Intervention de Jean Arthuis

Réunion du 23 décembre 2009 à 14h30
Loi de finances rectificative pour 2009 — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixte paritaire

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, en remplacement de M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’ai la charge, en l’absence de notre collègue Philippe Marini, rapporteur général, retenu dans son département, de vous rendre compte des délibérations de la commission mixte paritaire qui s’est tenue lundi dernier 21décembre au Sénat sur le troisième projet de loi de finances rectificative pour 2009.

Ce collectif, dont nous n’oublions pas qu’il tend d’abord à prendre acte – avec un déficit de plus de 140 milliards d’euros – des conséquences budgétaires de la politique de relance destinée à protéger l’économie française de la crise financière, comporte, sur le plan législatif, deux volets.

Tout d’abord, il présente un ensemble cohérent de dispositifs relatifs à la lutte contre la fraude fiscale et l’utilisation des paradis fiscaux et juridiques, d’autant plus intéressant qu’il reflète aussi la volonté du Gouvernement de lutter contre les causes structurelles de la crise.

Ensuite, il regroupe des mesures diverses et variées résultant, comme il est de coutume, d’initiatives, le plus souvent officieuses, du Gouvernement, sur le principe desquelles je reviendrai en conclusion de mon propos.

La commission mixte paritaire a donc traité de ces deux volets, certes d’inégale importance, ce qui l’a conduit, en dépit de l’absence de divergences de fond, à délibérer, dans un excellent climat, pendant plus de deux heures et demie sur les 71 articles restant en discussion.

Les statistiques témoignent de la convergence des positions entre les deux assemblées : si un seul article a été adopté dans la rédaction proposée par l’Assemblée nationale, quarante et un articles l’ont été dans celle qui était issue des délibérations du Sénat, auxquels il faut ajouter trois suppressions conformes.

Mais la commission mixte paritaire a aussi bien travaillé, puisqu’elle a rédigé vingt articles et s’est accordée sur six suppressions.

Sur les huit amendements présentés à l’Assemblée nationale par le Gouvernement sur le texte adopté par la commission mixte paritaire, j’ai noté qu’un certain nombre avaient été sagement retirés par le Gouvernement ou rejetés par nos collègues députés, ce qui montre bien que le Gouvernement ne doit pas, sur des sujets somme toute mineurs, tenter de revenir sur les conclusions acquises à une large majorité par la commission mixte paritaire. Mais peut-être une telle attitude était-elle la conséquence de votre déplacement en Chine, monsieur le ministre. Je veux croire que, si vous aviez été là, le Gouvernement n’aurait pas déposé tant d’amendements sur les conclusions de cette commission mixte paritaire.

À cet égard, vous m’autoriserez, mes chers collègues, à saluer la vigilance et l’esprit de résistance manifestés par nos collègues députés.

Permettez-moi de revenir un instant sur la position très ferme adoptée par la commission mixte paritaire pour inviter le Gouvernement à faire preuve de la plus grande attention concernant la lutte contre les paradis fiscaux et juridiques.

Je ne rappellerai pas ici les circonstances qui avaient conduit le Sénat à proposer, avant que M. le ministre nous demande de le retirer, un amendement permettant de considérer comme non coopératifs, à compter du 1er janvier 2010, les États ou territoires qui, à cette date, ayant conclu avec la France une convention d’assistance administrative, auraient manifesté leur intention de suspendre sa ratification. Tout juste pourrais-je faire remarquer que le pays ami limitrophe qui avait pu se sentir concerné n’est pas un cas isolé et que d’autres pays, parfois tout aussi proches, marquent à mon sens un attachement excessif à la préservation du secret bancaire.

Le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire, sans modifier l’équilibre général de l’article 14 du projet de loi, le précise sur une série de points.

En ce qui concerne les emprunts, le Sénat avait accordé une « clause de sauvegarde » : ainsi, les produits des emprunts ne subissent pas de prélèvement à la source si le débiteur démontre que les opérations auxquelles correspondent ces revenus et produits ont principalement un objet et un effet autres que de permettre la localisation de ces revenus et produits dans un État ou territoire non coopératif.

La commission mixte paritaire, sur proposition de l’Assemblée nationale, a précisé la clause de sauvegarde applicable à certaines prestations de services, en ouvrant la possibilité pour une entreprise procédant à un versement à destination d’un État ou territoire non coopératif d’échapper au prélèvement à la source de 50 % si elle est en mesure de démontrer la réalité des opérations concernées.

En outre, la commission mixte paritaire a inclus les prestations artistiques et sportives dans le champ de ce dispositif. Ainsi, dès lors que les paiements ne correspondront pas à des salaires, le prélèvement de 50 % s’appliquera également, sauf si, là encore, ces opérations n’ont ni pour objet ni pour effet de placer des fonds dans un État ou territoire non coopératif.

Comme je l’ai mentionné dans mes propos introductifs, la plupart des apports du Sénat ont été repris par la commission mixte paritaire, qu’il s’agisse bien sûr des amendements manifestement inspirés par le Gouvernement ou des initiatives parlementaires, notamment celle que nous appelons désormais « la procédure Gouteyron », qui permet au ministre du budget de suspendre le bénéfice des avantages fiscaux pour les dons consentis à des organismes pour lesquels la Cour des comptes ou les commissaires aux comptes ont constaté de graves irrégularités de gestion.

Je souhaite revenir sur quelques points particuliers. J’évoquerai tout d’abord le report de l’application de la taxe d’habitation sur les résidences mobiles terrestres.

Il s’agit d’un sujet bien connu, qui nous vaut une fois encore une série d’atermoiements. L’Assemblée nationale avait voulu reporter une fois de plus l’entrée en vigueur de cette taxe ; le Sénat, finalement suivi par la commission mixte paritaire, est favorable à ce que l’on cesse de différer, pour des raisons pratiques, la perception d’une taxe emblématique, ainsi que de la redevance audiovisuelle.

Le Gouvernement, en votre absence, monsieur le ministre, a tenté, mais en vain, de revenir sur cet accord en prévoyant d’assortir le report d’un rapport. Il n’a pas été suivi, ce qui montre que nos collègues députés ont, comme nous, fait de ce sujet une question de principe, dès lors que le paiement de l’impôt participe de la citoyenneté fiscale et s’inscrit, à cet égard, dans le débat actuel sur l’identité nationale, laquelle implique, selon nous, la participation à la charge commune, par le biais d’une contribution citoyenne.

Je souhaite évoquer maintenant l’aménagement du bouclier fiscal.

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