Intervention de Léon Bertrand

Réunion du 11 juillet 2005 à 21h30
Ratification d'une ordonnance relative à l'aménagement du temps de travail dans le secteur des transports — Adoption définitive d'un projet de loi

Léon Bertrand, ministre délégué :

...le décret du 31 mars 2005 relatif à la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises a été pris, en application de l'ordonnance. Il a permis la mise en oeuvre concrète des dispositions concernant ce secteur.

Ce décret était très attendu par les organisations professionnelles de transporteurs, de nombreuses dispositions de l'ordonnance, notamment celles de l'article 1er, n'étant pas d'application directe ; c'est pourquoi ce décret est intervenu avant l'adoption du présent projet de loi de ratification.

Au demeurant - je réponds ainsi à une observation formulée dans votre rapport, monsieur Texier -, cela n'est pas contraire au droit et était totalement justifié par l'urgence que présentaient ces mesures d'assouplissement dans un secteur soumis à une très forte concurrence européenne.

Ces textes maintiennent la durée légale de temps de service des conducteurs ; ils augmentent modérément certaines durées maximales et permettent le décompte de la durée du travail sur une période de trois mois ou de quatre mois en cas d'accord.

Ils créent ainsi un système spécifique de décompte et d'octroi des repos compensateurs attribués aux salariés qui accomplissent des heures supplémentaires, un système plus simple et identique pour toutes les entreprises du secteur.

Pour répondre à une remarque formulée dans le rapport de M. Pierre, je précise que ce décompte du temps de travail sur trois ou quatre mois est sans incidence sur la rémunération des heures de temps de service. Cette dernière reste établie sur une base mensuelle, comme le prévoit l'accord collectif du 23 avril 2002 et comme s'y étaient engagées les organisations professionnelles lors de la concertation préalable à l'élaboration de l'ordonnance.

Si un besoin de clarification demeurait en ce domaine, en dépit de l'absence d'ambiguïté des positions exprimées par l'administration et par l'Union des fédérations de transports, en raison de la référence de l'accord du 23 avril 2002 à l'ancienne réglementation, il relèverait de la négociation collective et non de la loi ; dans cette hypothèse, les partenaires sociaux seraient amenés à adopter un avenant à l'accord du 23 avril 2002.

L'un des enjeux de la transposition des directives sur l'aménagement du temps de travail est le rapprochement des législations nationales en Europe. Ces directives, qui nous incitent à assouplir notre réglementation pour sauvegarder la compétitivité de nos entreprises, vont obliger la plupart de nos voisins à réduire la durée du travail de leurs conducteurs routiers. Ainsi, la durée de travail maximale moyenne hebdomadaire sur une période de quatre mois ne pourra en aucun cas dépasser quarante-huit heures.

Les deux rapports soulignent également l'enjeu de sécurisation juridique auquel cette ordonnance s'attache à répondre, en donnant une base législative adaptée aux dispositions réglementaires dérogatoires au droit commun.

Le texte du projet de loi de ratification qui vous est proposé, mesdames et messieurs les sénateurs, comporte, à la suite de l'amendement gouvernemental adopté par l'Assemblée nationale, plusieurs modifications concernant le travail de nuit.

Le paragraphe II de l'article unique est ainsi complété pour prendre en compte les accords collectifs intervenus en 2001 en matière d'aménagement et de réduction du temps de travail dans le secteur de la navigation intérieure. Ces accords limitent la durée quotidienne du travail des membres des équipages à douze heures par période de vingt-quatre heures et prévoient des périodes substantielles de repos à terre. Ils répondent donc à l'exigence de repos suffisant posée par la directive européenne pour les personnels navigants qui, en raison de leurs horaires, sont travailleurs de nuit.

Pour répondre à une observation formulée par M. Pierre dans son rapport, la référence dans le texte à un nombre de jours de repos en nombre suffisant peut, certes, paraître imprécise, mais toute autre référence, consistant par exemple à reprendre le nombre de jours de repos à terre prévu par les accords, aurait été trop rigide.

La nouvelle rédaction du paragraphe III tend à mieux articuler la transposition des deux directives sur l'aménagement du temps de travail qui s'appliquent aux conducteurs routiers : la directive 2002/2015 qui vise à limiter la durée du travail des personnels roulants travaillant la nuit, même occasionnellement ; la directive 2003/1988 qui a pour objet de limiter la durée du travail des travailleurs de nuit, c'est-à-dire des personnes qui travaillent habituellement pendant la nuit.

Elle vise également à mieux prendre en compte l'accord sur le travail de nuit intervenu dans le secteur du transport routier de marchandises le 14 novembre 2001. Elle limite à dix heures la durée quotidienne du travail des personnels roulants travailleurs de nuit, ainsi que celle des autres personnels roulants les jours où ils accomplissent une partie de leur travail entre vingt heures et cinq heures.

Du fait de ce paragraphe III qui le concerne spécifiquement, le personnel roulant des entreprises de transport routier n'est pas dans le champ d'application du paragraphe II.

Le paragraphe IV corrige une ambiguïté du texte de l'ordonnance en précisant que les dispositions de l'article L. 213-3, qui limitent la durée du travail des travailleurs de nuit, ne s'appliquent pas aux personnels roulants et navigants relevant de l'article L. 213-11, qui les soumet à des dispositions spécifiques en matière de durée du travail de nuit.

Enfin, le projet de loi de ratification comporte deux corrections destinées à améliorer la compréhension des textes pris dans le cadre de l'ordonnance.

En premier lieu, les dispositions issues des articles 2 et 3 de l'ordonnance sont modifiées de manière à améliorer la répartition entre les dispositions générales et les dispositions particulières de certains salariés du secteur des transports : ainsi, la définition générale du travailleur de nuit est maintenue à l'article L. 213-2 du code du travail, tandis que l'ensemble des éléments de cette définition propres aux personnels roulants et navigants des transports sont reportés à l'article L. 213-11.

En second lieu, aux termes de l'article 6 de l'ordonnance, la mention des personnels employés sur les navires est supprimée à l'article 7 de la loi du 13 juin 1998. Cette mention est en effet superflue puisque ces salariés sont régis par le code du travail maritime et non par le code du travail.

Plusieurs amendements ont été déposés sur ce texte. Ils répondent à des difficultés d'organisation résultant de l'application des dispositions de l'ordonnance relatives aux pauses, d'une part, dans le transport sanitaire et, d'autre part, dans le transport routier de voyageurs sur des lignes régulières de moins de 50 kilomètres, notamment dans les zones périurbaines.

Ces difficultés sont réelles. Il est dommage que, en raison sans doute de la complexité des textes, elles n'aient pas été soulevées par les professionnels lors de la consultation sur le projet d'ordonnance qui avait été organisée par Gilles de Robien.

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