Intervention de Marylise Lebranchu

Réunion du 2 juin 2015 à 14h30
Nouvelle organisation territoriale de la république — Proclamation du résultat du scrutin public

Marylise Lebranchu :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, permettez-moi tout d’abord de m’associer aux remerciements qui viennent d’être exprimés pour l’excellent travail réalisé par la commission des lois et ses corapporteurs. Ce travail se mesure aussi en heures, y compris celles qui ont été consacrées à la recherche, sinon d’un consensus, comme le prétend M. Dominique de Legge, mais d’un compromis.

Je voudrais relever quelques points, à commencer par ceux qui nous occuperont le plus pour aboutir à l’accord souhaité par le Premier ministre.

S’agissant du développement économique, le schéma établi par la région sera certes prescriptif, mais ce caractère prescriptif ne s’appliquera pas aux autres collectivités. Le texte, tel qu’il est désormais rédigé, est donc légèrement en recul par rapport à celui que le Sénat avait adopté en première lecture. Mais sans doute sera-t-il aisé, avec l’engagement des corapporteurs, de trouver une solution commune.

La région pourra également élaborer un schéma prescriptif en matière d’aménagement du territoire. Toutefois, les autres collectivités territoriales disposent maintenant d’une possibilité de blocage qui n’existait pas non plus dans le texte issu de la première lecture. La rédaction à laquelle nous aboutissons sur ce point n’est peut-être pas exactement celle que vous auriez souhaitée, d’autant que, d’amendement en amendement, la lecture n’en est pas forcément des plus fluides. En tout cas, là encore, tant sur le plan juridique que sur le plan opérationnel, un véritable recul est à noter, et il me semble qu’il nous faut trouver un langage commun sur le principe de co-élaboration, puisque, si j’ai bien compris, c’est l’objectif.

Encore un point sur lequel le texte issu de la première lecture au Sénat allait plus loin que celui que vous venez d’adopter : celui des syndicats intercommunaux et, en particulier, des représentations-substitutions. Un travail important doit encore être réalisé en la matière. Mais à l’impossible, ensemble, nous sommes tenus ! Donc, nous trouverons une solution !

D’autres sujets soulèvent un certain nombre de difficultés.

Dans le domaine de la solidarité, par exemple, l’application de la loi SRU en 2034 semble difficilement envisageable alors que, constat souvent partagé avec des sénateurs de toutes tendances politiques, il existe un véritable problème de logement. Attendre 2034 sans prévoir aucune mesure d’ici à cette échéance me semble effectivement un peu difficile. C’est pourquoi, si vous le voulez bien, je vous propose de retravailler sur la question.

En matière de coopération intercommunale, on est revenu à des dispositions datant d’avant la loi du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales. En effet, les pouvoirs spécifiques du préfet, que les parlementaires avaient adoptés dans ce cadre, ont été supprimés. Là encore, tant sur la question du seuil que sur celle des pouvoirs spécifiques accordés au préfet, il y a probablement matière à travailler.

S’agissant de la métropole du Grand Paris, je pense que plus de 90 % des élus avaient opté pour la date du 1er janvier 2016 ; nous trouverons sans doute des voies de discussion.

Vous aviez, mesdames, messieurs les sénateurs, ouvert le débat sur la compétence de la région en matière d’emploi. Les députés s’en sont saisis et ont fait des propositions ; le Sénat n’a pas entendu les suivre. Bien que les bruits de couloirs que j’ai pu entendre ne m’incitent pas vraiment à l’optimisme, je crois qu’un compromis est possible.

Il sera sans doute plus difficile de trouver un terrain d’entente sur le tourisme, mais sait-on jamais ! Nous pouvons aussi y travailler.

L’Assemblée nationale avait accepté la proposition du Sénat d’une co-élaboration des schémas par les régions et les départements. Le Gouvernement avait, pour sa part, proposé une simplification qui a disparu du texte. Le retour à la rédaction issue de la première lecture n’a pas pris en compte cette ouverture d’une assemblée vers l’autre.

Comme je le soulignais hier, l’Assemblée nationale compte aussi de nombreux élus locaux, responsables de petites communes et très attachés à leur collectivité, qui avaient accepté de travailler sur ces sujets. Les députés l’avaient fait également concernant les transports, au sens large. Du reste, nous nous attendions à vos remarques, mesdames, messieurs les sénateurs – le Premier ministre lui-même en avait parlé à propos des transports scolaires –, et nous les avons entendues.

Les ports constituent un autre sujet qui mérite que nous y travaillions, et le compte rendu des débats porte témoignage de mon ouverture à cet égard. Qu’il s’agisse du rôle des ports de commerce comme grands outils de développement économique, des petits ports de pêche ou des ports de tourisme, il y a matière à réfléchir.

Nous avons donc une semaine, ou un peu plus, pour créer les conditions d’une convergence entre les deux chambres : les deux lectures prévues par la Constitution ont justement pour but de permettre de parvenir à un accord.

C’est l’objectif commun que nous nous étions fixé. Même si la tâche semble aujourd’hui un peu plus difficile que prévu, je relève que certains compromis sont d’ores et déjà gravés dans le marbre de la loi. Je pense notamment aux dispositions que l’Assemblée nationale a acceptées sur les collèges – une revendication très forte du Sénat –, les routes ou la collectivité unique de Corse. Vos collègues députés ont entendu vos demandes sur ces sujets et n’ont nullement l’intention de revenir sur ces dispositions, même s’il faudra peut-être, en CMP, corriger à la marge une question de droit soulevée par M. Jean-Jacques Hyest.

Nous avons la ferme intention de poursuivre les discussions sur les questions de justice sociale et territoriale, de développement équilibré et durable des territoires et d’égal accès de nos concitoyens aux services publics, autant de sujets sur lesquels nous avons bon espoir de trouver un accord.

Je dirai en conclusion qu’on nous attaque en permanence en prétendant que nous voudrions supprimer les communes, alors que, à nos yeux, les 36 000 communes que compte la France sont constitutives de son histoire et font sa force. Si nous avons défendu l’intercommunalité, c’est parce qu’il n’existe pas, à l’heure actuelle, d’égalité entre les communes. Le maire d’une petite commune qui a des ressources, parce qu’elle est située sur le littoral, qu’elle exploite une station de sports d’hiver ou qu’elle abrite tel ou tel équipement, peut effectivement offrir des services à ses habitants. En revanche, le maire d’une autre commune abritant la même population mais ne disposant pas des mêmes atouts ne pourra pas le faire. Il existe donc des inégalités très fortes entre nos territoires.

Je propose toujours de voir l’intercommunalité comme un grand outil de solidarité entre les communes, dont nos citoyens ont besoin, et non comme la volonté des uns de prendre le pouvoir sur les autres.

C’est dans cet esprit que je vous invite à continuer à travailler, avec acharnement, mais aussi avec le souci de l’ouverture la plus large et d’une réflexion commune. En dépit des quelques reculs que j’ai évoqués, je persiste à penser qu’un accord est possible et que le souhait du Premier ministre peut être exaucé. C’est notre espoir et, pour l’heure, mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de l’excellent travail que vous avez d’ores et déjà accompli.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion