Intervention de Pierre Hérisson

Réunion du 23 décembre 2009 à 14h30
Entreprise publique la poste et activités postales — Adoption des conclusions du rapport d'une commission mixte paritaire

Photo de Pierre HérissonPierre Hérisson, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire :

Monsieur le président, madame, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici réunis pour examiner, avant que nos travaux ne soient suspendus pour cette fin d’année, un texte qui a beaucoup occupé le Sénat.

Adopté par notre assemblée le 9 novembre dernier à l’issue de débats que l’on peut qualifier d’approfondis, le projet de loi a été modifié par l’Assemblée nationale la semaine dernière. Réunie hier, la commission mixte paritaire a élaboré un texte commun que j’ai maintenant l’honneur de vous présenter.

Avant d’aborder le fond, je souhaite remercier M. Jean-Paul Emorine, président de notre commission de l’économie, qui a assuré la présidence de cette commission mixte paritaire, ainsi que M. Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, qui a exercé les fonctions de vice-président. C’est également avec un grand plaisir que je remercie mon collègue Jean Proriol, rapporteur pour l’Assemblée nationale, avec qui l’accord a été complet sur toutes les modifications que la commission mixte paritaire a apportées.

Bien entendu, j’ai souhaité que ce texte soit le plus proche possible de celui du Sénat, et je crois que c’est le cas sur la plupart des questions. Il n’en demeure pas moins qu’une commission mixte paritaire est mixte, comme son nom l’indique, et que sa position reflète à la fois le point de vue des députés et celui des sénateurs.

Je me réjouis en premier lieu que les aspects majeurs du texte adopté par le Sénat demeurent dans celui qui vous est proposé.

Ainsi le caractère public du capital de l’entreprise est-il garanti, ce capital étant détenu uniquement par l’État et d’autres personnes morales de droit public – nous ne le répéterons jamais assez ! –, hors actionnariat du personnel.

Le caractère de service public national de La Poste est également confirmé : les dispositions de l’article 1er sont en effet restées inchangées, dans la rédaction adoptée par le Sénat. Seule la date d’entrée en vigueur, pour les raisons que vous connaissez, a été repoussée au 1er mars 2010.

S’agissant des missions de service public de La Poste, l’Assemblée nationale a ajouté la mention « d’intérêt général », en référence à la notion correspondante en droit communautaire. Elle a également précisé le contour de la mission d’accessibilité bancaire. Il faut noter qu’elle a retiré le dernier alinéa, aux termes duquel le groupe La Poste devait être soumis au droit commun des sociétés dans la mesure où celui-ci n’est pas contraire au présent projet de loi, au motif que cette disposition introduisait une redondance avec l’article 1er.

Le Sénat avait par ailleurs renforcé la mission d’aménagement du territoire en inscrivant dans le projet de loi un nombre minimal de 17 000 points de contact sur l’ensemble du territoire. Il a été suivi par l’Assemblée nationale, qui a clarifié le contenu de certaines dispositions.

Ainsi, l’accès à internet dans les bureaux de poste, prévu par notre assemblée, sera d’abord effectif dans une centaine de bureaux de poste. S’agissant des horaires d’ouverture, ils devront s’adapter aux modes de vie, notamment par l’ouverture d’un bureau jusqu’à vingt et une heures dans les villes de plus de 50 000 habitants et par un encadrement des réductions de ces horaires.

Enfin, le changement de statut de La Poste n’aura pas d’incidence sur les partenariats locaux de l’opérateur. Cette dernière disposition a été sécurisée sur le plan juridique par la commission mixte paritaire, qui, sur les autres éléments de l’article 2 bis, n’a apporté que des modifications de nature rédactionnelle.

Après le contenu de cette mission, le Sénat en a garanti le financement en prévoyant une révision annuelle de l’allégement de fiscalité locale dont bénéficie La Poste, sur la base d’une évaluation du coût de ce réseau réalisée par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP. L’Assemblée nationale a conservé ce mécanisme, en prévoyant toutefois qu’un décret précisera la méthode d’évaluation mise en œuvre. La commission mixte paritaire vous propose de demander la publication de ce décret avant le 31 mars 2010 afin de laisser à l’ARCEP le temps de procéder à l’évaluation dans de bonnes conditions.

S’agissant du contrat d’entreprise, les députés ont apporté des évolutions qui me paraissent souhaitables, notamment la remise d’un bilan provisoire du contrat et la fixation dans celui-ci d’objectifs de qualité, ainsi que l’obligation pour La Poste de lutter contre le surendettement.

Concernant la nomination du président de La Poste, je dois préciser deux points afin de dissiper tout malentendu.

D’une part, les députés ont supprimé la phrase qui prévoyait de demander l’avis des commissions permanentes compétentes sur cette nomination ; cette disposition est en effet du ressort de la loi organique qui vient précisément d’être adoptée par le Sénat voilà deux jours.

D’autre part, l’interdiction pour le président de La Poste de détenir des responsabilités dans d’autres entreprises l’empêchait, par exemple, de siéger au conseil d’administration de ses filiales, ce qui n’était pas souhaitable. C’est pourquoi cette disposition a également été retirée.

L’Assemblée nationale a prévu par ailleurs que l’État peut s’opposer à la cession par La Poste d’un bien ou d’une de ses filiales lorsque cette cession compromet la bonne exécution de ses obligations. D’aucuns considéreront sans doute qu’il s’agit d’un retour en arrière, mais il est des opérations d’urbanisme et des projets importants des collectivités publiques qui méritent un arbitrage.

Le statut des fonctionnaires constitue un point important. J’ai bien entendu la préoccupation des fonctionnaires dits « reclassés », dont la carrière a été trop longtemps bloquée. Le Gouvernement a pris le 14 décembre un décret qui tire les conséquences de l’arrêt du Conseil d’État de décembre 2008 : désormais, les fonctionnaires reclassés bénéficieront de promotions. La demande d’une reconstitution de carrière a toutefois été supprimée par l’Assemblée nationale en raison du caractère exceptionnel d’une telle disposition et de son coût. La commission mixte paritaire n’est pas revenue sur cette suppression.

S’agissant à présent du régime de retraite complémentaire des agents de droit privé, le mécanisme introduit par le Sénat a été légèrement modifié par l’Assemblée nationale, qui a prévu que, faute d’un accord à la mi-2010 entre les organismes concernés, un décret permettrait de garantir la pérennité de ce régime pour les salariés.

Le report au 1er mars du changement de statut a par ailleurs imposé à la commission mixte paritaire de modifier l’article 11 afin d’éviter toute nécessité de prendre un arrêté comptable en cours d’année.

Enfin, l’Assemblée nationale a prévu une période transitoire pour le passage au droit commun en matière d’obligation d’emploi des travailleurs handicapés, mutilés de guerre et assimilés.

S’agissant à présent du titre II, la commission mixte paritaire a décidé à l’article 14, contrairement au choix retenu par l’Assemblée nationale, de maintenir un rythme triennal pour la remise au Parlement d’un rapport sur les conditions d’exécution par La Poste de sa mission de service postal universel, dans la mesure où le contrat de présence postale territoriale a également une durée de trois ans.

L’Assemblée nationale, au même article 14, a reformulé les obligations comptables auxquelles La Poste est astreinte.

À l’article 16, les députés ont modifié le critère d’exemption de la contribution au fonds. Là où le Sénat renvoyait à un seuil de chiffre d’affaires, l’Assemblée nationale renvoie à un seuil exprimé en nombre d’envois de correspondance.

S’agissant du fonds de compensation du service universel, je vous rappelle que le Sénat avait décidé qu’il assurerait la compensation des coûts découlant de l’ensemble des prestations du service universel et non des seuls envois de correspondance. L’Assemblée nationale et la commission mixte paritaire ont complété ce dispositif ; ainsi, les contributions dues par les opérateurs autorisés seront assises sur l’ensemble des prestations du service universel et non sur les seuls envois de correspondance.

L’Assemblée nationale a également prévu, dans une disposition qui a été encadrée par la CMP, que l’ARCEP soit informée par les opérateurs de toute modification susceptible d’affecter la pérennité de son exploitation.

Enfin, l’Assemblée nationale, à l’article 20, a précisé que les avis émis par l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, concernant les tarifs du service universel seraient systématiquement publics. Elle a également enlevé tout pouvoir d’appréciation à l’ARCEP pour la prise d’une mesure de modification ou de suspension d’un projet de tarifs, lorsque les principes tarifaires s’appliquant au service universel ne sont manifestement pas respectés. Dans ce cas, le non-respect de ces principes par La Poste devra être manifeste pour autoriser l’ARCEP à intervenir. Enfin, la surveillance de l’ARCEP sera limitée à la seule comptabilité de La Poste relative au service universel.

Le texte qui vous est ici proposé résulte, comme vous pouvez le voir, d’une véritable coopération entre les deux assemblées et je me réjouis que nous ayons pu nous entendre sur tous les points majeurs.

Notre assemblée a apporté son « expertise sénatoriale », celle d’élus au contact des réalités locales, pour reprendre l’expression de son président, Gérard Larcher, qui a donné en exemple le travail effectué sur le projet de loi dont nous discutons, lors de son allocution de fin d’année hier après-midi.

L’Assemblée nationale, tout en validant dans une large mesure les choix faits par le Sénat, a apporté de nombreuses améliorations et dispositions nouvelles pertinentes.

La commission mixte paritaire vous propose, en conséquence, mes chers collègues, d’adopter le projet de loi dans la rédaction qu’elle a retenue hier soir.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion