Intervention de Cécile Cukierman

Réunion du 20 mai 2015 à 14h00
Conditions de saisine du conseil national d'évaluation des normes — Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Cécile CukiermanCécile Cukierman :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, depuis des années, les conséquences de la prolifération normative et de l’insécurité juridique qui en résulte nourrissent un flot croissant de critiques. Nous dressions déjà ce constat en 2013. Aujourd’hui, nous observons que les textes qui nous sont soumis ont de plus en plus d’articles. Le projet de loi Macron, dont nous venons d’achever l’examen, en compte près de 300. Le projet de loi NOTRe, qui, comme l’a rappelé M. le secrétaire d’État, reviendra mardi prochain en deuxième lecture dans cet hémicycle, n’échappe pas à la règle, même s’il ne tombe pas dans cet excès. N’oublions pas non plus les projets de loi de simplification du droit. Ces textes, qui visent à mettre un terme à l’inflation législative, pourraient être résumés par cette formule : pour faire moins de normes, faisons plus de normes !

Ces législations infligent aux collectivités territoriales des obligations toujours plus nombreuses. Ces dernières se traduisent par autant de coûts supplémentaires ou d’allongements des délais de procédure. Néanmoins, cette inflation normative ne nous semble pas due, comme l’indique le rapport, au seul « zèle normatif » des administrations centrales et déconcentrées de l’État, un zèle qui serait fondé sur une « croyance inconditionnelle » dans la capacité des normes à « améliorer l’intérêt général ». Cette vision caricaturale minimise l’exigence de clarté du droit figurant dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Il n’y a pas de « volonté perverse de quelques administrateurs » mais une volonté de l’ensemble des fonctionnaires, quel que soit le service auquel ils appartiennent, de bien faire, de produire la norme la meilleure, et ce au service de la sécurité juridique.

Nous approuvons la création du CNEN. Toutefois, même si sa saisine est élargie, cette instance ne suffira pas à desserrer l’étau normatif dans lequel les collectivités territoriales sont prises.

Nous l’avons déjà dit lors des débats de 2013 : nos concitoyens exigent toujours plus de sécurité, au sens large du terme. Ces attentes sont elles-mêmes alimentées par des peurs, lesquelles sont entretenues par des discours alarmistes et catastrophistes. Cette demande de sécurité émise par les citoyens est relayée par les pouvoirs publics, lesquels se font l’écho des inquiétudes de la population par l’adoption de nouvelles normes. J’ajoute que les médias ont, en la matière, leur part de responsabilité. Que ce soit dans la presse écrite ou dans les émissions télévisées, cette interrogation est omniprésente : « Mais que font les pouvoirs publics ? » À chaque instant, pour chaque incident de la vie, on exige que l’action publique garantisse davantage de sécurité, ce qui incite à aller toujours plus loin sans jamais revisiter l’existant.

Toutefois, les normes ne sont pas seules en cause dans la perte de liberté des autorités locales. Un autre facteur, ne relevant ni de la loi du 17 octobre 2013 ni de la présente proposition de loi, est la multiplication des cartes, des schémas et autres découpages du territoire.

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