Le projet de loi prévoit que la CNCTR ne dispose que d’un pouvoir consultatif dans sa mission de contrôle a priori des demandes de mise en œuvre des techniques de renseignement sur le territoire national.
En prévoyant que l’avis est réputé rendu si la CNCTR ne l’a pas transmis au Premier ministre dans un délai de vingt-quatre heures ou trois jours ouvrables, selon qu’il soit émis par son président ou par plusieurs membres de la commission, il aboutit en outre à faire du silence un consentement.
Or, dans son rapport fait au nom de la commission des lois, Philippe Bas indique que le nombre d’autorisations quotidiennes à délivrer devrait s’élever entre 1 000 et 2 000. Dans son dernier rapport annuel, la CNCIS indiquait quant à elle avoir dû traiter pas moins de 321 000 demandes d’autorisation en un an.
Aussi, il est à prévoir que la CNCTR, qu’elle soit composée de neuf ou treize membres, ne sera pas en mesure d’examiner réellement les demandes d’autorisation de mise en œuvre des techniques de renseignement qui lui seront soumises quotidiennement.
D’une part, la question se pose de la réalité du contrôle a priori exercé par la CNCTR. Il est à craindre qu’il ne puisse être réellement appliqué dans des délais très rapprochés et pour un nombre très élevé de demandes d’autorisation. Il convient, toutefois, de souligner que des progrès ont été accomplis sur ce point au cours de la navette parlementaire, avec plusieurs ajouts bienvenus à l’article L. 832-4 du code de la sécurité intérieure.
D’autre part, dans le cas où la CNCTR n’a pas du tout rendu d’avis dans le délai imparti, l’alinéa 39 de l’article 1er prévoit une solution contestable : « En l’absence d’avis transmis dans les délais prévus au même article, celui-ci est réputé rendu ». « Rendu » équivaut ici à « favorable », puisque l’autorisation du Premier ministre à la mise en œuvre des techniques de renseignement n’a pas à indiquer les motifs pour lesquels celles-ci peuvent débuter en l’absence d’avis.
S’agissant de techniques de renseignement particulièrement intrusives, impliquant une atteinte à la vie privée, il est problématique de laisser accroire que la CNCTR approuve une demande sur laquelle elle n’a en réalité pas rendu d’avis. Les statistiques du rapport public établi annuellement par la CNCTR, censé être un des outils de transparence et donc de contrôle des activités des services de renseignement, risquent d’être ainsi tronquées.
Il serait donc préférable de considérer que l’absence d’avis rendu dans les délais vaut avis défavorable, afin que l’autorisation délivrée par le Premier ministre comporte les motifs pour lesquels il a été décidé, malgré ce silence, de mettre en œuvre une technique de renseignement.