Dans le même esprit que la proposition d’amendement qu’a présentée Michelle Demessine sur notre précédent amendement, mais aussi dans la lignée des propos que M. Jacques Mézard vient de tenir, nous souhaitons ici préciser le champ visé à l’alinéa 11 quant au recours aux techniques de renseignement.
La notion d’« intérêts économiques et scientifiques essentiels de la France » recouvre, de notre point de vue, un champ d’application beaucoup trop large et imprécis pour justifier l’usage de techniques de surveillance intrusives. C’est pourquoi nous proposons de cibler la seule prévention de l’espionnage économique, industriel et scientifique, tout en respectant le droit de l’information.
Dans sa rédaction actuelle, le texte ouvre la voie à des dérives, par exemple la surveillance de groupes ou d’individus qui entendent contester les politiques publiques ou les pratiques illégitimes d’entreprises françaises dans des domaines touchant, par exemple, à l’environnement ou à la santé publique, et cela alors même que, selon l’article 7 de la Charte de l’environnement, qui a valeur constitutionnelle, toute personne a le droit de « participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l’environnement ».
Ces dérives pourraient aussi viser des groupes de consommateurs dénonçant certaines pratiques d’entreprise, ce qui serait susceptible de nuire aux intérêts économiques de la France, mais aussi des organisations syndicales qui se mobiliseraient contre des choix économiques faits au niveau du pays ou d’une entreprise donnée. Il en est ainsi des actions visant à mettre au jour les pratiques illégales ou anormales d’entreprises nationales du secteur de l’énergie, de l’eau, des nouvelles technologies ou de l’armement. Évidemment, tout cela n’est que de la science-fiction et ne doit certainement pas exister…
Inversement, la prévention de l’espionnage économique, industriel et scientifique, dans le respect du droit de l’information, constitue un motif précis et légitime, excluant pour l’essentiel les risques de dérive de surveillance politique illégitime des citoyens, contribuant à garantir le cadre protecteur des lanceurs d’alerte et évitant la réintégration indirecte dans la loi de la protection du secret des affaires, que la représentation nationale a pourtant récemment rejetée.