Intervention de Najat Vallaud-Belkacem

Commission d'enquête sur le service public de l'éducation, les repères républicains et les difficultés des enseignants — Réunion du 2 juin 2015 à 16h30
Audition de Mme Najat Vallaud-belkacem ministre de l'éducation nationale de l'enseignement supérieur et de la recherche

Najat Vallaud-Belkacem, ministre :

L'apprentissage du français est une de nos priorités. L'acquisition des fondamentaux ne se résume pas aux évaluations de l'entrée en CE2. Pour éviter que se creusent les écarts de langage, nous encourageons la pré-scolarisation des enfants de moins de trois ans, avec un objectif fixé à 50 % à l'horizon 2017, dans les territoires relevant de la politique de la ville. La démarche engage le ministère de l'éducation nationale tout autant que les collectivités locales. C'est un travail de longue haleine.

Les activités périscolaires peuvent être exploitées pour transmettre les valeurs républicaines. D'où l'importance de travailler avec les collectivités locales et de signer des plans éducatifs territoriaux, car en mutualisant les moyens, on garantira un périscolaire de qualité. Lorsque nous avons reconduit le soutien financier de l'État aux communes à hauteur de 400 millions d'euros par an, avec pour contrepartie l'obligation de signer des plans éducatifs territoriaux, certains invoquaient la difficulté pour les communes à élaborer un tel plan, les démarches administratives trop complexes, etc. On a pourtant déjà dépassé les 10 000 communes signataires, et notre objectif devrait donc être atteint d'ici la fin de l'année.

C'est une évidence : les enfants qui vivent la ghettoïsation et qui n'ont pas accès aux mêmes rêves que les autres peuvent difficilement comprendre ce que sont les valeurs de la République. L'Unesco a publié un rapport sur cette question cruciale de la mixité sociale. Nous devons veiller à prévoir des secteurs de collèges plus larges. Pour calmer les inquiétudes légitimes des parents, il faut également veiller à ce que tous les établissements proposent une offre d'excellence. C'est ce que vise la réforme du collège : on ne peut pas se satisfaire que certaines options soient réservées à certains établissements. Les enquêtes démontrent que tous les élèves auraient à gagner à davantage de mixité sociale et scolaire. Aux pouvoirs publics de l'organiser. Nous procédons de manière pragmatique, en consultant les conseils départementaux et en mettant à leur disposition des outils pour mesurer le degré de mixité sociale et concevoir les moyens de l'améliorer.

L'ECJS n'a pas toujours été très bien traité ces dernières années. Nous avons conçu autrement l'enseignement moral et civique, qui prendra le relais cette année. Alors que l'ECJS était une composante des cours d'histoire-géographie aux programmes déjà bien chargés, l'EMC bénéficiera d'un créneau horaire propre, à hauteur de 300 heures sur l'ensemble d'une scolarité, je l'ai dit.

Dans l'un des établissements où s'était produit un incident lors de la minute de silence, le principal a invité Mme Latifa Ibn Ziaten. Après l'avoir entendue, les élèves ont demandé à refaire la minute de silence et ont applaudi à la fin. Tout en se montrant ferme, il est important de ne pas se braquer. N'opposons pas un mur aux interrogations des élèves, ce n'est pas cela, la vertu éducative de l'école ! N'hésitons pas, en revanche, à faire appel à d'autres personnes, qui ont un autre regard. D'où le concept de réserve citoyenne.

Pour qu'un enseignant ait de l'autorité, il faut qu'il y croie. Les maîtres ont été mis à mal ces dernières années. Leur rémunération est trop faible. Lorsque nous sommes arrivés en 2012, nous avons paré au plus pressé : la formation, les postes manquants, la pré-scolarisation des enfants de moins de trois ans, etc. La rémunération n'en reste pas moins un sujet important qu'il nous faudra traiter. Les maîtres ont également le sentiment d'être déconsidérés dans le débat public, car ils sont constamment soumis à des injonctions paradoxales, sommés de répondre à toutes les fractures de la société. La responsabilité n'est pas seulement celle des enseignants ; elle est partagée par les pouvoirs publics, les collectivités locales, les parents... C'est cette responsabilité collective qui rétablira l'autorité des enseignants. Aux médias, également, d'en prendre conscience et de se garder de toute caricature.

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