Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, je vais aborder les dispositions de l’ordonnance du 26 septembre 2014 que n’a pas encore évoquées Claire-Lise Campion. Certaines, relatives par exemple à l’accès des chiens guides d’aveugle aux lieux publics, font consensus : il n’est pas utile d’y revenir. D’autres, qui visent à adapter les normes applicables en matière de mise en accessibilité, nécessitent des éclaircissements.
La loi du 11 février 2005 a défini trois types de situations pouvant justifier que des ERP existants se voient accorder, de façon exceptionnelle, une dérogation : lorsque la mise en accessibilité est techniquement irréalisable, lorsque la conservation du patrimoine architectural rend impossible des travaux et, enfin, lorsqu’une disproportion manifeste apparaît entre les améliorations apportées et leurs conséquences. Conformément aux préconisations issues de la concertation, l’ordonnance précise ce dernier critère.
Des situations de blocage peuvent exister lorsque l’obligation légale de mise en accessibilité d’un ERP se heurte à l’exercice du droit de propriété : certains travaux réalisés dans des immeubles d’habitation collectifs doivent avoir été autorisés par l’assemblée générale des copropriétaires. Cette règle, inscrite dans la loi du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, s’applique même si le propriétaire qui doit rendre son ERP accessible s’engage à prendre en charge financièrement le coût des travaux.
La difficulté a parfaitement été identifiée au cours de la concertation. Une réponse lui est apportée par l’ordonnance, qui se fonde sur l’analyse juridique du Conseil d’État : pour un ERP existant, le refus prononcé par l’assemblée générale entraîne une dérogation de droit ; lorsque cette assemblée formule le même refus pour un ERP neuf, c’est au préfet qu’il appartient de prendre la décision d’accorder, ou non, une dérogation. La commission a souhaité encadrer davantage cette procédure en exigeant de l’assemblée générale qu’elle se prononce par une décision motivée.
J’en viens maintenant au secteur des transports. L’élaboration d’un agenda d’accessibilité programmée demeure facultative, ce qui est cohérent avec le fait que la loi du 11 février 2005 n’a pas prévu de sanctions pénales en cas de non-respect des obligations de mise en accessibilité. La commission a néanmoins aligné le régime juridique applicable aux Ad’Ap relatifs aux transports en prévoyant des règles identiques s’agissant des ERP pour les délais de dépôt des projets d’Ad’Ap et pour l’allongement de la durée de ces agendas.
Les obligations de mise en accessibilité des services de transport ont été redéfinies par l’ordonnance : cette mise en accessibilité passe désormais par l’aménagement des points d’arrêt définis comme prioritaires. Cette solution, réaliste, vise à tenir compte des contraintes économiques et techniques, tout en garantissant la mise en place d’un réseau cohérent et équilibré, capable de répondre aux besoins des usagers. Pour que ce chantier réussisse, il est indispensable que les points d’arrêt prioritaires soient définis en concertation avec l’ensemble des acteurs concernés. Les représentants des autorités organisatrices de transport nous l’ont par ailleurs indiqué : la définition de points d’arrêt prioritaires ne signifie pas que les points d’arrêt secondaires ne seront jamais rendus accessibles.
Un autre assouplissement concerne les plans de mise en accessibilité de la voirie et des espaces publics, les PAVE. La loi du 11 février 2005 rendait leur élaboration obligatoire pour toutes les communes de France. Aux termes de l’ordonnance, l’élaboration de ces documents est facultative pour les communes de moins de 500 habitants et simplifiée pour celles dont la population est comprise entre 500 et 1 000 habitants. Pour ces dernières, le PAVE ne concerne donc plus que les axes de déplacement les plus fréquentés. Cette solution concerne près de 55 % des communes françaises. Il s’agit là d’une évolution pragmatique.
De plus, les communes doivent tout particulièrement être aidées. À ce titre, je me félicite que les travaux d’accessibilité figurent aujourd’hui parmi les priorités en matière d’allocation de la dotation d’équipement des territoires ruraux, ou DETR, dans les départements.
C’est également pour aider les structures les plus fragiles que l’ordonnance crée un fonds national d’accompagnement de l’accessibilité universelle. La commission a prévu que l’ensemble des sanctions financières alimenteraient ce fonds.
Par ailleurs, il est indispensable de communiquer sur les autres mesures d’accompagnement financier qui peuvent être mises en place. Je pense en particulier aux prêts de la Caisse des dépôts et consignations destinés à financer les travaux de mise en accessibilité, et à la façon dont les fonds structurels européens pourraient être davantage utilisés pour l’accompagnement de projets.
Au-delà du volet financier, il est essentiel que l’ensemble des acteurs concernés soient pleinement informés des règles et des délais applicables à l’élaboration et à l’exécution des agendas. Des efforts sont menés dans ce sens par la délégation ministérielle à l’accessibilité, par les associations d’élus, par les chambres consulaires et par différentes branches professionnelles. Pour autant, si la date du 27 septembre prochain, qui est celle du dépôt des agendas, est aujourd’hui largement prise en compte, je crains qu’il n’en soit pas de même s’agissant du 27 juin, échéance limite pour la formulation de demandes de prorogation des délais de dépôt. Or cette date s’approche à grands pas.
Des efforts de pédagogie et de communication doivent être effectués auprès des responsables d’ERP ou de transports. L’accompagnement doit également concerner les professionnels lorsqu’ils sont en contact avec le public. Deux dispositions de l’ordonnance sont directement liées à cette question.
D’une part, les Ad’Ap relatifs aux transports devront obligatoirement définir un calendrier et des modalités de formation des personnels aux besoins des usagers handicapés.
D’autre part, l’acquisition de connaissances dans les domaines de l’accompagnement et de l’accueil sera rendue obligatoire dans la formation initiale de certains professionnels. La commission a souhaité aller plus loin dans cette démarche, en prévoyant que ces professionnels puissent également se voir proposer des formations de ce type par leurs employeurs.
Au terme de cette présentation, je tiens particulièrement à remercier Claire-Lise Campion, corapporteur de ce projet de loi, de son implication depuis de nombreux mois en faveur de la cause du handicap. Grâce à des auditions, des rencontres, des réunions de qualité, ensemble, nous avons su trouver un juste et délicat équilibre entre notre volonté commune de rendre accessible à tous notre société et un regard réaliste sur les capacités des porteurs de projets et des collectivités territoriales à réaliser les investissements nécessaires.