Intervention de Cédric Perrin

Réunion du 12 mai 2015 à 21h45
Débat sur les conclusions de la commission d'enquête sur l'organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en france et en europe

Photo de Cédric PerrinCédric Perrin :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le rapport dont nous discutons aujourd’hui porte sur un sujet d’une exceptionnelle gravité, qui n’était peut-être par encore identifiée comme telle au moment de la création de la commission d’enquête en octobre 2014. À cette date, en effet, il était difficile de se douter de l’importance qu’allaient revêtir ces travaux. Même si beaucoup étaient inquiets, peu d’entre nous imaginaient qu’un événement tragique viendrait secouer la France, poussant notre pays à entrer en guerre contre le terrorisme, le fanatisme religieux et l’extrémisme, pour défendre notre démocratie contre les menaces pesant sur nos libertés.

Pourtant, dès le mois de juin 2014, deux sénateurs sonnaient l’alarme et écrivaient qu’il était « indispensable que la représentation nationale soit pleinement informée […] des filières qui permettent le recrutement de ces apprentis djihadistes » et qu’elle puisse mesurer leur influence au sein de nos établissements pénitentiaires. Leur intuition s’est révélée tragiquement bonne ! C’est pourquoi je veux saluer le travail important réalisé par la commission d’enquête, qui présente aujourd’hui un rapport plus précis de la situation et 110 propositions adoptées à l’unanimité, dois-je le rappeler ?

Avant d’en venir aux propositions formulées par la commission d’enquête, un chiffre mérite d’être rappelé, celui du nombre de textes législatifs examinés par le Parlement ces dix dernières années. J’ai recensé pas moins de six textes visant à étoffer le cadre pénal ou à donner aux services de police ou de renseignement des moyens d’action plus efficace contre le terrorisme, sans compter les réformes relatives aux services de renseignement.

Nous ne pouvons donc nier la réalité : malgré la qualité de nos services de renseignement et de police, leurs limites, tant humaines que techniques, ont été atteintes. La commission d’enquête l’a d’ailleurs mis en évidence sans détour. Nous devons donc nous mobiliser pour que ces propositions viennent pallier nos difficultés, alors même que le pouvoir d’attraction des organisations terroristes ne cesse d’augmenter. Ces propositions doivent être appliquées avec fermeté, sans se préoccuper des minorités agissantes.

En janvier dernier, dans cet hémicycle, j’affirmais que la démocratie se défendait distraitement. Depuis lors, rien n’a changé dans les comportements. Au contraire, les leçons des événements de janvier semblent déjà oubliées par un certain nombre d’organisations bien pensantes.

Certaines propositions peuvent nous surprendre non pas par leur caractère innovant, mais au contraire par leur bon sens, ce qui nous oblige à nous interroger sur les raisons pour lesquelles elles ne sont pas encore mises en place sur notre territoire. Ainsi, je pense à la proposition n° 110, qui préconise d’enregistrer dans un fichier les personnes condamnées pour des actes de terrorisme, sur le modèle des dispositifs existant en matière d’infractions sexuelles. Un tel fichier, dont l’intérêt est incontestable, n’existe pourtant toujours pas. C’est aussi le cas de la proposition n° 4 sur l’échange d’informations entre les maires et les cellules de veille préfectorales ou encore de la proposition n° 29 sur l’accès aux fichiers de police et de justice pour les services de renseignement. Ces pratiques relèvent à l’évidence du bon sens.

La proposition n° 58, quant à elle, tend à instaurer des contrôles systématiques aux frontières de l’espace Schengen. C’est bien le minimum que l’on puisse mettre en œuvre pour atteindre nos objectifs...

Enfin, je pense surtout à la proposition n° 73, qui préconise l’adoption, « le plus rapidement possible » de la directive européenne sur le PNR, le rapport ajoutant qu’il s’agit là d’un « outil essentiel dans le domaine de la prévention du terrorisme ».

Que de temps perdu depuis l’affaire Merah et le drame qui a frappé l’école juive à Toulouse et les militaires à Montauban en 2012 ! Que de temps perdu depuis qu’un rapport d’information relatif aux premiers systèmes d’exploitation de grande ampleur des données des dossiers passagers, dits PNR, a été examiné à l’Assemblée nationale ! Que de temps perdu, surtout, depuis les attentats du 11 septembre 2001 ! Le PNR voyait alors le jour, et les États-Unis exigeaient de disposer des données relatives aux passagers décollant ou atterrissant sur leur territoire.

Pourtant, par la voix de l’actuel président de la République, l’opposition de l’époque refusait catégoriquement l’hypothèse, et même le débat.

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