Pour ma part, j’ai eu le privilège de vivre la mise en place des schémas interrégionaux de massif, qui sont peut-être une préfiguration de ce que seront ces schémas régionaux. Ils s’étendent en effet sur de grandes distances et fédèrent un certain nombre de schémas préalables au sein d’un document unique.
Toutefois, ces schémas de massif, tels qu’ils existent aujourd'hui, ne sont que les fils rouges, les références pour la mise en œuvre des politiques publiques d’investissement. Ils ne possèdent un caractère ni prescriptif ni même directif.
Or, les schémas régionaux d’aménagement posent le problème de leur articulation avec les autres documents existant en matière d’urbanisme. Je rappelle que, outre les SCOT, il existe, pour un certain nombre de territoires, les directives territoriales d’aménagement. En outre, pour les zones de montagne, il existe une disposition qui, bien que n’ayant jamais été activée, figure toujours dans la loi, je veux parler de la prescription particulière de massif.
Le problème est que tout document nouveau est susceptible de servir de point d’appui à des recours contre des projets d’aménagement devant les juridictions administratives. Comment la « prise en compte » sera-t-elle interprétée par la juridiction administrative ? Le schéma régional sera-t-il considéré comme suffisamment en rapport avec le SCOT et le PLU ? Personne ne le sait aujourd'hui ! La certitude que nous avons, c’est qu’il y aura des recours qui s’appuieront sur cette « prise en compte » et, le cas échéant, sur le fascicule dont il est fait état dans l’amendement du Gouvernement et qui devra préciser les règles d’aménagement avec lesquelles il faudra que les documents d’urbanisme soient compatibles. Nous avons là un nid à contentieux potentiel !
Il y a donc deux sujets.
Premièrement, s’agissant de l’élaboration du document, les propositions de MM. Michel Mercier, Didier Guillaume ou Gérard Collomb doivent permettre d’éviter que la loi des grands nombres n’impose des modèles de développement dont ne veulent pas ceux qui vivent sur certains territoires spécifiques.
En effet, plus les régions seront grandes, plus les différences entre territoires y seront marquées et plus l’élaboration du schéma sera compliquée. C’est la première difficulté, à laquelle, toutefois, il est possible de trouver une réponse.
Deuxièmement – et c’est le vrai sujet –, ce document ne doit pas avoir un caractère de référence sur lequel pourraient s’appuyer d’éventuels recours. Le risque, c’est d’avoir un document trop précis, qui entre par trop dans le détail. Il n’est pas nécessaire qu’il s’intéresse à la parcelle du PLU, ni même au PLU lui-même ! Sinon, des recours seront engagés au titre desdits documents.
On vous dira par exemple que la ressource en eau, là où vous aurez prévu d’urbaniser, n’est pas suffisante. Les recours contre des grands projets d’aménagement, singulièrement des projets touristiques ou d’infrastructure, pourront s’appuyer sur ce type de document. Il faut impérativement que nous évitions de tomber dans ce travers, car nous connaissons, les uns et les autres, les délais considérables, hors-normes, qui existent entre le moment où on décide un aménagement et le moment où on peut l’engager. En effet, ces délais n’ont fait que s’allonger depuis dix ans.