Vous avez fait le choix de parler de « l'État islamique » ; or, depuis plusieurs mois, nous avons fait le choix d'éliminer le mot d'« État » et de parler de « Daech ». Je crois qu'il serait bon de maintenir ce choix car, vous l'avez dit, ce n'est ni un État de droit, ni un État de non-droit. Prononcer le mot d'État, c'est déjà le reconnaître !
En second lieu, vous avez estimé qu'il ne s'agissait pas d'une organisation militaire. Néanmoins, ils ont tout ce qu'il faut pour constituer une force militaire : des armes, de l'argent pour acheter les troupes, ce qu'ils font, y compris chez nous. L'arsenal est grand !
Il ne faut donc pas se cacher derrière cet argument : ce n'est pas une organisation militaire. Néanmoins, ils se battent sur le terrain avec des armées, des armes et des moyens, sans compter l'Internet, qu'ils maîtrisent largement.
Vous avez raison de dire qu'il s'agit d'un ordre nouveau : à nous, en termes politiques d'essayer de mieux le percevoir et mieux le définir, et surtout d'étudier ce que peut devenir la dynamique qu'il a créée.
Par ailleurs, Daech n'est pas né de rien, en décembre 2013. J'aurais aimé que vous analysiez davantage les origines de ce monstre. Qui a participé à sa naissance ? On le sait un peu, mais c'est une première analyse à réaliser.
En second lieu, quel a été le rôle de la communauté internationale ? Je suis surprise que vous parliez des Chiites, des Sunnites, et que vous n'évoquiez jamais l'Iran, l'Arabie saoudite, la Turquie, voire la Russie !
Je connais bien la Turquie et le problème des Kurdes. Il faut évoquer le rôle de ce pays, notamment par rapport aux Kurdes. Vous parlez en permanence de l'Irak ; je ne centrerai pas tout sur l'Irak, puisqu'il n'en restera bientôt plus rien. Néanmoins, ce sont les Kurdes de Syrie et d'Irak qui se battent sur le terrain, et non ceux de Turquie.
J'étais à Kobané il y a deux semaines. J'y suis entrée par la Turquie. Il faudrait étudier le rôle de la Turquie de plus près. On a tous vu ces images, à quelques kilomètres de Kobané, des troupes turques qui ne participaient pas à la guerre.
Kobané, ville de 200 000 habitants, est maintenant détruite. Les 50 000 réfugiés qui en étaient partis sont aujourd'hui revenus. La Turquie empêche aujourd'hui l'aide humanitaire de passer. Il faut donc que la communauté internationale réclame très vite un couloir humanitaire. La vie de 50 000 réfugiés, dans Kobané et les villages voisins, en dépend. C'est cette analyse des perspectives politiques qu'il faudrait faire !