Nous avons déjà eu l’occasion, cet après-midi, de nous exprimer sur l’article 14, mais je voudrais réagir, en défendant la position de la commission, à l’intervention de notre collègue Michel Delebarre, qui, une fois de plus, ressasse le vieil argument consistant à faire de ceux qui s’en tiennent au seuil de 5 000 habitants des passéistes. On a même utilisé le terme « caricature » pour décrire la position qui est la nôtre.
Prenant pour référence mon département, j’ai appliqué le dispositif que le Gouvernement propose. Nous sommes concernés par le a). J’ai donc fait le calcul : il faut 9 350 habitants pour qu’une intercommunalité soit autorisée par le préfet dans le cadre de ce texte.
Or le seuil de 5 000 habitants n’empêche absolument pas aujourd’hui les élus de mon département, qui sont des gens modernes, d’élaborer des plans qui leur permettront de grossir jusqu’à 8 000, 9 000, 10 000, 15 000 habitants, peut-être. Mais, en étant libres de le faire, ils gagneront en responsabilités. Ce n’est pas la loi qui les obligera à faire, mais eux qui l’auront décidé, par rapport à un territoire qu’ils estiment pertinent, et, surtout, en fonction d’un projet qui les rassemble et qui les fédère.
Monsieur Delebarre, parler de 5 000 habitants ne consiste pas pour nous à dire qu’il faut que les communautés de communes aient 5 000 habitants, pas plus. Pas du tout ! Nous voulons simplement donner de l’air, de l’oxygène aux élus, que nous tenons pour des personnes responsables et capables de voir où est l’intérêt de leur territoire.
Je suis très sensible à la plaidoirie, ou plutôt au réquisitoire de Jacques Mézard. §Car vous n’étiez pas avocat, à l’instant, mon cher collègue, mais plutôt procureur, lorsque vous exposiez vos arguments, qui ont eu un fort retentissement dans cet hémicycle. Vous avez très bien démontré que, contrairement à une opinion répandue, relayée par M. le secrétaire d’État, dans cette affaire, ce n’est pas l’avis de l’Assemblée nationale contre l’avis du Sénat : c’est l’avis d’un certain nombre de personnes, qui appartiennent à des cercles de pensée parfaitement identifiés et décrits par vous, cher collègue, contre les élus que nous sommes, représentant les territoires.
Et si l’Assemblée nationale devait s’entêter, ce ne serait pas pour conforter les choix des élus sur le terrain. De toute manière, ce ne sont pas les députés qui décident, mais d’autres, en coulisses, alors que nous, sénateurs, sommes libres et indépendants.
J’attends d’ailleurs avec impatience que les députés aillent rendre compte de leurs travaux devant les élus des communes et des intercommunalités, et défendent, dans certains départements, le seuil de 20 000 habitants. Ils seront particulièrement bien reçus…
Nous, sénateurs, avons plus qu’un objectif, une ambition : donner plus de responsabilités aux élus.
Notre collègue Pierre-Yves Collombat a évoqué la sérénité des anciens. Vous me permettrez de terminer mon intervention en marquant d’une pierre blanche cette journée qui a été pour moi importante.
Nous avons échangé cet après-midi, dans le cadre des questions cribles thématiques, avec Mme la ministre de l’éducation nationale, sur la réforme du collège et des programmes. Mme Vallaud-Belkacem nous a affirmé qu’il n’était absolument pas question de supprimer le latin et le grec. Au contraire, a-t-elle dit, le Gouvernement va donner la possibilité à tous les élèves qui le souhaitent d’apprendre ces deux langues. Je dois vous avouer que je suis libéré d’un poids, car parler des langues dites « mortes » – elles ne le sont pas forcément – c’est presque se vouer à la clandestinité.
Aussi, je vais terminer tout à fait en citant une devise grecque, humble hommage à la sérénité des Anciens, en nous invitant à regarder les choses avec le recul nécessaire, ce recul qui nous est autorisé ici : Ό χρόνος διδάσκει τούς άνθρώπους, c’est le temps qui instruit les hommes.