Chaque année, c’est une ardoise de 1 milliard d’euros que l’État laisse à La Poste ! Sans compter le fait que l’État a également ponctionné une soulte de 2 milliards d’euros en 2006 au titre du financement des retraites et un dividende important depuis deux ans. Le passage en société anonyme légitimera d’ailleurs la perception d’un dividende encore plus important.
La seule disposition prise en termes d’aménagement du territoire réside en une augmentation de l’exonération de taxe professionnelle dont bénéficie La Poste afin de financer le fonds de péréquation. Connaissant le manque à gagner que va générer la suppression de la taxe professionnelle pour les collectivités locales, nous sommes inquiets quant aux sommes qui seront réellement versées au fonds de péréquation. De plus, instrumentaliser l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, l’ARCEP, pour évaluer ce coût, outre le fait que cela renforce les pouvoirs déjà exorbitants confiés à cette Autorité, n’est pas de bon augure quand on sait que sa mission première est de faire de la place pour les nouveaux entrants.
En tant qu’élu d’un département touché par la disparition progressive des services publics, la question de la présence postale me touche particulièrement. Certes, le texte prévoit le maintien de 17 000 points de contact, mais les services rendus par un point poste, par un bureau de poste de plein exercice ou par une agence postale communale sont fondamentalement différents, vous le savez bien.
Les élus que nous sommes ne peuvent ignorer que la présence postale dans les territoires ruraux n’est pas qu’une simple question de distribution du courrier ou d’accès aux services bancaires, même si ces services constituent le socle de droit minimum auquel les usagers doivent pouvoir prétendre. Le postier est également un maillon essentiel de la cohésion sociale permettant de lutter contre l’isolement des personnes les plus fragiles.
Mais cette dimension sociale s’étiole depuis bien longtemps. En effet, la direction de La Poste est d’ores et déjà tournée vers la recherche d’une rentabilité accrue : suppression de guichets, de bureaux non rentables, allongement des circuits des facteurs, suppression massive d’emplois de fonctionnaires, externalisation continue de l’ensemble des activités. Le groupe La Poste compte ainsi aujourd'hui trois cents filiales.
Ce chemin est celui qu’a déjà emprunté France Télécom, avec la triste actualité que nous connaissons. Les conditions de travail des salariés de La Poste sont déplorables et vont encore se dégrader. Pourtant, vous avez fait le choix de précariser un peu plus ceux-ci, en les alléchant avec la possibilité d’un actionnariat salarié. Or l’urgence pour les agents du service public postal n’est pas de rentrer dans le jeu de Monopoly géant de la finance mondialisée : elle est de bénéficier d’une hausse de salaire, les salaires des postiers étant ridiculement bas.
L’extension des horaires d’ouverture des bureaux de poste pourrait être une idée intéressante si elle ne venait pas détériorer encore les conditions de travail des salariés. Déréglementer le temps de travail ne peut conduire qu’à des amplitudes horaires infernales pour s’adapter à tous les rythmes.
L’Assemblée nationale a supprimé la disposition interdisant au PDG de La Poste d’exercer des responsabilités dans d’autres entreprises. Nous considérons qu’il s’agit là d’une erreur. Si le simple objectif de ce correctif était de permettre à M. Bailly de présider les filiales de La Poste, une autre rédaction était possible. On voit donc bien que c’est une autre logique que vous poursuivez !