Cet amendement tend à préciser la notion de « vie privée » et à revenir à la rédaction adoptée par l’Assemblée nationale.
Il apparaît essentiel de lever toute ambiguïté sur cette notion dès le début du texte, d’autant qu’a été ajoutée, sur recommandation de la CNIL, la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la protection des données personnelles aux deux composantes de la vie privée que sont le secret des correspondances et l’inviolabilité du domicile, dont le respect est garanti par la loi.
Le respect de la protection des données à caractère personnel est un facteur de transparence et de confiance pour les citoyens. Dans un contexte de bouleversements induits par le développement des nouvelles technologies, il serait d’ailleurs bienvenu de renforcer notre législation en la matière ; nous y reviendrons.
Cet amendement tend également à inclure dans cette définition de la vie privée le « droit à l’information ». Ce principe, venant compléter les limites générales fixées au projet de loi, vise notamment à protéger les « lanceurs d’alerte » qui ne peuvent être définis par leur seule profession.
Le droit à l’information renvoie aussi bien au droit d’informer qu’à celui d’être informé. Il est un corollaire de l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, qui en précise la portée et en approfondit le sens en disposant que « la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre à l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ».
L’information est une condition nécessaire à l’exercice de la démocratie. Si les citoyens ne sont plus informés, ils n’entendront plus qu’une voix, très certainement celle de l’État. En affaiblissant le contre-pouvoir médiatique nous dégradons notre démocratie.
Si le texte soumis à notre examen avait été en vigueur à l’époque, l’affaire Cahuzac, par exemple, n’aurait jamais pu être exposée. Cette surveillance généralisée et l’absence de mesures visant à protéger les professions « à risque », notamment celles du journalisme, mettront à mal les témoignages. De fait, les sources des journalistes se tariront, leur anonymat ne pouvant plus être garanti.
En effet, monsieur le ministre, comment un international mobile subscriber identity – ou IMSI – catcher pourra-t-il distinguer un journaliste d’un autre individu avant d’intercepter des communications électroniques ? Le rayon d’action de ces fausses antennes relais pouvant atteindre plusieurs centaines de mètres, leurs utilisateurs pourront prendre dans leurs filets un grand nombre de personnes sur le seul critère de leur proximité temporaire et fortuite avec une « cible » potentielle.Je vous laisse imaginer les conséquences qui pourraient résulter de la présence d’un IMSI catcher activé au pied de la rédaction du journal Le Monde…
Toutes les enquêtes des journalistes, surtout celles visant à alerter les citoyens, sont donc menacées, d’autant que, le secteur de la presse se portant très mal aujourd’hui, une remise en cause des investissements dans ce dernier constitue un fort moyen de pression. Les articles compromettants pour ceux qui apportent cette manne financière risquent fort de ne pas sortir ou d’être retardés jusqu’à ce que l’affaire soit « démantelée » de l’intérieur.
« Dans dix ans, si cela continue ainsi, il n’y aura plus de journalisme », s’émeut le Syndicat national des journalistes. Nous sommes donc prévenus !