Intervention de Jean-François Husson

Réunion du 28 mai 2015 à 15h00
Nouvelle organisation territoriale de la république — Article 14

Photo de Jean-François HussonJean-François Husson :

J’essayerai de ne pas répéter ce qui a déjà été dit et d’apporter quelques arguments pour défendre mon point de vue et montrer l’intérêt du débat.

L'Assemblée nationale a donc rétabli le seuil de 20 000 habitants. Avec les cinq ou six grandes familles de dérogations, ce seuil serait acceptable, puisque la moitié des intercommunalités seraient concernées.

On peut alors s’interroger : pourquoi légiférer pour moins de la majorité des intercommunalités ? Ne faudrait-il pas, au contraire, renverser le sablier, en préparant une loi qui donnerait satisfaction à la grande majorité – disons au moins 80 % – des intercommunalités, tout en prévoyant quelques dérogations ? Un tel dispositif me paraîtrait plus intéressant. C'est l’objet même d’une loi ; en tout cas, c’est ainsi que je l’envisage.

Après avoir entendu les propos des uns et des autres, je voudrais revenir à une époque pas si lointaine que cela : la campagne présidentielle de 2012. Des engagements avaient été alors pris devant les Français – notamment le maintien des dotations à niveau constant pendant toute la durée du mandat –, mais il n’avait pas été question de la réforme qui nous est aujourd’hui proposée. Et depuis, le Président de la République et les gouvernements successifs ont fait des déclarations… Vous avez mangé votre chapeau au moins trois ou quatre fois ! À l’époque, j’ai participé – la démocratie, c'est aussi cela ! – aux états généraux de la démocratie territoriale et entendu, à la Sorbonne, le gouvernement, aux côtés du Président de la République, présenter le grand mouvement de décentralisation. Le premier texte n’était pas encore rédigé qu’un deuxième projet arrivait déjà ; le deuxième n’avait pas pris corps qu’un troisième était présenté...

Entre-temps – faut-il le rappeler ? –, des élections sont intervenues, comme dans toute démocratie en bonne santé. Au printemps 2014 et au printemps 2015, les Français se sont exprimés. Dès lors, il y avait deux solutions : soit on considère que, par leur vote, ils ont émis des souhaits qu’il faut prendre en compte ; soit on estime que les consultations nationales vont, certes, de pair avec la démocratie, mais qu’on ne doit pas changer de cap, même si nos concitoyens expriment majoritairement une forme de désaccord.

Pour ma part, je considère que les Français nous ont adressé des messages à l’occasion des élections tant municipales que départementales. Je le dis avec sérénité, mais aussi avec inquiétude, si le Gouvernement ne prend pas en compte ces messages, je crains que le réveil ne soit douloureux pour certains d’entre nous lors du prochain scrutin. Personnellement, je crois à la démocratie, et je n’ai envie de jouer ni avec le feu ni avec le diable.

J’évoquerai maintenant le cas des cantons. Sauf erreur de ma part, on a aujourd’hui un dispositif qui comprend les arrondissements, les circonscriptions législatives et sénatoriales – elles correspondent aux départements –, les intercommunalités, les cantons. Pour les cantons, il n’existe pas de règle unique et uniforme pour toute la France : chaque département a sa propre règle, et la taille des cantons varie selon les départements.

Certains estiment que 36 000 communes, c'est beaucoup trop. Mais c'est l’histoire qui a fait la France, et il en va ainsi depuis des siècles. On ne va pas rayer d’un trait de plume ce qui fait la singularité de notre pays. Faites confiance aux élus, à leur capacité à travailler ensemble ! Il faut plutôt tendre la main, mettre en place des passerelles et donner les moyens de retisser ce lien de confiance entre les élus des territoires, qu’ils soient urbains, périurbains ou ruraux. Nous en avons la possibilité.

Je terminerai mon propos en citant l’exemple du schéma de cohérence territoriale, ou SCOT, que j’ai la chance d’animer avec un certain nombre d’élus et qui est, de par le nombre de communes qu’il concerne, le plus important de France. Sans bruit, on est passé de 450 à 476 communes, de 30 à 20 intercommunalités et à 570 000 habitants, qui sont tous représentés au travers d’un comité syndical, qui est passé de plus de 200 élus à 90. Le SCOT a été approuvé en moins de six ans. Aujourd’hui, il est mis en œuvre. Preuve en est que, lorsque les élus, avec les services de l’État et l’ensemble des autres collectivités, se prennent en main, il est possible, en se faisant confiance, de construire des projets au service de l’attractivité et du dynamisme de nos territoires, et donc au service de la France.

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