaire doit permettre d’assurer un niveau optimal de sécurité environnementale, c’est essentiel. Il relève des prérogatives de l’État de l’élaborer et d’en assurer l’effectivité. La mise en place de ce cadre sécurisé répond en outre aux recommandations du comité d’éthique et de précaution pour la recherche de l’IFREMER.

L’objectif de protection de l’environnement et le souci de ne pas créer un dispositif réglementaire ad hoc pour un nombre réduit d’opérateurs orientent notre réflexion vers le régime des installations classées pour la protection de l’environnement, les ICPE. Les services du ministère, en relation avec l’IFREMER et la profession, travaillent actuellement à l’élaboration de ce cadre.

La mise en place de ce cadre réglementaire a été reconnue comme un préalable incontournable à un transfert complet de la production des huîtres triploïdes de l’IFREMER vers d’autres opérateurs. Le rôle des structures professionnelles est par ailleurs essentiel, des réflexions sont en cours au sein du Comité national de la conchyliculture sur la mise en place d’un « centre technique national » géré par l’interprofession.

Dans le même temps, monsieur Joël Labbé, je partage votre ambition d’une information adéquate et renforcée du consommateur. Sur ce point, la profession conchylicole a fait un important effort de développement des signes officiels de qualité afin de répondre aux exigences de transparence provenant des consommateurs : label rouge, indications géographiques protégées, appellations d’origine protégées, ou AOP.

Dans ce même objectif de réponse aux besoins d’information des consommateurs, la question des huîtres triploïdes est amplement débattue. Ces débats semblent se concentrer plus particulièrement sur l’ostréiculture, alors que, comme je l’ai souligné précédemment, de nombreuses autres filières, animales et végétales, ont recours à des espèces polyploïdes sans qu’il y ait d’exigences d’étiquetage et sans que de tels débats apparaissent.

Promouvoir un étiquetage de l’origine du naissain pour distinguer celui qui est issu du captage naturel me semble, en tout état de cause, une idée intéressante, qui mérite d’être encouragée ; j’y suis tout à fait favorable. Un tel étiquetage devra être accompagné d’une véritable traçabilité à l’élevage, pour permettre le contrôle de l’origine du naissain.

Enfin, la question de la production des huîtres triploïdes doit être abordée dans le cadre plus global d’un projet de filière.

Le secteur ostréicole doit faire face depuis 2008, année de survenue des surmortalités, à un questionnement global sur le ou les modèles de production, qui dépasse la seule question des huîtres triploïdes.

Comme l’a souligné M. Vaugrenard, l’État s’est fortement engagé, et plus de 150 millions d’euros ont été mobilisés depuis 2008 en soutien direct des entreprises. L’accompagnement de la filière conchylicole sera poursuivi dans le cadre du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, le FEAMP, car le secteur de l’aquaculture en est une partie essentielle. Plusieurs mesures seront d’ailleurs gérées directement par les Régions, au plus proche des territoires.

Au-delà, les questions de régulation de la production, de gouvernance, de gestion des ressources génétiques, de pratiques culturales et de régulation du marché sont des problématiques englobantes qui nécessitent une mobilisation des structures professionnelles sur un projet de filière, dans une logique de partenariat avec l’État et les collectivités territoriales.

J’ai réuni il y a peu de temps l’ensemble des comités régionaux et le Comité national de la conchyliculture pour échanger sur ces enjeux d’avenir. Je leur ferai également part des principales conclusions et idées de ce débat très intéressant.

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