Le renseignement n’est une activité légitime que s’il se borne à la collecte d’informations dans un domaine strictement défini comme ayant trait à la sécurité nationale, à l’exclusion de toute dimension susceptible d’en faire un instrument politique placé entre les mains d’un gouvernement, quel qu’il soit.
La commission des lois a remplacé la notion d’« intérêts majeurs » de la politique étrangère de la France par celle d’« intérêts essentiels », mais ce critère reste trop large et imprécis pour justifier l’usage de techniques de surveillance intrusives. Il ouvre la voie à des dérives pouvant conduire à la surveillance de groupes ou d’individus qui entendraient contester certains aspects de la politique commerciale de la France – par exemple, en matière d’armement – ou critiqueraient l’engagement français dans des conflits internationaux.
À ce propos, une question se pose : monsieur le ministre, la détermination dont vous faites preuve, à juste raison, pour combattre le terrorisme ne devrait-elle pas s’exercer avec la même clarté contre les dictatures ou les pays « équivoques », dont on a du mal à savoir, par exemple, s’ils combattent ou encouragent les mouvements djihadistes ? Dans quelle mesure combattez-vous ces régimes, dont on sait qu’ils violent quotidiennement les droits de l’homme les plus fondamentaux ?
D'ailleurs, vendredi dernier, le quotidien turc Cumhuriyet a publié des photos et une vidéo qui accréditent l’hypothèse, jusque-là farouchement démentie par le gouvernement d’Ankara, de livraisons d’armes aux rebelles extrémistes syriens au début de l’année 2014.